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2. La Manche, domaine intraplaque 1 Héritage et structure profonde

2.2. Évolution des systèmes sédimentaires du Méso-Cénozoïque

2.2.3. Stratigraphie du Crétacé de la Manche orientale

Les affleurements crétacés sont nombreux au Sud de l’Angleterre, dans le bassin de Paris ainsi que dans la Manche. Les faciès sédimentaires sont variés, surtout pour le Crétacé inférieur, avec les grès et calcaires continentaux du Wealdien, les grès marins du Lower et Upper Greensand et les argiles de Gault. Le Crétacé supérieur est lui majoritairement représenté par des dépôts calcaires, montrant des lithologies très diverses (bancs de silex, hardgrounds, niveaux marneux fins) (figure 1-16).

Crétacé inférieur

La sédimentation au Crétacé inférieur dans la région de la Manche est continue, et elle se localise dans les bassins subsidants, notamment le bassin de Wessex. Les plus fortes épaisseurs de Wealdien sont d’ailleurs observées au sein du bassin de Portland-Wight, avec une série de plus de 700m (Whittaker, 1985). En revanche ces dépôts ne se mettent pas en place dans l’ensemble du bassin de Portland-Wight, puisqu’au Nord-Ouest de celui-ci les séries post-Wealdien (Aptien-Albien) reposent en discordance sur du Jurassique (Donovan et al., 1961).

Le Crétacé inférieur débute par les bancs de Cinder et de Durlston, au sommet de la formation des bancs de Purbeck (figure 1-16), les premiers étant des bancs calcaires riches en huîtres correspondant à une brève transgression marine (Casey, 1973). Suite à cette transgression, la sédimentation devient progressivement clastique et continentale, avec le dépôt des

L’apport terrigène important compense la forte subsidence pour maintenir un environnement de dépôt en eau douce, lacustre ou lagunaire (Allen, 1981). Cet apport provient de l’érosion des massifs en place, à savoir le massif de Londres-Brabant (NE), les reliefs Cornubien (W) et Armoricain (SW), et le haut de Cranborne-Fordingbridge (NW). Le faciès Wealdien est majoritairement caractérisé par des grès et des limons mis en place dans des plaines alluviales argileuses. Les zones les plus éloignées des sources clastiques, au centre de la Manche actuelle, ont connu une sédimentation essentiellement argileuse. Dans ces zones, le Wealdien repose en conformité avec les unités jurassiques, en revanche il se retrouve en discontinuité sur l’argile d’Oxford à l’approche du haut de Dieppe-Hampshire, en raison de son soulèvement à la fin du Jurassique et au début du Crétacé. Les variations latérales de faciès et d’épaisseur sédimentaires sont fortes. Le Wealdien représente ainsi une série de 100 à 200m dans le bassin de Weald, mais seulement 30m dans le Boulonnais (Mégnien et Mégnien, 1980; Whittaker, 1985) (figure 1-17).

Figure 1-16 : Série du Crétacé en Manche orientale (d’après Hamblin et al., 1992). Les courbes de variations eustatiques sont d’après Haq et al. (1988).

La formation du Wealdien comporte deux unités principales : les bancs de Hastings, majoritairement sableux, et les argiles du Weald (ou shales wealdiens ; figure 1-16). Le sommet des argiles du Weald marque un retour progressif à une sédimentation en milieu marin, associé à la transgression aptienne. En sismique réflexion, le faciès Wealdien est caractéristique, identifiable par des réflecteurs discontinus et un faciès parfois chaotique. Son expression sur les données bathymétriques, lorsqu’il affleure, est aussi caractéristique, en raison de l’interstratification de grès et de limons qui dessine de légères irrégularités sur le fond marin (Hamblin et al., 1992).

Figure 1-17 : Distribution des bancs de Purbeck et du Wealdien en Manche orientale (Hamblin et al., 1992, d’après Mégnien et Mégnien, 1980; Whittaker, 1985).

Au cours de l’Aptien et de l’Albien se déposent successivement le Lower Greensand, l’argile de Gault et l’Upper Greensand (figure 1-16). La transgression du début de l’Aptien ennoie le Nord du massif de Londres-Brabant, la Manche se retrouvant totalement immergée à la fin de l’Aptien. Cette phase transgressive et la poursuite de la subsidence en Manche ont permis le dépôt d’une série sédimentaire de plus de 100m (figure 1-18).

