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CHAPITRE I : IMPOSTURE D’ÉCRIVAIN ET PAUVRETÉ

CHAPITRE 2 : UNE PAUVRETÉ IDENTITAIRE EN HÉRITAGE

3. Satori in Paris : au-delà de l’origine

Jack Kerouac, dans le roman Satori in Paris, publié en 1966, fictionnalise le voyage qu’il effectue en France afin d’en savoir davantage sur son nom de famille, comme il l’explique dans le texte : « I had come to France and Britanny just to look up this old name of mine which is just about three thousand years old and was never changed in all that time […].211 » Il s’agit donc, pour l’écrivain, d’un périple lié

à la recherche de ses racines bretonnes.

Alors que dans un grand nombre de ses romans, Kerouac réfère à lui-même par des alter ego (Duluoz, Paradise, etc.), il choisit dans Satori in Paris de signer sous son vrai nom : « As in an earlier autobiographical book I’ll use my real name here, full name in this case, Jean-Louis Lebris de Kérouac, because this story is about my search for this name in France […]212

». Rapidement, le voyage crée un

209 Jack Kerouac, On the Road, op. cit., p. 259. « une vision, […] Ange de feu, frissonnant,

effroyable, venir à moi tout palpitant sur la route, s’approcher comme un nuage, à une vitesse énorme, me poursuivre dans la plaine tel le Voyageur au Suaire » (Jack Kerouac, Sur la route, op. cit., p. 320.)

210 Il serait d’ailleurs pertinent de faire un pont entre la figure du Shrouded Traveler et de Docteur

Sax, de s’intéresser au « Lowell de Dr. Sax », comme en discute Pierre Nepveu dans Intérieurs du Nouveau Monde (1998).Toutefois, comme cette dernière oeuvre ne fait pas partie de notre corpus principal, nous avons décidé de nous concentrer surtout sur la hantise du passé dans Satori in Paris.

211

Jack Kerouac, Satori in Paris, édition bilingue, Londres et New York, Penguin Books, 2007, p. 148. Aussi : « J’étais venu en France et en Bretagne, unequement pour opérer des recherches sur ce vieux nom qui est le mien, qui a près de trois mille ans, et qui n’a jamais changé durant tout ce temps. » (Ibid., p. 149)

212

Ibid., p. 20. « Comme dans un livre antérieur, une autobiographie, je prends ici mon nom véritable, c’est-à-dire, en l’occurrence, mon nom complet : Jean-Louis Lebris de Kérouac, parce

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certain désenchantement chez le narrateur de Satori in Paris et ravive son sentiment d’étrangeté, de pauvreté identitaire. Il ne se sent pas à sa place à Paris, a l’impression d’être incompris et isolé. Il est « l’homme le plus solitaire de Paris, si la chose est possible213 ». Si son aventure oscille entre des histoires d’un soir et des rencontres avec des secrétaires sévères, elle le conduit surtout de bar en bar :

[…] I’m left there hanging on the bar stool pestering everybody with my poor loneliness which goes unnoticed in the crashing busy night, in the smash of the cash register, the racket of washing glasses. I want to tell them that we dont all want to become ants contributing to the social body, but individualists each one counting one by one, but no, try to tell that to the in-and-outers rushing in and out the humming world night as the world turns on one axis. The secret storm has become a public tempest.214

Dans cet extrait, il est possible d’observer un sentiment de solitude chez le narrateur. Celui-ci cherche, dans un temps, la compassion de la foule, se sent isolé et à peine toléré par les passants, puis les condamne pour leur insipidité dans un autre temps. Il semble ainsi rechercher et fuir d’un même élan le contact avec ses semblables. Quoiqu’il revendique une individualité propre dans cet extrait, il croit, un peu plus loin dans le récit, être perçu comme n’importe quel Américain perdu dans une rue principale : « Unshaven, in a black raincoat with rain hat, dirty, I walk outa there and go sloopsing up dark streets looking like any decent American Boy in trouble, old or young, for the Main Drag […].215 » Il n’a pas d’âge

et pourrait passer pour n’importe qui. Le narrateur exprime donc l’envie d’être considéré comme un individu à part entière, mais ne cesse pourtant de se dépersonnaliser, voire de se déprécier au fil du texte : « My manners, abominable at times can be sweet. As I grew older I became a drunk. Why ? Because I like the

que ce récit concerne les recherches que j’ai effectuées en France à propos de ce nom […] » (Ibid., p. 21)

213

Ibid., p. 27.

