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Chapitre 3 : Prélèvements et analyses

II. Analyses

II.1. Spectrométrie de masse à plasma inductif (ICP-MS)

L’analyse des éléments traces a été réalisée par spectrométrie de masse à plasma inductif (ICP- MS signifie Inductively Coupled Plasma Mass Spectrometry). Cette technique permet de mesurer simultanément les concentrations d’un grand nombre d’éléments sans avoir à réaliser de chimie au préalable sur les échantillons (dans les cas des eaux douces naturelles). Les limites de détection (LD) sont faibles (souvent inférieures à 0,1 ppb). J'ai effectué l'ensemble des opérations pour l'analyse des éléments traces.

II.1.1.Principe de l’ICP-MS

La Figure 3. 5 présente schématiquement les différentes parties d’un ICP-MS.

Figure 3. 5 : Schéma de principe de l’ICP-MS. Les lettres a, b, c et d se rapportent au texte L’analyse se déroule en 4 étapes :

(a) introduction et nébulisation de l’échantillon

L’échantillon est introduit sous forme liquide (échantillons filtrés et acidifiés dans le cas des eaux naturelles) à l’aide d’une pompe péristaltique. Il est transformé sous forme d’aérosol au niveau du nébuliseur : un fin capillaire où arrive un gaz vecteur (Argon Ar : débit proche de 0.9 L/min, qui peut varier selon l’optimisation de l’appareil).

(b) ionisation des éléments

Dans la chambre de nébulisation, les plus grosses gouttes sont évacuées et seules les plus fines sont introduites dans la torche où un second flux d’Ar arrive. Là, le plasma à très haute température (plus de 5000K), ionise l’échantillon. Ce plasma électriquement neutre associant électrons et éléments ionisés envoie un faisceau d’ions, transféré par différence de pression (P atmosphérique dans la torche, 10-6 à 10-7 torr après l’interface grâce aux pompes primaire et turbo-moléculaire). Le faisceau traverse l’interface qui se compose de 2 cônes successifs : le cône échantillonneur (Sampler), et le cône écrémeur (Skimmer) qui ne garde que la partie centrale du faisceau. Le faisceau traverse ensuite une lentille électronique qui permet d’améliorer la focalisation du faisceau alors envoyé dans le spectromètre de masse quadripôle.

(c) séparation par la masse et la charge

Le faisceau traverse ensuite le quadripôle, constitué de 4 barreaux métalliques auxquels sont appliquées des tensions créant ainsi un champ électrique. Les ions sont déviés dans ce champ électrique en fonction de leur rapport masse/charge (m/z).

(d) détection

Après la séparation, les ions sont détectés et comptés par un multiplicateur d’électrons. Il existe 2 modes de détection : le mode « Pulse » pour les intensités inférieures à environ 2 000 000 coups par seconde (cps) qui utilise le courant électronique issu de l’ensemble du multiplicateur ; et le mode dit « Analog » pour les intensités supérieures.

II.1.2.Description de l’ICP-MS utilisé au laboratoire

L’ICP-MS utilisé au laboratoire est un modèle Elan DRC II de la marque Perkin Elmer (Figure 3. 6). Il a été acheté en 2004 en commun entre le LRSAE (EA 1175) et le laboratoire GéoAzur (UMR 6526) ; il est installé dans les locaux de GéoAzur. Le passeur automatique est placé sous une hotte à flux laminaire pour éviter la contamination des échantillons lors de l’analyse.

Le nébuliseur est de type Meinhard et la chambre de nébulisation est une chambre cyclonique. Ces derniers ainsi que la torche sont en quartz. Les cônes utilisés sont en platine avec une base en nickel, ils sont nettoyés après chaque journée de mesure avec une solution de HNO3 1% (v/v) et rincé à l’eau milliQ. Une solution multi-élémentaire à 1ppb est utilisée en début et fin de séance d'analyse pour vérifier les performances de l’appareil (intensité du signal, taux d’d’oxydes et de doubles charges créés par le plasma <3%, bruit de fond < 2cps) et pour optimiser si besoin les réglages de l’appareil (en modifiant le débit du gaz nébuliseur, la tension appliquée à la lentille électronique, la position de la torche ou du nébuliseur, la résolution en masse, …).

