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Statuer en classant : la rareté des qualifications directes

162 Conclusion de la Section 2 Le régime juridique appliqué aux embryons et aux cadavres ne permet pas de conclure définitivement, par un procédé inductif, sur la qualification

Section 1  Statuer en classant : la rareté des qualifications directes

Section 2 Statuer sans nommer : la diversité des qualifications indirectes

Section 1 

Statuer en classant : la rareté des qualifications directes

171.  Les décisions appliquant explicitement des qualifications de chose ou de personne

avant la naissance et après la mort sont rares. On en relève à peine une vingtaine sur l’ensemble du corpus, même en donnant un champ très large à la « qualification explicite », et en intégrant toutes les déclinaisons possibles du terme « personne » : « personne physique », « personnalité civile », « sujet de droit » mais aussi « personne humaine »679. La disparition de la personnalité

après la mort semble être la question la moins débattue (§1), là où le statut de l’embryon crée une polarisation plus importante des positions (§2).

§ 1 Les qualifications directes du mort : des positions timides § 2 Les qualifications directes de l’embryon : des positions tranchées

§1. Les qualifications directes du mort : des positions timides

172.  Sur une dizaine de décisions opérant une qualification directe de la situation juridique

s’ouvrant avec la mort, la plupart plaident pour la disparition de la personnalité juridique (A). Les quelques décisions semblant évoquer une survie de la personnalité sont cependant marquées d’une certaine ambiguïté (B).

A. La disparition de la personnalité avec la mort : qualifications directes négatives B. La survie de la personnalité après la mort : qualifications directes ambiguës

678

V. B. FRYDMAN à propos de la pensée de Ch. PERELMAN : « le sens clair est le sens non discuté » (Le sens des lois. Histoire de l’interprétation et de la raison juridique, 3e éd., Bruylant, Bruxelles, 2011, p. 598).

679

La notion de personne humaine sera considérée comme une qualification explicite lorsqu’elle est manifestement prise comme synonyme de « personne juridique ». Nous reviendrons plus spécifiquement sur les cas où la juridiction opère manifestement une distinction entre personne humaine (ou être humain) et personne juridique infra n° 230 et s.

A.  La disparition de la personnalité avec la mort : qualifications directes négatives

173.  La disparition de la personnalité juridique après la mort a été affirmée autant à propos

de la qualification des corps eux-mêmes (1) qu’à propos de la survie des droits de la personne décédée (2).

1) La réité du cadavre

2) La disparition des droits de la personne

1)  La réité du cadavre

174.  Deux décisions. Seules deux décisions du corpus, simples ordonnances de TGI680,

qualifient explicitement le cadavre. La première affaire concerne la fameuse exposition Our Body681. L’ordonnance qui suspend cette manifestation est remarquable à plusieurs titres. Tout

d’abord, elle fait partie des très rares décisions qui utilisent le terme « cadavre » pour désigner le corps mort682, mais surtout, elle est l’unique cas dans lequel on trouvera le terme de « chose »

employé comme qualificatif. Et encore, la juridiction utilise une formule détournée par laquelle elle affirme que « l'exposition épuise le mouvement artistique dans lequel elle prétend se situer en substituant à la représentation de la chose la chose elle-même ». Le juge des référés va d’ailleurs tirer les conséquences de cette qualification en appliquant à ces corps le régime des choses puisqu’il en ordonnera le séquestre. En dehors de cette décision, les qualifications relevées concernant le cadavre seront toujours négatives : on affirmera avant tout ce que le cadavre n’est pas. C’est le cas de la seconde affaire.

Des restes mortuaires ayant été malencontreusement dispersés, le Tribunal de Lille683,

se fondant sur l’article 16-2 du Code civil, qualifie le cadavre de « corps humain » et précise que « les débris formant le corps désagrégé sont respectables, quand bien même ces débris n’abriteraient plus aucune personne » : la personnalité juridique a disparu, seul demeure le corps-chose sur lequel s’exerce d’ailleurs un « droit de copropriété familial ».

