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1. Introduction

2. Évaluation traditionnelle des jeux finis 3. Interprétation d’un jeu arbitraire 4. Sémantique des positions

5. Sémantique bisémique 6. Sémantique des stratégies 7. Conclusion

Dans ce chapitre nous définissons la sémantique d’un jeu combinatoire à deux joueurs. Dans la théorie des jeux habituelle, où l’on assume que les arbres de jeu sont finis, la sémantique d’un jeu est fournie par une simple (et parfois implicite) fonction d’évaluationinductive. Dans cette hypothèse, le sens des stratégies et des contre-stratégies est également très simple à définir. En revanche, le relâchement de l’hypothèse de finitude complique, d’une part, la définition de sémantique d’un arbre de jeu complet, donc la sémantique d’une position, et, d’autre part, la définition de sémantique d’un élagage de l’arbre de jeu complet, tel qu’une stratégie ou tel qu’une contre-stratégie.

5.1. Introduction

À la fin d’une partie, il y a normalement soit une récompense soit, au contraire, un enjeu à payer pour les joueurs (sous forme d’argent, de prestige ou de satisfac-tion), qui dépend de la progression de la partie. On peut penser formaliser une telle situation avec une fonction qui assigne un coût,appelé traditionnellementpayoff, à chaque position terminale du jeu. Dans le cas denjoueurs, le payoff est unn-uplet composé par les coûts de chaque participant.

(x1; :::; xn) (y1; :::; yn)

(z1; :::; zn) (w1; :::; wn)

129

Le plus souvent l’ensemble des valeurs utilisées pour représenter un payoff indi-viduel est très simple. Par exemple, l’ensemble des booléens f0; 1g, autrement dit, gagné (1) ouperdu(0). Ou alors, comme dans leMorpion, lesDames et lesÉchecs, l’ensemblef-1; 0; 1gc’est-à-diregagné(1),perdu (-1) oumatch nul (0). Pour plu-sieurs jeux de cartes nous aurons besoin des entiersZpour traduire les gains ou les pertes en argent des joueurs.

Quels que soient les domaines D1; : : : ; Dn utilisés pour les payoff individuels des n joueurs, la fonction de payoff assigne un coût dans le produit cartésien D = D1× · · · ×Dn. Le jeu est toujours étudié sur la base d’une présomption fondamentale de la théorie des jeux, l’hypothèse de rationalité, selon laquelle les joueurs choisiront, à tout moment du match, leur meilleur coup. Dans cette hypo-thèse, les joueurs sont non seulement rationnels mais, aussi,égoïstes : ils ont à coeur leur seul intérêt qui estindépendant de celui des autres. En d’autres termes, chaque participant fera lemaximum vis-à-vis de son payoff, tout en sachant que ses adver-saires se comporteront de la même façon quand ce sera leur tour. D’un point de vue mathématique, cela correspond à équiper les domaines d’une relation de préférence

≤et d’une opération, que nous appellerons le max, qui permettra de sélectionner le meilleur des coûts, donc le meilleur des coups disponibles. C’est pourquoi, nous réfléchirons sur des structures de type (D1;≤1;max1); : : : ;(Dn;≤n;maxn). Pour illustrer cette hypothèse cardinale de la théorie, supposons qu’on aie un jeu à deux joueurs (où D1=D2=N) se déployant de la façon suivante :

ı1

ı2

8; 1 8; 2 8; 0 8; 3 2; 5

ı3

3; 4 3; 6

Le joueur se trouvant dans la position ı1, peut choisir entre deux coups, celui conduisant le jeu dans la positionı2 de l’opposant, ou celui conduisant le jeu dans la positionı3, toujours de l’opposant. Quel choix est le plus rentable dans la position ı1? On pourrait penser au premier, puisque la plupart des coups ensuite disponibles à l’opposant conduiraient lejoueur vers son gain maximal, c’est-à-dire8. Hélas, le joueur ne peut se permettre de faire un tel choix, il doit savoir que l’opposant ne joue pas au hasard mais tente, lui aussi, de maximiser son gain. Si l’opposant se retrouvait dans la position ı2 il n’hésiterait pas un seul instant et opterait pour son coup le plus rentable, pour lequel il gagnerait 5 faisant gagner 2 et non 8 au joueur. L’hypothèse de rationalité implique donc que le joueur choisira le second coup lui permettant d’assurer le gain 3.

