• Aucun résultat trouvé

4. Choix d’une méthode

4.3 Synthèse

Tout d‟abord, il est nécessaire de répéter que très peu d‟institutions ont décidé d‟appliquer une méthode proactive. L‟enquête entreprise dans le cadre de ce travail, décrite au chapitre 2, démontre que le manque de ressources, notamment financières, en temps et en personnel, en est l‟argument principal. Ainsi, tous les exemples étudiés ci-dessus représentent en majorité de grands services d‟archives.

Deux méthodes distinctes de collecte de documents d‟archives avec une attitude proactive existent aujourd‟hui. Il s‟agit de la documentation strategy et de la méthode Minnesota. Ce chapitre a confirmé les propos tenu au point 1.3.4, selon lesquels la méthode Minnesota a toujours rencontré du succès, au contraire de la documentation strategy, qui ne semble pas avoir reçu d‟échos entièrement positifs. Il existe d‟autres méthodes, comme le concept de la Significance 2.0, la méthode « Expanded Sector » et le guide des Archives de l‟Etat de New York, mais il s‟agit de dérivés de la méthode Minnesota.

La méthode Significance 2.0, provenant d‟Australie, présente toutefois une particularité par rapport aux autres modèles puisqu‟elle a été créée pour être appliquée indifféremment aux musées, aux services d‟archives, aux bibliothèques et aux galeries d‟art. Bien que les archivistes trouvent le concept intéressant, ce dernier ne peut pas être utilisé dans le cas des archives, car des aspects primordiaux du domaine, comme l‟évaluation, ne correspondent pas aux notions archivistiques. En attendant éventuellement un partenariat des archivistes avec les concepteurs de la méthode Significance 2.0 pour améliorer les aspects touchant à l‟archivistique, Karen Anderson conseille d‟appliquer la méthode Minnesota (2009, page web).

Cette dernière représente en effet la seule méthode reconnue dans le monde. Les auteurs d‟articles ou de monographies américains, canadiens et québécois, européens ou australiens admettent ne connaître aucun autre modèle théorique. Bien qu‟elle soit unique, cette méthode est par exemple plébiscitée par Frank Boles, spécialiste de l‟évaluation archivistique, dans son ouvrage Selecting & Appraising Archives &

Manuscripts (2005, p. 98-116). Il y consacre tout un chapitre de son livre à la méthode Minnesota ; la structure et les points qu‟il évoque sont identiques à cette dernière, mais il agrémente toutefois certaines étapes de détails supplémentaires ou de propositions pour améliorer des actions. Dans son ouvrage, il traite également de la documentation

strategy qu‟il critique. Ces idées sont rejointes pas Randall C. Jimerson, également spécialiste du domaine (1998, site web).

Dans les faits, seule une institution a refusé d‟implémenter la méthode Minnesota, il s‟agit de la Business Archives at Guildhall Library (Freeth, S. 2000, p. 186-188). Après avoir pesé le pour et le contre, les archivistes anglais sont parvenus à la conclusion que ce modèle ne peut pas être appliqué à leur institution, préférant suivre les anciens préceptes, c'est-à-dire élaborer et maintenir un très bon site internet et attendre les propositions. Cependant, comme le révèle Benjamin Bolin, étudiant à l‟Université de l‟État de San Jose : « théoriquement, cette méthode est séduisante, mais afin de savoir si dans la pratique elle marche, c’est seulement en essayant de l’implémenter qu’un service d’archives pourra le constater. » (2006, site web).

Bien que toutes les autres institutions aient effectivement mis le processus en place, aucune n‟a suivi scrupuleusement tous les points de chaque étape, chaque institution ayant adapté la méthode pour ses propres besoins. Ces variations peuvent s‟avérer très différentes. Peter Witschi, archiviste aux Archives du canton d‟Appenzell Rhodes-Extérieures, un tout petit service d‟archives n‟a, par exemple, utilisé que les éléments minimums indispensables à la bonne conduite du processus (2006, p. 79-87). Il prouve de cette manière qu‟il est possible d‟implanter ce modèle avec très peu de moyens. En revanche, les archivistes de la Manuscripts and Archives in the Yale University Library ont effectué peu de changements, malgré le fait que leur cible soit des personnes et non pas des entreprises (Hyry, T., Kaplan, D., Weideman, C. 2008, p. 117-133).