680

TGI Paris, ord. réf., 21 avr. 2009 : D. 2009, p. 1192, note X. LABBÉE ; Dr. fam. 2009, n° 5, alerte 37, focus M. LAMARCHE ; AJDA 2009. 797 ; JCP G. 2009, Actu. 225.

681

Concernant l’exposition de cadavres plastinés. Sur les détails de cette affaire v. aussi infra n° 698 et s.

682

V. aussi : C. d'ass. Vienne, 28 mai 1836 : S. 1836.I.546 ; TGI Arras, 27 oct. 1998 : D. 1999.511, note X. LABBÉE. La décision d’appel sur cette ordonnance utilisera le terme de « cadavres d’êtres humains » : CA Paris, 30 avr. 2009 : JCP G. 2009.12, note Gr. LOISEAU ; Dr. fam. 2009, n° 5, alerte 37, focus M. LAMARCHE ; D. 2009, jur., 2019, note B. EDELMAN ; D. 2010, pan., 604, obs. J.-Chr. GALLOUX et H. GAUMONT-PRAT ; Constitutions 2010. 135, obs. X. BIOY ; LPA 23 nov. 2009, X. DAVERAT, Gaz Pal. 2009, n° 148, p. 2, note E. PIERROUX.

683

175.  Remarque sur le langage. Il convient de souligner la particularité de la formulation

proposée par le Tribunal. Non seulement le terme « chose » n’est pas utilisé, mais le juge use du conditionnel pour évoquer la disparition de la personne, comme si l’affirmation était de toute façon surabondante. Ce constat se retrouvera à plusieurs reprises dans l’analyse du corpus : les juridictions n’usent que très peu d’affirmations claires : le langage est policé et permet des lectures multiples.

2)  La disparition des droits de la personne

176.  Le problème de la perpétuation de la personnalité après la mort a donné lieu à deux

décisions explicites, très anciennes et émanant de juridictions de première instance qui ont traversé le temps grâce à des faits particuliers qui font d’elles de parfaites décisions-illustrations, faciles à utiliser en doctrine en raison de leur caractère anecdotique684.

En dehors de ces deux décisions anciennes, la question a ressurgi récemment à la fois au plan national et supranational.

177.  En 1993, la Cour d’appel de Paris685, à propos de l’applicabilité post mortem du droit

à la présomption d’innocence affirme ainsi que l’article 9-1 du Code civil

« confère le droit au respect de la présomption d'innocence, uniquement à la personne vivante concernée, seule titulaire de droits ».

La formule ne prête pas à confusion : a contrario les personnes mortes ne sont pas titulaires de droits686, ce ne sont pas des personnes, du moins pas au regard de l’application du principe de

présomption d’innocence687.

La Cour européenne des droits de l’Homme, saisie de l’applicabilité de l’article 3 de la Convention à des mutilations sur des cadavres est plus claire encore. Elle affirme :

684

La première est un jugement du Tribunal civil de Pont-l’Evêque (Trib. civ. Pont-l'Evêque, 17 janv. 1878 : S. 1897.1.433) concernant un cas de désaveu de paternité dirigé contre un enfant décédé. Manifestement agacé par une action vaine et perturbatrice de l’ordre social, le Tribunal, avec fermeté et élégance, déclare l’action irrecevable en remarquant que le demandeur « persiste à s'attaquer à la personne même de l'enfant mort et non représenté, c'est-à-dire juridiquement parlant, au néant et combat sans adversaire ». La personne a disparu, note explicitement la juridiction, l’action ne peut se poursuivre. La seconde est une décision du Tribunal civil d’Orange (Trib civ. Orange, 30 déc. 1887 : D. 1889.3.63) restée dans les annales tant son sujet est peu banal : le legs consenti par une personne à son propre cadavre, afin d’entretenir sa propriété transformée en mausolée. La juridiction dénie toute validité à la stipulation, considérant que « le destinataire du legs est un sujet dépourvu d'individualité réelle ou de personnalité civile ».

