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Aggloméré référence, fraction 16mm

3.2.3 Spectroscopie Mössbauer

La spectroscopie Mössbauer est une technique d’analyse de matériaux basée sur l’ab-sorption sans recul de photons gamma par un noyau lié dans un réseau solide. Cette effet a été découvert par R. Mössbauer en 1958 [3.35, 3.36]. Pour comprendre cet effet, il faut considérer l’émission de rayons γ par un noyau libre. Si ce noyau libre permet la transition de l’état excité d’énergie Ee vers l’état fondamental d’énergie Ef, il subit alors un phénomène de recul.

L’énergie de ce rayonnement γ émis s’écrit alors :

Eγ0 = E0− ER (3.11)

Avec E0 – énergie de la transition nucléaire, E0 = Ee – Ef

Et ER– énergie de recul du noyau après émission du rayonnement γ, exprimée par [3.35] :

ER= (E 0 γ)2 2M c2(E0) 2 2M c2 (3.12) M masse du noyau c vitesse de la lumière

Dans un solide constitué d’atomes liés, le noyau résonnant est bloqué dans le réseau et son énergie de recul est alors transmise au cristal tout entier. Comme la masse du cristal est bien plus grande que la masse du noyau (dans un rapport de l’ordre du nombre d’Avogadro), l’énergie de recul du noyau est négligeable.

ERMöss= E

0

γ

2

2Mcristalc2 ≈ 0 (3.13)

Alors, l’énergie des rayonnements γ émis est presque identique que celle de la transition nucléaire. La figure 3.22 montre le principe de la spectrométrie Mössbauer. Les rayons γ émis par la source S sont enregistrés par un détecteur après avoir traversé l’absorbeur. Pour étudier le spectre d’énergie du noyau absorbeur, la source radioactive contenant l’isotope Mössbauer dans un état excité (par exemple 57Fe) se déplace à accélération constante avec une vitesse v de quelques mm.s-1. L’énergie du rayon gamma est donc changée par l’effet Doppler. Eγ = E0  1 + v c  (3.14)

On peut alors directement obtenir l’intensité des photons transmis après absorption en fonction de la vitesse de déplacement relatif source-échantillon. Le spectre Mössbauer se présente donc sous la forme de pics d’absorption extrêmement étroits, et ayant le profil

Lorentzien [3.35, 3.36] : N (Eγ) = N0. Γ 2 !2 (Eγ− E0)2+ Γ 2 !2 (3.15)

N0 nombre des photons transmis à la position d’énergie E0, E0 = Ee − Ef

Ee énergie de l’état excité, Ef énergie de l’état fondamental,

Γ largeur à mi-hauteur de pic, est reliée à la durée de vie τN de l’état excité, intervenant dans la transition nucléaire, par le principe d’indétermination d’Heisenberg :

Γ.τN ≥ ~ (3.16)

~ = h

(h étant la constante de Planck = 6,262 × 10

−34 J/s)

Figure 3.22: Principe de la spectrométrie Mössbauer

Les caractéristiques des spectres que l’on peut obtenir dépendent de la nature de l’échantillon étudié. Si les noyaux résonnants sont placés dans des environnements absolu-ment identiques dans la source et l’échantillon, la transition s’effectue à l’énergie E0 dans les deux cas et le spectre sera un pic unique centré sur la vitesse v = 0 de la source.

Dans la matière, un noyau est soumis à des champs électrique et magnétique créés par son environnement, qui vont changer les niveaux d’énergie nucléaire. Ces changements, appelées interactions hyperfines, sont de l’ordre de 10-7à 10-8 eV. Avec la source de57Fe, la largeur Γ est de 5.10-9 eV par rapport à l’énergie E0 de 14,4 keV de ce faisceau. La largeur relative Γ/E0 est donc de l’ordre de 10-13, faisant de ce rayonnement un des rayonnement les mieux définis et conduisant à une sélectivité énergétique extrême qui permet de différencier les très faibles valeurs d’énergie correspondant aux interactions hyperfines.

Les interactions hyperfines observées par spectrométrie Mössbauer sont [3.35, 3.36] :

• l’interaction monopolaire électrique → le déplacement isomérique,

• l’interaction quadripolaire électrique → l’éclatement quadripolaire,

• l’interaction dipolaire magnétique → l’éclatement magnétique.

L’étude de ces interactions offre une sérieuse opportunité d’accès à de nombreuses propriétés physiques et chimiques des matériaux contenant un isotope Mössbauer. Les paramètres Mössbauer sont présentés sur la figure 3.23.

Figure 3.23: Déplacement des niveaux nucléaires sous l’action des interactions hyperfines dans le cas d’une transition entre des états de spins 3/2 et 1/2 : effets sur le spectre Mössbauer

1. Le déplacement isomérique δ qui dépend de la densité électronique autour du

noyau. Si les environnements électroniques des noyaux émetteur S et absorbeur A sont différents, la raie d’absorption est alors décalée par rapport à la raie d’émission d’une quantité δ (figure 3.23 a) :

δ = ∆EA− ∆ES = CδR

R



| ΨA(0) |2 − | ΨS(0) |2 (3.17)

δ déplacement isomérique entre le noyau émetteur et le noyau absorbeur,

C constant pour un isotope contenant des parameters nucléaires,

δR

R variation relative de rayon nucléaire entre l’état excité et l’état fondamental,

ΨA(0), ΨS(0) fonctions d’onde qui représentent la densité électronique autour des noyaux absorbeur et émetteur, respectivement.

