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2. L’exemple de La Chauve-souris : présentation générale de l’œuvre et de sa traduction

2.2. Synopsis et source de la version originale

La Chauve-Souris et une opérette de Johannes Strauss, créée le 5 avril 1874 au Theater an der Wien de Vienne, dont l’action se situe dans une station balnéaire à proximité d’une grande ville. Le premier acte se déroule dans la maison de Gabriel von Eisenstein et de sa femme Rosalinde89. Ce dernier s’apprête à passer huit jours en prison pour avoir insulté un fonctionnaire. Son ami, le docteur Falke, lui rend visite et lui propose, à l’insu de Rosalinde, de se rendre au bal donné par le prince Olorfsky afin de se divertir avant ses huit jours de cellule. Eisenstein accepte. En réalité, Falke souhaite se venger d’un tour que lui avait joué son ami. Quatre ans auparavant, il avait été invité par Eisenstein à un bal costumé où il s’était rendu déguisé en chauve-souris. Après l’avoir fait boire, Eisenstein l’avait laissé

87 La présente section est rédigée sur la base d’informations trouvées sur le site : http://en.wikipedia.org/wiki/Paul_Ferrier

88 La présente liste provient de l’article suivant : Pistone, Danièle, op. cit., 2004, p. 133-142

89 Synopsis fondé sur le texte de Strauss Johannes, Die Fledermaus, Reclam, Stuttgart, 1959

s’assoupir sur un banc. Au matin, Falke avait dû traverser la ville déguisé en chauve-souris et s’était ainsi rendu ridicule.

Adele, la femme de chambre d’Eisenstein, reçoit une lettre qu’elle croit provenir de sa sœur, mais qui, en réalité a été écrite par Falke. Cette lettre l’invite à « emprunter » une toilette à sa maîtresse et à se rendre au bal du prince Olorfsky. Adele prétend que sa tante est malade et demande à Rosalinde l’autorisation de sortir le soir. Cette dernière commence par refuser. Cependant, son ancien amant, Alfred, s’introduit chez elle et elle lui promet de le recevoir une fois son mari parti pour la prison. Pour être seule, elle donne à Adele la permission de sortir.

Eisenstein part, visiblement heureux, pour la prison. Alfred paraît de nouveau et s’apprête à dîner avec Rosalinde qui n’apprécie pas cela du tout, lorsque Frank, le directeur de la prison, arrive pour emmener Eisenstein. Frank est assez pressé car il a aussi été invité au bal du prince Olorfsky. Afin de ne pas compromettre Rosalinde, Alfred se fait passer pour son mari et part pour la prison.

Le deuxième acte se déroule dans la villa du prince Olorfsky, un jeune homme très riche et blasé, qui cherche à se divertir, et qui a laissé de ce fait carte blanche à Falke pour la soirée.

Adele se présente au bal, à la grande surprise de sa sœur Ida, qui décide de la faire passer pour une actrice, sous le nom d’Olga. Falke, qui a promis au Prince qu’il allait s’amuser, lui explique qu’Olga est en réalité la femme de chambre d’Eisenstein. Ce dernier fait son entrée et Falke le présente sous le nom de marquis Renard. Falke décide alors d’inviter Rosalinde, qu’il prie de venir masquée et sous un faux nom. Soudain, Eisenstein se retrouve face à face avec Adele, qu’il reconnaît immédiatement. Cette dernière ne se laisse pas impressionner et répond qu’elle n’est pas celle qu’il croit, mais une actrice. Tous les invités se moquent de la méprise d’Eisenstein qui est contraint de s’excuser. Frank arrive enfin, sous le nom de chevalier Chagrin. Il s’entend très bien avec Eisenstein. Alors que les invités commencent à faire connaissance, Rosalinde se présente masquée et prétend être une comtesse hongroise souhaitant garder l’anonymat. Elle surprend son mari en train de faire la cour à sa femme de chambre, mais Falke lui demande d’attendre le lendemain pour se venger. Eisenstein, impressionné par la « comtesse », commence à lui faire la cour et Rosalinde réussit à lui subtiliser sa montre. Au cours du repas, les invités, doutant de l’identité de Rosalinde, lui demandent de se démasquer, ce qu’elle refuse de faire. Elle chante alors une czardas pour prouver qu’elle est hongroise. La fête bat son plein, mais

bientôt Eisenstein et Frank se rappellent leurs obligations respectives et quittent précipitamment la villa du prince, ce qui marque la fin du deuxième acte.

