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Les stratégies internationales

52. Pour répondre aux défis qui viennent d’être très rapidement évoqués, plusieurs stratégies sont en train d’être développées. Deux sont mentionnées ici, qui émanent de l’Organisation internationale du Travail (BIT) et de la Banque mondiale.

53. La stratégie proposée par l’Organisation internationale du Travail (OIT)41 plaide en faveur de structures flexibles :

un niveau de base de protection serait défini « comme un dispositif de protec-tion universel financé par l’impôt et géré par l’Etat, qui vise à assurer à chacun les services répondant à ses besoins fondamentaux et à garantir à ceux dont les ressources sont insuffisantes un revenu minimum de subsistance. Ce premier ni-veau est l’une des bases de la politique de protection sociale (...) » ;42

un « niveau solidarité » : « Il s’agit d’un système de protection obligatoire fi-nancé sur un fonds public alimenté par les cotisations des employeurs et des as-surés (ou éventuellement par l’impôt) et versant aux ayants droits, lors de la réa-lisation de certains risques, des rentes d’un montant minimum équivalant aux normes fixées par les conventions de l’OIT »43 ;

– un « niveau complémentaire » : « La séparation opérée entre responsabilité pu-blique et responsabilité privée influe sur la gamme des prestations assurées au titre du niveau « solidarité » et sur la nécessité éventuelle de compléter le dispo-sitif de protection, sous une forme ou une autre, c’est-à-dire individuellement ou en groupe, par le truchement de l’employeur, directement ou dans le cadre de fonds de pension privés ou de compagnies d’assurance commerciales. Ce volet devrait viser dans tous les cas à fournir un complément de revenu répondant aux besoins de l’individu et s’ajouter à la protection sociale fondée sur la solidarité, mais sans y porter atteinte ».44

54. Ces propositions relatives aux niveaux de base, de solidarité et complémentaires font partie d’une stratégie, qui devrait tendre à garantir une « protection sociale à des couches plus larges de la population mondiale et (...) rendre cette protection plus con-forme aux buts fixés par les déclarations et normes internationales ».45 Cette stratégie vise l’extension des programmes à la population non protégée, ce qui touche avant tout

41 OIT-CONFÉRENCE INTERNATIONALE DU TRAVAIL (80e session-1993) : Assu-rances sociales et protection sociale. Rapport du Directeur général. BIT. Genève 1993.

42 Idem, p. 87.

43 Idem, p. 88.

44 Idem, p. 89.

45 Idem, p. 83.

les pays en développement46, la garantie de prestations suffisantes pour que les per-sonnes dans le besoin reçoivent une aide efficace, la rationalisation des institutions compétentes afin de leur permettre de mieux répondre aux besoins des bénéficiaires.

55. Les structures flexibles proposées par le BIT confirment les responsabilités pu-bliques en matière de sécurité sociale  c’est un non clair à la privatisation pour les deux premiers niveaux  tout en prévoyant un relais par un niveau complémentaire, de nature professionnelle.

56. Le Bureau international du Travail continue son travail exploratoire. En 2001, il a adressé à la Conférence internationale du Travail un important « Rapport VI : Sécurité sociale. Questions, défis et perspectives ».47 Au titre de « questions fondamentales », ce document traite des liens entre sécurité sociale, emploi et développement, l’extension du champ d’application personnel, l’égalité entre femmes et hommes, le financement du-rable de la protection, le dialogue social. La Conférence internationale du Travail (89e ses-sion–2001) a bien accueilli le rapport, lequel devrait être pris en compte dans la pla-nification des activités de l’OIT. La Conférence a adopté des conclusions, dont le § 3 à citer ici :