Figure 3. 6 : ICP-MS du laboratoire, Elan DRC II (Perkin Elmer), avec le passeur automatique positionné sous une hotte à flux laminaire (photo G. Féraud).

II.1.3.Conditions expérimentales

Interférences

Les principaux inconvénients des analyses par ICP-MS sont les interférences qui conduisent à des surestimations des concentrations ainsi qu’à de mauvaises répétabilités. Il existe différents types d’interférences mais les principales sont les interférences isobariques ou polyatomiques : un autre ion ou une molécule qui a le même rapport masse/charge et donc est détecté comme étant l’espèce étudiée (Tableau 3. 1).

L’effet de l’interférence dépend de la concentration de l’élément interférent dans l’échantillon. Une étude a montré les concentrations minimales des éléments majeurs interférents à partir desquelles l’interférence est significative (Epov et al., 2004, cf. Tableau 3. 1 pour les éléments analysés). Les éléments suivants – Cr, Ni, Fe, V, Cu, Mn – sont fortement interférés à de faibles concentrations de l’élément majeur qui induit l’interférence, à partir de 100 voire 10 µg.L-1. Pour diminuer ces interférences, une cellule de collision/réaction (DRC) est parfois utilisée. La DRC est une cellule constituée d’un quadripôle situé entre la lentille et le quadripôle de l’ICP-MS. Cette cellule est pressurisée par un gaz qui peut réagir chimiquement ou simplement casser les assemblages polyatomiques interférents. Différents gaz sont utilisés parmi lesquels NH3, du H2 ou encore parfois un mélange Ar/H2. J’ai effectué des tests avec la cellule de collision (DRC, Perkin), installée sur l’ICP- MS (annexe 2) avec des solutions synthétiques dont les concentrations sont proches de celles des eaux naturelles étudiées. Al ne semble pas interféré et les corrections apportées par la DRC pour la mesure de Co et Ni ne se sont pas avérées satisfaisantes. Pour la mesure de l’arsenic (As), l’utilisation d’une équation de correction - 3.127 * 77(ArCl) + 2.733 * 82Se semble suffisante et donne des résultats similaires à ceux obtenus par DRC (voir annexe 2).

Les isotopes utilisés dans nos mesures et les interférences correspondantes principales sont indiqués dans le Tableau 3. 1. Al, Si, Co et Zn ont été mesurés sans correction supplémentaire car la concentration de l’élément majeur responsable de l’interférence principale (respectivement Mg, C, K et Ca, et Mg) est inférieure dans nos échantillons à la concentration minimale (Cmoy = concentration moyenne, Tableau 3. 1) à partir de la quelle l’interférence est significative (Epov et al., 2004, Tableau 3. 1). Seul le Cu est susceptible d’être interféré par le Na+. Les résultats sur l’eau certifiée (présentés ultérieurement dans le Tableau 3. 3) sont néanmoins satisfaisants.

Tableau 3. 1 : Liste des isotopes analysés selon l’élément et interférences principales correspondantes. Sont présentées également la concentration minimale de l’élément majeur responsable

de l’interférence à partir de laquelle celle-ci est significative (Epov et al., 2004) et la concentration moyenne de cet élément dans nos échantillons.

Elément Isotope analysé Interférences principales Cmin interférent (Epov et al., 2004)

Cmoy dans les

échantillons Li 7 - B 10 - Al 27 12C15N; 26Mg1H nd ; 1000 - ; 12 Si 29 12C16O1H 100 41 Co 59 41K18O ; 43Ca16O 1000 1,6 ; 89 Cu 63 23Na40Ar <10 15 Zn 66 26Mg40Ar 100 12 As 75 35Cl40Ar 1000 21 Sr 84 - 86 - Rb 85 - Mo 98 - Cd 111 - Cs 133 - Ba 138 - W 184 - Pb 208 - U 238 -

