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CHAPITRE 5. DENDROPROVENANCE ET RÉSEAUX D’ÉCHANGES DU

5.2 Validation de la méthode de dendroprovenance

5.2.1 Similitudes et différences entre les chronologies rurales

Il existe plusieurs facteurs influençant le degré de corrélation entre les chronologies de site. Parmi ceux-ci, mentionnons la distance séparant les sites, le type d’environnement où ont poussé les cèdres blancs et la puissance des chronologies de site.

Dans un premier temps, plus la distance entre deux sites est courte, plus la valeur de TVBP devrait être élevée. Ainsi, nous nous attendons à ce que les sites rapprochés géographiquement aient de plus grandes similitudes statistiques que les sites plus éloignés les uns des autres. Nous vous référons au tableau 1.2 (p. 21) pour revoir la distance à vol d’oiseau entre les sites. Dans un second temps, les cèdres blancs ayant poussé dans des environnements différents ne présenteront pas nécessairement un schème de croissance similaire. Les cèdres des basses-terres sont donc susceptibles de moins bien corréler avec les cèdres ayant poussé sur un sol rocheux ou sur le flanc d’une falaise. Dans notre corpus, seuls les cèdres de la maison Joanisse ont poussé sur un sol rocheux.

Enfin, la puissance des chronologies de site peut avoir un effet sur les valeurs de TVBP. La puissance d’une chronologie équivaut au nombre maximum d’échantillons

couvrant une année donnée de la chronologie. Une puissance élevée augmente généralement la valeur statistique lors de la comparaison, tandis qu’une faible puissance peut avoir l’effet contraire. Au sein des sites échantillonnés, seules les maison Ménard et Joanisse présente une faible puissance, soit respectivement 5 et 6. La ferme Borris est par ailleurs le site avec la plus grande puissance, soit 37. Le tableau suivant présente la puissance des chronologies et le type d’environnement où ont poussé les cèdres blancs.

Tableau 5.1. Puissance et type d’environnement

Sites Intervalle Puissance max. Puissance de 10 et + Type d'environnement

Maison Ménard 1703-1859 5 - basses-terres

Ferme Borris 1627-1867 37 1680-1850 basses-terres

Maison Joanisse 1687-1891 6 - sol rocheux

Ferme Turcotte 1667-1885 29 1757-1880 basses-terres

Ferme Wood 1643-1837 34 1712-1830 basses-terres

Ferme Wynands 1609-1859 29 1690-1850 basses-terres

Nous avions à l’origine découpé le territoire à l’étude en deux sous-régions, soit la vallée de l’Outaouais et celle du haut Saint-Laurent. Les facteurs influençant la corrélation statistique, notamment la distance entre les sites, nous poussent toutefois à effectuer un découpage plus serré. Aux deux vallées, nous ajoutons donc la proximité de Montréal, qui, sur la base du nombre de kilomètres entre les sites, sera représentée par les sites Ménard, Borris et Wood. Enfin, la maison Joanisse, étant la seule dont les cèdres ne proviennent pas des basses-terres, pourrait démontrer un schème de croissance différent de tous les autres sites.

Afin de valider ce premier découpage, nous avons généré un tableau affichant les valeurs de TVBP entre chacun des sites (tableau 5.2). À partir de ces valeurs nous avons calculé que le seuil statistique minimum pour la détermination de la provenance d’une pièce était de 11,44, selon la méthode d’Haneca et al. (2005). Ainsi, il sera possible d’avancer une provenance exacte pour une pièce si nous obtenons ce seuil. En deçà du seuil, nous pourrons toutefois émettre des hypothèses quant à la région d’approvisionnement en fonction des valeurs de TVBP les plus élevées.

À la lumière des résultats, nous pouvons affirmer que la croissance est plutôt semblable sur l’ensemble de la région étudiée puisque aucun TVBP ne descend en deçà de 8,1. La force des corrélations résulte probablement du lissage important des données brutes généré par l’indice Baillie-Pilcher. Seule la maison Joanisse, située à Saint- André-Avellin, corrèle moins bien avec les autres sites, même si les valeurs de TVBP entre 8,1 et 9,5 demeurent très élevées. Dans le tableau ci-bas, nous avons surligné en jaune les meilleurs résultats statistiques et en vert toutes les valeurs franchissant le seuil de 11,44. 11

Lorsque nous regardons les corrélations entre la maison Ménard et les autres sites, il semble que les pièces issues de cette maison ont un schème de croissance lié à celui de la vallée de l’Outaouais. Nous observons une corrélation de 14,1 et de 12,9 avec les fermes Borris et Turcotte. Les résultats avec les deux sites de la vallée du haut Saint- Laurent sont légèrement plus faibles que le seuil statistique (11,3 et 11,4), tandis que ceux avec la maison Joanisse sont loin derrière (8,1).