685

CA Paris, 21 sept. 1993 : D. 1993, IR, 224 ; RTD civ. 1994, p. 75.

686

Comp. CE, 27 avr. 2011, n° 314577 : Rec. Lebon. Dans cette décision, le Conseil affirme « le droit d'agir pour le respect de la vie privée s'éteint au décès de la personne concernée, seule titulaire de ce droit ». La formule est différente puisque la juridiction n’affirme pas alors que l’ensemble des droits disparait au décès.

687

Pour une position contraire de la Cour européenne des droits de l’Homme v. Cour EDH, 12 avr. 2012, Lagardère c. France, req. n° 18851/07 (JCP G. 2012, n° 724, obs. A. DETHOMAS), not. § 88. V. aussi infra nbp 846 et nbp 918.

« la Cour n'a jamais appliqué l'article 3 de la Convention à l'égard d'une dépouille ayant subi des profanations. La présente chambre ne le fera pas non plus, estimant que la qualité d'être humain s'éteint au décès et que, de ce fait, la prohibition des mauvais traitements ne s'applique plus à des cadavres »688

L’« être humain » semble ici pris comme synonyme de « personne » et la Cour refuse explicitement l’application post mortem du régime de la personne juridique.

178.  Remarque sur le langage. On remarque une fois encore que ces qualifications

« directes » restent négatives : nulle trace ici du terme de « chose ». Cependant, il est moins évident de constater un évitement du terme par les juridictions : contrairement au cas où la décision porte sur la matière même du cadavre, où le terme de chose peut être utilement employé dans le raisonnement, il suffisait, pour trancher ces affaires, de constater l’absence de sujet de droit, sans se prononcer sur le statut du corps lui-même. Curieusement, cette réserve linguistique se constate aussi lorsqu’à l’inverse les juges optent pour une certaine survie de la personnalité.

B.  La survie de la personnalité après la mort : qualifications directes ambiguës

179.  L’affirmation directe d’une personnalité post mortem a été proposée par deux arrêts

de juridictions supérieures : une ancienne décision de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 24 mai 1860689 et un arrêt récent du Conseil d’État du 29 juillet 2002690. Cependant,

à l’inverse des décisions précédentes si les mots sont clairs l’application des régimes jette un doute sur le mécanisme juridique effectivement appliqué.

180.  Ambiguïté des formulations. À la question de savoir si la diffamation publique

pouvait s’appliquer post mortem, la chambre criminelle répond clairement en 1860 : « Attendu que le mot personne […] comprend les vivants et les morts ». La qualification semble claire dans un premier temps mais elle devient plus ambiguë dans la suite de la décision.

La Cour affirme en effet que l’action intentée par l’héritier est recevable dans la mesure où la mémoire du mort – et non le droit à l’honneur – est entrée dans le patrimoine familial, patrimoine que les héritiers ont le pouvoir de protéger. Cette affirmation semble assimiler l’action à la défense d’un droit réel transmissible mais la Cour affirme ensuite que l’héritier agit ici en tant que « représentant » du défunt ce qui ramène le débat dans le domaine du droit de la

688

Cour EDH, 27 fév. 2007, Akpinar et Altun c. Turquie, req. n° 56760/00, § 80.

689

Cass. crim., 24 mai 1860 : D. 1860, 1, 201, note Ch. ROYER.

690

personnalité691. Cette décision est un premier aperçu des difficultés rencontrées dans l’analyse

de notre corpus : rares sont les décisions univoques.

