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La santé dans l’enfance : approche à partir des quotients de mortalité

Dans le document Santé et vulnérabilité au Maroc (Page 63-66)

Le niveau de la mortalité des moins de cinq ans6 (mortalité infanto- juvénile) et de ses composantes (mortalité juvénile7, mortalité infantile8, mortalité post-néonatale9, mortalité néonatale10) dépend de plusieurs facteurs qui interagissent entre eux : conditions médico-sanitaires (présence/absence de personnels de santé et de structures de soins, leur accessibilité,…), conditions socio-économiques (niveau d’instruction des mères,…), conditions bio-démographiques (intervalle intergénésique, âge de la mère,…). Au cours des quatre dernières décennies, la forte baisse de la mortalité infanto-juvénile témoigne d’une amélioration globale de ces différentes dimensions. Cependant, son niveau actuel mérite une attention particulière.

La mortalité chez les moins de cinq ans reste importante en dépit de reculs notables

Dans l’ensemble du pays, la mortalité des enfants de moins de cinq ans reste relativement élevée11 en dépit du recul considérable opéré depuis les années 1960. En effet, sur la période 1962-196612, le quotient de mortalité infanto-juvénile s’établissait à 203 ‰ alors que sur la période 1999-200313 il s’établissait à 47 ‰. Le risque de décéder avant l’âge de cinq ans est donc plus de quatre fois moins élevé à l’aube des années 2000 qu’au milieu des années 1960.

Parmi les composantes de la mortalité infanto-juvénile, c’est la mortalité juvénile qui a le plus reculé : elle est passée de 96,1 ‰ sur la période 1962- 66 à 7 ‰ sur la période 1999-2003. Quant à la mortalité infantile, son niveau a été divisé par près de trois entre ces deux périodes, passant de 118,2 ‰ à 40 ‰. Au sein de cette mortalité infantile, deux composantes sont à considérer : la mortalité néonatale qui a été divisée par deux entre ces deux périodes, passant de 58,1 ‰ à 27 ‰ ; et la mortalité post-néonatale qui a été divisée par plus de quatre entre ces périodes passant de 60,1 ‰ à 14 ‰.

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5Q0 : représente la probabilité de décéder entre la naissance et le cinquième anniversaire. 7

4Q1 : représente la probabilité de décéder entre le premier et le cinquième anniversaire. 8

1Q0 : représente la probabilité de décéder entre la naissance et le premier anniversaire. 9

PNN : probabilité de décéder entre le premier mois révolu et le premier anniversaire.

10

NN : probabilité de décéder entre la naissance et la fin de premier mois.

11 Haut Commissariat au Plan, 2008a, p. 35. 12

ENPS, 1987 (Ministère de la Santé publique, 1989). 

Dans le cadre du Plan national pour la réduction de la mortalité maternelle

et néonatale, un objectif spécifique est de réduire le taux de mortalité

infantile de 40 à 15 pour 1000 naissances vivantes d’ici 201214.

Une vulnérabilité particulièrement forte durant le premier mois de vie En comparant les composantes de la mortalité des moins de cinq ans entre les périodes 1987-1991 et 1999-200315, on peut remarquer que c’est pour la période de vie de un à cinq ans que la baisse de la mortalité a été la plus marquée puisqu’elle a diminué de près de deux tiers passant de 20 ‰ à 7 ‰. La baisse moins marquée de la mortalité infantile, qui est passée de 57 ‰ à 40 ‰, semble due à la résistance à la baisse de la mortalité néonatale qui n’a que relativement peu baissé entre ces deux périodes passant de 31 ‰ à 27 ‰. Ces éléments témoignent d’une vulnérabilité toujours particulièrement forte durant le premier mois de vie.

Évolutions des quotients de mortalité : une rurospécificité toujours très marquée

Le niveau de la mortalité des moins de cinq ans est très différencié selon le milieu de résidence considéré. Quelles que soient la période étudiée et la tranche d’âge considérée, résider en milieu rural apparaît comme un facteur de surmortalité dans l’enfance (tableau 2).

L’examen des évolutions différenciées, par milieu de résidence, des différents quotients de mortalité fait apparaître une surmortalité rurale très nette. De manière générale, la mortalité des moins de cinq ans est 1,8 fois plus élevée en milieu rural qu’en milieu urbain sur la période 1994-2004. Elle avait même été deux fois plus élevée dans les campagnes que dans les villes durant la première moitié des années 1990.

