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Une stratégie portuaire intégrée de la lutte contre la criminalité

République de Djibout

Titre 1 : La place de Djibouti dans la corne de l’Afrique A Contexte géostratégique des ports de Djibout

B. Une stratégie portuaire intégrée de la lutte contre la criminalité

La sécurité et la sûreté de la navigation et du port de Djibouti représentent non seulement une obligation régalienne de l’État mais celle-ci revêt une importance capitale lorsque l’on sait la part du port de Djibouti dans l’économie nationale. Le gouvernement de Djibouti en tant qu’acteur du droit international est l’autorité désignée pour ratifier des conventions internationales qui offriront un cadre de prévention et de protection des infrastructures du port.

À ce titre, trois chantiers majeurs nécessitant une intervention directe de l’État peuvent être mentionnés. Il s’agit notamment de :

· Une refonte de la législation maritime : il existe un impératif de réformer complètement le Code des affaires maritimes en y incluant les dispositions des conventions auxquelles la République de Djibouti devrait considérer l’adhésion. Il s’agit de la convention SAR, convention Tonnage 89, la convention STCW 78/95 (Standards of Training, Certification and Watchkeeping : normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille) et le Mémorandum d’entente de l’océan Indien. D’un point de vue opérationnel, il y a une nécessité de mettre en place un centre de coordination opérationnelle qui permettra de simplifier et rationaliser l’action des entités publiques concernées y compris le port de Djibouti.

· Un renforcement de la police maritime et de la sécurité en mer : des efforts doivent être déployés afin de consolider les stratégies de lutte contre les trafics illégaux (drogue, êtres humains, etc.), les mécanismes de recherche et de sauvetage en mer et enfin la surveillance des côtes en particulier contre les différents crimes cités précédemment et les crimes spécifiques comme la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN).

· L’édification d’une véritable structure institutionnelle fondée notamment sur la conduite d’études spécifiques comme la régulation des opérateurs privés au port de Djibouti et l’étude sur l’harmonisation et les indicateurs de performances portuaires. Il s’agit également d’une prospection commerciale afin d’y déceler les opportunités de développement commercial sur des délais à court et long terme. La formation des autorités publiques concernées constitue un volet essentiel. Ces formations à destination des officiers de la Marine Marchande, officiers des Affaires Maritimes, juristes et inspecteurs maritimes visent une meilleure compréhension des exigences et attentes règlementaires. À celles- ci s’ajoute une formation sur la protection de l’environnement maritime. · Une collaboration avec les organisations internationales : une coopération

accrue avec les organisations internationales permet, à travers notamment leur programme d’assistance technique, de mener des ajustements structurels de manière à se conformer aux standards internationaux.

Le port de Djibouti est ainsi assujetti aux normes et règlements internationaux en vigueur et a, de ce fait, entrepris un certain nombre de mesures comme imposer à tous les services commerciaux du port de se conformer au code ISPS et aux lois et règlements nationaux, notamment le volet ayant trait à la coopération et au partage d’informations entre les différentes entités privées et publiques opérant dans l’enceinte du port (douanes, garde-côtes, affaires maritimes, marine nationale et justice). À ce propos, le code ISPS définit bien cette coopération : « le présent code a pour objet

d’établir un cadre international dans lequel les gouvernements contractants, les organismes publics, les administrations locales et les secteurs maritime et portuaire puissent coopérer pour détecter et évaluer les menaces contre la sûreté et pour prendre des mesures de sauvegarde contre les incidents de sûreté ». Par ailleurs, le

code considère que la coopération entre les gouvernements contractants est primordiale puisque la sûreté est une activité de gestion qui entre dans la prérogative des missions de l’État. Cette coopération internationale entre les États contractants devrait également permettre d’établir une liste noire des pays et des armateurs qui ne font aucun effort pour promouvoir l’ISPS, et ainsi les écarter progressivement du commerce maritime mondial. Dans la même foulée, la sécurité du port de Djibouti est assurée par un ensemble d’acteurs chacun compétent dans son périmètre :

- Port Secure Djibouti (PSD), société privée en charge des accès et de la surveillance générale du port ;

- La brigade de police judiciaire, responsable de la police sur la partie terrestre, qui dresse les procès-verbaux à partir des relevés d’infractions établis par le Port Secure Djibouti ;

- La Marine nationale djiboutienne, chargée de la surveillance du plan d’eau et de la protection des bâtiments militaires en escale au quai 9 ;

- La brigade des affaires maritimes des garde-côtes, chargée de la surveillance du plan d’eau, en alternance avec la Marine nationale djiboutienne.