214 Ibid., p. 94-96. « […] et moi je reste seul au comptoir sur un tabouret, assommant tout le monde,

de ma misérable solitude, qui passe inaperçue dans le vacarme et l’agitation de la nuit, dans le cliquetis assourdissant de la caisse enregistreuse et le tintement des verres qu’on lave. Je veux leur expliquer que nous ne tenons pas tous à devenir des fourmis qui, par leur labeur, contribuent à la prospérité du corps social, mais des individus qui comptent, tous autant qu’ils sont, chacun d’entre nous comptant un par un ; mais non, essayer de dire cela à la cohue des arrivants et des partants qui entrent et sortent à pas précipités, dans la nuit d’un monde bourdonnant, pendant que la Terre tourne sur un axe. La tempête secrète est devenue un ouragan public. » (Ibid., p. 95-97)

215

Ibid., p.142. « Sale, pas rasé, avec mon imper noir et mon chapeau de pluie je sors de là, et remonte des rues noires, en pataugeant, cherchant, comme tout Américain en difficulté, jeune ou vieux, la rue principale. » (Ibid., p. 143)

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ecstasy of the mind. / I’m a Wretch. / But I love love.216 » Bien qu’il se reproche sa

conduite et ses tares dans ce passage, le narrateur justifie également ses actions : il est à la fois misérable et plein d’amour, maladroit et pardonnable.

Dans cette optique, Satori in Paris donne à lire un rapport au monde difficile, étant donné que le narrateur, dans ce roman, souhaite à la fois être inclus et exclu de la société, la désire et la rejette. Ce rapport à la communauté et au reste du monde tout en tensions, dans Satori in Paris, rappelle la figure du mauvais pauvre d’Hector de Saint-Denys Garneau et le prix à payer pour la vocation de pauvreté de Garneau et Kerouac.

Dans Satori in Paris, les sentiments du héros ne sont pas seulement liés à la solitude et à l’étrangeté, puisqu’il est également possible de remarquer dans l’œuvre un sentiment d’infériorité lié à l’identité culturelle et à la langue. Le narrateur observe en de nombreuses occasions des réactions méprisantes chez les personnes qu’il croise sur son chemin.

I dont remember how I got out of there but the lady was not pleased and neither was I – But what I didnt know about Britanny at the time was that Quimper […] was nevertheless of all dumb bigcity things considered a hickplace by the popular wits of Paris, because of its distance from the capital […]. – Connecting that with Quebec and the famous dumb Canucks she musta laughed in her teeth.217

Lorsque le narrateur rencontre cette bibliothécaire dans le roman, il souligne que celle-ci considère les Canadiens français comme des lourdauds, des imbéciles. Il soutient que c’est précisément le fait qu’il soit de filiation canadienne-française qui crée de la condescendance chez elle. Une certaine misère et une pauvreté identitaire sont donc associées à cette filiation, selon lui. Même s’il lui arrive de se désigner comme New Yorkais ou « American Boy », tel que souligné plus tôt, il se

216

Ibid., p. 54. « Mes manières, abominables parfois, peuvent être exquises. En vieillissant, je suis devenu un ivrogne. Pourquoi ? Parce que j’aime l’extase de l’âme. / Je suis un Misérable. / Mais j’aime l’amour. » (Ibid., p. 55)

217

Jack Kerouac, Satori in Paris, op. cit., p. 106. « Je ne me souviens pas comment je suis sorti de là, mais la péronnelle n’était pas contente, moi non plus d’ailleurs. – Mais ce que je ne savais pas, à propos de la Bretagne, à l’époque, c’est que Quimper […] n’en était pas moins considérée, malgré toutes ces âneries sur les grandes villes, comme un trou perdu, par les esprits populaires de Paris […]. – Faisant le rapprochement avec Québec et les Canadiens français, ces lourdauds fameux, elle a dû bien rire entre ses dents. » (Ibid., p. 107)

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qualifie également de crafty worthless Canuck218, de descendant d’humilié219, de rat de Québec220 et discute souvent de sa famille et de ses ancêtres à la négative.

