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Comme mentionné plus haut, le spectromètre SPI (Vedrenne et al., 2003) est l’un des deux principaux instruments de l’observatoire INTEGRAL. Sélectionné pour fournir une résolution spectrale sans précédent dans le domaine des X-durs/γ-mous, l’instrument fait preuve d’une bonne sensibilité à haute énergie ainsi que d’une réponse instrumentale stable dans le temps (Jourdain & Roques, 2009). SPI a été conçu et réalisé grâce à une collaboration internationale de différents instituts, sous la responsabilité du CESR et la maîtrise d’œuvre de l’agence spatiale française (CNES). La Figure 4.3 (gauche) montre une vue détaillée de l’instrument et de ses différents éléments constitutifs, dont les principaux seront décrits dans les paragraphes suivants.

4.2.1

La caméraγ

La caméra γ (cf. figure 4.4), développée sous la responsabilité de G. Vedrenne puis J.P. Roques au CESR à Toulouse, représente le cœur du spectromètre. Elle est formée d’un assem- blage hexagonal de 19 détecteurs à semi-conducteur de type n, en Germanium ultra-pur, formant une surface géométrique de détection de 508 cm2. Chaque détecteur individuel, épais d’à peu

Figure 4.3 – Gauche : Vue détaillée de la structure du spectromètre SPI. Droite : Photo de l’ins- trument lors de la phase de calibration.

près 7 cm, est lui aussi de forme hexagonale afin de minimiser le volume occupé par l’assem- blage. Pour tirer profit au maximum des qualités spectroscopiques des cristaux de Germanium, il est nécessaire de refroidir les détecteurs. Un système cryogénique actif est intégré à l’instru- ment afin de garder la température du plan de détection constamment autour de 80 degrés K. Ceci permet notamment d’atteindre la résolution spectrale nominale, qui est de 2.5 keV à 1.3 MeV, soit ∆ E / E = 2 × 10−3. La caméra γ de SPI fournit ainsi des mesures spectrales plus de 20 fois plus précises que les instruments précédents (OSSE, SIGMA, cf. Chapitre 3) de cette gamme en énergie.

Le principe de fonctionnement d’un détecteur à semi-conducteur est basé sur la collection des porteurs de charge libérés lors de l’interaction du photon incident avec la matière. En ef- fet, quel que soit le type d’interaction (effet photoélectrique, effet Compton ou effet de paire, cf section 3.1.1), l’absorption du photon se traduit par la création d’un grand nombre de paires

Figure 4.4 – Le plan de détection de SPI, formé de 19 détecteurs en Germanium ultra-pur.

électron-trou dans le semi-conducteur. Le détecteur étant sous haute tension, les porteurs de charge sont rapidement acheminés vers les électrodes et donnent lieu à un signal électrique. Après amplification et mise en forme du signal par un système électronique analogique, l’am- plitude de l’impulsion permet de déterminer l’énergie de l’évènement. Comme cette énergie est proportionnelle aux nombres de porteurs de charges collectés, la résolution spectrale du dispositif dépend de l’énergie minimale nécessaire à créer une paire électron-trou dans le semi- conducteur. Cet aspect justifie le choix du Germanium pour la caméra γ de SPI : le seuil de création électron-trou est d’environ 3 eV, ce qui signifie qu’un photon de 100 keV, s’il est totale- ment absorbé, va libérer 3 × 104porteurs de charge de chaque type. En refroidissant le détecteur en dessous de 100 K, le bruit de fond thermique est fortement réduit et la précision de la mesure de l’énergie d’un photon incident est théoriquement ultra-fine. Néanmoins, la résolution spec- trale dépend aussi des fluctuations du courant de fuite qui traverse le détecteur, effet qui limite les performances à basse énergie (Paul et al., 2001).

