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L’hypoxie intratumorale et les facteurs HIF

RSUME SENP

5. L’hypoxie et les facteurs HIF comme cibles thérapeutiques en cancérologie

5.3. Stratégies ciblant les facteurs HIF

Les facteurs HIF étant les acteurs de l’adaptation à l’hypoxie intratumorale, leur ciblage spécifique pourrait s’avérer bénéfique en clinique. Historiquement, les facteurs de transcription ont été décrits comme étant difficiles à cibler mais il existe aujourd’hui de nombreux composés capables d’inhiber l’activité des facteurs HIF, de manière directe ou indirecte (Tableau 6). Parmi eux, certains sont déjà sur le marché et d’autres font l’objet d’études cliniques ou précliniques.

5.3.1. Molécules déjà sur le marché

Quelques molécules utilisées actuellement en chimiothérapie anticancéreuse inhibent l’activité des facteurs HIF. C’est le cas du topotecan, un analogue de la camptothécine. Cette molécule inhibe la topoisomérase I et induit ainsi la formation de cassures double brin au niveau de l’ADN, inhibant donc sa réplication. Une étude a montré que le topotecan inhibe la traduction de HIF-1α

selon un mécanisme dépendant de la topoisomérase I mais indépendant de la réplication de l’ADN (Rapisarda et al. 2004a). Il a également été montré in vivo que l’administration quotidienne de topotecan entraine une diminution de l’expression de HIF-1α, de l’angiogenèse et de la croissance tumorale (Rapisarda et al. 2004b). De plus, un effet antitumoral synergique a été observé lors d’un traitement combiné avec le bevacizumab (Rapisarda et al. 2009). La doxorubicine et la daunorubicine, de la famille des anthracyclines, sont des agents intercalants de l’ADN utilisés en chimiothérapie. Une étude a montré que ces molécules inhibent l’activité transcriptionnelle de HIF-1 en bloquant sa liaison à l’ADN de ses gènes cibles, ce qui se traduit par une diminution de l’angiogenèse tumorale in vivo (Lee et al. 2009a).

D’autre part, plusieurs thérapies ciblées actuellement utilisées en clinique ont des effets anti- angiogéniques qui semblent largement être dus à leur capacité à inhiber l’activité de HIF-1 (Semenza 2010). Cela semble être le cas de l’imatinib, un inhibiteur de la protéine BCR-ABL (Breakpoint Cluster Region protein - Abelson murine leukemia viral oncogene homolog 1) dont l’activation constitutive favorise l’expression de l’ARNm de HIF-1α, augmentant ainsi son activité transcriptionnelle et donc l’expression du VEGF (Mayerhofer et al. 2002). L’effet anti- angiogénique du trastuzumab, un anticorps anti-HER2, pourrait également s’expliquer par l’inhibition de HIF-1α puisqu’une étude a montré que le récepteur HER2 stimule la synthèse de HIF-1α (Laughner et al. 2001). De plus, des études ont montré que l’erlotinib et le gefitinib, des inhibiteurs de l’EGFR, ainsi que le cetuximab, un anticorps bloquant l’EGFR, diminuent la synthèse de HIF-1α et donc l’expression du VEGF (Luwor et al. 2005, Pore et al. 2006). Des études ont également montré que le bortezomib, un inhibiteur du protéasome notamment utilisé pour le traitement du myélome multiple, inhibe la voie PI3K/Akt/mTOR et donc la traduction de HIF- 1α, et favorise le recrutement de FIH pour inhiber l’activité transcriptionnelle de HIF-1 (Shin et al. 2008, Befani et al. 2012). Enfin, le temsirolimus et l’everolimus, des inhibiteurs de mTOR, sont indiqués dans le traitement des adénocarcinomes rénaux avancés où ils inhibent la traduction de HIF-1α(Majumder et al. 2004, Thomas et al. 2006, Hudes et al. 2007, Motzer et al. 2008).

5.3.2. Molécules faisant l’objet d’études cliniques ou précliniques récentes

L’activation des facteurs HIF constituant un mécanisme de résistance au bevacizumab, une étude clinique de phase I a été mise au point afin d’étudier le bénéfice de la combinaison du bevacizumab avec le bortezomib, un inhibiteur de l’activité transcriptionnelle de HIF-1 (Falchook

présente une efficacité clinique chez des patients présentant une tumeur localement avancée et réfractaire aux traitements de première intention (Falchook et al. 2014).