Un problème similaire se rencontre dans la décision du Conseil d’État et dans le jugement du Tribunal administratif de Nantes692 qui, statuant quelques semaines plus tard sur la

même question, reprend son considérant. Les décisions sont promises à la postérité puisqu’elles concernent la légalité de la pratique de la cryogénisation. Les deux juridictions reconnaissent, dans leurs décisions

« le droit de toute personne d'avoir une sépulture et de régler librement, directement ou par l'intermédiaire de ses ayants-droit, les conditions de ses funérailles ».

Certes, le mot « personne » est employé. Certes, l’idée d’un droit existant avant la mort, mais dont l’exercice serait postérieur au décès, laisse penser que les juridictions sont ici sensibles à l’idée d’une prolongation post mortem de la personnalité. Pour autant, la formulation suscite le malaise : l’évocation d’un droit qui pourrait être exercé « par l’intermédiaire des ayants-droit » renvoie à deux hypothèses.

181.  Soit l’on considère qu’il existe là une véritable prolongation de la personnalité du

défunt et il est possible d’affirmer que les droits de l’ancienne personne sont exercés par ses ayants-droit. Cela pose une difficulté puisque le principe demeure que les droits personnels s’éteignent à la mort de la personne693. Soit l’on affirme que la personnalité disparaît

effectivement avec la mort mais l’on admet l’exercice de certaines prérogatives par les ayants- droit pour des raisons pratiques. Cependant, dans le cas qui nous occupe, on voit mal en quoi il serait nécessaire de passer par l’affirmation d’un droit du défunt qui se prolongerait après la mort : on pourrait tout aussi bien considérer que les ayants-droit ont un droit personnel à voir leur proche accéder à la sépulture qu’il ou elle aurait souhaité694.

Les qualifications ici proposées ne disent donc rien de définitif sur la position des juridictions. La simple utilisation du mot « personne » pouvant renvoyer à des conceptions théoriques variées. Les juridictions prennent en revanche des positions plus définitives dès lors qu’elles choisissent de qualifier explicitement les embryons.

691

V. cependant, pour une assimilation des droits de la personnalité à des droits réels sur les attributs de la personnalité v. Fr. ZENATI-CASTAING et Th. REVET, Manuel de droit des personnes, 1re éd., coll. Droit fondamental, PUF, 2006, n° 321 et s.

692

TA Nantes, 5 sept. 2002 : JCP G. 2003.II.10052, note S. DOUAY.

693

Gr. LOISEAU, Le droit des personnes, Ellipses, 2016, n° 188. Le droit moral constitue cependant une exception connue puisque malgré son caractère de droit de la personnalité il est perpétuel et se transmet ab intestat v. P.-Y. GAUTIER, Propriété littéraire et artistique, PUF, 9e éd., 2015, n° 198.

694

§2. Les qualifications directes de l’embryon : des positions tranchées

182.  L’essentiel des décisions affirmant une qualification explicite de l’embryon ont été

prises à partir des années 1980, dans une période où l’affrontement idéologique entre partisans et adversaires de l’avortement se déplace du strict champ politique à celui du contentieux judiciaire. La pérennisation de l’autorisation de l’IVG en 1979695 conduit en effet à ce que le

débat sur la protection juridique de l’embryon se déplace vers d’autres contentieux. Certaines juridictions du fond ont alors pris des positions affirmées : si le refus explicite de la qualification de personne reste le plus courant (A), certaines décisions inverses ont eu des retentissements importants (B).

A. Le refus de la qualification de personne : affirmations négatives B. La qualification explicite de personne : affirmation de l’existence d’un enfant

A.  Le refus de la qualification de personne : affirmations négatives

183.  On recense une dizaine de décisions affirmant explicitement que l’embryon n’est pas

une personne. Quatre concernent l’application anténatale de l’homicide involontaire696, trois des

cas d’entrave à IVG697, deux des contentieux portant sur le statut d’embryons in vitro698.