La caméra γ de SPI est exposée à un fort flux de particules énergétiques qui dégradent les performances des détecteurs. Leur impact génère des sites de piégeage des porteurs de charges ce qui modifie localement la structure des niveaux d’énergie du semi-conducteur. En consé- quence, la réponse impulsionnelle des détecteurs est déformée au fil du temps et la précision des mesures s’en trouve réduite. Pour arriver à garder un niveau de performance plus ou moins constant à long terme, une stratégie de recuit (annealing en anglais) des détecteurs a été mise en place (Leleux et al., 2003) : en portant le Germanium à 105◦C pendant un certain temps, l’agitation thermique accrue permet de réordonner le cristal qui retrouve ainsi ses qualités no- minales. Une telle procédure est effectuée deux fois par an et dure entre trois et dix jours, en fonction du niveau de dégradation du plan de détection.

Figure 4.5 – Le masque codé en Tungstène utilisé sur SPI

4.2.2

Les autres sous-systèmes

Le masque

Pour doter l’instrument d’une capacité d’imagerie raisonnable, une ouverture à masque codé est associée à la caméra γ. Le masque est fabriqué en Tungstène avec une épaisseur des éléments opaques de 3 cm, ce qui représente un bon compromis entre poids et opacité à haute énergie. Il a été développé sous la responsabilité de F. Sanchez à l’université de Valencia en Espagne. Le principe de fonctionnement du dispositif est rappelé à la section 3.1.2 et la Figure 4.5 montre le masque qui a été utilisé sur SPI.

L’ACS

Un système d’anticoïncidence actif (ACS pour AntiCoïncidence Shield) est disposé autour des détecteurs afin de réduire le bruit de fond provoqué par les rayons cosmiques qui peuvent interagir avec les matériaux du télescope. Constitué de 4 unités de cristaux d’oxyde de Bismuth- Germanium (BGO) formant un bouclier actif, ce système permet d’émettre un signal veto lors- qu’une interaction a eu lieu quasi-simultanément dans l’ACS et les détecteurs. L’ACS a été développé sous la responsabilité de G. Lichti et A. von Kienlin au MPE à Garching en Espagne. Le masque codé et la partie supérieure de l’ACS, distants de 70 cm (cf. Figure 4.3), définissent ensemble le champ de vue de SPI. Ce dernier se décline en deux catégories, en fonction du codage (total ou partiel) du ciel. Le champ de vue totalement codé (FCFOV pour Fully Coded Field Of View), défini par la région du ciel qui éclaire l’ensemble du plan de détection, mesure 16◦× 16◦. Avec 1.7 m de distance entre le masque et la caméra, le dispositif d’imagerie de SPI fournit une résolution angulaire de 2.5◦.

La PSD

Un système électronique basé sur la discrimination par la forme des impulsions (PSD pour Pulse Shape Discrimination) a été mis en place pour tenter de réduire le bruit de fond. Ce système vise à distinguer les évènements provoqués par certaines décroissances radioactives de ceux provoqués par les rayons γ, suite à une analyse de forme du signal électronique associé. Toutefois, l’importance de l’effet a été surestimé si bien qu’en pratique le système PSD n’a pas permis d’améliorer la sensibilité du télescope.

Les étages électroniques

L’instrument comprend une électronique spécifique adaptée à l’environnement spatial3. Les signaux délivrés par les pré-amplificateurs reliés au plan de détection sont filtrés et mis en forme par un dispositif analogique (AFEE pour Analogue Front End Electronics). Ensuite, un deuxième étage digital (DFEE pour Digital Front End Electronics) permet de relier les infor- mations issues des différents sous-systèmes, notamment l’éventuel signal veto de l’ACS et le résultat de l’analyse PSD. Aussi, la DFEE gère les temps d’arrivée des différents dépôts d’éner- gie et détermine la classification de chaque évènement selon le nombre de détecteurs impliqués : les évènements qui se sont produits dans un seul détecteur sont appelés des évènements simples (SE pour Single detector Events) et ceux ayant provoqué un dépôt d’énergie dans deux ou plu- sieurs détecteurs sont référencés comme des évènements multiples (ME pour Multiple detector Events). L’origine physique est les conséquences au niveau du traitement de données des diffé- rents types d’évènements seront abordés dans la prochaine section.