III. TRAVAUX ANTERIEURS
III.2 L’amidon
III.2.5 Architecture granulaire
III.2.5.1 Structure cristalline de l’amidon
La croissance du grain est initiée dans une région moins organisée structuralement appelée le
hile (Figure 15).
Figure 15 : Grain d'amidon de bananes vertes (sans coloration) Zhang et Whistler, 2002
L’observation au microscope optique en lumière polarisée des grains d’amidons natifs montre
une croix noire de biréfringence (« croix de Malte »), (Figure 16). Laquelle est caractéristique
d'une organisation sphérolitique. Elle permet de plus de démontrer que l'orientation moyenne
des chaînes dans l'amidon est radiale (French, 1984 ; Blanshard, 1987).
Figure 16 : Grains d'amidon natifs vus au microscope électronique à balayage et au microscope optique en lumière polarisée
A – maïs, B – banane verte, C – blé, D – pomme de terre (échelle : 20 µm) Pérez et Bertoft, 2010
A B
C D
Hile
La cristallinité de l'amidon dépend à la fois de l'origine botanique et de la teneur en eau qui
n'excède pas 40 %. Les amidons natifs présentent 3 types cristallins caractéristiques en
diffraction des rayons X aux grands angles : A, B et C (Buléon et al., 1998) (Figure 17) :
le type A qui correspond aux amidons de céréales
le type B qui correspond aux amidons de tubercules, de fruits, de céréales riches en
amylose, et amidons rétrogradés
le type C qui correspond au mélange des 2 modèles précédents des amidons de
légumineuses
Figure 17 : Diagrammes de diffraction des rayons X des amidons de type A, B et C Zobel, 1988b
La plupart des amidons de céréales contiennent des lipides et peuvent subir un recuit plus
cristallin pendant le traitement thermique (Morrison et al., 1993 ; Le Bail, 1998). Il y a la
disparition de la croix de biréfringence et la disparition des structures natives A et B par
diffraction des rayons X. De plus dans le cas de la diffraction des rayons X, la formation de
complexes amylose lipides cristallins se traduit par l'apparition d'un diagramme de diffraction de
type Vh (Figure 18), excepté pour les amidons qui ne contiennent que de l'amylopectine dit
« cireux » (waxy) ou qui ne contiennent pas de lipides.
Figure 18 : Diagrammes de diffraction des rayons X des amidons de type A, B et Vh Buléon et al., 1998
La cristallinité de l'amidon est trop faible et la taille des domaines cristallins trop petite pour
pouvoir résoudre directement la structure tridimensionnelle des domaines cristallins. Des
modèles ont donc été proposés à partir d'amylose recristallisée dans les types A et B. Dans les
2 cas, les chaînes s'organisent en doubles hélices avec 6 unités glycosyl par tour, pour chaque
brin (Figure 19). Chaque double hélice est disposée parallèlement (sauf dans le cas de la
structure de Wu) à sa voisine avec un décalage d’un demi-pas selon l’axe de la double hélice.
Ces doubles hélices s’organisent pour former des cristallites (Wu et Sarko, 1977 ; 1978a ;
1978b ; Imberty et al., 1987 ; Imberty et Pérez, 1988a ; Imberty et al., 1988b ; Imberty et al.,
1991 ; Buléon et al., 1998b).
Figure 19 : Modèle de la double hélice d’amylose Zobel, 1988b
Les allomorphes A et B se distinguent par le mode d'empilement des doubles hélices et par la
quantité d’eau présente dans la maille cristalline (Figure 20).
Selon les modèles d’Imberty, le type A, de maille monoclinique (a = 2,124 nm, b = 1,172 nm, c
= 1,069 nm, et γ = 123,5°), chaque double hélice a six voisines forme une structure dense. La
compacité de la structure ne permet l’hydratation que par 4 molécules d’eau par maille. En
revanche, la structure de type B se caractérise par une maille hexagonale (a = b = 1,85 nm, c =
1,04 nm et γ = 120°). Chaque double hélice a trois voisines. Les hélices sont disposées autour
d’une cavité centrale qui contient des molécules d’eau (36 par maille) (Imberty et al., 1988).
