• Aucun résultat trouvé

Chapitre I. Contexte géologique général et gisements aurifères du Craton Ouest-Africain

Chapitre 5 : Etude de la minéralisation

II. Le style de la minéralisation

A Syama, la zone minéralisée apparaît essentiellement dans certains faciès comme les basaltes bréchifiés, les black shales, les conglomérats bréchifiés et de façon moins importante dans les pyroclastites, les lamprophyres et même dans les filons d’andésite.

Elle est associée à un stockwork de veines à carbonates (ankérite et dolomite) et quartz (Fig. 36 A & B) qui évolue localement en une zone de brèche polygénique composée de débris anguleux de black-shale et de pyroclastite dans un ciment quartzo-carbonaté (Fig. 36. C) ; ces zones de brèches peuvent également affecter les autres types de roches encaissantes : basalte, pyroclastite, black-shale et parfois lamprophyre. Dans ces brèches les éléments seront eux-aussi englobés dans une matrice à quartz, ankérite et albite. Quelle que soit la nature de la roche hôte, la minéralisation aurifère est fréquemment associée à la pyrite qui se développe majoritairement aux épontes de ces veines comme le montrent les échantillons de basalte, de lamprophyre et d’argilite carbonée (Fig. 36 B, D & E). C’est la formation basaltique qui constitue la principale roche hôte de la minéralisation (Fig. 36 A & D) mais celle-ci se rencontre aussi dans les formations métasédimentaires intercalées dans les basaltes comme les

92 argilites riches en matière carbonée (black-shales, Fig. 36 E & F), et les pyroclastites avec la même organisation que dans les basaltes, à savoir plusieurs générations de veines recoupant la roche hôte ; enfin, la minéralisation se rencontre également dans les filons de lamprophyre (Fig. 36 B) et les dykes quartzo-feldspathiques tardifs, sécants sur les structures liées à la shear-zone.

93 Figure 36 : Echantillons représentatif du stockwork minéralisée de Syama. A: métabasalte (Syd 145, 227m, 0,36 g/t Au); 1, veines précoces à carbonate + graphite; 2, veines plissées de dolomite grise; 3, veines de dolomite grise spathique présentant des épontes enrichies en pyrite; 4, veine de dolomite laiteuse. B: lamprophyre (Syd 145, 258m, 0,05 g/t Au): 1, veines de dolomite grise spathique; 2, veines de dolomite + graphite; 3 veine de dolomite laiteuse. C: brèche polygénique (Syd 198, 177,4-178,4m, 6,7g/t Au) composée de débris anguleux de black-shale et de grauwacke dans un ciment quartzo-carbonaté. D: métabasalte (Syd 241, 350m, >10g/t Au) montrant le développement de pyrite et de grains d’or visibles en relation avec les veines de dolomite grise (1); à noter le développement de veines de quartz tardive et stérile (2). E: argillite carbonée (Syd 198 156-157m) recoupé de veinules à dolomite grise (1), de dolomite grise spathique (2) et de veines de quartz laiteux (3); à noter la richesse en pyrite disséminée. F: contact basalte – argillite (Syd 198, 190-190,6m, 61g/t Au) très déformé avec développement de veines de carbonates syn-shearing (1) et de quartz post-shearing (2). G: lamprophyre (Syd 137, 282m) montrant le développement de fuchsite (1) recoupée par une veine de dolomite grise (2).

A Tabakoroni, la minéralisation est majoritairement encaissée dans des roches sédimentaires carbonées et des roches volcanosédimentaires, plus rarement dans des métabasaltes ou méta-andésites. Toutefois, comme à Syama, on retrouve dans les échantillons minéralisés les carbonates (ankérite et dolomite), l’albite, le quartz et les sulfures, et accessoirement le rutile, la chlorite et la séricite. Cette dernière semble cependant être plus présente qu’à Syama, compte tenu de la nature originelle plus évoluée des roches hôtes. Suivant la nature de la roche originelle, on observera dans ces roches des minéraux reliques du stade métamorphique comme la chlorite ou la séricite (Fig. 37 A), se présentant parfois en « poches reliques » au sein de la nouvelle paragenèse d’altération carbonatée et/ou silicifiée (Fig. 37 B). Ces diverses roches sont très fortement schistosées et de nombreuses veines à remplissage principal de carbonates et de quartz recoupent ces diverses formations constituant ainsi un stockwork. Comme à Syama, plusieurs générations de veines peuvent être distinguées par la nature de leur remplissage et leurs relations de recoupement. On aurait:

