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Le programme SRIM permet de déterminer la trajectoire des ions incidents lorsqu’ils pénètrent dans un matériau et leurs distributions spatiales en fonction de la profondeur. Le calcul des distributions est basé sur une méthode Monte-Carlo [22, 93, 68]. On présente, dans cette section, une première simulation où le film de chalcogénure de 33 nm ne contient aucune impureté en surface et une seconde où l’échantillon est contaminé par du carbone et de l’oxygène (3 nm). L’intérêt est de vérifier leurs influences sur les distances parcourues, et la proportion relative de la zone implantée comparativement à cette zone contaminée. L’oxydation sur la couche mince se produit au moment où les nanocalorimètres sont transférés de la chambre de dépôt à la chambre d’implantation. À la figure 5.1, la partie gauche de chaque graphique comprend les résultats de la simulation de la couche mince qui ne contient

pas de contamination en surface. Dans la partie droite, on illustre celle de l’échantillon contaminé. En(a), les deux graphiques illustrent la trajectoire des ions incidents, alors qu’en

(c) on montre les atomes de la cible déplacés lors de la cascade de collisions. La figure5.1 (c)

permet d’apprécier la concentration, par unité de surface, des ions ou des atomes déplacés en fonction de la profondeur et d’une dimension latérale.

On remarque à la figure 5.1 (a) et (c) que les ions Au n’atteignent pas la surface du nanocalorimètre, et cela, dans les deux situations étudiées. Les particules ont une probabilité de présence élevée de se retrouver à une profondeur de 85 ± 38 Å dans le film non contaminé. On les retrouve en moyenne dans la couche de GST oxydée en surface à une profondeur de 79 ±24 Å. Bien que les ions aient un parcours projeté situé autour de 85 et 79 Å respectivement, ils provoquent des cascades de collisions sur une plus grande distance. Certains atomes déplacés peuvent avoir atteint l’interface avec le SiN, mais cela demeure un effet négligeable en comparaison de l’effet de la couche de surface, déjà faible. C’est ce qu’indique le graphique

(b). Cette simulation démontre donc que l’énergie d’un faisceau de particules situées entre 10 et 12 keV est appropriée pour étudier la relaxation du verre de chalcogénure après impact ionique d’Au, puisqu’aucun ion incident n’atteint la surface du substrat, tout en affectant une zone dont la partie potentiellement contaminée ne représente qu’une petite partie. La zone affectée demeure de dimension simulable dans le cadre du déploiement de méthodes numériques atomistiques pour étudier l’évolution d’un verre et la comparer à nos résultats.

Notons au passage que si la zone paraît large pour un grand nombre d’ions simulés, pour un seul ion isolé, cette zone n’est que d’environ 3 nm autour du parcours de l’ion. Ainsi, pour de faibles fluences (1012 Au/cm2), on pourra considérer les zones affectées comme iso-

lées les unes des autres. La probabilité que ces régions isolées se chevauchent (recouvrement) est donc négligeable. La mesure de calorimétrie sera subséquemment une moyenne sur un ensemble de zones isolées (voir Figure 5.2 (a)). À mesure que la fluence augmente, les ré- gions endommagées se recouvrent ce qui conduit à la formation d’une couche amorphe. Ce phénomène peut être représenté par l’équation suivant :

fa = 1 − e(−σaϕ) (5.1.1)

où fa, σa et ϕ représentent la fraction des atomes déplacés, la section efficace d’amorphi- sation et la dose ionique [88, p. 343]. Autrement dit, la probabilité qu’un ion incident impact une région non irradiée est donnée par 1 - fa. Subséquemment, une valeur de fa proche de 1 signifie que les régions emdommagées et ponctuelles finissent par se recouvrer et qu’en moyenne, les atomes sont déplacés une fois de leurs sites respectifs (dpa > 1).

(a) Représentation de zones endommagées dans un ma- tériau par des fluences d’implantation faibles (partie de gauche) et élevées (seconde moitié) [83]. Les zones désor- données occasionnées par les cascades de collision autour de la trajectoire des ions incidents sont considérées comme étant isolées à faible fluence. Celles-ci se recouvrent à plus forte fluence ce qui conduit à l’amorphisation de la région (dommage uniformément distribué) [71].