En 2004, Takahashi Kumano et Nishikawa ont démontré une structure semblable à celle
présentée par Imberty et al., avec une nuance pour les paramètres des mailles (a = b = 1,852
nm, c = 1,057 nm). Plus récemment, Popov et al. (2009) ont démontré une structure à très
haute résolution dans laquelle il y a 8 molécules d'eau par maille.
Figure 20 : Arrangement cristallin des types A et B (1) représentation tridimensionnelle selon l’axe de fibre,
(2) projection de la structure dans le plan (a, b). Imberty et al., 1988 a et b, 1991
Les conditions environnementales, telles que la température et l’action de l’eau dans le milieu
de synthèse lors de la croissance de la plante ont aussi sûrement une influence sur l’activité
enzymatique de biosynthèse. Un milieu chaud et sec favorise une organisation de type A. Dans
les milieux froids et humides, les chaînes de l’amylopectine sont plus longues et la structure de
A (1) B (1)
III.2.5.2 Ultra-structure du grain d’amidon
Le grain d'amidon présente une organisation en couches concentriques. La structure
semi-cristalline des couches les plus résistantes aux hydrolyses a été mise en évidence par
microscopie électronique à transmission (Yamaguchi et al., 1979; Oostergel et van Bruggen,
1993). Ces couches s’alternent en lamelles amorphes et cristallines. De nombreux auteurs ont
confirmé par diffraction des rayons X aux petits angles cette organisation lamellaire (Oostergel
et van Bruggen, 1989; Jenkins et al., 1993; Jenkins et Donald, 1995; Donald et al., 2001). La
distance de répétition des lamelles a été déterminée par diffraction des rayons X aux petits
angles et est évaluée à 9 – 10 nm (French, 1984 ; Blanchard, 1987 ; Oostergetel et Van
Bruggen, 1989 ; Jenkins et al., 1993 ; Cameron et al., 1993 ; Jenkins et Donald, 1995 ; Donald
et al., 2001).
La structure lamellaire est superposée à la structure moléculaire de l'amylopectine et les
lamelles cristallines sont formées des chaînes courtes de l'amylopectine (DP 15 – 20)
enchevêtrées en double hélices.
Oostergel et van Bruggen (1993) ont proposé un modèle d’arrangement de l’amylopectine en
super-hélice gauche, d’un diamètre de 18 nm de large et d’une cavité centrale de 8 nm. De
cette théorie Waigh et al, (2000) ont établi que les lamelles amorphes formeraient un squelette
pour les chaînes constituant les clusters d’amylopectine (Figure 21 (a)). Cette super-hélice est
constituée de plusieurs molécules d’amylopectine. Les clusters et chaque molécule
d’amylopectine sont alignés suivant l’axe de la super-hélice. Le modèle d’amylopectine établi
par Bertoft (2004) permet d’envisager un autre arrangement aboutissant à la même
super-hélice par une simple torsion de la molécule (Figure 21 (b)). Dans ce modèle, la super-super-hélice
est construite à partir d’une seule molécule d’amylopectine. La structure de la lamelle cristalline
reste identique mais la lamelle amorphe est constituée d’un vrai squelette formé par les longues
chaînes de l’amylopectine (B3). L’axe des clusters reste identique à l’axe de la super-hélice
mais la chaîne principale de l’amylopectine suit les tours de la super-hélice.
Figure 21 : Propositions de structure en super hélice de l’amylopectine (a) Waigh et al., 2000 (b) Bertoft, 2004
Un niveau d’organisation supplémentaire dans le grain d’amidon a été proposé par Gallant et al.
(1997). Des grains d’amidon observés en MEB à haute résolution, présentent à leur surface de
petits agrégats plus ou moins sphérique appelés « blocklets » (Figure 22). Les blocklets
présents dans les couches amorphes des grains d’amidons ont une taille inférieure (25 nm) à
celle des blocklets présents dans les couches cristallines (80 – 120 nm).
Figure 22 : Proposition de structure en « Blocklet » Tang et al., 2006