« 3. Si elle est bien gérée, la sécurité sociale favorise la productivité en assurant des soins de santé, une sécurité du revenu et des services sociaux. Associée à une éco-nomie en expansion et à des politiques actives du marché du travail, elle est un instru-ment de développeinstru-ment économique et social durable. Elle facilite les changeinstru-ments structurels et technologiques qui exigent une main-d’œuvre adaptable et mobile. Il est à noter que si elle représente un coût pour les entreprises la sécurité sociale est également un investissement dans l’être humain ou un soutien à celui-ci. Dans le contexte de la mondialisation et des politiques d’ajustement structurel, la sécurité sociale devient plus que jamais nécessaire ».48

57. La stratégie proposée par le BIT et acceptée par la Conférence internationale du Travail a d’autant plus d’importance qu’elle peut s’appuyer sur une série de conventions et de recommandations, adoptées dès 1944. Ces instruments normatifs traitent des grandes composantes des systèmes et des régimes de sécurité sociale (champs d’application personnel et matériel, prestations, organisation)49,50.

46 Voir ci-dessus les N° 30-31.

47 Cf. la note 35.

48 Résolution et Conclusions concernant la sécurité sociale, Conférence internationale du Travail, 89e session 2001. In : BIT : Sécurité sociale : un nouveau consensus, cité à la note 15, p. 2. – La Résolution et les Conclusions ont été reproduites, avec l’autorisation du BIT, dans le CGSS N° 30-2003, pp. 155 sv.

49 Cf. ci-dessus le N° 49.

50 Hector BARTOLOMEI DE LA CRUZ/Alain EUZÉBY : L’Organisation internationale du Travail. Presses universitaires de France. Paris 1997. – S. Günter NAGEL/Christian THALAMY : Le droit international de la sécurité sociale. Presses universitaires de

58. La stratégie de la Banque Mondiale51 a une toute autre orientation. La Banque Mondiale estime que le vieillissement de la population, dans toutes les régions du mon-de, va conduire à une crise aiguë des systèmes de sécurité sociale. Elle considère les ré-gimes publics et professionnels de retraite comme inefficaces et propose un recours lar-ge aux mécanismes du marché. Le rapport de la Banque Mondiale, publié en 1994, est axé sur les régimes de retraite, mais son orientation fondamentale déborde certainement de ce secteur et est beaucoup plus générale. La stratégie proposée est tout à fait contraire à la voie suivie en Europe, de l’Ouest comme de l’Est. Elle demande un recul important des protections publiques au profit d’une large privatisation de la protection sociale.

59. Les régimes publics ou légaux devraient avoir comme objectif limité l’atténua-tion de la pauvreté chez les personnes âgées. Les prestal’atténua-tions ne devraient pas être liées aux gains mais être forfaitaires. La Banque Mondiale ne tranche pas de manière décisive entre les prestations forfaitaires inconditionnelles et les prestations sous condition de ressources. Dans les deux cas, ce n’est qu’un filet de sécurité.

60. Le deuxième niveau de protection,  pour les retraites toujours  devrait être entièrement capitalisé et placé sous administration privée. La fonction à remplir est celle de l’épargne, pour tous les groupes de revenus de la population. Deux voies sont ici pos-sibles : les comptes d’épargne individuels ou les régimes de retraite professionnels. La Banque Mondiale estime les avantages des seconds illusoires : ils tendent à n’avoir qu’une couverture fragmentaire, à être offerts principalement aux travailleurs à revenus moyens et élevés, à restreindre la mobilité des travailleurs. En revanche, relève la Banque Mondiale, les plans d’épargne individuels peuvent être étendus et leurs presta-tions sont entièrement transférables (« libre passage »); ils doivent donc être préférés.

L’ad-ministration publique du 2e niveau n’est pas satisfaisante : les régimes sont sou-vent obli-gés d’investir dans le secteur public ou quasi étatique, avec fréquemment des taux d’in-térêts inférieurs à ceux du marché. En revanche, les régimes privés sont com-pétitifs, ils obtiennent des rendements conformes au marché. Le troisième niveau de protection est constitué par les plans d’épargne professionnels ou personnels volon-taires.