184.  Le refus net de la qualification de personne. Les attendus relevés dans ces

décisions montrent que les juridictions tiennent à affirmer avec force que la qualification de « personne » ne peut s’appliquer à un embryon. On lit par exemple que

« la qualité de personne n'est reconnue ni au fœtus ni à l'embryon »699 ; « le droit à la vie n’est pas garanti au fœtus ou à l’embryon humain qui n’a pas la qualité́ de personne humaine mais seulement de “personne humaine en devenir” »700 ;

« un tel être n'est pas juridiquement une personne »701 ;

695

L. n° 79-1204 du 31 déc. 1979 relative à l'interruption volontaire de la grossesse : JORF du 1er janv. 1980, p. 3.

696

Trib. corr. Fontainebleau, 25 avr. 1947 : D. 1947.312. Trib. corr. Lyon, 3 juin 1996 : cité par CA Lyon, 13 mars 1997, D. 1997.557 note E. SERVERIN ; JCP G. 1997.II.22955, note FAURE ; Dr. fam. sept. 1997, p. 5, note P. MURAT. CA Metz, 3 sept. 1998 : JCP G. 2000.II.10231.

697

TGI Châlon s/Saône, 3 juill. 1995 : Dictionnaire permanent bioéthique, p. 9328. CA Versailles, 8 mars 1996 : cité dans Cass. crim., 5 mai 1997. CA Caen, 11 mars 1996 : cité dans Cass crim., 2 avr. 1997 (Gaz. Pal. 1997, chron. Crim., p. 161, note J.-P. DOUCET).

698

TGI Rennes, 30 juin 1993 : JCP G. 1994.I.22250, note Cl. NEIRINCK ; RTD civ. 1996, p. 579, obs. J. HAUSER. TA Amiens, 9 mars 2004 : JCP G. 2005.II.10003, note I. CORPART ; RJPF, juill.-août 2004, p. 13, note P. ÉGÉA ; AJDA, 2004, p. 1546, note St. HENNETTE-VAUCHEZ ; D. 2004, p. 1051, note X. LABBÉE.

699

TGI Châlon s/Saône, 3 juillet 1995, préc.

700

Cass crim., 5 nov.1997, préc.

701

« le fœtus n’[est] pas une personne humaine ou autrui »702 ;

« pour qu'il y ait "personne", il faut qu'il y ait un être vivant, c'est à dire venu au monde et non encore décédé »703;

« aucun principe ne rend l’embryon congelé titulaire de droits »704

Certaines décisions utilisent des formulations un peu moins explicites mais qui ne prêtent pas à confusion. La Cour d’appel de Versailles affirme ainsi que l’embryon n’a pas la qualité de « personne humaine », le TGI de Rennes qu’il n’est « pas un sujet de droit par rapport à ses géniteurs »705. Nier la personnalité de l’embryon conduit alors à lui refuser la protection

afférente à cette qualification706.

185.  Remarque sur le langage. Bien que les qualifications ici retenues soient très claires,

elles restent des qualifications négatives. Le terme de « chose » n’est pas employé, seul est affirmé le statut de « non-personne ». On remarque en outre une « technicisation » de la langue effectuée par des termes apparemment scientifiques707. Les juges utilisent ainsi les mots

« embryon »708 et « fœtus »709 mais aussi parfois d’ « œuf fécondé »710, « ovocyte humain fécondé »711 ou « être en gestation »712, voire « être humain »713. Ce vocabulaire technique,

approprié à l’idée d’une négation de la personnalité, tranche avec le discours empreint d’émotion qui est celui des juridictions en faveur d’une personnification de l’embryon.

702

Trib. corr. Lyon, 3 juin 1996 : cité par CA Lyon, 13 mars 1997, D. 1997.557, note E. SERVERIN ; JCP G. 1997.II.22955, note FAURE ; Dr. fam. sept. 1997, p. 5, note P. MURAT.

703

CA Metz, 3 sept. 1998, préc.

704

CA Toulouse, 18 avr. 1994 : JCP G. 1995.II.22472, note Cl. NEIRINCK.