-les veines noires à dolomite + graphite, peu épaisses ; elles semblent les plus précoces (Fig. 38 A & B);

-les veines grises à dolomite + quartz avec développement de pyrite et d’arsénopyrite aux épontes (Fig. 38 A);

94 -les veines claires à quartz et ankérite, généralement plus épaisses, parfois plissées (Fig. 38 A, B & C), et plus souvent parallèles aux veines grises ; le quartz occupe la partie centrale de la veine indiquant une cristallisation plus tardive que celle des carbonates. On note une intense propagation de la carbonatation aux épontes de ces veines de même qu’une forte sulfuration avec pyrite et surtout arsénopyrite (Fig. 37 C & 38 B & C) ;

-les veines de faible épaisseur, à quartz + dolomite remplissant les fractures tardives et recoupant les précédentes générations de veines notamment les veines claires (Fig. 38 D). On observe également, comme à Syama, des zones fortement silicifiées conduisant à l’individualisation de faciès dits « cherteux » (Fig. 38 E & F) ; ces zones peuvent être recoupées par des venues tardives de silice qui accompagnent de nouvelles venues de sulfures ; cette silice remplit des ombres de pression autour des sulfures des précédentes générations (Fig. 37 D); ces dernières silicifications se manifestent également par la formation de veines de quartz blanc au sein desquelles on retrouvera des « fissures » à sulfures (Fig. 38 G), des « pseudo-stylolites » à graphite, carbonate, séricite et même des grains d’or visibles. Ainsi, de fortes teneurs en or allant jusqu’à 453g/t ont été enregistrées dans une zone (Tacd 026, 40-50m) où les « pseudo-stylolithes » sont particulièrement bien développés.

A Tellem, la minéralisation aurifère est contenue dans un microgranite (Fig. 39 A) présentant une paragenèse de faciès schiste vert à albite et séricite (Fig. 39 A). L’albite est localement très abondante le microgranite présente alors une composition d’albitite plus ou moins fortement carbonatée renfermant des sulfures disséminés (Fig. 39B & D).

95 Figure.37 : Photos au microscope polarisant montrant divers types de textures et structures d’échantillons minéralisés de Tabakoroni.

A: Métabasalte minéralisé (Tacd-242-3) à sulfures disséminés dans une matrice foliée à séricite, carbonates, albite et quartz. B: (Tab 198-3) Veine de quartz dans une roche fortement silicifiée et minéralisée montrant une relique d’un fragment riche en séricite. C: (Tab 198-1) Veines à quartz – carbonates et à carbonates montrant aux épontes le développement de sulfures dans une matrice fortement carbonatée. D: (Tab 198-3) Veine de sulfures associée à une zone fortement silicifiée; à noter l’ombre de pression autour du cristal de pyrite. Echelle = 200 µm.(Ser : séricite, Qz : quartz, Ank : ankérite, Py : pyrite, Apy : arsénopyrite).

96 Figure 38. Echantillons représentatif du stockwork minéralisée de Tabakoroni.

A & B: métabasalte (Tab 276, 1.2 g/t Au); 1, veine noire à Dol + Gr; 2, veines grises à Dol + Qz; 3, veine à Qz-Ank plissée présentant des épontes enrichies en pyrite et arsénopyrite. C & D: métabasalte (Tad 326); 1, veine claire à Qz + Cb; 2, veine tardive à Qz-Cb-Ser recoupant la matrice riche en sulfures et la veine 1; à noter dans la figure C le « nuage » de quartz pseudomorphosant la matrice et la veine. E: métabasalte (Tab 276) presqu’entièrement silicifié. F: argillite carbonée (Tad 273, 312m, 0,33g/t Au) silicifiée. G: veine de quartz (Tad 019 259m 3,36g/t Au) montrant un réseau de microfissures à sulfures et produit graphiteux. H: veine de quartz (Tad 26, 50) présentant des stylolites à remplissage graphiteux et de l’or visible à l’œil nu. (Py : pyrite, Apy : arsénopyrite, Au : or, Qz : quartz).

97 Figure 39. Echantillons représentatifs du stockwork minéralisé de Tellem.

A: Microgranite (Te 058-1), faiblement minéralisée montrant la distribution éparse des sulfures dans la roche. B: métasédiments encaissant montrant la foliation S0-1. C: Microgranite (Te 092-7) recoupée par une veine quartzo-carbonatée montrant le développement des sulfures aux épontes de la veine. D: (Te 058-1) réseau de veinules à Quartz-Carbonate et sulfures disséminés dans la matrice. E : Microgranite (Te 092-7) recoupée par une veine polyphasée à Quartz-Calcite-Albite-Chlorite et sulfures aux épontes. F: veine de quartz aurifère (Tec 075) montrant de l’or visible nodulaire dans du quartz, au sein d’un échantillon affecté par l’altération supergène. (Qz : quartz, Py : pyrite, Apy : arsénopyrite, Au : or, Ab : albite).

98 Le microgranite forme un sill au sein des faciès métasédimentaires à volcanoclastiques qui présentent une foliation de type S0-1 bien marquée (Fig. 39B). Lui-même montre une légère foliation et des ombres de pression autour des cristaux de pyrite (Fig. 40 B), témoignant de déformation en domaine ductile. Mais l’essentiel des déformations se développent en domaine cassant avec le développement d’un stockwork de veines auquel est associée la minéralisation aurifère; ces veines sont soit à remplissage simple (quartz ou carbonate), soit à remplissage polyphasé à quartz + carbonates (calcite et dolomite) + albite et + chlorite (Fig. 39C, D & E; Fig. 40C). La minéralisation aurifère, associée aux pyrites et arsénopyrites, se développe principalement dans la zone d’altération en bordure des veines (Fig. 39C, D & E), mais parfois à l’intérieur des veines (Fig. 40D & E). On trouve parfois de l’or libre dans les veines de quartz. Une de ces veines, recoupée par un sondage à faible profondeur (TEC-075, 94-95m), montre une minéralisation vraisemblablement remobilisée et « surconcentrée » par l’altération supergène avec une teneur de plus de 350 g/t Au (359g/t, Source Resolute Mining, Fig. 39F).

En conclusion il apparaît que dans les trois gisements, les formations minéralisées ont deux caractéristiques communes : une forte altération et la présence d’un réseau de forte densité de veines.

L’observation des relations entre les structures et microstructures d’une part et les paragenèses d’altération d’autre part permettent de proposer une chronologie. On peut définir trois stades d’altération majeurs correspondant successivement à une albitisation généralisée, une silicification localisée et une altération polycomposite tardive liée au réseau de veines recoupant l’ensemble des faciès.

L’albitisation affecte l’ensemble des roches. Dans les roches basaltiques et les lamprophyres il existe deux types de plagioclases : des plagioclases reliques de la paragenèse primaire mais avec des compositions en partie rééquilibrées (An : 20-40%) et des plagioclases secondaires de composition albitique. Dans les pyroclastites et quelques roches métasédimentaires le plagioclase a une composition d’albite. Cette albite associée à la chlorite ou la séricite et le quartz est orientée par la foliation régionale et traduit le phénomène de métamorphisme de faciès schiste vert synchrone de la déformation majeure. Dans certains faciès, l’albite peut être très abondante et représenter le minéral prépondérant. La roche prend alors une composition d’albitite. Les albitites sont des roches fréquentes au sein des ceintures et bassins du COA (voir Bassot, 1997) où elles sont associées de façon privilégiée aux gisements aurifères (Dommanget et al., 1993, Bamba et al., 1997 ; Béziat et al., 1998 ; 2008; Lawrence et al., 2013).

99

La silicification est très largement développée dans les trois gisements. Elle se traduit par la formation de plages de très petits cristaux de quartz associés à de rares cristaux d’albite et de séricite envahissant l’ensemble des faciès (shales, conglomérats, pyroclastites ou basaltes) ; les roches prennent alors un faciès de chert. Ces plages peuvent être isolées mais sont le plus souvent coalescentes et former de véritables filons de taille variable (de quelques décimètres à plusieurs dizaines de m). Ce phénomène de silicification affecte les roches métamorphisées et est donc postérieur à l’albitisation généralisée.

L’altération composite est le dernier épisode d’altération. Il est lié au développement du réseau de veines non orientées associées au dernier épisode de déformation fragile affectant l’ensemble des faciès à des degrés divers. Ces veines de longueur décimétrique et de largeur millimétrique à centimétrique sont le plus souvent rectilignes mais parfois sinueuses. Elles se recoupent les unes les autres. Cependant localement on observe quelques veines plissées donc précoces par rapport à la formation du réseau. Le remplissage des veines est varié et indépendant de la roche recoupée: quartz seul ; carbonate seul (dolomite ou calcite) ; carbonate + graphite ; quartz + carbonate ; quartz + albite ± séricite ; quartz + ankérite + albite ± chlorite ; quartz + sulfure + or (Cf planches photos).

La minéralisation est associée à cet épisode de fracturation par écrasement, sa localisation étant contrôlée par les veines.