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Les sciences « omiques »

Chapitre I : Généralités

4 De l’analyse des lipides à la lipidomique

4.2 Les sciences « omiques »

Enfin, face aux coûts de développement d’un nouveau traitement, l’industrie est à la recherche de marqueurs permettant d’orienter leur recherche. En effet, seulement 1 à 2 médicaments sur 10 entrant en développement seront mis sur le marché. Cette pression est augmentée par les organismes payeurs qui souhaitent obtenir une évaluation objective d’une meilleure efficacité avant de rembourser une nouvelle thérapeutique souvent plus coûteuse215.

D’un point de vue analytique, un biomarqueur doit être mesuré objectivement, c’est-à-dire avec une précision et une reproductibilité suffisantes. De plus, il doit être évalué comme un indicateur de processus physiologiques ou pathologiques, ou être capable de mesurer la réponse thérapeutique à un nouveau traitement. Les biomarqueurs les plus couramment recherchés sont les protéines, les acides nucléiques (ADN et ARN), de petites molécules ou leurs métabolites.

4.2 Les sciences « omiques »

Etymologiquement, le suffixe « omique » a pour origine le mot « OM » tiré du sanscrit désignant la complétude et la plénitude. Les sciences « omiques » consistent à identifier l’ensemble des espèces moléculaires constitutives d’un organisme vivant et plus particulièrement les modifications de composition en réponse à une altération du métabolisme. Ces recherches consistent à caractériser l’ensemble d’un système biochimique. Les différentes disciplines comprennent notamment la génomique, la transcriptomique, la protéomique et la métabolomique216, Figure 33.

Figure 33 : Différents niveaux des sciences « omiques » ainsi qu’un ordre de grandeur du nombre d’espèces dans chaque classe217

47 Les sciences « omiques » ont considérablement modifié les méthodes d’exploration des phénomènes biologiques. En effet, cette approche globale génère une quantité d’informations gigantesque à des niveaux biologiques très variés : du séquençage de l’ADN en passant par l’expression des protéines ou la description des modifications des structures métaboliques. De plus, il n’est pas forcément utile de formuler une hypothèse de départ pour démarrer ses recherches. Il est par contre nécessaire de définir des groupes d’étude. Les données recueillies permettent ainsi de formuler des hypothèses biologiques et de les tester. Cette nouvelle approche ouvre la porte à de nombreuses découvertes sur les mécanismes physio-pathologiques218.

La métabolomique présente certains aspects singuliers. En effet, elle est placée à la fin de la cascade omique, caractérisée par une grande complexité et comprenant les acides nucléiques, les acides aminés, les sucres et les lipides. De plus, cette diversité d’espèces moléculaires peut varier dans le temps et dans l’espace et rendre plus complexe le défi analytique. Pour toutes ces raisons, aucune méthode de bioanalytique ne peut caractériser l’ensemble du métabolome136. Cependant, l’ensemble des techniques précédemment exposées (chromatographie et spectrométrie de masse notamment) grâce à leur diversité de mise en œuvre et la possibilité de réaliser des analyses à haute fréquence peuvent répondre aux défis des analyses métabolomiques.

Différentes stratégies analytiques sont possibles en métabolomique, comme le montre la Figure 34. On distingue les analyses ciblées qui ont pour objectif d’identifier la structure et de quantifier quelques lipides d’intérêt connus dans un mélange complexe. L’utilisation de la spectrométrie de masse en tandem avec la réalisation d’une fragmentation permet d’observer les ions fragments spécifiques d’une molécule. Les modes SRM (Selected Reaction Monitoring) et MRM (Multiple Reaction Monitoring) sont largement utilisés pour observer les ions parents recherchés avec les ions fragments spécifiques. En revanche, les analyses non ciblées ont pour objectif d’apprécier la variabilité de composition qualitative et/ou quantitative de la totalité des lipides ou d’une fraction lipidique donnée dans plusieurs groupes d’échantillons. Les analyses en spectrométrie de masse peuvent faire suite à une séparation chromatographique, pour faciliter la lecture des spectres de masse ou l’échantillon peut être injecté directement dans la source ou « shotgun ». L’analyse « shotgun » présente l’avantage de supprimer l’étape de séparation chromatographique et peut être utilisée en mise au point lors d’analyses non ciblées ou ciblées.

Enfin l’analyse en mise au point est utilisée pour l’étude d’une catégorie de lipides. Cette méthode utilise les outils cités précédemment avec différents modes d’acquisition comme la perte de neutre ou le scan d’un ion précurseur lorsqu’un fragment spécifique de la classe lipidique est connu.

48 L’utilisation d’une méthode de chromatographie en phase inverse peut être utilisée pour séparer les différentes espèces moléculaires étudiées.

Figure 34 : Représentation schématique des différentes stratégies utilisées en métabolomique et la quantité de biomarqueurs potentiellement mise en évidence217

Les analyses lipidomiques ont été appliquées à de nombreuses situations pathologiques comme la maladie d’Alzheimer, les neurosciences ou l’oncologie219–224. Dans le domaine des maladies cardio-vasculaires, les approches « omiques » laissent entrevoir de nouvelles perspectives pour comprendre les phénomènes physio-pathologiques associés. Des publications récentes soulignent l’intérêt d’étudier les modifications du lipidome du macrophage, cellule qui joue un rôle très important dans les processus inflammatoires et la constitution d’une plaque d’athérome menant à l'athérosclérose225–228.

Les études métabolomiques comportent plusieurs étapes et font appel à des compétences très diversifiées, Figure 35. Dans un premier temps, il est nécessaire de situer le contexte de l’étude pour établir la nature et la disponibilité de l’échantillon à analyser (cellules, tissus, fluides biologiques). Ces points sont déterminants pour choisir la stratégie de préparation de l’échantillon biologique et la technique analytique mise en jeu lors de l’étude. Enfin, l’ensemble des innovations technologiques en spectrométrie de masse et en chromatographie liquide ont permis d’accroître les fréquences d’acquisition des appareils et leur capacité d’analyse des mélanges complexes. Les données chimiques obtenues sont donc considérables surtout dans le cas des études non ciblées. Il est donc particulièrement difficile d’extraire et d’interpréter les informations pertinentes. Le traitement statistique des données chimiques obtenues lors des analyses métabolomiques est connu sous le nom de chimiométrie.

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