Une étude préclinique récente a montré que l’acriflavine, une molécule capable d’inhiber la dimérisation de HIF-α avec HIF-β, limite la progression tumorale dans un modèle murin de cancer colorectal induit par l’inflammation (Shay et al. 2014). En effet, l’acriflavine diminue le nombre de tumeurs, la taille et le grade tumoral, ainsi que l’infiltration de macrophages et la vascularisation tumorale. Ainsi l’inhibition de HIF dans les cellules tumorales, immunitaires et endothéliales permettrait de limiter la croissance tumorale (Shay et al. 2014).

Enfin, une étude préclinique effectuée dans un modèle murin de leucémie myéloïde aigüe récidivante indique que l’administration d’échinomycine, un inhibiteur de HIF-1, permet de guérir près de 50% des animaux. Dans ce modèle, l’échinomycine cible spécifiquement les cellules souches leucémiques, responsables de la récidive, tout en épargnant les cellules souches hématopoïétiques (Wang et al. 2014d).

Tableau 6. Mécanismes d’action des inhibiteurs de HIF.

Molécule Mécanisme(s) d’action Référence

Inhibiteurs de l’expression de l’ARNm de HIF-α

EZN-2968 Augmentation de la dégradation de l’ARNm de HIF-1α (Greenberger et al. 2008,

Jeong et al. 2014b)

Aminoflavone Inhibition de la transcription de l’ARNm de HIF-1α (Terzuoli et al. 2010)

Inhibiteurs de la traduction de HIF-α

Topotécan Inhibiteur de la topoisomérase I

Inhibition de la traduction de HIF-1α

(Rapisarda et al. 2002, Rapisarda et al. 2004a, Rapisarda et al. 2004b, Rapisarda et al. 2009, Kummar et al. 2011)

EZN-2208 Inhibiteur de la topoisomérase I

Inhibition de la traduction de HIF-1α

(Pastorino et al. 2010, Sapra et al. 2011, Jeong et al. 2014a)

NSC-644221 Inhibiteur de la topoisomérase II

Inhibition de la traduction de HIF-1α

(Creighton-Gutteridge et al. 2007)

Temsirolimus Inhibition de mTOR

Inhibition de la traduction de HIF-1α

(Wan et al. 2006, Hudes et al. 2007)

Everolimus Inhibition de mTOR

Inhibition de la traduction de HIF-1α

(Motzer et al. 2008, Baselga et al. 2012)

Rapamycine Inhibition de mTOR

Inhibition de la traduction de HIF-1α

(Majumder et al. 2004)

2-methoxyoestradiol Déstabilisation des microtubules Inhibition de la traduction de HIF-1α

(Mabjeesh et al. 2003)

Digoxine Glycoside cardiotonique

Inhibition de la traduction de HIF-1α

(Zhang et al. 2008b, Lin et al. 2014a)

PX-478 Inhibition de la transcription et de la traduction de HIF-1α (Koh et al. 2008b, Zhao et al.

2015)

PX-12 Inhibition de la thiorédoxine 1

Inhibition de la traduction de HIF-1α

Molécule Mécanisme(s) d’action Référence

Inhibiteurs de la traduction de HIF-α (suite)

Pleurotine Inhibition de la thiorédoxine 1

Inhibition de la traduction de HIF-1α

(Welsh et al. 2003)

Glycéolline I, II, III Inhibition de la voie PI3K/Akt/mTOR Inhibition de la traduction de HIF-1α

(Lee et al. 2015a)

Cetuximab Blocage de l’EGFR

Inhibition de la traduction de HIF-1α

(Luwor et al. 2005)

Erlotinib, Gefitinib Inhibition de l’EGFR

Inhibition de la traduction de HIF-1α

(Pore et al. 2006)

Bortezomib Inhibiteur du protéasome

Inhibition de la voie PI3K/Akt/mTOR Inhibition de l’expression de HIF-1α

(Befani et al. 2012) Inhibition de la stabilisation ou de l’accumulation de HIF-α

PX-478 Inhibition de la déubiquitinylation de HIF-1α (Koh et al. 2008b, Zhao et al.

2015)

Glycéolline I, II, III Inhibition de la HSP90

Inhibition de la stabilité de HIF-1α

(Zhao et al. 2015)

YC-1 Inhibition de l’accumulation de HIF-1α (Chun et al. 2001, Sun et al.

2007, Carroll et al. 2013)

Galdanamycine Inhibition de la HSP90

Ubiquitinylation de HIF-1α

(Hur et al. 2002, Isaacs et al. 2002, Koga et al. 2009)

17-AAG (analogue de

la galdanamycine) Inhibition de la HSP90 Ubiquitinylation de HIF-1α

(Neckers and Neckers 2002, Neckers 2006)

LAQ824 Inhibition des HDAC

Augmentation de la dégradation protéasomale de HIF-1α

(Qian et al. 2006)

Ascorbate,