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Revenons à l’ouvrage Science, vérité et démocratie. Après avoir exposé dans le détail les procédures permettant de parvenir à un état idéal de science bien ordonnée, Kitcher s’emploie lui-même avec application à souligner les aspects qui lui semblent constituer les principales faiblesses de son modèle. Comparant les mérites respectifs du système de démocratie éclairée qu’il propose avec celui de l’élitisme, il conclut :

Voilà la dernière raison, et à mon sens la plus convaincante, de défendre l’élitisme. […] soit les processus qui précèdent l’élaboration des programmes de recherche sont épouvantablement lourds et prennent énormément de temps, soit ils ne parviennent pas à modifier suffisamment les vues des participants pour s’écarter vraiment de la démocratie vulgaire. (p.206)

Cependant, que les sceptiques se rassurent. L’idéal envisagé par Kitcher ne se veut pas un « guide » à suivre dans le but d’élaborer une science plus démocratique, mais de manière plus pragmatique, vise à présenter un horizon vers lequel tendre, un point de référence à l’aune duquel évaluer les décisions effectivement prises en matière de politique scientifique. Ainsi que Kitcher le formule lui-même :

Il n’est pas question […] que la science bien ordonnée doive instituer dans les faits les discussions compliquées que j’ai envisagées. L’idée est que, quelle que soit la façon dont l’enquête se déroule, nous voulons qu’elle génère ce qui aurait été obtenu par ces procédures complexes sur les points que j’ai indiqués. » (p.188)

Voilà qui, au terme de l’exposé détaillé des procédures régissant le bon ordonnancement de la science, a de quoi surprendre à plusieurs égards. En quoi s’éloigne-t-on concrètement de l’élitisme si ces mesures ne sont pas instituées ? Comment savoir à quelles conclusions les délibérations auraient abouti si celles-ci n’ont jamais véritablement eu lieu ? Peut-on réellement parler de système démocratique si le peuple n’intervient que par le biais de ce que l’on imagine être ses préférences ? Comme nous allons le voir, ces interrogations n’ont pas échappé à nombre d’auteurs ayant analysé l’idéal de Kitcher d’un point de vue politique, et soulèvent plusieurs objections que nous nous proposons de discuter ici.

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7-1. Les résultats, ou la manière d’y parvenir ?

Parmi ces auteurs, Brown (Brown, 2004) délivre notamment une analyse approfondie de la conception philosophique qu’a Kitcher de son idéal de régulation des politiques scientifiques. Ayant mentionné le passage cité ci-dessus, Brown attire l’attention sur ce que cette formulation implique quant à l’attitude de Kitcher en regard de son idéal : « Ce passage suggère que le souci premier de Kitcher ne concerne pas tant la délibération démocratique que d’aboutir ‘a peu près aux bons résultats’. »48 (Brown, 2004, p.83). Le parallèle avec la critique menée dans la partie précédente au sujet du contenu de l’idéal est frappant. De la même manière que Kitcher se concentre sur les résultats que peut délivrer la science plutôt que sur la manière dont ils sont obtenus, il semble que là encore il privilégie l’issue des délibérations idéales envisagées aux dépens de leur mise en pratique. Ce faisant, et ainsi que le fait à juste titre remarquer Brown, il ne prend en compte qu’un tiers de l’idéal démocratique de Lincoln énoncé par la fameuse formule : « le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple »49, se focalisant sur ce que peut la gouvernance de la science pour le peuple, et non pas sur ce que le peuple pourrait réaliser par cette forme de gouvernance. Malgré son rejet explicite de toute forme élitiste de régulation des politiques scientifiques, et l’argument qu’il avance à l’encontre d’une éthique objectiviste, Kitcher semble par cette affirmation appeler de ses vœux une forme de politique scientifique axée sur ce que les citoyens pourraient exprimer comme préférences dans le cadre idéal qu’il propose, plutôt qu’une permettant à de réels individus, plus ou moins éduqués, de décider par eux-mêmes de la direction dans laquelle orienter la science. Ainsi que le souligne également Longino, « Par l’importance accordée au résultat aux dépens du processus, [le modèle de SBO] penche plus du côté du “gouvernement pour le peuple” que du “gouvernement par le peuple”, semblant laisser la porte ouverte à l’élitisme autrement rejeté par Kitcher. »50 (Longino, 2002a, p.566).

