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Les sources d’incertitude

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Il est important de garder à l’esprit que chaque étape du processus de dosimétrie qui vient d’être décrit, peut introduire des biais qui affecteront les valeurs de dose absorbée calculées. La thématique de la dosimétrie en RTIS étant encore récente, peu d’études abordent cet aspect [Gear et al., 2018]. Les sources d’incertitudes sont généralement regroupées selon leur caractère aléatoire ou systématique. Les sources d’erreurs aléa- toires peuvent être évaluées sur un grand nombre de données cliniques alors que les biais systématiques sont couramment estimés à partir d’expérimentations sur fantôme. Comme mentionné précédemment, la définition des volumes est dépendante de l’opérateur. L’impact dosimétrique de la variation inter-observateur n’a pas pu être évalué de manière quantitative ici. Cependant, il est aisé d’imaginer que l’incertitude sur la définition des volumes peut avoir un impact sur l’estimation de la dose absorbée et que ceci est d’autant plus important que le volume considéré est petit. En parti- culier, la définition de la tumeur anatomique semble être fortement influencée par la série d’images utilisée (temps artériel ou portal) et par le choix du fenêtrage [Gotra et al., 2017] (voir Figure 2.12). Une recherche bibliographique sur cet aspect en RTIS n’a abouti qu’au seul résultat de Kappadath et al. qui mentionnent avoir observé une variation de l’ordre de 15 % sur la dose absorbée pour des variations de 5 mm sur la définition anatomique de la tumeur et que ce pourcentage s’élève à 50 % lorsque la tumeur est définie de manière fonctionnelle [Kappadath et al., 2018]. La mise en place d’une procédure de standardisation pour contourer les compartiments comme c’est le

cas en radiothérapie externe [Hong et al., 2014] pourrait probablement contribuer à la réduction de ce biais.

Figure2.12 – Illustration de la variabilité de la définition du volume tumoral. Le contour (en rouge) peut être tracé différemment selon l’opérateur et selon le temps d’injection utilisé. Dans ce cas précis, l’idéal serait d’utiliser le temps portal où la délimitation de ce CHC infiltrant est plus facile tout en s’aidant du temps artériel.

Malgré l’implémentation de méthodes de recalage semi-automatiques dans les TPS actuels, un ajustement manuel de la part de l’utilisateur est souvent nécessaire que ce soit pour les méthodes de recalage rigide ou élastique. Cette tâche peut s’avérer complexe et chronophage, d’autant plus lorsque l’organe concerné est le foie dont la forme et la position peuvent être fortement modifiées entre deux acquisitions à cause de la respiration ou de la position des bras. Le résultat reste souvent imparfait et est sujet à un biais de subjectivité [Kao et al., 2012b]. Pour avoir une idée approximative de l’impact sur les doses absorbées calculées, dans le cadre de cette thèse, le recalage rigide a été réalisé rétrospectivement par deux opérateurs indépendants pour 14 pa- tients atteints de CHC traités par microsphères de verre. Dans chaque cas, l’imagerie TEMP/TDM aux 99mTc-MAA a été recalée sur l’imagerie TDM avec injection de pro-

duit de contraste, sur laquelle la tumeur et le foie non tumoral ont été définis. Les mêmes volumes ont été considérés dans chaque cas et le calcul de dose absorbée avec l’approche convolution a été réalisé avec une même valeur d’activité d’yttrium-90. Les volumes moyens de la tumeur et du foie non tumoral étaient de 437 ± 314 mL et 1556 ± 379 mL respectivement. L’activité d’yttrium-90 prévisionnelle pour le calcul de dose absorbée était de 4036 ± 2023 MBq (sur les 14 patients). Les écarts relatifs (en valeur absolue) entre les deux opérateurs pour la dose absorbée moyenne à la tumeur et au foie non tumoral étaient de 7 ± 8 % et 8 ± 8 % respectivement. L’expérience et l’utili- sation de critères de référence doit permettre de réduire ce biais. De plus, l’amélioration des algorithmes de recalage pour proposer une meilleure solution automatique pourrait diminuer cette incertitude et faire gagner du temps à l’utilisateur.