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Plus de 25 000 enfants décèdent chaque année avant de fêter leur premier anniversaire et environ 16 700 nouveau-nés décèdent avant d’atteindre l’âge de 28 jours. Site internet du Ministère de la Santé. Chiffres cités dans la présentation du Plan national pour la réduction

de la mortalité maternelle et néonatale.

Tableau 2. Évolution de la mortalité infanto-juvénile et de ses composantes (en ‰), par milieu de résidence, Maroc, 1977 à 2003

Source Période ENPS 1987 1977-86 ENPS II 1992 1983-92 ENSME 1997 1992-97 EPSF 2003-04 1994-2004 Mortalité infanto-juvénile (5Q0) Urbain (1) 81,4 58,7 29,9 38 Rural (2) 137,3 97,8 61,1 69 Ensemble 118,0 83,9 45,8 47* (2)/(1) 1,68 1,67 2 1,81 Mortalité juvénile (4Q1) Urbain (3) 16,4 7,2 6,1 5 Rural (4) 51,0 30,7 15,0 15 Ensemble 38,7 22,1 9,8 7* (4)/(3) 3,1 4,26 2,45 3 Mortalité infantile (1Q0) Urbain (5) 66,1 51,9 23,8 33 Rural (6) 91,0 69,3 46,1 55 Ensemble 82,4 63,1 36,6 40* (6)/(5) 1,38 1,34 1,93 1,66 Mortalité post-néonatale (PNN) Urbain (7) - 22 8,7 - Rural (8) - 33,1 23,9 - Ensemble 32,2** 29,2 16,9 - (8)/(7) - 1,5 2,74 - Mortalité néonatale (NN) Urbain (9) - 29,9 15,1 24 Rural (10) - 36,2 22,1 33 Ensemble 41,1** 34 19,7 27* (10)/(9) - 1,21 1,46 1,37

Sources : 1977 à 1997 : enquêtes Ministère de la Santé ; 1994-2004 : EPSF, repris de Haut Commissariat au Plan, 2008a.

*

1999-2003

**

1982-86

La disparité milieu rural/milieu urbain est la plus forte pour la mortalité juvénile : sur la période 1994-2004 par exemple, la mortalité juvénile rurale se révèle être trois fois plus élevée que la mortalité juvénile urbaine (15 ‰ contre 5 ‰). Cela se vérifie quelle que soit la période considérée, la mortalité juvénile étant par conséquent la composante de la mortalité des moins de cinq ans où la rurospécificité apparaît la plus marquée.

En ce qui concerne la mortalité infantile, l’écart relatif entre les deux milieux de résidence, apprécié ici à partir du quotient mortalité rurale /

mortalité urbaine semble avoir notablement augmenté entre les périodes 1977-1986 et 1992-97. Entre les deux périodes extrêmes pour lesquelles nous disposons ici de données ventilées par milieu de résidence, 1977-86 et 1994-2004, le niveau de mortalité infantile a été divisé par deux tandis qu’en milieu rural il a moins fortement baissé, bien que diminuant de 40 %. Sur la période la plus récente, la mortalité infantile reste 1,66 fois plus élevée en milieu rural qu’en milieu urbain.

C’est pour la mortalité néonatale que l’écart entre les deux milieux de résidence apparaît le moins fort ; elle reste néanmoins près de 1,4 fois plus élevée en milieu rural (33 ‰) qu’en milieu urbain (24 ‰).

Un autre élément paraît important à souligner : la mortalité des enfants de moins de cinq ans varie fortement suivant le niveau d’instruction des mères. Selon l’ENSME 1997, la mortalité infanto-juvénile pour les enfants dont la mère n’avait jamais été scolarisée (53,4 ‰) était deux fois plus élevée que celle des enfants dont la mère avait atteint un niveau d’enseignement primaire (25,3 ‰), 2,8 fois plus élevée que celle des enfants dont la mère avait atteint un niveau d’enseignement secondaire (19,3 ‰) et près de cinq fois plus élevée que celle des enfants dont la mère avait atteint un niveau d’enseignement supérieur (11,7 ‰). On peut donc penser qu’une partie de la surmortalité des jeunes enfants en milieu rural est liée, parmi d’autres éléments, au fait que ce milieu de résidence doive encore faire face à un niveau d’analphabétisme féminin important (cf. la quatrième partie.

Dans le document Santé et vulnérabilité au Maroc (Page 63-66)