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Le Color Glass Condensate

7.3. FAITS EXPÉRIMENTAUX MARQUANTS 107

7.4.2 Simulations AliRoot

Pour pouvoir comparer les résultats obtenus dans le cadre du CGC à ceux du modèle MNR, nous devons être le plus proche possible des conditions dans lesquelles les simulations de référence ont été effectuées. Celles-ci se découpent en trois étapes :

– la génération des quarks via le générateur Monte Carlo PYTHIA. Le logiciel PYTHIA est destiné à simuler et décrire les collisions de particules élémentaires (électron et proton) à haute énergie. Il prend en compte de nombreux aspects physiques tels que les distributions partoniques du proton et des noyaux (via le modèle de Glauber et les facteurs de modifications nucléaires EKS98 pour ce dernier), les processus d’interaction durs et mous au Leading-Order, les interactions multiples. Les processus NLO et NNLO sont approximés via l’émission de gluons et photons à partir des quarks ce qui nécessite d’ajuster certains paramètres tel que le ktdes partons pour reproduire les différents modèles proposés ;

– la fragmentation des paires de quarks produites ; – la décroissance leptonique des hadrons.

7.4. SIMULATIONS 117

Une partie de ce travail a donc consisté d’intégrer dans AliROOT un générateur de quarks c et b, à partir des résultats issus des codes fournis par F. Gelis. Il a été conçu pour que, selon le modèle étudié lors des simulations (CGC ou MNR/PYTHIA), le traitement de données dans le code de reconstruction soit identique.

Fragmentation

Aux tout premiers instants de leur création, les quarks q et q interagissent entre eux via leur charge de couleur. Lorsque ces quarks se séparent (leur impulsion n’étant pas identique), l’échelle d’énergie qui caractérise le système diminue et le potentiel d’interaction forte augmente. Lorsque la densité d’énergie du milieu inter-quark est suffisamment grande, une nouvelle paire de quarks (u, d ou s) secondaires est créée à partir du vide ; chacun de ces quarks secondaires s’associe alors avec l’un des deux quarks initiaux. Ce processus, dit de fragmentation, se répète jusqu’à ce que la masse invariante des paires produites soit voisine de la masse du hadron.

Une partie du processus d’hadronisation appartient au régime non perturbatif de la QCD (lorsque Q2 < λQCD). Les physiciens ont donc recours à des modèles phénoménologiques associés à des fonctions dites de fragmentation. Ces dernières donnent la probabilité qu’une fraction z de l’impulsion du parton soit emportée par le hadron (7.3). Ce facteur z permet de calculer l’énergie et l’impulsion d’un hadron à partir de celles du quark.

z = (E + pk)H

(E + p)q (7.3)

où pk est la composante de l’impulsion du hadron dans la direction de propagation du quark. Concernant la fragmentation des quarks lourds, les fonctions les plus souvent citées sont :

– la fonction de Lund modifiée[34] pour tenir compte des effets de masse de quarks lourds,

f (z) ∝ z1+RHbm2 Hza(1 − z z ) bexp(−bm 2 T z )

où RH et b sont des paramètres libres fixés expérimentalement en fonction des quarks et hadrons étudiés. – la fonction de Peterson[35], f (z) ∝ 1 z(1 − 1zH 1−z)2 avec un paramètre Hm12 H

, mH étant la masse du hadron. – fonction δ.

Fig. 7.18 – Fonctions de fragmentation pour les quarks c (gauche) et b (droite).

Dans le cadre des collisions hadroniques, et plus particulièrement pour les ions lourds, il existe une incertitude sur l’universalité de ces fonctions lorsqu’il s’agit des paires de quarks de basse masse. La pré-sence de nombreux partons peut influer sur les processus de fragmentation favorisant les processus de coalescence. Par exemple, un quark de la mer d’un noyau peut s’associer avec l’un des quarks lourds issus

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d’un processus dur du type gg → qq. Le méson ainsi formé possède une impulsion plus grande que celle du quark lourd initial. Le rapport z est dans ce cas supérieur à l’unité. Puisque lié au faisceau, cet effet, communément appelé beam-drag, est plus propice dans la région des grandes rapidités.

Les figures7.18représentent les différentes fonctions de fragmentation en fonction de z pour le charme et la beauté. La fonction de fragmentation de Lund présentée a été extraite des simulations issues de PYTHIA et prend en compte les effets de beam-drag. Les spectres de hadrons présentés dans la PPR sont produits avec une fonction de fragmentation de Lund. Le quarks b étant plus lourds, la fraction d’impulsion z emportée par le hadron tend vers 1 et les effets de beam-drag sont moins importants qu’avec le charme. Initialement utilisée pour décrire les collisions lepton-lepton, la fonction de Peterson se limite quant à elle à z ∈ [0, 1].

Des études menées auprès des expériences du RHIC ont montré que pour avoir une meilleure concor-dance entre les données et les prédictions théoriques à haut pt, les fonctions de fragmentation des quarks lourds peuvent être assimilées à une fonction δ(1) [36] [37].