C’est donc l’ensemble de la position philosophique défendue par Kitcher qu’il faut réexaminer, afin de déterminer le poids exact des implications que semble soulever cette

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« This passage suggests that Kitcher’s primary concern is not so much with democratic deliberation, as with getting ‘roughly the right results’. »

49 « government of the people, by the people, for the people. »

50 « In its emphasis on outcome rather than on process, it leans more towards “government for the people” than towards “government by the people,” seeming to leave an opening for the elitism Kitcher otherwise dismisses. »

82 déclaration. En effet, la formulation contrefactuelle de la proposition soulève de nombreuses questions quant au caractère réellement démocratique de la science bien ordonnée. Admettons que les décisions prises n’aient pas besoin de résulter de l’implémentation concrète de procédures démocratiques, mais simplement d’être identiques à celles qui en résulteraient. Comment savoir avec certitude quelles seraient ces décisions, sans jamais passer par le processus de délibération censé leur donner forme ? A l’évidence, l’aspect démocratique de l’idéal doit être analysé plus en profondeur.

On pourrait ainsi tout à fait suggérer que l’attitude de Kitcher de se refuser à appeler la mise en pratique effective de procédures de participation d’un public de citoyens éduqués est justifiée. Longino (Longino, 2002a) émet par exemple l’hypothèse que cette volonté de Kitcher puisse être motivée par l’idée de permettre aux délibérateurs idéaux d’être issus d’agences telles que la National Science Foundation aux Etats-Unis, tout en demandant à ces comités de fonder des structures mimant, à petite échelle, une délibération publique de l’ensemble de la société. C’est une idée intéressante, et qui pourrait s’avérer tout à fait envisageable. Cependant, Kitcher n’en fait pas état lui-même. En fait, il n’examine pas directement la question mais se contente d’évoquer le fait que « les informations sociologiques nécessaires à la construction de modèles réalistes [de participation citoyenne en matière de politique scientifique] ne sont pas disponibles à ce jour. » (p.206). Selon lui, s’il n’a pas considéré lui-même la possibilité d’implémenter concrètement les procédures décrites, c’est tout simplement parce que ce n’est pas possible à l’heure actuelle. Ce n’est cependant pas l’avis d’autres spécialistes de la question. Ainsi, Brown s’élève fermement contre cette affirmation : « Kitcher en sait probablement plus sur les sciences sociales contemporaines que la plupart des chercheurs en sciences sociales en savent sur son domaine, mais il faut dire qu’ici il est tout simplement dans l’erreur. »51 (Brown, 2004, p.84). Selon lui, et même s’il reconnaît qu’il y a encore beaucoup à apprendre au sujet des types d’institutions favorisant le mieux la délibération démocratique, « des études empiriques de procédés participatifs tels que les audiences publiques, les jurys citoyens et les conférences de consensus […] montrent clairement que le citoyen lambda est capable de prendre des décisions intelligentes en regard de problèmes techniques complexes. »52 (Brown, 2004, p.84). L’exposé d’une théorie de la gouvernance des politiques scientifiques se voulant idéale ne peut donc légitimement pas se

51 « Kitcher probably knows more about contemporary social science than most social scientists know about his field, but it must be said that here he is simply mistaken. »

52 « empirical studies on such participatory venues as public hearings, citizen juries, and consensus conferences […] clearly show that lay people are capable of making intelligent decisions on complex technical issues. »

83 permettre de faire l’impasse sur l’examen approfondi de la mise en pratique effective des procédures proposées.

