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4.5 Le banc MITHIC

4.5.2 SLM et imagerie à haut contraste

Le SLM (« Spatial Light Modulator ») est un composant dont le but est, tout comme un DM, de modifier le front d’onde dans un système optique. Un SLM, dont le principe de fonctionnement est illustré sur la figure4.11, est constitué d’une matrice de cristaux liquides (nous parlerons par la suite de « pixels SLM »). L’orientation de ces cristaux est contrôlée par l’application d’un signal DVI de manière à introduire un déphasage donné sur chaque pixel SLM.

L’avantage principal de ces composants est de permettre de contrôler des aberrations de très hautes fréquences spatiales : en effet, le SLM installé sur MITHIC est constitué d’une matrice de 792× 600 pixels SLM de 20 × 20 µm. Ainsi, sur le diamètre de la pupille d’entrée du système (D = 5,5 mm) se trouvent 275 pixels SLM, permettant ainsi de contrôler des hautes fréquences spatiales de la phase.

Ces composants souffrent toutefois de plusieurs limitations, à commencer par leur lenteur (la bande passante est de 60 Hz) et leur chromatisme. Néanmoins, ces deux caractéristiques ne sont en rien un problème pour le cas qui nous intéresse, à savoir la calibration d’aberrations quasi-statiques (pas de correction rapide requise) réalisée à l’aide d’une source monochromatique.

La limitation la plus critique réside ici dans l’état de polarisation du faisceau incident requis par le SLM. Considérons le champ électrique ψ incident : ce dernier est formé de deux composantes ψs et ψp polarisées rectilignement dans les directions orthogonales (s) et parallèle (p) au plan d’incidence (respectivement), soit :

ψ = ψsespep, (4.5.1)

avec es et ep les vecteurs unitaires dans les directions s et p. Le SLM ne permet de modifier la phase que de la composante ψp du champ électrique ψ. Par conséquent, pour travailler avec le SLM, il est indispensable de réduire la composante ψsdu champ incident autant que possible, dans la mesure où cette dernière n’est pas affectée par le SLM. C’est la raison de la présence du banc fibré sur MITHIC (voir figure 4.10) qui permet de minimiser l’intensité de la composante ψs du champ incident ψ sur le SLM. Remarquez que l’usage d’un composant fibré permet de polariser le faisceau tout en évitant d’introduire des aberrations ou réflections parasites sur le banc, ce qui aurait été inévitable en ajoutant un polariseur plus conventionnel sur le banc lui-même, devant le SLM.

Obj. f = 45 mm Cube f = 100 mm Polar. PixelLink f = 100 mm HASO + LIP SLM Iris

FIGURE4.12 – Représentation schématique du banc de test intégré pour la caractérisation du SLM. 4.5.2.2 Caractérisation

Avant d’être intégré sur le banc MITHIC, le SLM a été installé sur un petit banc de test conçu pour l’occasion afin de pouvoir évaluer les performances de ce composant. Ce banc de test, présenté

sur la figure 4.12, comprend notamment un HASO, ASO commercial de type Shack-Hartmann

permettant ici de mesurer les déformations du front d’onde introduites par le SLM, et une caméra permettant de réaliser des images plan focal.

Pour s’assurer du bon fonctionnement du SLM et de la pertinence de l’intégration d’un tel composant sur MITHIC, plusieurs tests, présentés ci-après, ont été réalisés.

Stabilité : pour pouvoir être utilisé sur MITHIC, le SLM doit impérativement être stable, i.e. les aberrations introduites avec ce composant ne doivent pas évoluer au cours du temps. Pour s’assurer de la stabilité du SLM, une carte d’aberrations donnée a été introduite par ce dernier ; 10 fronts d’ondes ont ensuite été mesurés avec le HASO dans un intervalle de temps de 5 minutes. Ces 10 mesures ont ensuite été comparées entre elles pour évaluer la stabilité du SLM. Le résultat de ce test est présenté sur la figure4.13, où l’on peut constater la très bonne stabilité du SLM : les variations de phases calculées sur les 10 mesures réalisées par le HASO valent en effet 0,38 nm RMS en moyenne.

Linéarité : pour permettre de tester de nouveaux concepts d’ASO tel que COFFEE, le SLM doit être capable d’introduire convenablement une aberration d’amplitude donnée. Aussi, pour tester la linéarité du SLM, des aberrations d’amplitude variant de −1000 nm RMS à 1000 nm RMS ont été introduites à l’aide du SLM, puis mesurées avec le HASO.

Le résultat de ce test est présenté sur la figure4.14dans le cas d’une aberration de défocus (Z4), où l’on peut constater la très bonne linéarité du SLM. Remarquez ici que les valeurs mesurées sur le HASO sont systématiquement plus petites que celles théoriquement introduites sur le SLM. Ce phénomène provient du diamètre de la pupille, légèrement plus petit sur le banc de test (figure4.12) que le diamètre théorique.

