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Chapitre I. Contexte géologique général et gisements aurifères du Craton Ouest-Africain

I.1 Caractères géologiques généraux du Craton Ouest-Africain

Le craton ouest-africain (COA) est classiquement subdivisé en trois domaines distincts (Bessoles, 1977 ; Fig.1) : 1) au Nord la dorsale Réguibat affleurant en Algérie, au Maroc et en Mauritanie constituée de formations archéénnes (3.0 – 2.7 Ga) et paléoprotérozoïques (~2 Ga) : 2) au Sud la dorsale de Man ou de Leo formée par les séries archéénnes du bouclier Libérien et les formations paléoprotérozoïques du Domaine Baoulé-Mossi recouvrant le Ghana, la Côte d’Ivoire, la Guinée, le sud du Mali, le Burkina Faso, l’Ouest du Niger ; ces formations paléoprotérozoïques sont généralement désignées sous le terme de Birimien terme introduit par Junner (1954) en référence aux études de Kitson (1928) dans la secteur de la rivière Birim au Ghana; le contact entre le socle Libérien et les séries birimiennes correspond à une grande faille complexe, la faille de Sassandra (Bessoles, 1977 ; Caby et al., 2000) ; 3) en position intermédiaire entre les deux dorsales, deux boutonnières, la boutonnière de Kayes dans l’Ouest du Mali et la boutonnière de Kédougou située de part et d’autre de la frontière sénégalo-malienne ; ces boutonnières sont formées exclusivement par des séries birimiennes. Les séries du COA sont recouvertes en discordance par les formations néoprotérozoïques (~1 Ga) et phanérozoïques du bassin de Taoudéni et limitées à l’Ouest par la chaine pan-africaine et paléozoïque des Mauritanides, à l’Est par la zone mobile panafricaine du Hoggar et de l’Adrar des Iforas et de l’Ahaggar.

Bien que le débat reste ouvert sur l’extension et les caractéristiques du socle archéen et ses relations avec le domaine Paléoprotérozoïque, les auteurs (Black et al., 1980; Boher et al., 1992; Feybesse and Milési, 1994; Kouamelan et al.,1997; Thiéblemont et al., 2001, 2004; Egal et al., 2002), s’accordent pour considérer que ces formations archéennes ont été soumises à deux orogenèses, Léonienne (ca 3200 – 3100 Ma) et Libérienne (ca 2800 – 2700 Ma) avec comme plus vieil âge obtenu, un âge de 3535 ± 9 Ma indiqué par Thiéblemont et al. (2001). Les formations archéennes ont subi un métamorphisme de haut grade (faciès amphibolite à granulite) accompagné de la mise en place de granitoïdes de type TTG (tonalite–trondhjemite–granodiorite).

7 Figure 1. Carte géologique du craton Ouest-africain (modifiée d’après Bessoles, 1977).

Les formations birimiennes du domaine Baoulé Mossi et des boutonnières apparaissent cartographiquement avec un dispositif similaire à celui des formations archéennes avec : i) des ceintures étroites et allongées généralement Nord-Sud essentiellement constituées de roches volcaniques basiques ; ce sont les ceintures de roches vertes ou « greenstone belts » ; ii) des bassins alternant avec les ceintures formés très majoritairement de roches sédimentaires ; ces bassins affleurent très largement en Côte d’Ivoire, dans l’Ouest du Mali, en Guinée et dans la boutonnière de Kédougou. Les formations des ceintures et des bassins ont été déformées et métamorphisées entre ~2120 Ma et ~2080 Ma lors de l’orogenèse éburnéenne (Bonhomme, 1962 ; Oberthür et al., 1998 ; Feybesse et al., 2006) au cours de laquelle se mettent en place plusieurs générations de plutons de granitoïdes (voir bibliographie dans Dioh et al., 2006 ; de Kock et al., 2011 ; Lambert-Smith et al., 2016).

8 Le Birimien sensu lato s’est développé dans une période de ~ 180 Ma comprise entre 2266 et 2080 Ma (Perrouty et al., 2012 ; White et al., 2014 pour les dernières études). Cette période est divisée par certains auteurs en deux phases : i) une première phase correspondant à la mise en place des séries volcaniques et métasédimentaires et de granitoïdes précoces et au développement d’une tectonique chevauchante ; une deuxième phase essentiellement marquée par la mise en place de granitoïdes associée à la formation de grandes zones de cisaillement (Milési et al., 1992 ; Allibone et al., 2002 ; Tshibubudze et al., 2009 ; de Kock et al., 2011). Il n’y a pas consensus sur ce découpage beaucoup d’auteurs privilégiant une évolution continue à la suite de Leube et al., 1990.