7-2. Une science bien ordonnée en théorie

Il est clair qu’établir les conditions nécessaires à l’institution de processus de délibération idéale au sein des choix concernant les politiques scientifiques est une tâche ardue. Là-dessus, on ne peut que souscrire à l’analyse de Kitcher. Plus encore, affirmer que de telles délibérations sont réalisables, comme nous l’avons soutenu dans le paragraphe précédent, ne suffit pas à démontrer que leur institution dans les faits serait souhaitable. Cependant, l’examen de la littérature sur le sujet de la participation apporte plusieurs éléments de réflexion tendant à montrer qu’une approche délibérative de la gouvernance de la science, à l’image de celle proposée par Kitcher, devrait prendre en compte tant les procédures démocratiques que leurs résultats, voire, en cas de doute, s’intéresser prioritairement aux procédures. Tel est le point que nous nous proposons d’examiner maintenant, en nous appuyant principalement sur l’argumentaire déployé par Brown dans son article « The political philosophy of science policy » (Brown, 2004).

Il faut tout d’abord nuancer quelque peu l’opposition frontale que pose Kitcher entre le système de la démocratie éclairée et celui de la gouvernance par les élites. Brown fait remarquer, à juste titre, que cette opposition binaire entre les deux systèmes est trompeuse car, les démocraties modernes étant nécessairement représentatives, il s’ensuit que : « même une démocratie éclairée requiert certains éléments de gouvernance par les élites, étant donné que sélectionner des représentants implique en toute logique de choisir un candidat que l’on estime meilleur que les autres candidats. »53 (Brown, 2004, p.85). On ne peut donc pas légitimement soutenir qu’une démocratie éclairée consiste en un rejet foncier de toute forme d’élitisme. Les délibérateurs, censés former un comité représentatif des divers groupes d’intérêt présents au sein de la société, forment, dès lors qu’ils sont choisis, un groupe « à part » du reste de celle-ci. La seule manière de s’assurer que leurs voix expriment directement les préférences de l’ensemble du peuple serait de faire en sorte qu’un dialogue permanent soit instauré entre le comité et la société. Ce n’est cependant pas ce que Kitcher suggère : pour lui,

53 « even an enlightened democracy requires some elements of elite rule, because selecting representatives logically implies picking a candidate deemed better than other candidates. »

84 une fois le groupe de délibérateurs formé, il ne reçoit plus d’informations en provenance du reste des concitoyens. Sa représentativité est assurée par sa constitution, et les délibérateurs n’ont qu’à se baser sur l’introspection, et l’intuition, pour imaginer quelles seraient les préférences du groupe social qu’ils sont supposés représenter. Comme le formule Brown : « Les délibérateurs peuvent ainsi être considérés comme agissant ‘au nom de’ plutôt que ‘pour’ les personnes qu’ils représentent. […] Cependant, ceci s’apparente plus à une forme de représentation philosophique que politique. »54 (Brown, 2004, p.86). Selon lui, Kitcher fait en effet ici implicitement référence à la philosophie politique de John Rawls (Rawls, 1993), qui place l’expérience de pensée au cœur du processus de représentation. Il n’est cependant pas assuré que ce soit un moyen infaillible, ni le plus direct, d’exprimer la voix du demos.

La seule bonne manière d’exprimer directement et avec fiabilité les désirs et attentes de la société est de l‘impliquer entièrement dans les processus de décision, de la convier à y prendre part activement. Par ailleurs, « les citoyens ne peuvent pas apprendre à participer, et seulement ensuite participer, mais doivent apprendre par la participation »55 (Brown, 2004, p.86), affirme Brown. Ainsi, même si la participation directe des citoyens aux processus de choix des politiques scientifiques semble ne pas pouvoir avoir un impact immédiatement bénéfique pour la société, il n’en reste pas moins qu’elle est assurément un des meilleurs moyens d’obtenir de tels résultats sur le long terme. Plus encore, il a été clairement montré qu’une plus grande implication du citoyen dans les processus démocratiques contribue activement à le rendre plus responsable, plus conscient des enjeux adressés par la société dont il fait partie, en un mot : plus citoyen. En d’autres termes, la participation effective des citoyens aux décisions scientifiques auxquelles est confrontée la société ne permet pas seulement d’aboutir à un choix plus conforme aux attentes de l’ensemble de la société, mais contribue également à éduquer ces citoyens. La situation bénéficie donc tout autant à qualité des décisions auxquelles elle aboutit qu’à la société qui prend ces décisions. Ou, ainsi que le formule Brown : « de la même manière que la participation entreprise en vue de fins instrumentales peut apporter des bénéfices intrinsèques à ceux qui participent, la recherche scientifique menée ‘en son seul nom’ peut également apporter à la société des bénéfices instrumentaux. »56 (Brown, 2004, p.87). On mesure, à la lumière de ces arguments,