Il peut arriver, accidentellement, que les intérêts des joueurs convergent, sans que l’hypothèse qui veut que les joueurs soient rationnels et égoïstes ne soit remise en discussion :

5.1. INTRODUCTION 131

ı1

ı2

1; 2 3; 4

ı3

5; 6 7; 8

Dans cet exemple le match aboutit au payoff(7; 8)qui est maximal pour les deux joueurs. Si la convergence fortuite des intérêts ne pose pas de véritables problèmes, un second aspect peut compliquer l’évaluation d’un jeu. Si plusieurs coups sont équivalents, à un moment donné, pour le joueur qui a le choix (le joueur actif), mais ils ne le sont pas pour celui qui subit ce choix (le passif), nous aurons des difficultés pour estimer la valeur de payoff du joueur passif. Considérons l’exemple suivant :

ı1

ı2

3; 2 5; 2

ı3

1; 7 9; 7

Devant le joueur un choix difficile : s’il choisit à gauche, l’opposant se trouvera dans une position où ses deux coups disponibles seront équivalents à la valeur2; de la même manière, s’il choisit à droite, l’opposant aura deux coups équivalents à7.

Qu’est-ce que fera l’opposant? Il seraindifférentet choisira auhasard? Il seragentil et viendra au secours ? Est-ce qu’il profitera méchamment de toutes les occasions qui se présenteront pour affliger son concurrent ? En d’autre termes, s’il est clair que l’opposant fera le max sur sa composante, qu’est-ce qu’il fera sur l’autre ? La moyenne (indifférent), le max (gentil), ou le min (méchant) ?

Ce type de jeu trouve donc des réponses extrêmes, celles du pire des cas (ad-versaire méchant) et du meilleur des cas (adversaire gentil), ou la réponse inter-médiaire, le cas moyen (adversaire indifférent). Il s’agit d’une classe de jeux qui peut être aussi abordée par la théorie, extrêmement développée, des jeux répétés oustochastiques, où les joueurs réitèrent les parties et, ce faisant, il sont gentils ou méchants, c’est-à-dire coopératifs ou pas, selon l’expérience du comportement de leur adversaire observé dans le passé.

Nous ne nous occuperons plus de ce genre de jeu, où les intérêts peuvent conver-ger, mais, nous nous placerons dans le cadre théorique des jeux ditsà somme nulle, pour lesquels lasomme des payoffs individuels des joueurs estnulle. Si la somme est nulle, les payoffs sont l’un l’opposé de l’autre, tout comme les intérêts des joueurs.

D’un point de vue mathématique, cela revient à dire que, dans le cas de deux joueurs, les deux structures(D1;≤1;max1)et(D2;≤2;max2)ont le même domaine D1 = D2 mais avec l’ordre de préférence renversé : x ≤1 y , y ≤2 x, ce qui implique max1=min2et max2=min1.

Dans les jeux à somme nulle, on peut évidemment se contenter de donner les n-1premières composantes du payoff, ce qui est particulièrement utile pour les jeux àn=2joueurs. En effet, si la seconde composante des payoffs est toujours l’opposé de la première, nous pouvons la passer sous silence et ne nous occuper que de la

première. Nous aurons alors un seul domaine d’évaluation, que nous appellerons D, avec un seul ordre de préférence, celui du joueur, que nous noterons ≤et les deux opérations de sélection, celle dujoueur, noté max, et celle de l’opposant, noté min. Pour cette raison, les jeux à deux joueurs à somme nulle sont appelés jeux min-max.

5.2. Évaluation traditionnelle des jeux finis

Pour l’évaluation d’un jeu fini, dont la syntaxe est S = (P; –;!;PI), on peut imaginer que la technique que l’on met habituellement en oeuvre consiste à décorer l’arbre de jeu (fini) qui découle d’une positionı∈P, par les fonctions min et max sur les noeuds non terminaux, et par lepayoff de la position terminale sur les feuilles de l’arbre. Ensuite, on imaginera un mécanisme de rétro-propagation des valeurs vers la racine par le calcul des opérations affectées aux noeuds de l’arbre. D’un point de vue mathématique cela correspond précisément à une définition inductive, où le calcul de la valeur d’un noeud renvoie au calcul des valeurs de ses fils. Nous supposerons que nous disposerons toujours d’une fonction indiquant le payoff, par exemple un entier naturel, de toute position terminale :

