• Aucun résultat trouvé

Septi` eme Parole

Dans le document Les Sept Paroles du Christ de Haydn (Page 47-53)

Dans tous les textes des Evangiles, le Christ insiste sur le rapport d’amour qui lie les hommes au P`ere. La pri`ere qu’il leur a appris, le “Notre P`ere” est un h´eritage culturel du juda¨ısme auquel la tendresse du Fils de l’Homme ajoute un appel ´emu `a ´elever notre cœur vers Dieu dans une rencontre personnelle.

Cette septi`eme et derni`ere parole est alors la plus intime de toutes comme l’´echo du dialogue entre un fils et son p`ere vers lequel il va s’en retourner, son œuvre accomplie. Loin derri`ere lui sont d´ej`a tous les tourments et toutes les larmes vers´ees, toutes les d´esillusions, toutes les souffrances et toutes les trahisons. Dans ce calme extraordinaire, surnaturel au sens plein du terme, l’esprit de J´esus est parti vers le Royaume aupr`es de sa source vive.

Aucun ´eclat dans ce mouvement jou´e avec sourdines dans un climat en mi-teinte.

Toute la noblesse de la premi`ere phrase est `a la fois tr`es affirmative et d’une douceur sans ´egal et l’instant o`u les deux violons se rejoignent `a la mesure 8 est cristallin.

On ne le joue jamais assez l´eger, a´erien. Il faudrait que tous ces moments aient l’air immat´eriels dans une sonorit´e diaphane. Les ponctuations des basses restent tendres et assur´ees comme le baiser d’un p`ere. Dans la mˆeme veine,

`

a partir de la mesure 12 am`ene un ´el´ement irr´esolu, ce n’est qu’un vague et lointain ´echo du tumulte des mouvements pr´ec´edents.

Pour cette raison, il nous semble juste de ne pas jouer trop brusquement les sforzandi dont ce mouvement est parsem´e ou, par exemple, trop g´emissant le chromatisme du second violon et de l’alto `a la mesure 22;

il s’agit simplement d’une insistance un peu plus marqu´ee.

A peine le pouls doit il l´eg`erement s’acc´el´erer dans la deuxi`eme partie, l`a o`u un assombrissement en mi b´emol mineur fait passer un fugitif nuage (mesure 45) .

Il faut dans la suite r´eussir `a ce que le premier violon apparaisse de plus en plus d´econnect´e tel l’esprit de J´esus s’´eloignant de plus en plus de la terre. On doit se laisser porter par l’´ecriture de la phrase, avant tout dans cet instant magique (mesure 56 et suivantes) o`u le premier violon plane litt´eralement au dessus des autres instruments dans un rythme d´ecal´e qui ´evoque des battements d’ailes.

Les croches d’accompagnement gagnent `a ˆetre courtes, avec rebondissement,

battements et du dernier appel. Amen´es par une magnifique marche de l’alto et du violoncelle (mesures 69 et suivantes), les ´echanges se font pressants et les longues tenues essayent de capturer la ligne du violon

qui s’´echappe d´efinitivement `a la mesure 81. Les quinze derni`eres mesures sont d’une d´elicatesse extrˆeme. Plus rien ne doit bouger, `a peine une ride `a la surface de l’eau.

un ´echo d’´echo, sans expression. Les croches du violoncelle (mesure 92), puis celles de l’alto, jou´ees `a l’extrˆeme pointe sur la touche, les pizzicatides violons jou´es en posant juste le doigt sur la corde, ach`event d’ˆoter `a l’ambiance toute pesanteur.

Il Terremoto

Au cours du cycle, la tension s’est accumul´ee. Malgr´e des phases locales d’accalmie, le caract`ere tragique du supplice auquel est soumis le Christ reste au moins pr´esent en filigrane. On aurait pu penser, vu le calme qui habite la fin de la Septi`eme Parole que Haydn choisirait d’achever l’œuvre sur cet espoir de r´edemption tant le pardon paraissait alors accord´e. Mais, on l’a d´ej`a soulign´e

`

a plusieurs reprises, la composition s’inscrit dans une dimension humaine et l’esprit l’ayant quitt´e, le corps de J´esus reste l`a sur la Croix, inanim´e et horri-blement mutil´e, t´emoin de la nuit et de la d´esolation du meurtre. Dieu vient de mourir et avec lui le sens de toute chose dans une cr´eation abandonn´ee `a elle-mˆeme, `a la d´erive vers l’in´evitable pr´ecipice.

Si la version pour quatuor `a cordes peut un peu souffrir de l’absence d’instruments puissants, (comme par exemple les cuivres de la partition orchestr´ee) dans le tableau violent et ravageur du tremblement de terre, l’effet produit peut ˆetre malgr´e tout tr`es impressionnant. Contrairement `a ce qu’on pourrait croire na¨ıvement, ce n’est pas n´ecessairement en le jouant le plus vite possible qu’on atteint un tel but, la vitesse ayant souvent le d´efaut de diminuer la concen-tration d’archet, mais plutˆot en jouant tr`es ensemble, en ajoutant de grands mouvements d’ensemble dans la dynamique et en ne pressant surtout pas.

Chaque note doit ˆetre ´ecrasante: les rythmes point´es haletants, jou´es comme avec rage, en particulier les successions deux triples-croche point´ee (mesure 64);

Chercher en quoi que ce soit `a avoir un “beau son” dans ce final est un contre sens: il ne s’agit pas de faire n’importe quoi mais d’admettre que les asp´erit´es font partie int´egrantes de l’atmosph`ere cherch´ee. L’arrachement des derni`eres s´eries de triolets (mesure 115) et des quatre derni`eres noires doit accabler l’auditeur comme une pluie d’orage.

Dans le document Les Sept Paroles du Christ de Haydn (Page 47-53)

Documents relatifs