61. Les voies proposées par la Banque Mondiale ont fait l’objet de grands débats et de critiques très vives.52 Ces voies sont actuellement quelque peu assouplies.53

France. Paris 1994. – Guy PERRIN : Histoire du droit international de la sécurité socia-le, cité à la note 14, pp. 228 sv., 500 sv.

51 Rapport sur la crise du vieillissement. Mesures destinées à protéger les personnes âgées et à promouvoir la croissance. Washington 1994.

52 Voir p. ex. le N° 3-4/1995 de la Revue internationale de sécurité sociale.

53 Voir les études de Warren McGILLIVRAY, Robert HOLZMANN, Colin GILLION, Karl Gustav SCHERMANN dans le N° 1/2000 de la Revue internationale de sécurité sociale et la synthèse de Monika QUEISSER dans le N° 2/2000 de la même revue.

62. Longtemps considérée comme une question essentiellement technique  la croissance économique rendait les arbitrages plus faciles  la sécurité sociale est redeve-nue un objet de discussions et de débats politiques. Elle est en effet liée à des grands choix de société : quelle part du revenu national distribuer selon des critères de justice sociale et quelle part attribuer selon les règles du marché, quel équilibre établir entre le social et l’économique, quelles sont les priorités de nos sociétés contemporaines ?54

* * * * *

54 Alain EUZEBY : Sécurité sociale : une solidarité indispensable. Revue internationale de sécurité sociale, 3/1997, pp. 3 sv.

DEUXIÈME PARTIE

L’APPROCHE GÉNÉRALE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE EN SUISSE

1. Terminologie ... 63 2. Le développement historique et la diversité du système ... 65 3. Les sources ... 75 3.1. Généralités ... 75 3.2 La Constitution fédérale et la sécurité sociale ... 77 3.3 Les principales lois fédérales de sécurité sociale ... 87 3.3.1 La loi fédérale sur la partie générale du droit

des assurances sociales ... 87 3.3.2 Les lois « spéciales » de sécurité sociale ... 94 3.4 Les réglementations connexes ... 97 3.5 Droit international et européen ... 98a 3.6 Une « source » particulière : les directives des autorités

de surveillance ... 99 3.7 La place du droit de la sécurité sociale dans l’ordre juridique suisse .... 100 4. Les principes généraux du droit constitutionnel et administratif ... 103 4.1 Le principe de la légalité ... 104 4.2 Le principe de l’égalité ... 106 4.3 Le principe de la proportionnalité ... 109 4.4 Le principe de la bonne foi ... 110 4.5 L’interdiction de l’arbitraire ... 112 4.6 La motivation des décisions ... 113 4.7 La reconsidération et la révision ... 114 5. Les principes fondamentaux spécifiques au droit de la sécurité sociale ... 117 5.1 Le principe de l’affiliation obligatoire ... 118 5.2 Le principe de l’assurance ... 119 5.3 Le principe de la solidarité ... 120 5.4 Le principe de la prévention ... 122 5.5 Le principe de la réadaptation ... 124 5.6 Le principe de l’intervention de l’Etat ... 126 6. Autres principes ... 128

6.1 La protection des droits acquis ... 128 6.2 L’obligation de diminuer le dommage ... 131 6.3 La proportionnalité entre le coût et le succès d’une mesure ... 134 6.4 L’interdiction d’une surindemnisation ... 135 6.5 Les règles de preuve... 136 7. L’évolution vers une coordination et une harmonisation des régimes

de sécurité sociale ... 138 8. Méthode ... 143

1. Terminologie

63. En Suisse, la plupart des lois fédérales relatives à la sécurité sociale emploient le terme d’assurance.55 Il en est ainsi de l’assurance-maladie, de l’assurance-accidents, de l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité, de l’assurance-chômage et de l’assuran-ce-militaire; quant à la loi sur la prévoyance professionnelle, la notion d’assurance ne figure certes pas dans le titre, mais déjà les règles sur l’assujettissement expriment bien qu’il s’agit d’une assurance sociale56. La doctrine en Suisse emploie les termes de droit des assurances sociales57 (Sozialversicherungsrecht)58 ou de droit de la sécurité sociale (das Recht der sozialen Sicherheit)59.