705

Bien entendu, il serait toujours possible de considérer que cette affirmation sous-entend que si l’embryon n’est pas un sujet de droit « par rapport à ses géniteurs » il pourrait l’être à l’égard d’autres personnes. Dans ce sens v. J.-Chr. HONLET, « Adaptation et résistance de catégories substantielles de droit privé aux sciences de la vie », in Le droit saisi par la biologie. Les juristes au laboratoire, C. LABRUSSE-RIOU (dir.), LGDJ, 1996, p. 261. Mais le régime appliqué par la juridiction ne laisse pas place à cette interprétation.

706

Une exception notable, l’affaire jugée d’abord par le Trib. corr. Colmar, 11 mai 1950 (Gaz. Pal. 1950-2, jur., p. 27) puis par la CA Colmar, 31 juill. 1950 (Gaz. Pal. 1950-2.jur. p.189) : dans cette affaire d’avortement pratiqué à l’étranger c’est au contraire le refus de la qualification de personne qui permet la protection. En effet, si l’avortement est qualifié d’atteinte « aux particuliers », ce qu’avait retenu le Tribunal, il ne peut être poursuivi en France que s’il l’est aussi par les autorités étrangères, ce qui n’était pas le cas en l’espèce. La Cour d’appel qualifie donc l’infraction d’atteinte « aux intérêts de la Nation » ce qui lui permettait en théorie de condamner les prévenus. La Cour constatera in fine que l’infraction n’était pas constituée.

707

Pour une évolution parallèle dans les textes v. supra n° 876.

708

TGI Rennes, 30 juin 1993, préc. ; CA Toulouse, 18 avr. 1994 : JCP G. 1995.II.22472, note Cl. NEIRINCK ; TGI Châlon s/Saône, 3 juill. 1995, préc. ; CA Caen, 11 mars 1996, préc.

709

TGI Châlon s/Saône, 3 juill. 1995, préc. ; Trib. corr. Lyon, 3 juin 1996 : cité par CA Lyon, 13 mars 1997, D. 1997.557 note E. SERVERIN ; JCP G. 1997.II.22955, note FAURE ; Dr. fam. sept. 1997, p. 5, note P. MURAT.

710

TGI Rennes, 30 juin 1993, préc.

711

TA Amiens, 9 mars 2004, préc.

712

TGI Rennes, 30 juin 1993, préc.

713

B.  La qualification directe de personne : affirmation de l’existence d’un enfant

186.  Une prise de position claire dans un contexte de controverses. Si cinq décisions

peuvent être lues comme affirmant explicitement l’existence d’une personnalité de l’embryon714, seules les trois plus récentes, de 1987 et 2000, retiennent l’attention715. Elles

portent sur deux sujets alors d’une brûlante actualité : homicide involontaire et encadrement de l’insémination avec tiers donneur. Toutes trois utilisent le même terme de « personne humaine » afin de qualifier l’embryon. Les juridictions affirment alors des positions politiques très claires. Le lien entre la décision et une position défavorable à l’avortement est ainsi tout à fait évident dans la décision de la Cour d’appel de Toulouse du 21 septembre 1987 :

« attendu que le droit essentiel qu'il [appartient au CECOS] de préserver est

celui de l'enfant à naître qui, dès sa conception, c'est-à-dire dès la formation

de l'embryon, possède pleinement, en virtualité tout au moins, tous les attributs de la personne humaine. Pareil droit, juridiquement protégé en dépit de l'atteinte que le législateur a estimé opportun de lui porter par la législation sur l'avortement, ne pouvant être mis en balance avec un prétendu "droit" des futurs père et mère à l'enfant »716.

Ici point de qualification négative : la qualité de personne est clairement affirmée. L’association de l’expression « personne humaine » à l’affirmation d’un droit à naître semble indiquer que ce terme est pris comme synonyme de « personne juridique ». Les juridictions n’ont nullement