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Synthèse de la comparaison avec les travaux existants sur la bionomie benthique en

4. Discussion

4.1. Distribution des sédiments grossiers de la Manche : une description souvent difficile

4.2.3. Synthèse de la comparaison avec les travaux existants sur la bionomie benthique en

En résumé, à l’échelle de l’échantillonnage des sédiments grossiers circalittoraux réalisé, et sur la seule base des assemblages faunistiques définis par les mollusques, échinodermes, crustacés décapodes et céphalochordés, on distingue :

- la communauté des sédiments grossiers sablo-graveleux à Branchiostoma lanceolatum (assemblage 1) avec :

o un faciès-type de sables coquilliers à Branchiostoma lanceolatum (sous-assemblage 1a)

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o un faciès de graviers plus ou moins ensablés à Nucula hanleyi et Polititapes rhomboides (sous-assemblage 1b)

- la communauté des cailloutis et graviers à Pisidia longicornis et Ophiothrix fragilis (assemblage 2) avec :

o un faciès d’appauvrissement à Nucula nucleus (sous-assemblage 2a) o un faciès d’appauvrissement à Ophiothrix fragilis (sous-assemblage 2b)

o un faciès-type de cailloutis et graviers à Pisidia longicornis et Timoclea ovata (sous-assemblage 2c)

o un faciès de graviers plus ou moins ensablés à Glycymeris glycymeris (sous-assemblage 2d)

4.3. Lien avec les paramètres environnementaux et géographiques

L’environnement est susceptible d’influencer la distribution des assemblages faunistiques à travers deux composantes : les paramètres environnementaux seuls et/ou leur organisation spatiale. La structure spatiale des variables environnementales peut conduire à une surestimation du rôle strict de ces variables par une forte auto-corrélation spatiale (Legendre & Troussellier, 1988). Toutefois, la partition de variance permet de s’affranchir de ce problème en isolant (1) la composante non spatialisée de l’environnement, (2) la composante spatialement structurée de l’environnement et (3) la composante non-environnementale de la variance totale de la distribution d’une espèce ou d’une structure de communauté (Borcard et al., 1992). Par cette approche, nos résultats montrent que les variables environnementales considérées dans leur ensemble (i.e. avec leur composante spatialement structurée) expliquent 24,3% de la variance totale, ce qui signifie que la distribution des assemblages macrobenthiques dépend de manière non négligeable de l’environnement caractérisé par le type sédimentaire dominant, la température, la tension de cisaillement sur le fond et la pression maximale d’abrasion de sub-surface liée à la pêche. Les deux tiers de cette variance expliquée l’est par l’interaction entre les variables environnementales considérées et l’espace géographique, en accord avec les gradients hydrodynamiques (Salomon & Breton, 1991), édaphiques (Vaslet et al., 1979 ; Larsonneur et al., 1982) et thermiques (Lumby, 1935 ; Agoumi, 1982) longitudinaux qui caractérisent ce couloir épicontinental que constitue la Manche.

En gardant à l’esprit l’aspect spatialement structuré des variables environnementales considérées, la seconde partition de variance réalisée montre le rôle majeur du type sédimentaire dominant, qui traduit ici une taille de grain dominante dans le prélèvement, par rapport aux autres paramètres. S’il est bien connu que la taille des particules est déterminante sur la distribution des

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individus, populations et communautés de substrats meubles (Gray, 1974 ; Snelgrove & Butman, 1994 ; Anderson et al., 2008), d’autres facteurs liés au sédiment tels que le contenu en matière organique, le degré de porosité, la présence de micro-organismes (notamment de bactéries), la disponibilité et les interactions trophiques ainsi que l’effet des organismes sur le sédiment sont susceptibles de jouer un rôle potentiellement limitant (Gray, 1974 ; Snelgrove & Butman, 1994). La prise en compte de ces facteurs mais aussi de l’hétérométrie observée du sédiment permettrait sans doute d’augmenter la part de variance expliquée par le sédiment. Après l’ajustement des variables sédimentaires au modèle, la variance est principalement expliquée par l’amplitude de température, et donc indirectement par les températures minimale et maximale, en accord avec les travaux de Holme (1966) et de Cabioch et al. (1977) relatifs à la distribution des espèces macrobenthiques en Manche en fonction de leurs préférences thermiques. Constituant le cœur de cette thèse, la question de l’effet de la température et de ses changements liés au réchauffement climatique sur la distribution des espèces macrobenthiques circalittorales des substrats meubles de la Manche sera très largement discutée dans les deux chapitres suivants. La tension de cisaillement sur le fond explique une part significative mais toutefois moindre de la variance dans la composition des assemblages macrobenthiques lorsque les paramètres sédimentaires et thermiques ont été pris en compte. Le rôle minoré de ce paramètre peut s’expliquer par un partage marqué de la variance expliquée, lié à la forte interaction entre la tension de cisaillement et la nature du fond notamment mise en évidence par Pingree & Maddock (1977). Enfin, en dépit de l’effet négatif et significatif de la pêche aux arts traînants sur l’abondance, la biomasse et la richesse spécifique des communautés benthiques démontré par de nombreuses études (Kaiser et al., 2000 ; Hiddink et al., 2006 ; Hinz et al., 2009), la pression maximale d’abrasion de sub-surface liée à la pêche n’explique que 1% de la variance totale liée à la composition des assemblages. La conjonction de deux hypothèses parmi d’autres permettrait d’expliquer cette faible contribution, néanmoins significative. La première est que l’impact des engins de fond est en général plus important sur l’épifaune sessile que sur l’endofaune comme cela a été montré par Tillin et al. (2006) en mer du Nord dans le cadre d’une étude de l’effet du chalutage de fond sur la composition fonctionnelle des communautés benthiques. Le compartiment échantillonné au cours de cette thèse serait donc moins sensible que celui sur lequel se sont concentrés Cabioch et al. (1977). La deuxième hypothèse est liée au fait que les communautés échantillonnées pourraient être adaptées à des degrés de perturbations naturelles élevés qui leur confèreraient un avantage face aux perturbations liées à la pêche (Queiros et al., 2006 ; Diesing et al., 2013). Les effets directs des différents engins traînants sur les communautés benthiques sont en effet fortement spécifiques au type d’habitat (Kaiser et al., 2006). Enfin, il est également possible que la structure des communautés échantillonnées en Manche dans le cadre de cette thèse soit tout simplement peu sensible aux perturbations liées à la pêche comme cela a été

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montré dans la même région par Kaiser & Spence (2002). Ces auteurs ont également souligné la présence continue de bivalves longévifs de taille importante, considérés comme particulièrement sensibles à la pression de pêche aux arts traînants (Ramsay et al., 2000), à 40 ans d’intervalle.

4.4. Lien avec les cartographies à grande échelle d’habitats benthiques

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