p:PT !N

Sur cette fonction nous pouvons bâtir l’évaluation d’un jeu fini. En effet, ce qui prend traditionnellement le nom de valeur d’un jeu est une fonction val : P! N définie de la façon suivante :

val(ı) = 8>

><

>>

:

p(ı) siı∈PT

i=1::nmax val(ıi) si Succ(ı) =ı1::ın; –(ı) =Player

i=1::nmin val(ıi) si Succ(ı) =ı1::ın; –(ı) =Opponent

Une version équivalente nous reporte à la décoration imaginaire de l’arbre de jeu suivi du mécanisme de rétro-propagation des valeurs. Nous définissons la fonction val :T(S)!Nnon pas sur les positions du jeu mais sur les arbres finis du jeu :

val(t) = 8>

><

>>

:

p(ı) sit=f("; ı)g

i=1::nmax val(ti) si Fils(t) =t1::tn; –(t(")) =Player

i=1::nmin val(ti) si Fils(t) =t1::tn; –(t(")) =Opponent

La fonctionval :P!Nsur les positions pourra alors être redéfinie par l’intermé-diaire de son analogue des arbres : val(ı),val(tı).

Dans les deux cas, les définitions sont, bien entendu, limitées au cas des jeux fi-nis, où lesfeuilles des arbres constituent la base inductive. La motivation principale de ce chapitre est, en revanche, celle de donner une signification ou, autrement dit, une valeur, à tout type de jeu, fini ou infini. Dans ce sens, la deuxième technique est plus intéressante puisqu’elle suggère une façon d’évaluer un arbre infini : celle de considérer la valeurlimited’un processus qui, selon le schéma précédent, évaluerait des préfixes finis de l’arbre infini. Finalement, avant de discuter l’évaluation des jeux infinis, nous pouvons formaliser l’évaluation des jeux finis, où IT(S) =T(S).

5.2. ÉVALUATION TRADITIONNELLE DES JEUX FINIS 133

5.2.1. Structures d’évaluation élémentaires. Dans le procédé d’abstrac-tion des propriétés requises à la donnée d’une sémantique des jeux, nous commen-çons par présenter les éléments sémantiques nécessaires aux jeu finis.

Definition5.2.1. (Structure d’évaluation élémentaire)Une structure d’évaluation élémentaire est une algèbre Dsur la signature :

(D; domaine d’évaluation

: D!D ; fonction du joueur

: D!D ; fonction de l’opposant )

˜

Les opérations : D ! D et : D ! D, d’arité variable, qui généralisent le max et le min, sont appelées respectivement fonction du joueur et fonction de l’opposant. Une structure d’évaluation élémentaire permet, avec une fonction de payoff p:PT !Dévaluant les noeuds terminaux, d’attribuer une valeur dans Dà tout jeu fini.

Definition 5.2.2. (Valeur d’un jeu fini) Étant donné une arène de jeu S = (P; –;!;PI), une structure d’évaluation élémentaire (D; ; ), et une fonction de payoffp:PT!D, lavaleur d’un arbre finidu jeu est la fonction val:T(S)!D définie de la façon suivante :

val(t), 8>

>>

><

>>

>>

:

⊥ sit=∅

p(ı) sit=f("; ı)g

i=1::nval(ti) si Fils(t) =t1::tn; –(t(")) =Player

i=1::nval(ti) si Fils(t) =t1::tn; –(t(")) =Opponent

˜

Example5.2.3. Dans le cas d’un jeu comme le Morpion, la structure d’évalua-tion est composée de trois valeurs seulement : gagné (+1), perdu (-1)et match nul (0). Les opérations des deux joueurs sont le max et le min (restreintes à l’ensemble des trois valeurs du jeu). Dans la position initiale de la figure 5.2.1, le joueur n’a pas de stratégie gagnante, au contraire il doit choisir le coup à gauche sur la figure pour espérer décrocher le match nul. En d’autres termes, la valeur de la position initiale de l’arbre, obtenue par le mécanisme de rétro-propagation des valeurs, est égale à0, qui dénote le match nul.

˜

Fig. 5.2.1. Valeur d’une branche du Morpion

Supposons qu’on veuille évaluer un préfixe finit0 d’un arbre de jeu t :t0 ≤t.