La multiplication des intervenants nécessite une bonne coordination autour du Commandant du port. Ainsi, la coopération entre différents acteurs intervenant au sein du port, à savoir les douanes djiboutiennes, la police nationale, la Direction générale de la sécurité nationale et le cabinet du parquet de Djibouti, ont permis le démantèlement d’un réseau de trafiquants de cocaïne dans le port de Djibouti. En conséquence et pour limiter les risques, le port sécurisé de Djibouti, choisi par les lignes régulières internationales pour faire le transbordement régional et le transport maritime à courte distance (TMCD), permet de connecter au reste du monde les pays en situation d’instabilité (guerre civile) et en insécurité totale (piraterie, terrorisme), situés de part et d’autre du détroit de Bab el-Mandeb, peuplés de plus de 30 millions d’habitants28. La finalité est de limiter les risques pour les navires-mères et leurs

cargaisons qui représentent des enjeux financiers considérables pour les armateurs desservant les ports régionaux les plus sécurisés qui sont en l’occurrence les ports de Djibouti.

28) Une population estimée en ajoutant la population répertoriée de Djibouti et du Yémen, les deux seuls pays côtiers du détroit de Bab el-Mandeb, en 2016.

Tableau 2 : Dispositifs sécuritaires régionaux du maillon portuaire de Djibouti

29) Barkadleh H., « La sécurisation du détroit de Bab el-Mandeb », Le transport maritime à courte distance : mythe ou avenir du transport régional, Actes du colloque international DEVPORT, mai 2016, p.185.

Maillon portuaire de Djibouti29 Etat : Administrations et pouvoirs Publics Ports et entreprises associées : Ports, Zones Franches, Prestataires privés logistiques, etc… Année 2008 2009 2012 2013 2006 2009 2009 Dispositifs

Alliance Militaire Européenne : Opération Atalante, point d’appui à Djibouti.

Code de conduite de Djibouti : Représentant 21 pays (dont 11 régionaux)

Mission civile de l’Union Européenne : EUCAP NESTOR, quartier général à Djibouti. Centre de formation et la lutte contre la piraterie maritime : Centre Régional de Formation Maritime (CRFM), établi à Djibouti

Privatisation de la sûreté des zones portuaires de Djibouti : Société « Port Secure Djibouti ». Certification pour la sécurisation des installations portuaires de Djibouti : Code ISPS

(International Ship and Ports Security)

Certification pour la sécurisation des marchandises en transit à Djibouti : Supply Chain Security Management (ISO 28000 : 2007)

Objectifs

Sécurisation maritime régionale, lutte contre la piraterie au large de la Somalie.

Renforcement juridique de lutte contre les actes criminels dans le golf d’Aden. Assistance à l’amélioration continue de la sécurité maritime régionale.

Prévention contre la piraterie maritime régionale (Somalie).

Sécurisation optimale des zones portuaires.

Garantir la sûreté portuaire.

Management de la sûreté de la chaîne

Conclusion :

Face à cette situation actuellement incontrôlable, il convient de mettre l’accent sur deux séries de mesures qui constituent à mon avis une solution efficace et fiable dans la lutte contre la piraterie et les actes de malveillance : il s’agit d’une part d’améliorer encore davantage les solutions actuelles (le volet opérationnel), c’est-à- dire en engageant aux larges des côtes somaliennes des navires de guerre équipés d’hélicoptères (ce qui n’est pas le cas actuellement pour tous les navires), et d’autre part de déployer des mesures nouvelles. Ces mesures nouvelles consistent à renforcer la coopération régionale. Le code de conduite de Djibouti de 2009 a ouvert la voie à une coopération régionale plus spécifique dans la lutte contre la piraterie30.