Le troisième acte a pour cadre la prison. Il s’ouvre sur un monologue de Frosch, le gardien de la prison, qui est manifestement ivre. Puis paraît Frank, dans le même état. Tous deux entament une discussion quand Adele et sa sœur Ida sonnent à porte de la prison.

Falke leur a donné l’adresse de Frank. Adele avoue qu’elle n’est pas actrice et demande l’aide de Frank. Soudain, Eisenstein se présente à la prison. Frank demande à Frosch de mettre Adele et Ida dans une cellule. Eisenstein et Frank sont très surpris de se retrouver à la prison et finissent par se révéler leur véritable identité. Cependant, Frank refuse de croire Eisenstein et lui apprend qu’il a lui-même arrêté Eisenstein la veille, à son domicile, alors qu’il dînait avec sa femme. C’est alors que Rosalinde arrive. Frank sort pour la recevoir et Eisenstein reste seul sur scène, où il rencontre l’avocat Blind, venu à la demande d’Alfred.

Il revêt ses habits afin de pouvoir rencontrer l’homme qui a été arrêté à sa place. Entre-temps, Rosalinde a rejoint Alfred dans sa cellule et veut à tout prix le faire sortir avant que son mari n’arrive. Alfred lui dit qu’il a demandé un avocat et tous deux conviennent de tout lui raconter. Eisenstein, déguisé en avocat, entre alors et demande à connaître toute l’histoire. Il finit par perdre son sang froid et se démasque. Alors qu’il crie vengeance contre Rosalinde et contre Alfred, sa femme sort sa montre et lui révèle qu’elle était la comtesse hongroise, qu’il a courtisée la nuit précédente. Sur ces entrefaites, le Prince Olorfsky, accompagné de Falke, arrive à la prison et Falke avoue à Eisenstein que tout cela n’était qu’une farce de son invention pour se venger du tour qu’il lui avait joué. Le prince promet à Adele de l’aider à faire carrière, Eisenstein s’excuse auprès de sa femme, et tous concluent que seul le champagne était coupable.

Le livret de La Chauve-Souris est tiré d’une pièce d’Henri Meilhac et de Ludovic Halévy intitulé Le Réveillon, elle-même s’inspirée d’une pièce allemande, Das Gefängnis. Das Gefängnis, écrite en 1851 par Roderich Benedix, expose notamment les thèmes de l’amant arrêté à la place du mari et du mari faisant la fête au lieu de purger sa peine de prison90. Cependant, la notion de vengeance est absente de la pièce originelle et apparaît en premier lieu dans Le Réveillon91. Cette pièce, qui fut créée le 10 septembre 1872, raconte la machination élaborée par le notaire Duparquet pour se venger de son ami Gaillardin, qui lui a fait traverser Paris déguisé en oiseau bleu. Max Steiner, alors directeur du Theater an der Wien, en achète les droits et demande à Carl Haffner de traduire et d’adapter la pièce pour

90 D’après l’introduction (Einleitung) de Wilhelm Zentner, in Strauss Johann, Die Fledermaus, Reclam, 1959, pp. 3-9

91 Halévy, Ludovic, Meilhac, Henri, « Le Réveillon », in Halévy Ludovic, Meilhac, Henri, Théâtre, tome 5, Calmann-Lévy, Paris, 1900, pp. 13-126

en faire un livret d’opérette. Ce dernier supprime la notion de réveillon, qu’il juge trop française, et remplace le costume de l’oiseau bleu par celui de la chauve-souris, déguisement prisé par les Viennois à cette époque. Il fait de la femme de Gaillardin (Fanny, dans Le Réveillon) et de la femme de chambre (Pernette) des personnages principaux en les faisant venir au bal, alors que, dans la pièce Fanny et Pernette n’apparaissaient qu’au premier acte.

Il s’inspire d’une scène entre Gaillardin et Métella, une des invitées, pour la scène galante entre Eisenstein et Rosalinde.

Lors de sa création, La Chauve-souris ne rencontra pas un franc succès, car Vienne subissait une crise économique et les Viennois n’avaient pas le cœur à rire. En outre, la pièce leur rappelait une époque passée qu’ils regrettaient. La Chauve-souris ne fut représentée que seize fois à Vienne, avant de partir pour Berlin, où elle connut le succès avec 300 représentations, puis pour Hambourg92. Elle fut un triomphe à l’opéra de Vienne en 1894 sous la direction de Gustav Malher.