(b) Distribution en profondeur du recul des atomes Ge, Sb et Te après le passage des d’or de 12 keV dans la couche mince de GST.

Figure 5.2. Répartition du recul atomique selon la profondeur et schéma- tisation des régions endommagées par l’injection d’ions lourds Au de 12 keV dans le verre GST : 225. L’angle d’incidence est de 7◦.

La figure5.2 (b)illustre un graphique de la répartition du recul atomique (atomes dépla- cés de la cible de GST), en fonction de la profondeur, engendré par le passage de particules d’or de 12 keV. À partir de celui-ci, on déduit que le nombre médian des atomes, hors posi- tion initiale, dans le volume impacté par les ions incidents (dpa). Pour ce faire, on multiplie la moyenne des ions déplacés (axe des y) par la fluence. On divise ensuite cette valeur par la densité du matériau (∼ 3.08 × 1022 at/cm3). On détermine ainsi un dpa situé entre 0.27 et

0.47 pour une fluence de 1014Au/cm2 et une profondeur approchant 85 ± 38 Å. L’amplitude

de ce nombre est de 10 à 100 fois plus faible pour les autres fluences examinées (1012 à 1013

Au/cm2).

Mentionnons également que la densité du GST est d’environ 3 × 1022 at/cm3, et qu’en

considérant 30 nm d’épaisseur, les couches comportent approximativement 1 × 1017 at/cm2.

Conséquemment, plusieurs implantations d’Au à 1014 ions/cm2 introduisent moins de 1 %

5.2. Méthode permettant d’extraire les courbes de relaxation

du film GST endommagé par les ions Au

Dans cette section du mémoire est exposée la méthodologie utilisée pour extraire les informations concernant la relaxation du liquide vitrifiable Ge2Sb2Te5. Au premier abord,

on cherche à déterminer la dépendance en température de la relaxation aux environs de la transition vitreuse. Pour cela, il est nécessaire de repérer la température à laquelle débute le processus. Ensuite, on cherche à établir si la fluence d’implantation a un effet sur la température de transition vitreuse. Autrement dit, on désire déterminer si Tg est robuste à l’implantation et si le phénomène se déplace en température lorsque la fluence d’implantation est croissante.

Pour tenter de répondre à ces questions, on commence par relaxer et, pour certaines expériences, cristalliser la couche de GST à l’aide d’une dizaine de balayages en température. Ensuite, on endommage le matériau par faisceau d’ions, de manière à créer des zones loin de l’équilibre dans la structure amorphe. À la suite de cette opération, on effectue dix balayages en température sur l’échantillon, et ce, jusqu’à la même température où il a été précédemment relaxé ou cristallisé. Le premier balayage renferme les informations globales de l’expérience (masse thermique, relaxation, et éventuellement, cristallisation). Les signaux subséquents contiennent uniquement celles sur la capacité calorifique de la masse déposée (Cp, L.B. dépôt),

incluant la transition vitreuse dans le cas où l’échantillon n’est pas cristallisé. Ils sont utilisés comme ligne de base pour déterminer la chaleur relâchée par la relaxation lors du 1ebalayage. Pour déterminer la chaleur relâchée en fonction de la température pendant le processus de relaxation, on soustrait la moyenne des mesures 2 à 10 (ligne de base) du 1e signal (valide pour une seule expérience de NC). Le premier balayage contient la mesure expérimentale de l’ensemble des processus ayant lieu, y compris la relaxation et, éventuellement, la cris- tallisation. Une expérience de mise hors-équilibre et de NC (comportant 10 balayages) est généralement répétée entre 5 et 10 fois pour chaque fluence d’implantation. Ce qui engendre un nombre total de signaux situé entre 50 et 100 pour chaque fluence. Le premier signal de chaque série de 10 balayages est regroupé et moyenné (5 à 10 mesures). Il en est de même pour les lignes de bases. Les signaux 2 à 10 de chaque ensemble de 10 balayages sont moyen- nés (45 à 90 signaux). (À noter qu’on a soustrait de cette mesure la ligne de base avant le dépôt, c.a.d. la différence intrinsèque entre le calorimètre échantillon et référence, ainsi que les corrections évoquées à la section 2.2). La soustraction de la moyenne des "balayages subséquents" (de la moyenne) du premier balayage montre donc la partie non-réversible de la capacité calorifique après implantation, que nous associons à la relaxation s’il n’y a pas

