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La saisie-vente des soutes, une mesure à l’assiette diminuée

Dans le document La saisie de soutes (Page 83-86)

L’assiette du gage des créanciers participant à une saisie-vente paraît minime du fait du prix dérisoire des soutes (§1) et des coûts de pompage (§2).

§ 1. Le prix de vente dérisoire des soutes

La saisie-vente qui tend à l’obtention de la contrevaleur des soutes (A) paraît d’un intérêt limité eu égard à la valeur des soutes (B).

A. La saisie-vente, une mesure tendant à la réalisation du gage du créancier

Définition de la saisie vente – Rappelons à titre liminaire que « tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, après signification d'un commandement, faire procéder à la saisie et à la vente des biens meubles corporels appartenant à son débiteur, qu'ils soient ou non détenus par ce

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dernier » (art. L. 221-1 CPCE). Cette procédure autrefois appelée « saisie exécution » a pris le nom de « saisie-vente » avec la loi du 9 juillet 1991.

La saisie-vente de soutes – Eu égard aux coûts qu’induisent l’immobilisation du

navire, la saisie conservatoire de soutes pratiquée par le créancier qui ne détient pas - par hypothèse - une « créance maritime » aura généralement pour effet d’obtenir le recouvrement de sa créance. Toutefois, il peut arriver que l’indisponibilité des soutes ne suffise pas pour que le débiteur honore sa dette. C’est le cas d’un débiteur en prise à des difficultés financières qui ne lui permettent décidément plus de payer le service rendu ou le bien fourni par le créancier. Le créancier pourrait alors être tenté de prolonger la saisie conservatoire pratiquée par une saisie-vente des soutes (ce qui est parfaitement possible au vu de l’article R. 221-6 du code de procédure civile d’exécution81) éventuellement entre les mains de l’exploitant non débiteur (art. L.

221-1 et R. 221-9 CPCE).

Les conditions d’une saisie-vente - La saisie-vente est subordonnée à une créance

liquide et exigible reconnue par un titre exécutoire (art. L. 221-1 CPCE). Le créancier titulaire d’un tel titre doit signifier au débiteur un commandement de payer lui notifiant le titre exécutoire dont il se prévaut. A l’expiration d’un délai de huit jours à compter de la signification, l’huissier de justice pourra ensuite poursuivre les opérations de saisie (art. R. 221-10 CPCE).

Les effets d’une saisie-vente - Le débiteur a alors un mois à compter de la

notification de l’acte de saisie pour procéder lui-même à la vente des biens saisis. A défaut, les soutes feront l’objet d’une vente forcée aux enchères publiques (art. L.221-3, alinéa 1).

L’intérêt de la saisie-vente des soutes - Pour que la saisie-vente ait un intérêt pour

le créancier, le produit de la vente devrait au moins être égal au montant de sa créance. Qu’en est-il ?

B. La valeur des soutes, insuffisante à désintéresser les créanciers

Le prix du baril - Avec un baril à 49,34 $ (au 4 août 2016) au lieu de 105,84 (au 23

juin 2014), la vente du carburant contenu dans les soutes peut s’avérer insuffisante

81 « Tous les biens mobiliers corporels saisissables appartenant au débiteur peuvent faire l’objet d’une

La saisie de soutes 78 pour désintéresser le créancier qui a eu l’initiative de la saisie-vente. le prix des soutes est encore réduit par leur passage dans les cuves du navire.

La dépréciation des soutes par son passage dans les entrailles du navire - Les

résidus contenus dans les réservoirs et les machines ont nécessairement souillé les soutes. A une époque où les normes de qualité ne cessent de se complexifier, les armateurs se montrent extrêmement réticents à l’idée de remplir leurs soutes avec un carburant d’occasion ce qui a pour conséquence de baisser encore le prix de ces soutes. Par ailleurs, les frais inhérents à la procédure de saisie-vente ne font qu’affaiblir l’intérêt d’une pareille procédure.

§ 2. Les coûts induits par une saisie-vente de soutes

La saisie-vente suppose l’extraction du fioul du navire (A) ce qui s’avère être une mesure parfois complexe (B).

A. La saisie-vente subordonnée à l’extraction des soutes du navire

La nécessaire extraction du fioul du navire - Pour que les soutes puissent être

vendues, encore faut-il que celles-ci soient extraites des cuves du navire.

B. Les difficultés d’enlèvement des soutes

L’extraction complexe et onéreuse du fioul - Les difficultés relatives à l’extraction

du carburant des soutes du navire a été mise en lumière par l’arrêt Ice Crest (JEX; TGI Saint Nazaire, 8 février 1994, navire Ice Crest DMF 1994.590, note P. Y. Nicolas). En l’espèce il s’agissait d’un créancier qui avait obtenu l’autorisation de procéder à la saisie-exécution d’un navire. Mais le navire se trouvait aussi grevé d’une charge dans la mesure où l’affréteur à temps invoquait son droit de propriété sur les soutes. Le créancier ayant initié la saisie-exécution du navire entendait donc que le juge ordonne la libération du navire. Le juge saisi répond en deux temps : il considère d’abord qu’ « il est difficilement contestable que (la société affréteur)

ayant résilié la charte-partie la liant (au débiteur) pour l’affrètement à temps du navire, est tenue de rendre celui-ci libre de toute occupation. Elle est donc non seulement en droit de faire procéder à l’enlèvement du fuel se trouvant encore à

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bord et lui appartenant mais également tenue d’y procéder ». Il reconnaît toutefois

que l’exécution de la mesure apparaît aléatoire dans la mesure où l’enlèvement du fuel n’est possible qu’après mise en fonctionnement des serpentins de chauffage du bord. Or le fonctionnement de ces appareils semble douteux en raison de l’état général du navire. L’idée d’une procédure de saisie-vente paraît ainsi très limité pour les créanciers, ce, d’autant qu’elle souffre d’un autre défaut.

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