Par définition de préfixe, l’arbre t0 est un élagage complet ou radical à toutes ses adresses. En d’autres termes, les feuilles detsont forcément des feuilles det0, mais pas réciproquement, les feuilles de t0pouvant correspondre à un élagage radical de taux adresses concernées. Pour évaluer un préfixe, il faudra alors savoir évaluer des feuilles ne correspondant pas à des positionsterminales du jeu. Autrement dit, il faudra savoir approximer la valeur des positions non terminales du jeu.

Le problème de l’approximation de la valeur d’une position d’un jeu n’est pas une question qui se pose exclusivement pour les jeux infinis. On la rencontre aussi, dans la théorie des jeux combinatoires, pour estimer la valeur d’un jeu fini dont l’arbre de jeu est trop grand pour être évalué précisément (ceci est le cas, par exemple, des Échecs avec les règles modernes). Dans un tel contexte, un algorithme explorant l’arbre à la recherche d’une stratégie gagnante (tel que Deep Blue pour les Échecs), contraint à répondre dans un temps considéré comme raisonnable pour un être humain, sera souvent forcé d’arrêter ses recherches à une profondeur infé-rieure à la hauteur de l’arbre. Il sera alors obligé d’estimer la valeur d’une branche inexplorée, au lieu de l’évaluer avec précision.

Si dans la problématique du robot joueur d’Échecs nous pouvons imaginer plu-sieurs façons heuristiques d’estimer la valeur d’une position, plus au moins correctes vis-à-vis de la véritable valeur, dans la question d’attribuer une sémantique à tout jeu infini, nous devons, en revanche, procéder d’une façon rigoureuse d’un point de vue mathématique. La façon d’approximer les positions non terminales respectera, intuitivement, une règle dictée par un bon sens mathématique : plus l’exploration de l’arbre avancera en largeur et profondeur, et plus l’approximation de sa valeur sera fidèle. Plus précisément, nous dirons que les heuristiques devront respecter la relation préfixe entre arbres : en évaluant deux préfixest1ett2 d’un arbre infinit,

5.3. INTERPRÉTATION D’UN JEU ARBITRAIRE 135

eux-mêmes dans la relation préfixet1≤t2, nous nous attendrons à ce que l’approxi-mation résultant de la visite de t1 soit moins informative que celle correspondant à t2. Autrement dit, nous nous attendrons à ce que les valeurs soient, elles aussi, dans une relation ≤D définie sur le domaine d’évaluation D et homomorphe à la relation préfixe :

t1≤t2 ) v(t1) ≤D v(t2)

La notion d’interprétation d’un jeu est donc celle, habituelle, d’interprétation al-gébrique. Au départ de cette projection, que nous demandons à être un homomor-phisme, nous retrouvons l’algèbre syntaxique principale du jeu, dont l’objectif est celui de définir les éléments nécessaires à l’évaluation des arbres de jeut∈IT(S);

(PT;PNT;T(P);Tb(S);ITc(S);IT(S) ;≤)

Tous les éléments syntaxiques seront traduits dans l’algèbresémantique du jeu, une algèbre d’évaluation arbitraire dont la signature sera :

D= (D; D[;≤; ; ;⊥)

Si nous appelonsDı l’ensemble des valeurs résultant de l’évaluation d’un préfixe quelconque de la positionı, nous verrons que tout arbre de jeu infini t∈IT(S)⊆ IT(Sc )=‰ T(S)b [ a un signifié dans l’ensemble des dirigés de Dı modulo co-finalité (ou, autrement dit, dans la complétion par idéaux de Dı, cf. corollaire 2.5.6). Et lorsque la sous-algèbre(Dı;≤) sera un dcpo algébrique, un tel signifié pourra être considéré, à un isomorphisme près, comme étant une valeur deDı. Nous allons donc définir l’ensemble des fonctions composant l’interprétation des valeurs (qui, nous le rappelons, est une construction polymorphe’ : ∀¸:S: ¸! (¸), oùSest l’ensemble des sortes, cf. section 1.3.2), c’est-à-dire :

(1) l’interprétation des étiquettes (les positions terminales PT ou non termi-nales PNT) ;

(2) l’interprétation des arbres étiquetés dansP, qui incluent les préfixes finis ;

(3) l’interprétation des préfixes infinis, qui incluent IT(S).

Pour construire un tel homomorphisme on demande à la structure d’évaluation de contenir une relation de comparaison entre valeurs et des opérations des joueurs avec des propriétés de monotonie.