64. Nous avons choisi le terme de sécurité sociale pour présenter le système suisse dans son ensemble, dans le but de couvrir un champ de vision large. Ce choix termi-nologique permet de tenir compte du fait que certains régimes du système suisse ne sont pas conçus sous forme d’assurances sociales à proprement parler. L’on peut mentionner à ce titre les prestations complémentaires à l’AVS/AI et les allocations familiales aux travailleurs agricoles, dont l’organisation et le financement sont rattachés à l’AVS, mais qui ne reposent pas sur l’idée de l’assurance; l’octroi de prestations complémentaires notamment se distingue des prestations des autres branches par le fait que le demandeur doit se trouver dans le besoin60 ; c’est un régime sous conditions de ressources.61 De même, le droit cantonal contient un grand nombre de systèmes de protection sociale qui ne remplissent pas les critères d’une assurance sociale tout en étant distingué de l’as-sistance.62

55 Par quoi il faut comprendre assurance sociale (cf. ci-dessus les N° 18, 20 sv.).

56 Art. 2 al. 1 LPP.

57 P. ex. Jean-Louis DUC : Les assurances sociales en Suisse. Duc éditeur. Lausanne 1995.

58 P. ex. Alfred MAURER : Bundessozialversicherungsrecht. Helbing & Lichtenhahn.

Basel/Frankfurt am Main 1993.

59 P. ex. Pascal MAHON : Institutions de sécurité sociale. Presses polytechniques ro-mandes. Lausanne 1983.

60 Art. 2 al. 1 LPC.

61 Voir ci-dessus la note 29.

62 Voir p. ex. RMI VD, RMCAS GE.

2. Le développement historique et la diversité du système

65. La sécurité sociale suisse ne constitue pas un véritable système, mais elle com-prend plutôt une juxtaposition de régimes, organisés le plus souvent sous la forme de l’assurance sociale.63 En effet, le constituant et le législateur ont écarté intentionnelle-ment l’idée d’un projet global et ils ont procédé de manière très pragmatique. Ils ont insisté, dès l’origine, sur la nécessité d’accumuler des expériences avec un premier ré-gime avant d’en introduire d’autres et sur la prise en considération prudente des possibi-lités financières.

66. Comparée à d’autres Etats européens, la Suisse s’est mise relativement tard à développer son système de protection sociale. Jusqu’à la Seconde guerre mondiale (1939-1945), l’évolution a été lente. Les seuls régimes à avoir été introduits au début du XXe siècle furent l’assurance militaire, l’assurance-maladie et l’assurance-accident, alors que les éventualités vieillesse, invalidité et chômage ont dû attendre leur régle-mentation pendant plusieurs décennies. La législation sociale de l’après-guerre a en re-vanche connu un développement soutenu sous la pression des besoins et en raison d’une évolution économique favorable. Elle a débuté en 1946 avec l’adoption de la loi sur l’assurance-vieillesse et survivants64 pour se poursuivre dans les domaines de l’invali-dité, du chômage et des allocations familiales. En lieu et place d’une description détail-lée du développement historique65, rappelons quelques dates essentielles :

1890 Art. 34bis Cst. relatif à l’assurance-maladie et à l’assurance-accidents 1900 Rejet par le peuple de la « Lex Forrer » (concernant l’assurance-maladie et

accidents)

63 Voir ci-dessus les N° 20-22.

64 Alexandre BERENSTEIN : L’assurance-vieillesse suisse. Réalités sociales. Lausanne 1986. – Peter BINSWANGER : Geschichte der AHV. Pro Senectute Verlag. Zürich 1986. – Message du Conseil fédéral à l’Assemblée fédérale relatif à un projet de loi sur l’assurance-vieillesse et survivants, du 24 mai 1946. FF 1946 II, pp. 353 sv.

