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PARTIE II : Le recours à l’assistance médicale à la procréation

E. Complications de l’assistance médicale à la procréation

1. Syndrome d’hyperstimulation ovarienne

a. Définition et aspects cliniques

Le syndrome d’hyperstimulation ovarienne (SHO) est une complication ovarienne potentiellement grave liée à l’administration exogène d’agents inducteurs de l’ovulation (que ce soit les gonadotrophines ou les anti-œstrogènes). C’est la complication la plus redoutable et pourtant la plus fréquente. En effet, l’incidence est estimée entre 3 et 6 % avec une forme sévère dans 0,1 à 3 % des cas. Chez certaines femmes présentant des facteurs de risque (décrits ci-après dans la partie « d. Facteurs de risques ») d’hyperstimulation, ce taux peut même atteindre 20 %.

Le SHO se traduit par une augmentation du volume ovarien et une exsudation extravasculaire. Les ovaires sont porteurs de kystes lutéaux multiples. La création d’un troisième secteur entraine l’apparition d’ascite et plus rarement, d’un épanchement pleural et/ou péricardique, accompagné d’hypovolémie avec oligurie, hémoconcentration, troubles ioniques et de la coagulation. Ce tableau clinique peut s’aggraver et mettre en jeu le pronostic vital par le biais d’une insuffisance rénal aigüe, d’un syndrome de détresse respiratoire aigüe et d’accidents thromboemboliques.

Ce syndrome peut se manifester précocement ou tardivement, selon le moment d’intervention de l’hormone hCG :

 Précocement, lorsque l’hCG est administrée en vue de déclencher l’ovulation, le SHO survient alors 3 à 7 jours après l’injection. C’est le cas le plus fréquent et le moins grave, la guérison est généralement spontanée.

 Tardif, lorsque l’hCG est sécrétée naturellement par la mise en route d’une grossesse, le SHO apparaît alors dans un délai de 12 à 17 jours après l’ovulation et peut potentiellement être grave.

b. Physiologie

La physiologie du SHO reste incertaine. L’augmentation de la perméabilité capillaire serait déclenchée par la libération de substances vasoactives d’origine ovarienne en réponse à l’administration d’hCG. Le vascular endothelial growth factor (VEGF) qui augmente la perméabilité vasculaire et favorise le passage extravasculaire semble être l’un des principaux acteurs, sans pour autant que son activation et sa régulation soient clairement établis (62). D’autres substances vasoactives telles que l’histamine, la sérotonine, les prostaglandines et la prolactine joueraient des rôles plus ou moins importants. Les interleukines, en particulier l’IL-6, devrait également avoir un rôle dans cette cascade d‘évènements.

86 c. Classification

L'OMS classe ce syndrome en trois formes : légère, modérée et sévère. Les symptômes dépendent du degré de sévérité. Le tableau suivant décrit les différents signes cliniques et biologiques rencontrés selon la forme du SHO.

Tableau 17 : Classification des SHO selon l’OMS (63)

Signes cliniques et biologiques Léger Stade I

Modéré Stade II

Sévère Stade III

Production stéroïdienne excessive + + +

Gros ovaires < 5 cm < 12 cm > 12 cm

Douleurs abdominales + + +

Kystes ovariens palpables + + +

Distension abdominale + + Nausées +/- + Vomissements +/- + Diarrhées +/- + Ascite + Hydrothorax +/- Hémoconcentration + Troubles de la coagulation +

Les patientes doivent être informées de ce risque et connaître les signes cliniques alertant afin qu’elles puissent avertir rapidement l’équipe de soins (prise de poids brutal, apparition d’œdèmes, tension abdominale, diminution de la diurèse). En effet, la présence d’un ballonnement abdominal attribuable à une ascite de faible envergure constitue habituellement le premier signe de SHO grave imminent. Le pharmacien doit donc s’assurer que les patientes connaissent ces signes et la démarche à suivre si ceux-ci surviennent.

d. Facteurs de risques

Les facteurs de risques entrainant, de façon indépendante, une hausse du risque de survenue d’un SHO grave sont les suivants (64) :

 Age inférieur à 30 ans  IMC faible

 Ovaires polykystiques ou forte numération basale de follicules antraux constatée par échographie

 Taux sérique d’estradiol élevé ou en hausse rapide  Antécédents de SHO

 Nombre important de petits follicules (de 8 à 12 mm) constaté par échographie au cours de la stimulation ovarienne

 Utilisation de l’hCG, par opposition à la progestérone, aux fins de soutien de la phase lutéale à la suite de la FIV

87 e. Prise en charge

 Traitement préventif

L’identification des patientes à risque (femme jeune, SOPK, nombre important de follicules en début de cycle) est capitale dans la prévention du SHO. Chez ces femmes, il faudra adapter les doses de gonadotrophines prescrites, renforcer le monitorage et éviter toute administration d’hCG lors de la phase lutéale (utiliser plutôt la progestérone). Lors de la stimulation ovarienne on préfèrera alors utiliser des doses minimes d’inducteur sur une longue durée (46). En FIV, les protocoles agonistes longs avec des doses faibles de gonadotrophines sont recommandés. L’association d’une PCO et d’un agoniste de la GnRH (protocole de « double suppression ») ou l’utilisation d’un antagoniste de la GnRH peuvent également être proposés afin de réduire l’incidence de SHO.

Des mesures préventives spécifiques doivent être entreprises en cas de risque de SHO au cours de la stimulation ovarienne :

 Le coasting consiste à arrêter l’administration de gonadotrophines pendant 3 à 6 jours avant l’administration d’hCG en attendant la baisse des taux d’estradiol et une maturation folliculaire satisfaisante. .

 La dose d’hCG injectée peut être diminuée de 10 000 à 5 000 UI.

 En cas de SHO imminent, le cycle d’AMP (insémination, FIV ou TEC) sera stoppé.  Traitement curatif

En cas de SHO avéré, les rapports sexuels doivent être évités car ils favorisent les torsions des ovaires et exposent à la survenue d’une grossesse (même en cas d’infertilité) qui amplifierait la gravité du SHO.

 Pour les formes légères :

Une mise au repos est recommandée. Un traitement symptomatique par antalgique, antispasmodique et antiémétique peut être prescrit. Les symptômes disparaissent généralement spontanément en quelques jours ou avec la survenue des règles. En revanche, si une grossesse survient, le tableau clinique peut s’aggraver et passer au stade du SHO modéré.

 Pour les formes modérées :

Une hospitalisation est recommandée afin de contrôler les facteurs de gravité. Un monitorage par échographie et un suivi de l’hématocrite en milieu hospitalier est indispensable.

Comme dans les formes légères, une mise au repos et un traitement symptomatique sont conseillés, ainsi qu’une hydratation.

 Pour les formes sévères :

L’hospitalisation en soins intensifs ou en réanimation est systématique. Le monitorage des signes cliniques et biologiques ainsi que l’administration intraveineuse de solutions de remplissage constituent les règles de la prise en charge.

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