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Chapitre 1 : Ingénierie Tissulaire

C. SIGNAUX REGULATEURS

Le comportement cellulaire est fortement influencé par des signaux biologiques,

biochimiques et biophysiques émis par la MEC. Par conséquent, l'utilisation de signaux de

régulation est la troisième composante de la triade de l'ingénierie tissulaire. Ces signaux incluent

notamment des stimuli biochimiques et/ou biophysiques pour induire et régler la formation des

tissus à la fois in vitro et in vivo (18).

Les signaux biochimiques modulent les processus de signalisations cellulaires

responsables de la migration cellulaire, l'adhésion, la prolifération, la différenciation et la survie.

Les facteurs de croissance et cytokines peuvent fonctionner localement ou systématiquement afin

de changer le mode d'expression des gènes dans les cellules cibles. Ils peuvent également être

impliqués dans l’activation ou l’inhibition de la synthèse d’autres facteurs de croissance et

récepteurs. Ces protéines se lient à des récepteurs transmembranaires qui transduisent les signaux

extracellulaires entraînant des changements au niveau de l'expression génique (36,37). Les

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facteurs de croissance et principes actifs modulant la signalisation cellulaire sont largement

utilisés en ingénierie tissulaire, même si leur utilisation peut augmenter considérablement le coût

d'un implant.

En plus des signaux biochimiques, les stimuli biomécaniques influencent également le

comportement cellulaire par un processus connu sous le nom de « mécano-transduction ».

Plusieurs systèmes ont été développés pour induire différents types de stimulation physique à des

cellules en culture, y compris les bioréacteurs en flacon de type « spinner », les bioréacteurs à

perfusion, les bioréacteurs de compression dynamique, et les bioréacteurs de pression

hydrostatique (38). Une stimulation biomécanique appropriée, ex vivo, peut positivement

influencer la différenciation cellulaire, la production de la MEC et, le résultat obtenu après

l'implantation (39). La distribution hétérogène des cellules peut être un obstacle majeur pour le

développement, ex vivo, d’un tissu ou d’un organe en 3D, pour cela des méthodes de

biomécanique optimisées ont été mises au point pour améliorer la distribution cellulaire spatiale

(40).

Une meilleure compréhension du rôle de la MEC dans la régulation des signaux

moléculaires / biochimiques ainsi que physiques a permis le développement d'une nouvelle

génération de biomatériaux. Par exemple, il a été montré que le destin des cellules souches est

influencé par la rigidité du substrat sur lequel elles sont ensemencées (41). En conséquence, les

biomatériaux, eux-mêmes, peuvent être considérés comme des signaux de régulation dans la

conception de l’implant dans l'ingénierie tissulaire, de façon à ce que la structure chimique et

physique du biomatériau soit bien adaptée à un comportement cellulaire optimal (18).

En résumé, les paramètres caractérisant chaque élément de la triade de l’ingénierie

tissulaire sont montrés dans la figure 6 ci-dessous.

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Figure 6. Paramètres définissant le concept de l’ingénierie tissulaire (42).

III. Application de l’ingénierie tissulaire à la médecine vasculaire

Les maladies cardiovasculaires (MCV) sont la principale cause de mortalité dans les pays

occidentaux, et parmi les dix premières causes de mortalité et de morbidité dans le monde.

Chaque année, les infarctus de myocarde, les accidents vasculaires cérébraux (AVC), les

insuffisances cardiaques congestives, les maladies des valves cardiaques et les maladies

vasculaires telles que l’athérosclérose entraînent des milliers de morts. La prise en charge de ces

maladies constitue donc un enjeu considérable en termes de santé publique. Selon Zaragoza et al,

les complications cardiaques et vasculaires sont associées à des facteurs génétiques et

environnementaux, ce qui rend ces pathologies multifactorielles très difficiles à éviter (43). Bien

que beaucoup d’études précédentes aient rapporté que les nouveaux médicaments et les

dispositifs innovants aient amélioré la qualité de vie des patients souffrant de MCV, mais elles

n’ont pas mentionné que ces traitements ont réduit le taux de mortalité et de morbidité (44).

Ensuite, la transplantation d’organes s’est avérée comme une nouvelle voie thérapeutique

proposant un remède immédiat en remplaçant des tissus ou organes par des substituts

fonctionnels. Comme il s’agit du traitement de choix dans le cas d’une défaillance d’un organe, il

y a alors un besoin croissant d’organes humains compatibles transplantables (autologues ou

allogéniques) (45). Cependant, deux obstacles majeurs compliquent l’application de ce

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traitement : le manque de donneurs, et le risque élevé de rejet de greffe (46). En fait, le succès du

traitement des MCV a été limité par l’absence de tissus autologues capables de réparer les

muscles cardiaques atteints et de conduits vasculaires remplaçant les vaisseaux occlus. De plus,

les immunosuppresseurs administrés lors d’une transplantation augmentent le risque d’infections

et de cancers affectant aussi le taux de mortalité dû aux MCV (44).

Plus particulièrement, pour faire face aux atteintes du système vasculaire, plusieurs

méthodes sont utilisées :

- des médicaments permettant de réduire le risque de survenue ou de récidive des

maladies vasculaires ;

- des prothèses synthétiques (en Dacron

®

ou en polytétrafluoroéthylène expansé

(ePTFE)) ;

- une endoprothèse (« stents »): qui consiste à placer un ballonnet gonflable à l’endroit

où le vaisseau est rétréci pour le dilater, et y placer un dispositif à ressort pour

maintenir le diamètre nécessaire pour une bonne circulation sanguine ;

- un pontage : c’est-à-dire une portion de vaisseau prélevé chez le patient est ajustée de

part et d’autre de la zone obstruée.

Néanmoins, les médicaments ne fournissent pas un traitement curatif, les prothèses

synthétiques ne sont applicables que pour les vaisseaux ayant un diamètre inférieur à 6mm, les

endoprothèses peuvent induire une occlusion aigüe ou une resténose et le capital vasculaire d’un

patient pourrait ne pas permettre un pontage (47,48). C’est pourquoi pour s’affranchir des limites

des traitements traditionnels il est nécessaire de développer des substituts vasculaires issus de

l’ingénierie et rassemblant les caractéristiques d’un vaisseau natif.

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