Haste et al. ont présenté les résultats de la variation inter-observateur qu’ils ont pu observer en comparant les doses absorbées moyennes à la tumeur et au foie non tumo- ral évaluées en aveugle par 3 observateurs indépendants. Les valeurs de dose absorbée prévisionnelles et post-traitement ont été calculées pour 73 patients atteints de CHC traités par microsphères de verre. Chaque observateur a recalé l’imagerie TEMP aux

99mTc-MAA et TEP aux microsphères d’yttrium-90 sur l’imagerie TDM avec injection

de produit de contraste. La tumeur et le foie non tumoral total ont été définis sur l’ima- gerie TDM et les coups dans chaque volume ont été relevés. La dose absorbée moyenne a ensuite été calculée en appliquant le formalisme du MIRD à l’échelle de l’organe. Dans chaque cas, ils ont calculé un coefficient de reproductibilité comme étant le rap- port maximal entre les doses absorbées calculées par deux observateurs distincts. Ils ont rapporté un écart inter-observateur plus important pour la dose absorbée moyenne à la tumeur (coefficient moyen de 2,4 pour la dose absorbée TEMP aux 99mTc-MAA

et 1,6 pour la dose absorbée TEP aux microsphères d’yttrium-90) par comparaison à la dose absorbée moyenne au foie non tumoral (coefficient moyen de 1,4 à la fois pour les doses absorbées établies sur l’imagerie TEMP aux 99mTc-MAA et TEP aux micro-

sphères d’yttrium-90). Ces écarts considérables peuvent être liés au recalage d’images ou à la définition des volumes [Haste et al., 2017].

La calibration relative de l’imagerie TEMP aux 99mTc-MAA introduit également

un biais. Comme évoqué précédemment, si l’on se réfère aux contours du foie et des poumons pour indiquer les "coups réels", certains coups peuvent ne pas être pris en compte à tort à cause d’un décalage entre l’imagerie TEMP et l’imagerie TDM injectée (segmentation, recalage, étalement du signal).

Par ailleurs, comme décrit dans le Chapitre 1, la quantification de l’activité dans chaque voxel peut être plus ou moins affectée par l’effet de volume partiel qui dépend de la résolution spatiale de la machine. Cet effet est d’autant plus important sur de pe- tites régions d’intérêt. La méthode la plus répandue pour compenser cet effet consiste à réhausser les valeurs en fonction de facteurs de recouvrement déterminés préalablement sur fantôme pour différentes tailles de sphères [Gear et al., 2018] (voir Chapitre 3). En pratique, à partir de l’analyse de ces facteurs de recouvrement, des lésions de diamètre inférieur à un certain seuil ne doivent pas être considérées pour une estimation do- simétrique fiable ou une compensation doit être appliquée. Dans notre cas, pour ces raisons et principalement afin de réduire le biais lié au recalage, le diamètre minimal choisi est de 2 cm. Sur les cohortes de CHC étudiées où les volumes des lésions étaient importants, les lésions qui n’ont pas été considérées pour l’analyse dosimétrique pour leurs faibles dimensions étaient peu nombreuses.

Enfin, le mouvement respiratoire du patient peut influencer indirectement les étapes de recalage et de définition des volumes comme évoqué précédemment et directement la quantification de l’imagerie TEMP et TEP comme montré par plusieurs auteurs [Siman et al., 2017, Ausland et al., 2018, Bastiaannet et al., 2017, Pasciak et al., 2014]. En particulier, Bastiaannet et al. concluent que "parmi les paramètres étudiés, la res- piration est le plus grand facteur de détérioration de la quantification de l’imagerie TEMP" [Bastiaannet et al., 2017]. En routine clinique, cet effet est souvent compensé par l’application de méthodes de reconstruction tenant compte du mouvement respira- toire comme les méthodes de "gating" basées sur la phase du cycle respiratoire [Werner et al., 2009,Lupi et al., 2009,Suenaga et al., 2013]. Cependant, dans le cadre de l’image- rie TEP à l’yttrium-90, la faible statistique de comptage serait d’autant plus accentuée pour une acquisition en mode "gating" avec 2 à 5 fois moins de coups dans l’image

par comparaison à l’acquisition statique, résultant notamment en une augmentation du bruit et une durée d’acquisition nécessairement plus longue [Osborne et al., 2018]. Néanmoins, les premiers résultats sur l’évaluation de la faisabilité de reconstruire les images TEP/TDM aux microsphères d’yttrium-90 par un algorithme de gating basé sur l’amplitude sont prometteurs [Pasciak et al., 2014, Mamawan et al., 2013, Osborne et al., 2017, Osborne et al., 2018]. En particulier, Osborne et al. ont rapporté que les doses absorbées calculées lors d’une reconstruction en mode "gating" sont plus élevées tout en conservant une qualité d’image suffisante pour le diagnostic.

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Relation dose absorbée-effet et limitations du mo-

dèle BSA

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