65 Voir les ouvrages indiqués en tête de cette subdivision.

GILLIAND, Pierre : Politique sociale en Suisse. Introduction. Réali-tés sociales. Lausanne 1988.

GNAEGI, Philippe : Histoire et structure des assurances sociales en Suisse. Schulthess. Zürich 1998.

MAURER, Alfred : Geschichte des schweizerischen Sozialversiche-rungsrechts. Schriftenreihe für internationales und vergleichendes Sozialrecht. Band 6c. Duncker & Humblot. Berlin 1981.

TSCHUDI, Hans Peter : Entstehung und Entwicklung der schweize-rischen Sozialversicherungen. Helbing & Lichtenhahn. Basel 1989.

1901 Loi fédérale sur l’assurance militaire (LAM) 1911 Loi sur l’assurance-maladie et accidents (LAMA)

1925 Art. 34quater Cst. (première version) relatif à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité

1945 Art. 34quinquies Cst. relatif aux allocations familiales et à l’assurance- maternité

1946 Loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants (LAVS) (en vigueur depuis 1948)

1951 Loi fédérale sur l’assurance-chômage (facultative)

1952 Loi fédérale fixant le régime des allocations familiales aux travailleurs agricoles LAPG)

1959 Loi fédérale sur l’assurance-invalidité (LAI) (en vigueur depuis 1960) 1965 Loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’AVS/AI (LPC) 1972 Révision de l’art. 34quater Cst.

1972 8e révision de l’AVS (en vigueur depuis 1973)

1976 Art. 34novies Cst. relatif à l’assurance-chômage obligatoire 1977 9e révision de l’AVS (en vigueur depuis 1979)

1981 Loi fédérale sur l’assurance-accidents (LAA) (en vigueur depuis 1984) 1982 Loi fédérale sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas

d’insolvabilité (LACI) (en vigueur depuis 1984)

1982 Loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (LPP) (en vigueur depuis 1985)

1986 2e révision AI 1992 3e révision AI

1993 Loi fédérale sur le libre passage dans la prévoyance professionnelle (LFLP) (en vigueur depuis 1995)

1994 Loi fédérale sur l’assurance-maladie (LAMal) (en vigueur depuis 1996) 1994 10e révision AVS (en vigueur depuis 1997)

1999 Rejet de la loi sur l’assurance-maternité (référendum) 1999 Nouvelle Constitution fédérale (en vigueur depuis 2000) 2000 Loi sur la partie générale du droit des assurances sociales

(LPGA) (en vigueur depuis 2003).

67. Les facteurs juridiques et politiques qui ont exercé et qui exercent toujours une influence importante sur la structure de la sécurité sociale en Suisse sont le fédéralisme, la démocratie directe (initiative populaire, référendum facultatif législatif) et le libéra-lisme.66

68. Le fédéralisme a joué un rôle important surtout jusqu’à l’adoption de l’art.

34novies Cst en 1976 (la Confédération a alors reçu la compétence de rendre l’assu-rance-chômage obligatoire). Actuellement les domaines de la santé et de l’assistance ou

66 Voir Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER : Droit constitution-nel suisse. Stämpfli. Bern 2000. Cf. Volume I, pp. 187 sv., 293 sv. – Michel HOTTE-LIER : La Constitution fédérale suisse et les droits sociaux. CGSS N° 27-2001, pp. 9 sv.