Pour mener efficacement la lutte contre la piraterie, les États de la région ont décidé de créer à Djibouti le Centre régional de formation maritime destiné prioritairement aux agents en charge de la lutte contre la piraterie (Administration des affaires maritimes, la Marine nationale, la Garde-côte, etc.). Ce centre met ainsi en œuvre la formation des garde-côtes de tous les États de la région pour enrayer le fléau de la piraterie.

Sont ainsi présentés les éléments portant sur une approche globale de la problématique somalienne, la sécurité maritime et plus particulièrement la lutte contre la piraterie et le vol à main armée en mer. Liant les initiatives régionales aux engagements internationaux, cette approche permettra à long terme de sécuriser cet axe maritime stratégique qu’est le golfe d’Aden pour le commerce mondial et régional. À ce jour, seule l’Union européenne semble être véritablement déterminée dans cette voie. Les ambitions de développement régional, voire continental et international, de la République de Djibouti vont irrémédiablement de pair avec un accroissement des risques de sécurité et de sûreté pour le pays en général et le trafic maritime et les infrastructures portuaires en particulier. Les enjeux stratégiques que représente ce petit pays pour les grandes puissances, à l’instar des États-Unis, du Japon, de la Chine ou encore récemment de l’Arabie Saoudite qui ont ouvert une base militaire, constituent tout autant d’impératifs pour le gouvernement de ratifier et d’élaborer un cadre dans lequel les services portuaires pourront exercer leur autorité. Toutefois, les exigences sécuritaires représentent une charge financière, humaine et institutionnelle non négligeable et ce d’autant que le pays est situé dans une zone à haut risque. Une stratégie à long terme devrait prévoir une collaboration avec les centres de formation (universités, écoles spécialisées, etc.) afin de doter le pays de personnes compétentes sur ces questions. De plus, une réflexion devrait être

30) Ali Miganeh H., « Stratégie logistique et de transport au service du développement en Afrique », L’Harmattan, 2015, p. 149.

engagée avec les décideurs de manière à planifier un accroissement des besoins opérationnels. C’est sans aucun doute le prix à payer pour assurer un développement durable pour le pays et sa population.

Bibliographie :

André Vigarié, « Les grands ports de commerce de la Seine au Rhin » p. 44. Éric Foulquié et Christine Lamberts (dir.), « Gouverner les ports de commerce à l’heure libérale : regards sur les pays d’Europe du Sud », CNRS Ed., Paris, 2014.

Bourgain A., Brot J. et Gérardin H., « L’Afrique et son intégration internationale, quelles perspectives ? », édit. Karthala 2014, p. 3.

Brian S., « Sécurisation et facilitation de la chaîne logistique globale : les impacts macro et micro-économiques de la loi américaine 100 % scanning », sous la direction de Frédéric CARLUER, avec la collaboration de Yann ALIX et Olivier JOLY, Étude commanditée par l’Organisation mondiale des douanes (OMD) à l’Université du Havre, p.15.

Charret A., « AL-SHABAAB : Au cœur du terrorisme somalien », Collection Grandes Ondes, Éditions de l’Absence, Paris 2016, p. 7.

Daher Djama A., Le XXIème siècle à l’assaut du droit de la piraterie : le cas de la Somalie. Droit. Université Nice Sophia Antipolis, 2015. Français. <NNT : 2015NICE0029>. <tel- 01239367>, p. 9.

Gascon A., « Djibouti : Singapour sur mer Rouge. Un confetti d’Empire futur dragon africain », Cairn.Info,Outre-Terre 2005/2 (no 11), p. 451-466.

http://www.cairn.info/revue-outre-terre1-2005-2-page-451.htm

Nour Ayeh M., article « Djibouti : les marges extrêmes du désert à la recherche d’un destin oriental », janvier - juin 2011, p. 237-251 http://insaniyat.revues.org/ 12740

Saïd Chiré A., Tamru B., « Les migrantes de retour dans la Corne de l’Afrique. Vers une transformation sociale des espaces émetteurs : le cas éthiopien », EchoGéo 37 : juillet 2016/septembre 2016. https://echogeo.revues.org/14742

CHAPTER 3

Enhancing Maritime Security in Mexico: