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7 Modélisation intégrée à l’échelle régionale

7.2 Définition des unités hydrologiques fonctionnelles

7.2.2 Spatialisation des propriétés hydrodynamiques des sols (synthèse données

propriétés hydrodynamiques des sols en surface a été réalisé, afin de pouvoir disposer d’une base de données plus complète sur les sols cévenols et étendre l’analyse proposée par Desprats et al. (2010) à l’ensemble des Cévennes. Ces auteurs avaient montré, à partir d’essais d’infiltration en surface réalisés sur différents types de géologie et d’occupation du sol sur les secteurs des Gardons et de l’Avène, qu’il était possible de spatialiser la conductivité hydraulique à saturation à partir de la géologie et de l’occupation du sol. Ces travaux s’étaient appuyés sur deux types d’essais par perméamètre de Guelph et par double anneau. Compte tenu d’ordres de grandeurs très différents entre les deux méthodes, une relation entre les valeurs issues de chaque méthode avait été proposée, afin de pouvoir analyser l’ensemble du jeu de données.

L’ensemble des données disponibles sur les Gardons et l’Avène (double anneau et perméamètre de Guelph) a pu être récupéré. Nous y avons adjoint les essais d’infiltration réalisés par HSM et le LTHE sur différents sites d’étude à l’aide d’essais par infiltromètres à multiple succions, la campagne d’essais par méthode Beerkan et mini-disques réalisée dans le projet (cf sections 5.2.5 et 5.3.4), ainsi que les résultats d’une campagne similaire menée sur le bassin expérimental de l’Yzeron près de Lyon sur géologie de type gneiss (Gonzalez-Sosa et al., 2010). Des tests statistiques ont été réalisés pour voir dans quelle mesure les différents types d’essais pouvaient être combinés dans un même jeu de données. Pour les essais double anneau et perméamètre de Guelph, nous avons retenu les valeurs double anneau, plus proches des valeurs des essais Beerkan. Une relation entre les valeurs des deux types d’essais (double anneau et perméamètre de Guelph) a été ré-estimée de manière similaire à ce qui est proposée par Desprats et al. (2010). Une relation a ensuite été établie entre valeurs Beerkan et valeurs double anneau permettant de ramener l’ensemble des essais à des valeurs double anneau. Une analyse statistique (boxplot, classification) a ensuite été menée qui permet de proposer une spatialisation de la conductivité à saturation en fonction de la géologie et de l’occupation du

sol (Figure 7-1). L’ensemble des étapes de cette analyse a été documentée dans Braud (2016) et une publication est en préparation24.

Néanmoins, les différences d’ordre de grandeur entre les différentes méthodes utilisées montrent que cette spatialisation reste plutôt qualitative et qu’il reste encore pas mal d’incertitudes sur la valeur absolue de la conductivité hydraulique à saturation, rendant nécessaire des analyses de sensibilité à ces paramètres lorsqu’ils sont utilisés dans les modèles.

Figure 7-1 : Boxplot des conductivités hydrauliques à saturation (méthode double anneau) en fonction de la géologie et de l’occupation du sol

Les bases de données sol du programme IGCS (Inventaire Gestion et Conservation des Sols) ont été récupérées sur l’Ardèche et les départements du Gard, de la Lozère et de l’Hérault. Leur analyse a permis de cartographier différentes caractéristiques des sols telles que la profondeur, la capacité maximale de stockage ou la réserve utile (pour les horizons de sol « agronomiques », ainsi que les propriétés hydrodynamiques des sols en utilisant la fonction de pédotransfert de Rawls et Brackensieck (1985) (Bonnet, 2012). Les valeurs de conductivité hydraulique déduites de ces fonctions sont en général plus faibles que les valeurs mesurées sur forêt et à peu près concordantes sous culture (si on compare aux valeurs du perméamètre de Guelph de Desprats et al., 2010) (Vannier, 2013).

Cette base de données et les résultats sur la synthèse des essais d’infiltration nous donnent donc des éléments pour définir les unités de modélisation où les processus peuvent être considérés comme homogènes. Ils montrent que les facteurs géologie, occupation du sol et pédologie, doivent être pris en compte et que le poids prépondérant donné à la pédologie dans la discrétisation du modèle CVN mérite d’être revisité. Il serait préférable d’inclure la

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7.3 Modélisation hydrologique régionale par approche bottom-up et évaluation

Le travail réalisé sur ce volet du projet est essentiellement issu du travail de thèse de Vannier (2013)

Nous sommes partis d’une version événementielle du modèle CVN (Manus et al., 2009 ; Anquetin et al., 2010) qui a été enrichie pour aboutir à une modélisation en continu (Figure 7-2). Le maillage sur lequel s’appuie CVN est constitué d’hydro-paysages résultant du croisement de couches SIG : celle des sous-bassins versants issus d’un modèle numérique de terrain (MNT) avec ici une taille minimale de 0.5 km2, la carte pédologique et celle de l’occupation du sol. A chaque sous-bassin est associé un brin de réseau hydrographique. Le modèle prend en entrée une chronique de pluie et d’évapotranspiration de référence à pas de temps variable ou fixe. Sur chaque unité de modélisation, on résout d’équation de Richards de transfert d’eau en milieu saturé ou non-saturé. La modélisation peut prendre en compte différents horizons de sol aux propriétés hydrodynamiques différentes. En bas de colonne, la condition à la limite peut être un flux de drainage libre (flux gravitaire) ou un flux nul. Lorsque la pluie dépasse la capacité d’infiltration ou si l’horizon de surface est saturé, il y a production de ruissellement. Ce dernier est directement envoyé au brin de rivière le plus proche pour être routé jusqu’à l’exutoire. Il n’y a pas de transfert latéral d’eau d’une unité de modélisation à l’autre. L’évapotranspiration réelle est modélisée par un terme puits dans l’équation de Richards, représentant l’extraction racinaire. L’interception est aussi représentée et dépend de l’indice foliaire (LAI).

Figure 7-2 : Illustration de la structure du modèle CVN-p (tiré de Vannier et al., 2016)

Une des questions importantes pour mettre en œuvre un tel modèle est la question de la spécification des paramètres représentant les propriétés du sol dans le modèle. Dans les premiers travaux, nous avons utilisé une base de données sol du programme IGCS25

(Inventaire Gestion et Conservation des Sols) au 1/250000ème sur Languedoc-Roussillon et l’Ardèche. Cette base renseigne différentes unités typologiques de sol avec des informations sur les horizons de sol en particulier leur épaisseur et leur texture. Nous en avons tiré une cartographie des capacités de stockage des sols et de leurs propriétés hydrodynamiques (courbes de rétention d’eau et de conductivité hydraulique) en utilisant les fonctions de pédo- transfert de Rawls et Brackensieck (1985). Ces fonctions fournissent des relations statistiques entre paramètres décrivant les propriétés hydrodynamiques des sols et leur texture (% sable, argile, limon). Les premiers essais de modélisation ne se sont pas révélés très concluants (Vannier, 2013) et nous avons réalisé que cette base de données, construite à des fins agronomiques, ne renseignait pas les horizons de sol altérés, qui peuvent stocker de l’eau et avoir un rôle hydrologique. Nous avons alors cherché un moyen d’estimer les capacités de stockage des sols par d’autres méthodes (Vannier et al., 2014, voir section 0). Une méthode qui a fourni des résultats intéressant consiste à analyser les chroniques de débit, en particulier les récessions. Moyennant des hypothèses sur la modélisation de ces récessions, cette analyse permet d’estimer la profondeur D des horizons altérés, leur conductivité k et leur capacité de stockage, moyennant une hypothèse sur la porosité. Les résultats montrent que les profondeurs de roches altérées estimées sont très élevées pour certaines géologies (une dizaine de mètres pour le granite). Par ailleurs, la géologie explique de manière remarquable les différences observées (Figure 7-3). Les capacités de stockage ainsi estimées sont largement supérieures à celles estimées à partir des seules bases de données sol.

Figure 7-3 : Capacité de stockage des sols et épaisseurs/conductivité hydraulique des horizons altérés obtenues à partir de l’analyse des récessions de 24 petits bassins versants de la région Cévenole (tiré de Vannier et al., 2014)

A partir de ces résultats, le modèle CVN a été modifié pour arriver à une version appelée CVN-p. Dans cette nouvelle version, on rajoute au sol un horizon supplémentaire correspondant à l’horizon de roches altérées, avec les propriétés déterminées par l’analyse de données de la Figure 7-3. La condition à la limite inférieure est fixée à un flux de drainage

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schiste respectivement. Pour les simulations longues, les pluies utilisées sont celles de la réanalyses SAFRAN (Vidal et al., 2010) de Météo-France. Pour les épisodes, des pluies horaires issues du krigeage des pluviographes, ou d’une combinaison de pluies radar et de pluviomètres ont été utilisées. Les résultats montrent une nette amélioration des simulations longues et de celle des épisodes pour la géologie granitique. Les améliorations sont sensibles, mais les volumes restent surestimés durant les épisodes et les récessions trop rapides pour la géologie sur schiste.

Cet exemple illustre la démarche itérative entre modélisation et observation et son intérêt en termes d’amélioration des connaissances. On peut aussi souligner la mise en œuvre du modèle CVN pour 7 bassins principaux des Cévennes et du Mont-Lozère (Ardèche, Cèze, Gard, Tarn, Vidourle, Hérault, Vistre) et son évaluation tant sur des simulations longues que sur des épisodes intenses. Les données utilisées sont bien entendu les débits aux stations, mais d’autres données comme les estimations de débit de pointe des retours d’expérience ou les coupures de route ont aussi été utilisées. Des évaluations supplémentaires, en particulier avec les épisodes de 2014, seraient nécessaires pour consolider les résultats.

Figure 7-4 : Comparaison des débits observés (points rouges) et simulés avec les modèles CVN (vert) et CVN-p (noir) sur le bassin du Tarn à Pont de Montvert sur l’année 2008 (simulation longue, en haut) et l’épisode de novembre 2008 (en bas) (tiré de Vannier et al., 2016)

Figure 7-5 : Comparaison des débits observés (points rouges) et simulés avec les modèles CVN (vert) et CVN-p (noir) sur le bassin sur le Gardon de Mialet sur l’année 2008 (simulation longue) et l’épisode d’octobre 2008 (tiré de Vannier et al., 2016)

La Figure 7-6 illustre une évaluation spatialisée du modèle (avec un forçage issu des pluies krigées) qui s’appuie sur des estimations de débit maximum réalisées lors du retour d’expérience sur la crue d’octobre 2008. Le modèle donne des ordres de grandeur réalistes, même s’il tend à surestimer les valeurs faibles et sous-estimer les valeurs fortes. Les détails de cette évaluation sont décrits dans Vannier et al. (2016).

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Figure 7-6 : Comparaison des débits simulés par le modèle CVN-p pour l’épisode des 21-23 Octobre 2008 aux estimations de pointe obtenues suite à un retour d’expérience (tiré de Vannier et al., 2016)