Encore une fois, il y a des échos entre l’imaginaire de Kerouac et celui de Gaston Miron. Dans le recueil L’homme rapaillé, Miron décrit le Canadien français comme « le sous-homme, la grimace souffrante du cro-magnon / l’homme du cheap way, l’homme du cheap work / le damned Canuck ». Le Canadien français est ainsi évoqué dans le poème « Le damned Canuck » tel un homme inférieur, à peine debout et agonisant, voire complètement privé de son identité. Chez Miron, le terme a toutefois une portée plus sociale que pour Kerouac. Comme le souligne Karine Villeneuve dans « Genèse  du  cycle  de  " La  batèche"  de  Gaston  Miron221

», « Le damned Canuck » « [dénonce aussi] l’aliénation d’un peuple incapable de dominer une situation avilissante », une aliénation dont Miron aurait pris la pleine conscience en France. Dans le roman de Kerouac, le terme réfère plutôt à un sentiment d’infériorité lié à une filiation, à une histoire personnelle, sans toutefois chercher à dénoncer ou mettre en lumière une aliénation collective.

De plus, le narrateur de Satori in Paris peine à se faire comprendre par les gens qu’il rencontre à cause de son état d’ivresse avancé. Ceux-ci lui font également remarquer qu’il a un accent et ne comprennent pas chacun de ses mots222.

– You speak the good French but you have an accent–? – Oua, du Canada.

– Ah yes, because your passeport is American.

– But I havent learned French in books but at home, I didnt know how to speak English in America before I was, oh, five six years old, my parents were born in Canada in Québec, the name of my mother is L’Évêsque.

– Ah, that’s breton also.223

218 Ibid., p. 158. « […] vil et rusé Canadien français » (Ibid., p. 159) 219

Ibid., p. 160.

220

Ibid., p. 57.

221 Karine Villeneuve, « Genèse  du  cycle  de  " La  batèche"  de  Gaston  Miron : de la noirceur aux

rives de l’aube nouvelle », dans Bibliothèque et Archives nationales du Québec, [en ligne].

http://www.banq.qc.ca/documents/a_propos_banq/nos_publications/revue_banq/Revue3_banq201 1_BR-pages_20-33.pdf [Texte consulté le 25 avril 2017].

222

Ibid., p. 93.

223

Ibid., p. 166.

– Vous parlez bien français, mais vous avez un accent… – Oua, du Canada.

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Tout au long de son périple en France, le narrateur doit expliquer à plusieurs reprises la raison pour laquelle il sait parler français, bien qu’il soit né aux États- Unis. Discuter de son héritage culturel ambigu provoque parfois chez lui un sentiment de manque. Il rêve d’une communauté dans une cité du Saint-Laurent, de « cousins à lui224 » qui porteraient le même nom, mais a aussi l’impression d’être un imposteur, de ne pas parvenir à perpétuer la mémoire de ses ancêtres.

This cowarldy Breton (me) watered down by two centuries in Canada and America, nobody’s fault but my own, this Kerouac who would be laughed at in Prince of Wales Land because he cant even hunt, or fish, or fight a beef for his fathers, this boastful, this prune, this rage and rake and rack of lacks, "this trunk of humours" as Shakespeare said of Falstaff, this false staff no even a prophet let alone a knight, this fear-of-death tumor, with tumescences in the bathroom, this runaway slave of football fields, this strikeout artist and base thief, this yeller in Paris salons and mum in Breton fogs […]. This, in short, scared and humbled dumbhead loudmouth with-the-shits descendant of man.225

Dans cette longue énumération, l’accumulation des termes fait écho à la période de temps – deux siècles – qui a contribué à appauvrir l’héritage breton du narrateur, voire à l’anéantir complètement, à en supprimer toutes traces. Par cette accumulation mélangeant histoires personnelles et dérision, le narrateur met encore une fois l’accent sur sa médiocrité et ses lacunes. Ainsi, le tiraillement lié à son héritage culturel crée de l’incertitude et de la culpabilité chez le narrateur. Au cours des derniers siècles, il a l’impression que ses racines bretonnes se sont avilies.