Comme nous venons de l’évoquer, pour une saveur donnée, les paramètres des fonctions de fragmen-tation dépendent du méson considéré et fixent les taux de production de ces derniers. Pour des raisons de simplicité, ces paramètres ont été fixés ; par exemple, dans le cas de la fonction de Peterson, le paramètre retenu est  = 0.06(0.006) pour le charme (beauté). Les taux de production utilisés pour cette étude sont les suivants [38] :

Méson D+ D0 D+s Λc

Taux de production (%) 20 60 12 8

Méson B+ B0 Bs+ Λb

Taux de production (%) 41 40 12 7

Tab. 7.6 – Taux de production des mésons D et B.

Production des mésons dans les simulations

Comme nous allons le voir, le choix des fonctions de fragmentation peut avoir une grande influence sur la cinématique des mésons produits, et donc implicitement sur celle des muons. Il est à noter que les observations faites dans ce chapitre au sujet du charme sont valables pour la beauté avec des effets moindres.

Les figures 7.19 (du haut) représentent le spectre des mésons issus du charme en collisions proton-proton à 8.8 TeV pour les fonctions de fragmentation précédemment évoquées. Le spectre des quarks c père est indiqué en trait plein et constitue notre référence. Nous retrouvons les effets suivants :

– la fonction de Peterson étant définie pour un z compris entre [0, 1], le mécanisme de fragmentation tel qu’il est modélisé, tend à dépeupler la région de grande rapidité et de grand pt;

– la fonction δ revient à considérer que la cinématique du méson est quasi-équivalente à celle du quark ce qui est compatible avec les résultats des simulations ;

– la fonction de fragmentation “Lund+Beam-drag” est quant à elle définie pour des z plus grands que l’unité à cause des effets de beam-drag qui ont donc tendance à favoriser la région des grands pt. Le tableau7.7montre les paramètres de l’ajustement avec les fonctions de l’équation7.2et (p1

t)asur les distributions des mésons issus des différentes fonctions de fragmentation. Selon le modèle utilisé, il apparaît que le comportement à haut pt de la distribution des mésons est grandement influencé par le modèle de fragmentation utilisé : cette distribution décroît en p5.531

t

pour Peterson à p3.631 t

(Lund+Beam-drag). Les figures 7.19 du bas représentent le rapport RP b−p en fonction de y et pt une fois le processus de fragmentation effectué. Selon la fonction de fragmentation considérée, le comportement du rapport RP b−p reste identique mais avec les caractéristiques suivantes :

– le comportement du rapport RP b−pen fonction de y est peu affecté par les processus de fragmenta-tion ;

7.4. SIMULATIONS 119

Paramètres Peterson δ(1) Lund+Beam-drag Ajustement via la fonction de l’équation 7.2

p(0)t (GeV/c) 1.21 2.11 1.35

n 1.86 2.03 1.49

Ajustement via la fonction de l’équation (p1 t)a

a 5.53 3.92 3.63

Tab. 7.7 – Paramètre des ajustements réalisé sur les distributions des mésons : les fonctions utilisées sont identiques à celles des quarks.

– le rapport RP b−p associé à la fonction de fragmentation de Peterson tend plus rapidement vers 0.9 à grand pt que celui des quarks. Le rapport RP b−p à partir des mésons laisse apparaître des effets de diffusion plus importants par rapport à celui des quarks ;

– à contrario, les distributions proposées par la fonction de fragmentation de “Lund+Beam drag” aboutissent à un rapport RP b−p plus monotone en tendant plutôt vers 0.8 à grand pt. Ceci se manifeste comme une minimisation des effets de diffusions multiples et à un effet de shadowing plus important par rapport à ceux observés avec les quarks.

y (rapidity) -8 -7 -6 -5 -4 -3 -2 -1 0 1 (a.u.) dy dN 0 0.005 0.01 0.015 0.02 0.025 0.03 quark c - CGC - pp@8.8TeV Meson D - Peterson Meson D - Lund Meson D - Delta (GeV) t p 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 (a.u.) t dp dN -4 10 -3 10 -2 10 quark c - CGC - pp@8.8TeV Meson D - Peterson Meson D - Lund Meson D - Delta (GeV) t p 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Pb-p R 0.2 0.4 0.6 0.8 1 1.2 quark c - CGC - pp@8.8TeV Meson D - Peterson Meson D - Lund Meson D - Delta y (rapidity) -7 -6 -5 -4 -3 -2 -1 Pb-p R 0.2 0.4 0.6 0.8 1 1.2 quark c - CGC - pp@8.8TeV Meson D - Peterson Meson D - Lund Meson D - Delta

Fig. 7.19 – En haut : distributions en rapidité et en pt des mésons issus de différentes fonctions de fragmentation. Le spectre en trait plein correspond à celui des quarks associés produits en collisions proton-proton à 8.8 TeV. En bas : rapport RP b−p effectué sur les mésons D issus des quarks c pour les différentes fonctions de fragmentation.

Selon le mode de fragmentation considéré, les effets nucléaires peuvent être observés via la mesure des mésons. Après avoir étudiée les spectres des mésons, nous allons nous intéresser à ceux des muons issus de leur décroissance, et en particulier dans l’acceptance du spectromètre à muons du détecteur ALICE. Tous les résultats présentés par la suite utiliseront une fonction de fragmentation de type Peterson.

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