Il existe toutefois une variation importante commune à plusieurs cas. Il ne s‟agit pas d‟une modification du processus, mais plutôt de l‟essor d‟une autre philosophie.

Comme nous le savons, la méthode Minnesota a été conçue à partir de plusieurs modèles et processus, dont la documentation strategy. Pour rappel, cette stratégie, critiquée et décriée par une majorité d‟archivistes dans la littérature professionnelle, consiste à regrouper des producteurs d‟archives, des archivistes et des usagers, afin de choisir, d‟après les besoins de chacun, un domaine ou un thème important à documenter. Cette approche permet ainsi de délimiter ce qu‟un service d‟archives doit acquérir en priorité, afin de posséder un panel documentaire représentatif de la société. Bien que critiquée comme simple technique, ce procédé retrouve un second souffle dans l‟ensemble de la méthode Minnesota. En effet, bien que les concepteurs de la méthode Minnesota accordent autant d‟importance pour chaque étape, certaines institutions octroient une plus grande place à la documentation strategy. Cette différence est primordiale, car elle s‟opère dans la première étape du processus, dont

le but est d‟identifier le ou les secteurs à documenter, ce qui influence toute la suite.

Alors que les archivistes du Minnesota basent leur analyse des besoins sur l‟analyse des fonds actuels et la mission de l‟institution, les adeptes de la documentation strategy s‟appuient essentiellement sur les besoins et la volonté des usagers, des producteurs d‟archives et des archivistes.

Quoique plusieurs institutions semblent avoir choisi ce chemin, seul la thèse concernant l‟expérience d‟Algonquin Park le déclare explicitement (Woodley, C. 2006, 129 p.). La méthode « Expanded Sector », proposée par les archivistes du Danish National Business Archives et le guide écrit par un archiviste des Archives de l‟Etat de New York semblent suivre le concept de la documentation strategy, même si ce n‟est pas explicité (Fode, H., Fink, J. 1997, p. 75-80 ; Suter, J. 2003, 77 p.).

Les points négatifs les plus récurrents concernant la méthode Minnesota sont sa complexité, le concept de priorisation, le nombre de ressources à déployer et son aspect de projet continu. Cependant, au fil des articles, en-dehors de la complexité tous ces problèmes disparaissent. La priorisation fait maintenant l‟unanimité dans la littérature, il n‟est pas nécessaire d‟employer de grandes quantité de ressources, comme le confirme Peter Witschi, responsable des Archives du canton d‟Appenzell Rhodes-Extérieures, et la continuité est perçue comme un avantage par certains (2006, p. 79-87). Dans le cas où une institution désire suivre la méthode Minnesota, elle doit s‟attendre à un projet complexe et continu, mais elle offre de nombreux points positifs comme le mentionne les archivistes de l‟Université de Yale (Hyry, T., Kaplan, D., Weideman, C. 2008, p.117-133). Le point commun de toutes ces expériences consiste au fait que finalement tous les archivistes sont satisfaits d‟avoir implémenté la méthode Minnesota.

Comme le révèle Frank Boles (2005, p. 98-116), les méthodes sont faites pour être adaptées et il serait donc préférable de suivre la méthode Minnesota de base. D‟un point de vue philosophique, l‟analyse des fonds existants et le suivi de la mission de l‟institution reste une valeur sûre. La méthode Minnesota est soutenue par de grands spécialistes, alors que cette même méthode basée sur la documentation strategy n‟a pas eu d‟écho de la part de grands auteurs. De plus, dans le cas des AVG, nous n‟avons pas les ressources nécessaires pour convoquer tous les acteurs touchant à la commune de Genève. Enfin, comme l‟a prouvé Peter Witschi, il est tout a fait possible de suivre la méthode Minnesota avec très peu de ressources (2006, p. 79-87).

Quoiqu‟il s‟agisse d‟un travail complexe et continu, les AVG engendreront de nombreux

description d‟expériences de plusieurs institutions aux caractéristiques variées nous permettra de prendre en considération un grand nombre d‟aspects et de choix, nous aidant de façon significative pour la sélection des meilleurs procédés à adopter selon les besoins propres aux AVG. Nous étudierons ainsi dans le chapitre suivant les études de cas, étape par étape. De cette manière, il sera très intéressant de comprendre ce qu‟ont effectué les autres services et sur cette base, choisir les actions les plus adaptées aux AVG.