Le Lower Greensand s’étend de l’Aptien au début de l’Albien et correspond à des alternances d’argiles et de sables mis en place dans un environnement côtier peu profond soumis à l’influence des marées. Cette formation repose en concordance sur le Wealdien, mais est discordant localement sur le Kimméridgien dans le Dorset (Donovan et al., 1961). Le Lower Greensand se divise en quatre unités dans le Dorset et sur l’île de Wight : l’argile d’Atherfield, Ferruginous Sandstone, Sandrock et Carstone. Une pause dans la sédimentation est observée à la base de l’unité Carstone. Dans le bassin du Weald-Boulonnais et le bassin de Dieppe-

Sandgate Beds (grès argileux et argiles limoneuses) et Folkestone Beds (sables peu consolidés et argiles). Les arrêts de sédimentation sont ici plus nombreux, en raison de la faible épaisseur de la tranche d’eau à l’Aptien.

Les argiles marines de Gault se déposent au cours de l’épisode transgressif majeur de l’Albien inférieur. Ces argiles, riches en organismes benthiques et pélagiques, sont limoneuses dans leur partie basale, et deviennent de plus en plus sableuses jusqu’à l’Upper Greensand. En Manche orientale, l’épaisseur du Gault est estimée autour de 40m, en diminuant vers le Pas de Calais.

La formation Upper Greensand correspond à une sédimentation dans un milieu plus proximal. Elle est peu présente à l’Est de la Manche, dans le bassin du Weald-Boulonnais. Son épaisseur est relativement variable, de même que sa lithologie (limons, grès siliceux, grès calcaires, calcaires limoneux).

Figure 1-18 : Distribution des séries apto-albiennes (Lower Greensand, Gault et Upper Greensand) en Manche orientale (Hamblin et al., 1992, d’après Mégnien et Debrand-Passard, 1980; Whittaker, 1985).

Crétacé supérieur

Le Cénomanien, qui correspond au début du Crétacé supérieur, est marqué par une subsidence tectonique régionale ainsi que par une hausse du niveau marin (Haq et al., 1988). Cette combinaison de facteurs tecto-eustatiques a permis la mise en place de la mer de craie sur une grande partie de l’Europe (figure 1-19), qui repose en discordance angulaire (5 à 10°) sur les dépôts plus anciens (Auffret et Colbeaux, 1977). La série sédimentaire du Crétacé supérieur se compose à sa base de marnes glauconieuses, puis d’une épaisse série de craie (plus de 400m au niveau du bassin de Dieppe-Hampshire), divisées en trois formations: la Craie inférieure (Cénomanien), moyenne (Turonien) et supérieure (Sénonien)(Rawson et al., 1978)

(figure 1-16). Cette craie s’est déposée dans une mer profonde de 100 à 600m et de salinité normale (Hancock, 1975). La craie est parfois entrecoupée de bancs nodulaires, de marnes ou de bancs de silex.

La Craie inférieure (Cénomanien), composée de marnes crayeuses et de craies grises, se distingue par de fortes teneurs en éléments terrigènes. Elle est délimitée à sa base et son sommet respectivement par les marnes glauconieuses et les marnes de Plenus. La Craie moyenne (Turonien) correspond à des bancs massifs de craie blanche litée. Le banc Melbourn Rock, constitué de craies nodulaires et de hardgrounds, réside à sa base. Enfin la Craie supérieure (Sénonien) correspond à la plus épaisse des trois unités de la Craie. Il s’agit de craies blanches massives et litées, avec à sa base le banc de Chalk Rock (craies nodulaires et hardgrounds). En Manche, le dépôt de la Craie est peu observé après le Campanien ; des craies maastrichtiennes sont toutefois présentes au Sud du Central Channel High et sur la bordure orientale du bassin de Dieppe-Hampshire (Hamblin et al., 1992 ; Gale et Lovell, 2018). Le Cénozoïque de la partie méridionale du Bassin de Dieppe-Hampshire repose en discordance sur la craie d’âge santonien à campanien (King, 2016). Un épisode érosif est reconnu dans les zone alentours, avec des dépôts préservés les plus récents d’âges campaniens à maastrichtiens (Pomerol, 1989).

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