La ferme Borris, à Vankleek Hill, présente quant à elle un TVBP au-dessus du seuil statistique avec tous les sites ruraux sauf celui de la maison Joanisse à Saint-André- Avellin, quoique la meilleure valeur de TVBP soit obtenue avec la ferme Turcotte, à Masson-Angers (15,1). La corrélation élevée entre la ferme Borris et les autres sites ruraux semble traduire la grande puissance (n=37) de cette chronologie. À la lumière de

11 Le code des couleurs se lit par colonne.

Tableau 5.2 : Valeur de la corrélation entre les chronologies rurales (TVBP) Vaudreuil-

Soulanges Outaouais haut Saint-Laurent Ménard Maison Ferme Borris Joanisse Maison Turcotte Ferme Ferme Wood Wynands Ferme Maison Ménard 100,0 14,1 8,1 12,9 11,3 11,4 Ferme Borris 14,1 100,0 8,2 15,1 12,9 14,6 Maison Joanisse 8,1 8,2 100,0 9,5 8,2 8,9 Ferme Turcotte 12,9 15,1 9,5 100,0 12,0 11,4 Ferme Wood 11,3 12,9 8,2 12,0 100,0 13,0 Ferme Wynands 11,4 14,6 8,9 11,4 13,0 100,0

ces observations, les résultats obtenus avec la ferme Borris ne pourront pas être utilisés afin de déterminer la sous-région de provenance d’une pièce de cèdre.

La corrélation statistique entre la maison Joanisse et les autres sites ruraux n’atteint pas le seuil statistique minimum. Cette faiblesse relative ne peut, selon nous, être attribuée à la faible puissance de la chronologie (n=6), puisque la maison Ménard, qui possède une puissance moindre (n=5), a démontré une corrélation beaucoup plus élevée avec les autres sites. C’est plutôt l’environnement rocheux dans lequel ont poussé les cèdres blancs, Saint-André-Avellin étant situé à la limite sud du Bouclier canadien, qui peut expliquer un schème de croissance distinct pour ce site. Quoiqu’il en soit, la maison Joanisse corrèle davantage avec la ferme Turcotte qu’avec les autres sites ruraux (9,5), démontrant son appartenance à l’Outaouais.

La ferme Turcotte est le site qui, selon nous, représentera le plus fidèlement le schème de croissance de l’Outaouais dans notre recherche de provenance géographique des pièces montréalaises. Lors de la comparaison entre les sites ruraux, les meilleurs résultats statistiques s’observent avec la ferme Borris et la maison Ménard, alors que nous obtenons des valeurs de TVBP de 12,9 et 15,1. Les corrélations avec les sites de la vallée du haut Saint-Laurent sont légèrement plus faibles, soit de 12,0 pour la ferme Wood et 11,4 pour la ferme Wynands. Ces données statistiques nous obligent à rester prudents quant à la détermination de la provenance géographique des pièces, puisqu’une différence parfois infime semble exister entre les schèmes de croissance des cèdres des deux vallées.

Lorsque nous analysons les données statistiques pour la ferme Wood, à Williamstown, nous remarquons que les corrélations au-dessus du seuil statistique sont obtenues avec les fermes Wynands (13,0) et Borris (12,9). Ainsi, il semble que les cèdres de la ferme Borris, par leur position géographique et écologique, se rapprochent également du schème de croissance des cèdres de la vallée du haut Saint-Laurent. Le même phénomène est observable pour la ferme Wynands qui présente une excellente force statistique avec les fermes Borris (14,6) et Wood (13,0).

À la lumière de cette analyse, nous possédons quelques balises pour déceler la provenance géographique de pièces de cèdre retrouvées en contexte montréalais. Une provenance de l’Outaouais devra être corroborée par une forte corrélation avec la ferme Turcotte. Une provenance du haut Saint-Laurent devra quant à elle être confirmée par des valeurs de TVBP élevées avec les fermes Wood et Wynands. De la même manière, des valeurs élevées avec la maison Joanisse et la ferme Turcotte témoigneraient d’une provenance au nord de la rivière des Outaouais, à la limite sud du Bouclier canadien. Enfin, contrairement à l’hypothèse énoncée ci-haut, rien ne prouve pour l’instant l’existence d’un schème de croissance propre à la proximité de Montréal, regroupant la maison Ménard, la ferme Borris et la ferme Wood. Nous ne laissons toutefois pas tomber cette hypothèse et attendons de voir ce que les autres analyses nous réservent. Ayant analysé les données à l’échelle des chronologies moyennes de site, procédons maintenant à l’analyse entre les individus d’un site avec les chronologies moyennes des autres sites.

5.2.2 Similitudes et différences entre les échantillons d’une chronologie rurale et les

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