Utilisation des étalons internes

Un autre inconvénient majeur de l’analyse par ICP-MS est la grande instabilité du signal au cours du temps. Elle est liée à différents paramètres physiques (électronique, variations de la température de l’appareil malgré la climatisation de la salle) mais surtout à des effets de matrices, souvent très importants pour nos mesures sur des échantillons de compositions variables. Pour limiter au mieux la dérive du signal, des étalons internes ont été utilisés. Ils sont introduits avec les échantillons à partir d'une solution reliée en continu au tube d'alimentation de la solution de l'échantillon. L’indium (In) est l’élément le plus couramment utilisé pour les analyses d’eaux naturelles. Cependant des tests ont été réalisés afin de préciser le choix des étalons internes (annexe 2), à la suite desquels nous avons décidé

d’utiliser le terbium (Tb) et le germanium (Ge), car les variations de signal mesuré de ces éléments au cours du temps sont plus représentatives de celles des éléments analysés.

Limite de détection et limite de quantification

Les limites de détection (LD) et limite de quantification (LQ) sont calculées de la façon suivante : LD [ppb] = 3 * SD blanc [cps] / pente d’étalonnage [cps/ppb]

LQ [ppb] = 10 * SD blanc [cps] / pente d’étalonnage [cps/ppb] Avec SD blanc = écart-type, en cps, dans le blanc d’étalonnage

Les valeurs moyennes des différentes limites obtenues par jours d’analyse sont reportées dans le Tableau 3. 2.

Tableau 3. 2 : Limites de détection (LD) et de quantification (LQ) des différents éléments analysés (valeurs moyennes calculées à partir des valeurs obtenues par jours d’analyses)

LD LQ (en µg.L-1) Li 0,0071 0,024 B 3,8477 12,826 Al 1,2104 4,035 Co 0,0029 0,010 Cu 0,0107 0,036 Zn 0,5740 1,913 As 0,0461 0,154 Rb 0,0123 0,041 Zr 0,0016 0,005 Mo 0,0043 0,014 Cd 0,0025 0,008 Cs 0,0009 0,003 Ba 0,0066 0,022 Pb 0,0040 0,013 U 0,0015 0,005 Sr 0,0024 0,008

Contrôle de la qualité des mesures, justesse des mesures

Afin de contrôler la justesse des mesures effectuées par ICP-MS, une eau de référence avec des concentrations certifiées – l’eau de surface SLRS-4, CNRC (Conseil national de Recherches Canada) – a été analysée, à plusieurs reprises, lors de chaque jour d’analyse. Les résultats obtenus sont présentés dans le Tableau 3. 3.

Tableau 3. 3 : Résultats obtenus sur l'eau certifiée SLRS4 (ce tableau est à nouveau présenté dans l’article du Chapitre 4 : Table 4. 2)

(in µg.L-1) Valeur de référence +/- Valeur mesurée moyenne Ecart- type Recouvrement % n Valeurs certifiées (SLRS-4 NRC) Cd 0,012 0,002 0,009 0,004 62 13 Sr 0,0263 0,0032 0,028 0,000 100 2 Co 0,033 0,006 0,041 0,005 63 38 U 0,05 0,003 0,047 0,003 90 40 Pb 0,086 0,007 0,084 0,015 98 40 Mo 0,21 0,02 0,20 0,02 100 40 As 0,68 0,06 0,77 0,13 87 54 Zn 0,93 0,1 0,95 0,16 88 17 Cu 1,81 0,08 1,77 0,12 88 40 Ba 12,2 0,6 12,63 0,38 100 13 Al 54 4 56,4 9,6 86 29 Valeurs non certifiées (Yeghicheyan, 2001) Cs 0,009 0,001 0,007 0,001 55 40 W 0,013 0,001 0,012 0,016 88 32 Li 0,54 0,07 0,49 0,05 96 26 Rb 1,53 0,05 1,60 0,22 85 34

D’autre part, les solutions utilisées pour les étalonnages externes ont parfois été analysées parmi la série d’échantillons, afin de vérifier la concentration mesurée. En cas de forts écarts, une correction a été réalisée sur l’ensemble des échantillons, en se basant sur l’hypothèse d’une dérive linéaire dans le temps.

Répétabilité

En plus des nombreuses analyses effectuées sur l’eau de référence SLRS-4, des réplicats étaient régulièrement réalisés sur certains échantillons, afin d’estimer la répétabilité des mesures sur la matrice correspondant à nos échantillons.

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