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« The deliberators might thus be said to ‘stand for’ rather than ‘act for’ their constituents. […] However, this amounts to a philosophical rather than political form of representation. »

55 « Citizens cannot learn to participate, and then participate, but must learn through participation »

56 « just as participation undertaken for instrumental ends may bring intrinsic benefits to those who participate, scientific research ‘for its own sake’ may also bring society instrumental benefits. »

85 l’importance d’associer à la réflexion concernant l’élaboration théorique d’un système de délibération démocratique une réflexion pratique sur les procédures concrètes d’implémentation de ce système. Il est clair que, selon la nature des questions adressées par la société, le recours à de tels processus participatifs de délibération démocratique peut s’avérer lourd et contraignant, et il se peut que, dans ces cas précis, se focaliser sur l’obtention de réponses soit la solution appropriée. Le reste du temps cependant, et dès que cela peut être envisagé, le statut souverain du peuple dans une démocratie exigerait que la priorité soit donnée à la procédure. Ce n’est que par l’action concrète que nous pourrons réellement nous rapprocher d’un état de science bien ordonnée.

7-3. Idéal démocratique et démocratie idéale

Jusqu’ici, notre critique a donc porté sur la manière dont Kitcher à la fois formule (ce qu’est l’idéal de SBO) et conçoit son idéal (quoi en faire), notamment en nous appuyant sur la prétention à l’idéalité d’un tel système. C’est de cette manière que nous avons tenté d’exposer, au cours du paragraphe précédent, en quoi toute proposition d’un idéal de régulation des politiques scientifiques devrait, précisément pour avoir vocation à être idéale, intégrer à l’élaboration des procédures une visée pratique quant à leur implémentation concrète. Ceci peut cependant sembler un peu antithétique. Un idéal peut-il vraiment être institué dans les faits ? Ne cesse-t-il pas précisément d’être idéal dès lors qu’il est réalisé en pratique ? Et si ces deux aspirations sont contradictoires, laquelle privilégier ? Un certain nombre d’auteurs considèrent, dans la perspective des arguments qui ont été exposés ci- dessus, que l’idée même de chercher à améliorer la gouvernance de la science en mettant en évidence le contraste entre ce qu’elle est actuellement et ce en quoi elle devrait idéalement consister est en fait illusoire. Penchons nous donc, pour finir, non plus sur l’idéal de SBO en lui-même, mais sur les fondements du raisonnement qui amène Kitcher à proposer un modèle idéal de régulation démocratique des politiques scientifiques.

Il faut en premier lieu noter que Kitcher lui-même n’est pas catégorique sur le fait que la meilleure manière de contribuer au progrès de l’intégration science/société consiste, pour le philosophe des sciences, à proposer un idéal, ni même sur le fait que sa proposition soit la plus pertinente. Il énonce ainsi, avant de démarrer l’exposé de son système : « Je ne prétends pas que ce que je propose constitue l’unique meilleure réponse possible – ou même que