2. L’éclatement quadripolaire ∆EQ est directement proportionnel au gradient du champ électrique autour du noyau lorsque celui-ci admet une distribution de charge asymétrique. Cette asymétrie peut provenir de l’asymétrie de la distribution de charges électroniques de la couche de valence de l’atome et de l’asymétrie de la distribution de charges extérieures à l’atome.

∆EQ = eQVzz 4I(2I − 1) h 3m2I− I(I + 1)i 1 + η 2 3 !1 2 (3.18)

Q moment quadripolaire électrique,

Vzz composante du gradient de champ électrique suivant l’axe principal Oz du gradient de champ électrique,

η paramètre d’asymétrie du gradient de champ électrique,

η = Vxx− Vyy

Vzz

avec la convention |Vxx| ≤ |Vyy| ≤ |Vzz| I spin nucléaire,

mI composante du spin suivant l’axe Oz

Dans le cas de 57Fe ( I = 3/2 à l’état excité, mI= ±1232), on obtient deux niveaux séparés de : ∆EQ = eQVzz 2 1 + η2 3 !1 2 (3.19)

3. L’éclatement magnétique ∆EM est un facteur d’ordre magnétique des atomes.

L’interaction du moment magnétique nucléaire µ avec l’induction magnétique H créée au voisinage immédiat du noyau par son environnement électronique, divise le niveau nucléaire par effet Zeeman avec des variations d’énergie ∆EM telles que :

∆EM = −µHmI

I = −gNN.H.mI (3.20)

µ moment magnétique nucléaire, µ = gNβNI

gN facteur de Landé nucléaire,

βN magnéton nucléaire de Bohr,

mI composante du vecteur spin I suivant la direction de l’induction, H Valeur de l’induction magnétique.

4. Le facteur Debye-Waller f indique les propriétés vibrationnelles des atomes

(températures de Debye, effets d’orientation et de texture, . . . )

f = exp −4π2hx2i

λ2

!

(3.21)

λ longueur d’onde du rayonnement γ,

hx2i amplitude quadratique moyenne de vibration de l’atome résonnant, si hx2i  λ2, f → 1

Relations entre les paramètres Mössbauer et les caractéristiques des maté-riaux étudiés

Le déplacement isomérique nous donne des informations sur le degré d’oxydation, la configuration électronique, le type de liaisons, l’effet de covalence, les processus d’oxydo /réduction et la structure électronique des atomes. Par exemple dans le cas des ions Fe3+ et Fe2+ de configurations électroniques respectives 3d5 et 3d6, l’ion ferreux Fe2+ possède une densité d’électrons s au noyau plus faible que celle de l’ion ferrique Fe3+ en raison de l’effet d’écran plus important exercé par les électrons 3d sur les électrons 4s. La conséquence de cela est le déplacement isomérique vers des valeurs plus positives dans le cas de l’ion Fe2+ que dans celui de l’ion Fe3+ : 0 < δ < 0,5 mm/sec pour Fe3+; 0,6 < δ < 1,4 mm/s pour Fe2+.

Le paramètre d’éclatement quadripolaire permet de d’obtenir des informations sur la symétrie locale du site de l’atome résonnant, l’arrangement autour de cet atome, la transition de spin, les propriétés électroniques, les types de liaison,. . .

Le champ magnétique interne H nous donne des informations sur le spin nucléaire, les moments magnétiques locaux, les propriétés magnétiques, le superparamagnétisme, l’effet de granulométrie. Par exemple, le champ hyperfin à la température ambiante vaut 51,8 T et le déplacement isomérique 0,39 mm/s pour l’hématite de formule chimique α-Fe2O3. Si le fer est substitué par de l’aluminium, on observe une diminution du champ.

Le largeur de raie Γ qui donne des informations sur les faibles perturbations locales (écarts à la stœchiométrie ; différents types environnements locaux ; effets de relaxation ;

désordre local ; hétérogénéité de tous ordres...).

En général, cette technique donne des renseignements locaux sur les noyaux qu’elle affecte, en particulier sur leur état de vibration, la densité électronique locale et le moment magnétique effectif. Ce type de données fournit des renseignements précieux sur l’état de valence des atomes correspondants, les liaisons qu’ils forment avec leurs voisins et leur position dans un réseau cristallin. Comme le fer est un des noyaux les plus faciles à mettre en œuvre, la métallurgie et la minéralogie sont des domaines de choix pour l’utilisation de la technique. [3.20, 3.35–3.37].

Une photo du spectromètre Mössbauer disponible au laboratoire est présentée sur la figure 3.24.

La configuration standard du spectromètre Mössbauer en mode de transition utilisé dans notre laboratoire est la suivante (figure 3.25) :

• Mössbauer Velocity Transducer MVT-1000 • Mössbauer Velocity Calibrator MVC-450 • Mössbauer Drive Unit MDU-1200

• Amplifier AMP-1000

• Proportional Counter LND-45431 • HV Supply HVS-2

• Data Acquisition Module CMCA-550 • Digital Function Generator DFG-1200

Figure 3.24:Spectromètre Mössbauer au laboratoire Physico-chimie de l’Atmosphère (Dunkerque)