La stratigraphie des formations birimiennes hors granitoïdes, longtemps débattue (voir discussions dans Vidal et al., 1996 ; 2008 ; Baratoux et al., 2011 ; de Kock et al., 2011), semble désormais faire l’objet d’un consensus. Cette stratigraphie est celle de Bassot (1965). Le Birimien serait formé à la base essentiellement par une série de basaltes localement en pillow lavas, de dolérites et de gabbros à affinité tholéiitique avec des intercalations metasédimentaires (grès, argile, carbonates) visibles par exemple dans la série de Mako dans la boutonnière de Kédougou (Bassot, 1965). La série basaltique serait surmontée par une série métasédimentaire à caractère détritique avec localement comme au Sénégal oriental d’importantes intercalations carbonatées ; à cette série est associé un volcanisme (basaltes, andésites, dacites, rhyolites) à affinité calco-alcaline (Bassot, 1965). La partie sommitale de la série détritique correspond à ce qui est défini comme le Tarkwaien (Hirdes et al., 1996 ; Oberthür et al., 1998 ; Feybesse et al., 2006 ; Baratoux et al., 2011 ; Lambert Smith et al., 2016).

Les granitoïdes ont fait l’objet de très nombreux travaux (Leube et al., 1990 ; Liégeois et al, 1991 ; Davis et al., 1994; Pons et al., 1995 ; Hirdes et al., 1996 ; Doumbia et al., 1998 ; Ludtke et al., 1998, 1999; Caby et al., 2000 ; Egal et al., 2002; Hirdes et Davis 2002, Gasquet et al., 2003 ; Naba et al., 2004 ; Dioh et al., 2006 ; Gueye et al., 2008 ; Vegas et al., 2008; Lompo, 2009 ; de Kock et al., 2011 ; Tapsoba et al., 2013 ; Lambert-Smith et al., 2016). Ils sont présents dans l’ensemble du craton et dans certaines régions comme le centre et l’ouest de la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso, ils représentent jusqu’à 75% des affleurements. Ces intrusions séparent et parfois recoupent les formations des ceintures et correspondent essentiellement à des tonalite, granodiorite et monzogranite. De manière schématique, on peut les classer en deux suites en fonction de leurs caractères pétrographiques et géochimiques et de leur âge de mise en place: i) une suite à caractère sodique représentée essentiellement par des granitoïdes à amphiboles définissant une série de type TTG mise en place entre 2.25 et

9 2.12 Ga; ii) une suite calco-alcaline à caractère potassique représentée par des granitoïdes à ortho et clinopyroxène, des granitoïdes à amphibole et des granitoïdes à biotite mis en place entre 2.12 et 2.09 Ga et parfois même une suite alcaline avec des granites et des syénites alcalins comme ceux décrits au Burkina Faso (Naba et al., 2004 ; Tapsoba et al., 2013), en Côte d’Ivoire (Morel et Alinat 1993) et au Sénégal (Hirdes et Davis 2002) mis en place à la fin de l’orogenèse entre 2.11 et 2.07 Ga . Quelques intrusions de type TTG se mettraient en place précocement et pourraient être contemporains du volcanisme mafique à intermédiaire à 2195–2172 Ma (âges U–Pb et Pb–Pb sur zircon, Hirdes et al., 1992; Oberthur et al., 1998; Siegfried et al., 2009) mais l’essentiel de l’activité plutonique se déroulerait entre 2153 et 2068 Ma (âges U–Pb et Pb–Pb sur zircon, Liegeois et al., 1991; Hirdes et al., 1996; Doumbia et al., 1998; Oberthur et al., 1998; Egal et al.,2002; Hirdes and Davis, 2002; Castaing et al., 2003; Gasquet et al., 2003).