86 l’approche que je viens d’adopter est la meilleure façon d’aborder le problème. » (p.176). Un peu plus loin, commençant à justifier son choix, il explique que « En avançant une réponse, j’espère apaiser les inquiétudes sceptiques relatives à l’absence d’une conception cohérente plus large, et […] également délimiter le domaine dans lequel la formulation d’une réponse plausible peut être attendue. » (p.176). L’essentiel selon lui n’est donc pas (pour le moment), de chercher à donner la solution au problème, mais avant tout de contribuer à son élaboration, à la fois en encourageant d’autres personnes à participer au débat (en affirmant qu’il est possible d’en déterminer une sortie viable), et en même temps en « donnant du grain à moudre » à ceux qui s’y sont déjà engagés. A cet égard, sa proposition est donc plus à concevoir comme un argument du débat que comme une tentative de clore celui-ci. En ce qui concerne sa volonté de donner à sa réponse la forme d’un idéal, celle-ci semble motivée par le constat que « les pays démocratiques riches d’aujourd’hui tentent, de façon pour le moins hasardeuse, de s’approcher raisonnablement d’un idéal important. » (p.188). Or le diagnostic que fait Kitcher de la situation est qu’en la matière, « la majeure partie de la littérature scientifique souffre de l’absence d’une reconnaissance claire de ce que cet idéal visé pourrait être. » (p.188, note de bas de page). En fournissant un exemple de ce en quoi cet idéal pourrait consister, il espère ainsi pallier cette lacune, et amorcer la réflexion visant à répondre au besoin qu’ont nos sociétés de disposer d’un objectif vers lequel tendre. Il s’agit donc en premier lieu de baliser un champ d’investigation théorique, devant permettre, à terme, de fournir une solution concrète au problème devant lequel se trouvent nos gouvernements actuels. Ainsi Kitcher conclut-il :

J’espère que l’idéal servira de première indication du type de standard dont nous avons besoin et incitera d’autres personnes à l’affiner (ou à le remplacer), et à réaliser le travail empirique de connexion de l’idéal aux décisions concrètes auxquelles nous sommes aujourd’hui confrontés. (p.224)

Plusieurs arguments peuvent cependant être opposés aux justifications données par Kitcher de son entreprise. Tout d’abord, remarquons que le débat qu’il se propose d’instaurer, et d’ouvrir « à d’autres personnes », est un débat d’idées épistémologiques, c'est-à-dire philosophique et non démocratique. En suggérant que le rôle de la philosophie est de proposer un horizon à la politique, une direction à suivre, l’attitude de Kitcher cantonne implicitement la réflexion politique au champ de l’application de l’idéal élaboré par les philosophes, comme

87 si celle-ci n’avait plus qu’à se préoccuper du « comment » et pas du « pourquoi » : « la politique se trouve facilement réduite à la question des moyens »57 (Brown, 2004, p.91), comme le fait remarquer Brown. Le problème est alors qu’un élément central de la vie de la société, à savoir la réponse à la question « vers où veut-on aller ? », se retrouve soutiré de l’arène du débat public, et du choix collectif démocratique. En se refusant à considérer l’aspect pratique de sa réflexion dans l’élaboration de son idéal, et par là à contribuer à construire un espace institutionnel au sein duquel il pourrait être démocratiquement débattu, Kitcher restreint la discussion autour de celui-ci à la sphère de la philosophie, et refuse ainsi le droit d’entrée aux citoyens, y compris les politiques. Ceux-ci semblent n’être plus invités qu’à « réaliser le travail empirique de connexion de l’idéal aux décisions concrètes », laissant l’articulation de l’idéal aux mains des philosophes. Cette conception de la théorie politique va de manière assez frappante à l’encontre du discours de Kitcher à propos de la science, qui vise entre autres à démontrer aux scientifiques que le citoyen peut légitimement solliciter un droit de regard sur les directions que prend la science, et qu’il est de leur devoir d’accepter qu’il s’asseye à la table des débats. Alors même qu’il milite pour une plus grande contextualisation de la science et de l’épistémologie, Kitcher borne paradoxalement sa pensée politique à la présentation d’un idéal abstrait, et laisse le soin aux autres de réfléchir à la manière de le relier