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5.6 Résultats & Interprétations

5.6.1 Sol 1 ( podzosol ocrique - rédoxisol soliflué) :

Il se situe dans un replat de la pente exposée nord, dans ce que nous avons appelé le "bourrelet à myrtilles". La végétation est principalement composée dePicea abies etVaccinium myrtillus. Aucun élément grossier n’est visible en surface, que ce soient des blocs ou des cailloux calcaires. La séquence d’hori-zons décrite à partir du profil est la suivante : OF/AE/A/E/Eg/BPsg/Mm.

Le profil est creusé après une longue période sèche.

– OF (0-14 cm) : composé de la litière apportée parVaccinium myrtillus, Picea abies et des mousses. Son activité biologique est assurée par les racines de Vaccinium myrtillus et par des champignons. Le pH est de 4 (pH-mètre Hellige) et l’horizon est non carbonaté.

– AE (14-23 cm)(correspond à la référence 1.1 dans le tableau de résul-tat, annexe B.2) : cet horizon présente une texture limoneuse fine et une structure grumeleuse. Sa couleur est noir gris et vaut 10 YR 4/2 d’après le code Munsell. La quantité de racines diminue et ces dernières deviennent plus petites. Le pH H2O est de 3.8. La perte au feu donne un taux de matière organique de 18% alors que le dosage du carbone organique vaut 17%. Avec une valeur faible en azote (0.4%), le rapport

5.6. RÉSULTATS & INTERPRÉTATIONS 67 C/N est très haut (42) et dénote une faible activité biologique.

– A (23-28 cm)(1.2) : étonnamment, cet horizon d’apparence plus noire se situe en dessous du précédent. Sa couleur a une valeur de 10 YR 4/3. Il est encore plus acide que celui du dessus car son pH H2O est de 3.6. La principale différence avec l’horizon AE est sans doute au niveau du taux de carbone organique qui baisse (12%) et surtout de la valeur d’azote qui double (0.8%). De ce fait, le rapport C/N varie énormément et vaut 15. La texture est identique alors que la structure passe de grumeleuse à grumeleuse subpolyédrique.

– E (28-35 cm)(1.3) : les principales différences sont issues de la structure et de la couleur. Nous passons de quelque chose de meuble, facilement travaillable à un horizon plutôt compact. Le code Munsell donne une valeur plus claire qu’avant (10 YR 6/2) traduite par une teinte grise avec des taches plus foncées. La texture reste très limoneuse (76% de limons). L’activité biologique est invisible dans cet horizon. Le taux carbone organique est presque nul (1.5%).

– Eg (35-47 cm)(1.4) : il ressemble en tout point au précédent, si ce n’est que les taches noires sont remplacées par d’autres de couleur rouille.

Le code Munsell vaut 10 YR 7/2.

– BPsg (47-62 cm)(1.5) : cet horizon est singulier. D’une part, il présente un aspect de zone de battement de nappe. Il est de teinte bleutée avec de nombreuses taches rouille (Munsell 2.5 Y 7/2). D’autre part, une augmentation de l’aluminium sous forme organominérale est mesurée.

La texture devient argilo-limoneuse et la structure reste identique. Le pH H2O remonte à 5.9 et on retrouve une certaine activité biologique par la présence de racines de taille moyenne à grande.

– Mm (47-... cm) : cet horizon est fortement carbonaté (4/4 au testHCl) et un pH de 7 est mesuré (pH-mètre Hellige). Sa couleur est jaunâtre.

C’est un horizon meuble composé par les marnes de l’Argovien.

Un problème, le nom

La première difficulté pour nommer ce sol provient de la probable soliflu-xion de ce solum : sous le OF, il y a un horizon plus clair (AE) puis une couche plus foncée (A). Comment expliquer cette différence de couleur ? La première possibilité est un enrichissement en matière organique. La perte au feu vient confirmer cette hypothèse. Or la source de matière organique se situe dans l’OF, donc l’horizon AE (1.1 dans les tableaux de résultats) devrait être plus organique que le A (1.2) dans une vision d’enfoncement progressif décrit entre autre par Legros (2007). Une différence granulométrique peut aussi éclaircir le AE. En effet, si la texture devient plus grossière, par exemple plus riche

en sable de quartz, l’horizon va s’éclaircir. Mais cette solution est à rejeter car la granulométrie montre une texture quasiment identique. Enfin, la zone supérieure de battement de nappe peut blanchir l’horizon mais dans le cas présent, la nappe ne monte pas si haut. Des apports sub-autochtones par ruissellement diffus semblent être une bonne solution. Pour appuyer cette hypothèse, il est possible de décrire notamment la topographie et la végéta-tion de la zone de creusement. Dans une pente relativement constante, on retrouve en montant une petite butte d’un mètre de haut, puis un replat et enfin la pente qui recommence. C’est un bourrelet de solifluxion. Pour ce qui est de la végétation, des espèces calcifuges ne poussent que sur ce monticule, ce qui tend à démontrer qu’une différence d’épaisseur de substrat isole les plantes des marnes calcaires de l’Argovien sous-jacentes3.

Un second problème dans la dénomination de ce profil est la présence d’une zone de battement de nappe. Elle "affecte la morphologie et les car-actéristiques analytiques des podzosols", selon le Réferentiel pédologique (AFES, 1995). Il y a une perte en fer par réduction de F e3+ en F e2+ qui est plus mobile et est évacué du profil. De plus, la complexation entre des composés organiques et le fer se fait de préférence entre des acides humiques ou/et fulviques et le fer ferreux. Ces chélats ainsi formés sont, eux aussi, mobiles et peuvent être emportés par chéluviation (Gobat et al., 2003). Ces deux phénomènes ont pour conséquence d’appauvrir le sol en fer. Le rap-portF eox ou pyro/Alox ou pyro(soit les formes les plus mobilisables) est le plus faible de tous les sols de la zone d’étude pour les deux horizons présentant des traces d’oxydo-réduction. L’aluminium et les complexes alumino-organiques sont plus stables face à cette anoxie possible (Bouyeret al., 1978). Il faut donc observer la podzolisation à travers l’aluminium et non le fer tout en gardant en tête que l’aluminium est mobilisé plus rapidement que le fer et peut donc traduire une évolution plus marquée (Duchaufour, 1983; Righi, 1984). L’alu-minium extrait avec une solution de pyrophosphate (Rouiller, 1981) puis dosé donne une mesure sur la quantité de complexes organo-métalliques traduisant la podzolisation (Gobat et al., 2003). Il y a une augmentation de la concen-tration des chélats dans l’horizon PBsg par rapport à l’horizon Eg (1.4).

La conclusion est qu’il y a bien podzolisation. Mais est-elle vraiment encore d’actualité lorsqu’il y a des battements de nappe ? La réponse est oui. Le processus ne se fait plus en majorité par le fer mais par l’aluminium.

Il s’agit donc bien d’un podzosol ocrique - rédoxisol soliflué.

3voir le chapitre 4.

5.6. RÉSULTATS & INTERPRÉTATIONS 69

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