50 100 150 200 T (°C) -1 -0.5 0 0.5 1 1.5 2 Heat flow (J/K) #10-7 Ge2Sb2Te5 : 10 13 Au/cm2 (32.1 nm magnetron) Relâchement de chaleur Relaxation ---> Relaxation 1er balayage Moyenne balayages 2 à 10

différence --> 1e balayage - balayages subséquents

(a) Explication schématique des calculs servant à ex- traire les informations de relaxation et de transition vitreuse des couches GST. On observe la forme que prennent les courbes calorimétriques selon la ligne de base utilisée. Les résultats présentés sont ceux mesu- rés pour une série de 10 implantations à une fluence de 1013 Au/cm2. 0 50 100 150 200 T (°C) -5 0 5 10 15 20 Heat flow (J/K)

#10-8 GST:225 moyenne implantation 1012 - 1014 Au/cm2

moyenne 1012 Au/cm2 : L.B.

moyenne 1013 Au/cm2 : L.B. moyenne 1014 Au/cm2 : L.B. moyenne 1012 Au/cm2 : L.B. depot

moyenne 1013 Au/cm2 : L.B. depot

moyenne 1014 Au/cm2 : L.B. depot sans implantation L.B. sans implantation L.B. depot moyenne 1014 Au/cm2 : L.B. - L.B. depot moyenne 1013 Au/cm2 : L.B. - L.B. depot

moyenne 1012 Au/cm2 : L.B. - L.B. depot

y=0

T g

(b) Thermogramme des moyennes des expé- riences d’implantation à une fluence de 1012,

1013 et 1014 Au/cm2 sur le matériau GST de

32 nm d’épaisseur. La notation a1, b1 et c1 fait référence à la fluence utilisée durant la 1e expérience d’implantation. De même, celle

concernant (lb x,y) et (exp x,y) est en lien avec le nombre de splines utilisés pour lisser les signaux bruts de voltage.

Figure 5.3. Thermogramme des expériences nanocalorimétriques de la couche mince GST.

eu cristallisation. Si la température atteinte est suffisamment élevée pour que la cristallisa- tion ait lieu, ce signal exothermique est également présent dans la différence, mais aussi une contribution de la transition vitreuse (comme nous l’avons observé au chapitre précédent, sans la relaxation), puisque cette dernière n’est plus observée dans le matériau cristallisé donc dans les balayages subséquents. Résumons la situation :

Sans cristallisation :

• signal 1er balayage = Cp GST + Cp transition vitreuse + relaxation • signaux balayages subséquents = Cp GST + Cp transition vitreuse • différence —> relaxation

Avec cristallisation :

• signal 1erbalayage = Cp GST + (Cp transition vitreuse) + relaxation + cristallisation • signaux balayages subséquents = Cp GST

• différence —> Cp transition vitreuse + relaxation + cristallisation

Les thermogrammes de la figure5.3 (a) exposent graphiquement les données de nanoca- lorimétrie de 10 expériences d’implantation d’or, à une fluence de 1013Au/cm2, dans un film

GST de 32 nm. Dans cet exemple, la température maximale atteinte n’a pas été suffisante pour qu’il y ait cristallisation. Les courbes identifiées 1er balayage correspondent aux pre- miers balayages de ces 10 expériences (10 implantations différentes sur le même calorimètre). Les courbes identifiées "balayages subséquents" représentent chacune la moyenne des 9 ba- layages suivants. Puisque 9 mesures sont moyennées, cet ensemble de courbe est plus lisse et est tout à fait reproductible. On observe que la capacité calorifique, des courbes résultant de cette différence, est à peu près nulle entre 20 et 110 ◦C. Le nombre très petit d’atomes

ajoutés par l’implantation n’influence pas Cp du GST. Le relâchement de chaleur par la relaxation commence à 120 ◦C.