Le processus de croissance crustale du Birimien est aussi un sujet de débat. Suivant différents auteurs ; le magmatisme tholéiitique de la base du Birimien serait relié à un environnement de : 1) domaine océanique de type MORB (Lompo, 2010) ; 2) domaine de plateaux océaniques (Abouchami et al., 1990 ; Boher et al., 1992 ; Pouclet et al., 1996 ; Pawlig et al., 2006; Augustin et Gaboury, 2017) ; 3) domaine d’arc insulaire (Dia, 1988; Sylvester and Attoh, 1992; Ama Salah et al., 1996; Baratoux et al., 2011; Béziat et al., 2000; Soumalia et al., 2004; Dampare et al., 2008; de Kock et al., 2012; Senyah et al., 2016). Toutefois, ces divers auteurs s’accordent pour considérer que le magmatisme calco-alcalin du Birimien supérieur serait associé à une subduction intraocéanique évoluant tardivement en marge continentale active (e.g., Lambert Smith et al., 2016). Sur le plan structural il apparaît un relatif accord entre les auteurs sur la géométrie des structures acquises lors de l’orogenèse éburnéenne ; ces structures seraient la conséquence d’un raccourcissement comme l’illustre la série de coupes proposées par Feybesse et al. (2006) pour les provinces ghanéennes (Fig. 2) et qui pourrait être étendu à l’ensemble du COA. La tectonique éburnéenne est une tectonique polyphasée et une succession de déformations a été proposée par les différents auteurs. La déformation responsable du dispositif en dôme et bassins caractéristique du COA est unanimement considérée comme la déformation majeure. Les formations birimiennes sont affectées de plis droits de longueur d’onde plurikilométrique dont la surface axiale orientée NNE-SSW est soulignée par la schistosité régionale. Les roches volcaniques tholéiitiques des ceintures forment les charnières anticlinales et les roches métasédimentaires des bassins les charnières synclinales. Les granitoïdes apparaissent sous forme de dômes souvent très

10 volumineux ou de plutons s’intégrant dans le dispositif structural général.

Pour certains auteurs (Milési et al., 1992 ; Allibone et al., 2002 ; Feybesse et al., 2006, Tshibubudze et Hein, 2013 ; 2016) cette phase majeure serait précédée d’une phase de tectonique chevauchante marquée par des grands plis couchés. Pour d’autres auteurs cette phase précoce n’apparaît pas ou est minimisée (Vidal et al, 1996 ; 2008 ; Doumbia et al., 1998 ; Baratoux et al., 2011), la structuration du COA débutant par la formation des grands plis droits associée à la mise en place des grands plutons de TTG. A la formation de ces plis et à la mise en place des massifs de TTG succède ou est associé le développement des zones de grande déformation d’étendue régionale orientées NNE-SSW, à fort pendage, d’épaisseur hectométrique à kilométrique et d’extension variée (x10 à x100 km). Ces zones, le plus souvent localisées au niveau des contacts lithologiques notamment entre les granitoïdes et leur encaissant, sont interprétées par la quasi-totalité des chercheurs (de Milési et al . 1989 à Lambert Smith et al. 2016) comme des zones de cisaillement transcurrentes. Enfin l’ensemble de structures (schistosité régionale et zones de cisaillement) sont localement recoupées par des chevauchements pelliculaires tardi-éburnéen (Debat et al., 2003 ; Feybesse et al., 2006 ; Baratoux et al., 2011 ; Sangaré et al., 2015).

Figure 2. Evolution géodynamique des provinces ghanéennes au cours de l’orogenèse éburnéenne (d’après Feybesse et al., 2006). Le stade 5a correspond à la phase D1 (2.13 to 2.105 Ga) de chevauchement et d’épaississement crustal; le stade 5b correspond à l’ouverture des bassins Tarkwaien à la fin de la phase D1, le remplissage de ces bassins se poursuivant durant la phase D2 ; le stade 6 correspond aux évènements décrochant D2–3 (2.095 to 1.98 Ga) : les structures actives durant cet épisode D2 auraient canalisé et piégé les fluides hydrothermaux aurifères.

12 Le métamorphisme accompagnant la schistosité régionale est dans l’ensemble du COA un métamorphisme de faciès schistes verts (Bessoles, 1977). Cependant dans des aires restreintes des séries de faciès amphibolites ont été décrites au Ghana (John et al., 1999 ; White et al., 2014) ou au Nord du Burkina Faso (Tshibubudze et Hein, 2013 ; 2016) et même des séries de faciès granulite ont été signalées au Nord du Ghana (Block et al., 2015).. Par ailleurs au voisinage de certains plutons du Ghana, du Burkina Faso et du Niger des associations staurotide, disthène, chloritoïde ont été observées (Junner, 1935 ; 1940 ; Bessoles, 1977 ; Pons et al., 1995 ; Debat et al., 2003 ; Ganne et al., 2014, Soumaïla et al., 2004). Les études menées dans les secteurs d’Aribinda et de Tampelga, au Burkina Faso (Debat et al., 2003) montrent que ces associations sont la résultante d’un métamorphisme de contact et non d’un épaississement crustal produit d’une tectonique chevauchante ; les auteurs rejoignent en cela les conclusions de Junner (1935 ; 1940) et Eisenlohr and Hirdes (1992).

I.2 Géologie du Birimien de la partie sud-occidentale du Mali et de la