Efficacité de polarisation : comme nous l’avons évoqué en section 4.5.2.1, le SLM ne fonc-tionne qu’en lumière polarisée linéairement dans la direction p (voir section4.5.2.1). Il a par

consé-4.5. LE BANC MITHIC 20 40 60 80 100 Zernike modes −10 0 10 20 30 40 50 Amplitude (nm RMS) WF 1 WF 2 WF 3 WF 4 WF 5 WF 6 WF 7 WF 8 WF 9 WF 10 20 40 60 80 100 Zernike modes 0.05 0.10 0.15 0.20 0.25 0.30 0.35 Standard dev. (nm RMS)

FIGURE 4.13 – Évaluation de la stabilité de la phase introduite sur le SLM : a gauche, tracé des 100 premiers modes de Zernike calculés à partir des 10 mesures de front d’onde successives. A droite, écart-type calculé pour chaque mode de Zernike à partir des 10 mesures de front d’onde successives. 10 20 30 40 Zernike modes −600 −400 −200 0 200 400 600 Amplitude (nm RMS) Z4 = −1000 nm RMS Z4 = −800 nm RMS Z4 = −600 nm RMS Z4 = −400 nm RMS Z4 = −200 nm RMS Z4 = 0 nm RMS Z4 = 200 nm RMS Z4 = 400 nm RMS Z4 = 600 nm RMS Z4 = 800 nm RMS Z4 = 1000 nm RMS −1000 −500 0 500 1000 Instroduced Defocus (nm RMS) −1000 −500 0 500 1000 Measured Defocus (nm RMS) Theory Estimation : HASO Linear fit

FIGURE 4.14 – Test de la linéarité du SLM : mesure d’une rampe de défocus introduite avec le SLM. A droite : tracé des 100 premiers modes de Zernike lors de l’introduction des 11 ampli-tudes de défocus. A droite, tracé de la rampe de défocus mesurée. En rouge, amplitude de défocus théoriquement introduite ; en vert, amplitudes mesurées à l’aide du HASO.

FIGURE4.15 – Quantification de l’intensité du signal résiduel sur le détecteur : répartition d’inten-sité obtenue sur la caméra avant (en bas) et après (en haut) introduction d’un Tip de 86 rad RMS sur le SLM.

quent été indispensable de quantifier la quantité de signal résiduel après réflexion sur le SLM, i.e. la quantité de signal sur le détecteur dont la phase n’est pas affecté par le déphasage introduit par le SLM. Pour réaliser ce test, une forte valeur de tip (86 rad RMS) a été ajouté sur le SLM. L’in-troduction d’une telle aberration se traduit, sur le détecteur, par un décalage de la FEP créée par le signal polarisé dans la direction p de 350 pixels (sachant que l’échantillonnage sur le détecteur est de 6,4 pixels par λ/D). Par conséquent, il ne reste, à la position initiale de la FEP, que la partie du signal non affectée par le tip introduit par le SLM.

L’intérêt de ce test est double : tout d’abord, il permet de mesurer l’intensité de la fraction du signal non affecté par le déphasage induit par le SLM. Si cette dernière est trop importante, il peut être envisageable d’utiliser le SLM en ajoutant systématiquement à toute aberration introduite sur le SLM une forte valeur de tip. Un tel procédé permettrait de n’utiliser que la fraction du signal affectée par le SLM, qui serait alors déplacée à une position bien distincte du signal résiduel présent dans le plan focal.

La figure4.15présente les images acquises en plan focal avant et après introduction du Tip sur le SLM. Dans ce dernier cas, on voit clairement le signal se séparer en deux parties : l’une, polarisée dans la direction p, est affecté par le tip introduit par le SLM et se déplace donc sur le détecteur, et l’autre, non affectée par le déphasage induit par le SLM, voit sa position inchangée. Cette mesure permet de quantifier l’intensité du signal résiduel, qui vaut 6% de l’intensité totale mesurée dans le plan focal. Sur la figure4.15, on peut par ailleurs constater que lors de l’introduction d’une forte valeur de tip, la FEP affectée par la présence du SLM est non seulement décalée, mais également fortement déformée. Ce phénomène, qui n’est aujourd’hui pas expliqué (y compris par la société

4.5. LE BANC MITHIC commercialisant le SLM), interdit ici de travailler avec le SLM en ajoutant une forte valeur de tip, comme nous l’envisagions précédemment. En effet, les systèmes d’imagerie coronographiques étant particulièrement sensible à toute déformation de la FEP, il y a fort à parier qu’une telle déformation aurait des conséquences désastreuses sur le niveau de contraste obtenu sur le détecteur, limitant fortement tout test lié à l’optimisation du contraste en plan focal.

Suite à cette observation, il a été décidé d’utiliser le SLM sans ajout de tip-tilt. Dans ce dernier cas, il convient dès lors de régler le polariseur situé devant le SLM pour optimiser la qualité de la polarisation du signal incident, i.e. pour minimiser la quantité de signal résiduel présent sur le détecteur scientifique (rappelons que la quantité de signal résiduel vaut alors 6% de l’intensité totale sur le détecteur).