Pour déterminer si la fluence d’implantation modifie la température à laquelle la transi- tion vitreuse se produit, on présente les résultats de calorimétrie d’une seconde manière. Ce paramètre n’a un effet sur Tg que si la position de son sommet se déplace en température. Les courbes calorimétriques, pour les différentes fluences utilisées, sont exposées sur la même figure [5.3 (b)]. Graphiquement on repère la capacité calorifique de la masse déposée entre 20 et 120◦C ; soit juste avant le premier processus thermique identifiable (relaxation). Elle a

une valeur de 0,8 × 10−7 J/K qui correspond à 1.00 J/Kcm3 qui n’est pas très éloignée de la

valeur répertoriée de 1.25 J/Kcm3 [82]. Dans la situation où l’implantation a un effet sur Tg,

la capacité calorifique et la transition vitreuse des lignes de base relative à une expérience d’implantation dont la fluence est de 1012 Au/cm2 ne devraient pas être identique à celle

d’une expérience de 1014 Au/cm2 ou celle suivant une analyse calorimétrique après dépôt.

On constate à la Fig. [5.3 (b)] que, suite au premier balayage, les courbes (moyennes utilisées comme lignes de base contenant le dépôt : L. B. dépôt) se superposent presque parfaitement pour les 3 fluences utilisées. On conclut donc que le système se remettre dans le même état relaxé en dépit du désordre structurel auquel il est précédemment assujetti par le dommage ionique. Donc que la transition vitreuse dans un matériau relaxé est indépendante de la fluence d’implantation à laquelle il est précédemment assujetti.

Pour ce qui est de Tg pendant le premier balayage, c’est-à-dire en présence d’un matériau désordonné, ce signal est superposé à celui de la relaxation. Il devient donc un peu plus

difficile de dire si Tg est affecté. Dans le cas de la plus faible fluence (1012 Au/cm2), très

peu de chaleur est relâchée durant la relaxation. Le signal du premier balayage semble même surpasser celui des balayages subséquents, mais nous pensons qu’il s’agit d’une fluctuation comme nous l’expliquerons au prochain paragraphe. Ceci dit, la température de Tg ne semble pas affectée. Pour les fluences plus élevées (1013 et 1014 Au/cm2), la chaleur relâchée par la

relaxation est beaucoup plus importante. On observe néanmoins un pic vers le haut qu’on peut associer à la transition vitreuse. Celui-ci semble se déplacer légèrement vers les plus basses températures, mais il ne faut pas négliger deux aspects. Le premier est qu’un pic du style gaussien superposé sur une droite verra son maximum se déplacer vers le côté élevé de la droite. Ici, la relaxation contribue ce qui semble être une droite de pente négative. Le maximum d’un pic superposé sur une telle droite se déplacera donc vers la gauche. Le second concerne les effets transitoires associés à la fin d’un balayage.

En effet, de manière à éviter la cristallisation qui se produit immédiatement après Tg dans le GST, le balayage en température se termine abruptement juste après Tg. Les voltages fournis au calorimètre s’arrêtent donc abruptement. Or, les données brutes sont relativement bruyantes ce qui requiert de les moyenner et de les lisser au moyen de splines afin de mieux faire ressortir les informations sur la forme du signal [32]. Cependant, près des bouts, ce lissage peut introduire des pics (positifs ou négatifs) en début et en fin de signal (voir an- nexe D). Ce fait survient lorsqu’un point (ou un groupe de points), dans les extremums du domaine considéré, est situé à une coordonnée y qui diffère largement des autres données. Il est nécessaire de bien connaître le thermogramme du matériau étudié afin de corroborer la validité de chaque pic. Dans les mesures présentées à la Fig.5.3, les courbes vont systémati- quement en baissant puisque la cristallisation est sur le point de commencer, mais il subsiste une incertitude quant à la forme exacte de la fin du signal, ce qui peut affecter quelque peu l’évaluation de Tg.

Dans ces circonstances, on peut affirmer que Tg ne change pas à l’intérieur d’une incer- titude estimées à 2 ou 3 ◦C, et résiste donc sans broncher à l’extrême mise hors-équilibre

induite par l’implantation d’ions lourds.

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