Sa filiation identitaire lui semble donc perdue, voire totalement absente, et va jusqu’à le hanter, comme le souligne Jean-Christophe Cloutier dans l’avant- propos de La vie est d’hommage, lorsqu’il affirme que « "l’héritage d’étrangeté" du

– Seulement j’ai pas appris le français dans les livres, mais à la maison, j’ai pas su parler anglais, en Amérique, avant d’avoir, oh, cinq ou six ans, mes parents sont nés au Canada, à Québec; ma mère c’est une L’Évêsque.

– Ah, c’est aussi un nom breton. (Ibid., p. 167)

224

Ibid., p. 151.

225

Ibid., p. 158-160. « Ce poltron de Breton (moi) dégénéré par deux siècles passés au Canada et en Amérique, personne n’est fautif, sauf moi, ce Kerouac dont tout le monde se gausserait sur les terres du prince de Galles, parce qu’il n’est même pas capable de chasser ou de pêcher, ou de se battre pour ses pères, ce vantard, ce péquenot, ce dévoyé roué, qui fait le Jack au cognac, cette outre pleine d’humeurs, comme le disait Shakespeare en parlant de Falstaff […] Bref, ce

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père et des ancêtres masculins de Kerouac le hante constamment226 ». Un autre exemple de cette hantise s’avère le moment où le narrateur de Satori in Paris croise un imprimeur dans la rue :

I get mad and go up to an apparent elderly printer hurrying home from work or cardgame, maybe my father’s ghost, as surely my father musta looked down on me that night in Britanny at last where he and all his brothers and uncles and their fathers had longed to go, and only poor Ti Jean finally made it […].227

L’utilisation du terme « mad », dans ce passage, a une signification particulière dans le contexte d’écriture de Satori in Paris. Pour plusieurs écrivains de la Beat

Generation, le terme renvoie à une façon d’être qui ne se conforme pas aux

normes sociales de la classe moyenne américaine. Dans son article « Social Madness in Beat Generation Writing228 », Megan Reynolds souligne qu’être fou ou encore insensé, pour ces écrivains, n’a pas une connotation péjorative, étant donné que cette folie s’avère un moyen d’accéder à une façon d’être authentique, une façon d’être soi sans être affecté par les déterminismes de la société américaine des années 1950, que les auteurs de la Beat Generation trouvent étouffants. Toutefois, comme Reynolds le dit, entrer à pieds joints dans cette folie représente également des dangers pour ceux-ci : la possibilité d’être isolés de la société, ou encore de tomber dans l’abus, de développer une dépendance aux drogues ou à l’alcool, par exemple.

De la sorte, dans Satori in Paris, l’emploi du terme « mad » en début de paragraphe apparaît comme une invitation à accéder à un mode de pensée différent, s’opposant à des réflexions rationnelles ou cartésiennes. Cela rend possible, dans l’extrait, l’apparition du fantôme du père (un fantôme qui n’est d’ailleurs pas sans rappeler celui de Gérard) ou encore la présence de la parenté de Kerouac dans le ciel breton. Même si les réminiscences liées à sa famille et ses ancêtres troublent le narrateur, son voyage en France lui apporte finalement une

226 Jean-Christophe Cloutier, « Avant-propos » dans Jack Kerouac, La vie est d’hommage, op. cit.,

p. 29.