– Michel HOTTELIER : Les régimes cantonaux d’allocations familiales. Aspects cons-titutionnels. CGSS N° 29-2002, pp. 43 sv.

aide sociale demeurent de la compétence des Cantons. C’est en fait principalement à cause du courant du libéralisme que le fédéralisme a marqué le développement de la sé-curité sociale : une compétence générale en cette matière aurait pu être attribuée à la Confédération à l’origine (1890) ou après la Seconde guerre mondiale, sous l’influence notamment des normes adoptées par l’Organisation internationale du Travail. A l’épo-que contemporaine, le fédéralisme conserve – en dehors des domaines de la santé et de l’aide sociale – un intérêt certain. En effet, en plus des dispositions d’exécution qu’ils sont amenés à adopter (cf. p. ex. art. 57 LPGA), les Cantons peuvent légiférer dans les secteurs qui ne sont pas réglés de manière exhaustive par le droit fédéral.67 Par exemple : l’amélioration des prestations complémentaires cantonales à l’AVS/AI allant au-delà de la LPC du 19 mars 1965 ; les allocations familiales (la Confédération n’a légiféré que pour l’agriculture et ses propres agents).

69. L’initiative populaire exerce une influence dynamique sur le développement de la sécurité sociale. Non pas en raison d’un effet direct (la plupart d’entre elles ont été re-tirées par leurs auteurs, les autres ont été rejetées en votation populaire), mais d’effets indirects :

a) le Parlement s’oppose à l’initiative, mais élabore un contre-projet (ex. : révision de l’art. 34quater Cst en 1972) ;

b) Le Parlement s’oppose à l’initiative, mais propose une nouvelle loi (cas en 1959 pour l’assurance-invalidité) ou la révision d’une loi (cas de plusieurs révisions de l’AVS).

70. Le référendum facultatif législatif a exercé des effets directs – refus des pre-mières lois fédérales sur l’assurance-maladie et accidents et sur l’assurance-vieillesse et survivants – mais ce sont les effets indirects qui sont les plus importants : la « menace » d’une demande de référendum incite les diverses tendances politiques et économiques à rechercher un compromis. En effet, les questions de sécurité sociale sont souvent com-plexes et techniques; plus il y a de questions plus il y a de motifs d’oppositions et il n’est guère aisé d’en faire comprendre toute la portée aux votants; le risque d’un résultat négatif n’est alors guère négligeable. La recherche d’un consensus se manifeste ainsi tout au long des travaux préparatoires. L’élaboration de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (LPP) l’a illustré très clairement.

71. L’influence du libéralisme a été mise en évidence par le prof. Ph. BOIS.68 Il l’ajoute aux critères classiques qui viennent d’être exposés : « (ce) courant de pensée,

67 Blaise KNAPP : Le fédéralisme. Société suisse des juristes. Rapports et communica-tions. Fascicule 3/1984, pp. 301 –307.

68 Philippe BOIS : Spécificités de la politique sociale en Suisse. In : Droit et politique so-ciale : Travaux réunis par P. de LAUBIER et J.-P. FRAGNIERE. Delta. Vevey 1980, pp. 34-36.

important en Suisse, exerce évidemment une influence dans le domaine des assurances sociales ». Selon cet auteur, il a eu en tout cas deux effets :

a) la résistance à l’affiliation obligatoire à un régime (le problème demeure en ma-tière d’assurance-maladie à l’égard des indemnités journalières) ;

b) la résistance à l’organisation centralisée : la sécurité sociale en Suisse est gérée par une multitude d’institutions publiques et privées (l’on peut ajouter que ce courant politique, majoritaire, est traditionnellement prudent à l’égard du déve-loppement de la sécurité sociale).

72. Les principaux régimes de sécurité sociale en Suisse peuvent être présentés sous la forme d’un tableau :

69

69 En fait, il ne s’agit pas d’un régime de sécurité sociale (protection collective), mais d’un complément à celle-ci. Il est indiqué dans le tableau, compte tenu de son inscription dans l’art. 111 Cst. (voir la sixième partie).

Assurance-maladie

73. La diversité présentée par ces régimes peut être résumée comme suit :

a) Chaque régime repose sur une ou des lois différentes : il n’y a pas de code de la sécurité sociale70 ; ces lois n’ont pas été adoptées à la même date ;

b) Bien qu’il y ait des points communs, les grandes composantes de ces régimes –

b) Bien qu’il y ait des points communs, les grandes composantes de ces régimes –

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