227 Jack Kerouac, Satori in Paris, op. cit., p. 152. « La moutarde me monte au nez; j’aborde une

espèce d’imprimeur apparemment d’un certain âge, qui rentre chez lui d’un pas pressé au sortir du travail ou d’une partie de cartes, le fantôme de mon père, peut-être, car cette nuit-là en Bretagne, enfin, en cette Bretagne où lui et ses frères, ses oncles et leurs pères, avaient tous tant voulu aller ; et seul le pauvre Ti Jean avait fini par y arriver […]. » (Ibid., p. 153)

228

Megan Reynolds, « Social Madness in Beat Generation Writing », dans The Expositor: A Journal of Undergraduate Research in the Humanities, Trinity College, 2016, p. 80-99.

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certaine fierté, étant donné qu’il est le premier de sa famille à visiter l’Europe afin d’en savoir davantage sur ses origines. À la fin du roman, il semble même parvenir à une certaine forme d’acceptation vis-à-vis sa dualité identitaire en se qualifiant tout simplement de « dopey American Canuck229 ».

Même si l’héritage familial hante constamment le narrateur et lui apparaît comme un lourd poids à porter, la recherche d’une filiation identitaire se résout dans le roman grâce à l’idée de communauté et de complicité entre gens de différents métiers et nationalités que les satoris suggèrent. Même si la visée d’écriture de Satori in Paris soit de mettre le doigt sur ce qui a pu causer le satori230, il est difficile pour le narrateur d’affirmer à quel moment exact se produit vraiment son illumination. Le satori prend plusieurs formes et visages tout au long du récit : il est attribuable au chauffeur de taxi Raymond Baillet231, apparaît au fil de longues conversations en français232, est causé par le regard approbateur d’un prêtre233, par la rencontre de Noblet et, finalement, peut être arrivé à l’auberge Victor-Hugo234. Somme toute, ce qui semble analogue dans tous ces évènements sont les liens de confiance et de complicité que le narrateur développe à ces moments particuliers avec les gens qu’il rencontre, comme des marques certaines de compréhension mutuelle et de filiation pour celui-ci. Encore une fois, une porte de sortie vis-à-vis du malaise identitaire, dans l’imaginaire de Kerouac, réside dans la possibilité de transcender cette tension en supposant son identité comme étant universelle, en quelque sorte, afin de parvenir à une certaine acceptation de soi.

Cette posture rappelle ce que suggère Yvon Rivard lorsqu’il discute « des nouveaux riches qui croient échapper à leur condition de pauvres en empruntant, par exemple, l’identité américaine ou européenne235

» et de la méfiance de Gaston

229

Jack Kerouac, Satori in Paris, op. cit., p. 166. « ce Canadien français américain abruti par l’alcool » (Ibid., p. 167)

230

Terme japonais qui signifie illumination ou encore révélation, et qui fait référence à un éveil spirituel, un état de compréhension plus profonde.

231

Jack Kerouac, Satori in Paris, op. cit., p. 17 et 240.

232 Ibid., p. 93. 233 Ibid., p. 135. 234 Ibid., p. 171.

235 C’est-à-dire au « recours à toute culture, européenne ou américaine, qui le guérirait

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Miron par rapport au « salut par la calotte236 ». Chez Kerouac, cependant, le recours à une identité universelle ne semble pas relever de l’artifice ou d’une posture de nouveau riche, comme le prouve, par exemple, la peur constante du narrateur de Satori in Paris de faillir à l’héritage familial. La découverte par Kerouac d’une identité universelle relève donc davantage d’un universel comme l’entend Miron, et tel que l’explique Yvan Lamonde dans « Rapailler l’homme québécois : Miron et la catharsis du temps237 ». En effet, en acceptant sa pauvreté natale, sa propre spécificité, Miron a le sentiment d’accéder à une culture complète, « une et multiple, ouverte et plurielle238 », et de participer, humblement, à cette culture universelle. Il s’agirait donc d’une façon d’être les deux à la fois – le spécifique et le collectif, tout en restant fidèle à sa pauvreté natale et à son héritage culturel. Aussi, en découvrant grâce à la route et au voyage une

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