5.3.1. Interprétation des étiquettes. Le couple constitué de l’interpréta-tion des posil’interpréta-tions terminales (foncl’interpréta-tion de payoff) et de l’interprétal’interpréta-tion des posil’interpréta-tions non terminales d’un jeu (fonction heuristique), doit constituer la partie essentielle de l’homomorphisme de l’algèbre syntaxique vers l’algèbre d’évaluation du jeu.

Definition5.3.1. (payoff, heuristique)Étant donné une arène de jeuS= (P; –;!;PI), et un domaine de valeursD, une fonction de payoff est une fonction de type p:PT !D, une fonction heuristique est une fonction de typeh:PNT!D.

˜

5.3.2. Interprétation des arbres finis décorés. Les opérations des joueurs et définies dans unestructure d’évaluation élémentairepermettent, avec les fonc-tions d’évaluation des posifonc-tions terminales (lepayoff) et non terminales (l’heuristique), d’évaluer tout arbre fini étiqueté dansPavec l’habituel mécanisme de rétro-propagation des valeurs, à partir des feuilles, vers la racine de l’arbre. Si le noeud est terminal, la position est évaluée avec l’heuristique ou avec la fonction de payoff selon le statut (terminale ou non terminale) de la position qui décore le noeud. Si le noeud est non terminal, le statut terminal ou non terminal (dans le jeu) de la position qui le décore est ignoré. L’évaluation du noeud dépend exclusivement du joueur qui a la main dans la position du noeud. La fonction associée à ce joueur ( ou bien ) est appliquée pour composer les évaluations des fils de l’arbre.

Definition 5.3.2. (Rétro-propagation min-max)Étant donné une arène de jeu S = (P; –;!;PI), une structure d’interprétation élémentaire (D; ; ), une fonction de payoff p : PT ! D et une heuristique h : PNT ! D, l’interprétation inductive de T(P)(ou rétro-propagation min-max) est la fonction vp;h :T(P)!D définie de la façon suivante :

vp;h(t), 8>

>>

>>

><

>>

>>

>>

:

⊥ sit=∅

p(ı) sit=f("; ı)g; ı∈PT

h(ı) sit=f("; ı)g; ı∈PNT

i=1::nvp;h(ti) si Fils(t) =t1::tn; –(t(")) =Player

i=1::nvp;h(ti) si Fils(t) =t1::tn; –(t(")) =Opponent

˜

Ce mécanisme inductif permet, en particulier, d’évaluer aussi bien les arbres finis du jeu T(S) que les préfixes finis du jeu T(Sb )et les élagages finis du joueur Tep(S; ı)et de l’opposantTeo(S; ı).

Definition 5.3.3. (Valeurs d’une position)Étant donné une arène de jeu S = (P; –;!;PI), une structure d’interprétation élémentaire(D; ; ), une fonction de payoff p:PT !D et une heuristiqueh : PNT !D, l’ensemble des valeurs (des préfixes finis) d’une position ı∈P, notéDp;hı , est l’image de la rétro-propagation min-max de tous les préfixes finis de l’arbre de la position :

Dp;hı ,fvp;h(t)j t∈T(S; ı)gb

L’ensemble desvaleurs des élagages finis (du joueur)dansı, notéDep;hı , est l’image de la rétro-propagation min-max de tous les élagages finis du joueur :

Dep;hı ,fvp;h(t)jt∈Tep(S; ı)g

˜

Notation 5.3.4. Pour alléger la notation, lorsque il n’y aura pas d’ambiguïté possible sur les fonctions de payoff et heuristique utilisées, nous écrironsDıetDeı

au lieu deDp;hı etDep;hı . Nous ferons de même avec la rétro-propagation min-max, que nous noterons plus simplement par l’écriturev.

5.3. INTERPRÉTATION D’UN JEU ARBITRAIRE 137

Si l’ensemble des valeurs des préfixes finisDıpermet de caracteriser les struc-tures d’évaluation qui donnent un sens aux arbres de jeu infinis, l’ensemble des valeurs des élagages finis du joueur Deı permet, en revanche, de caractériser les structures qui donnent un sens aux élagages du joueur et donc, en particulier, à ces stratégies.

5.3.3. Structures d’évaluation monotones. Nous allons voir comment les valeurs des préfixes finis d’une positionıpeuvent converger vers une limite que nous appelleronsvaleur (ousémantique) deı. Nous pouvons généraliser une propriété des fonctions max et min utilisées habituellement pour l’évaluation d’un jeu.

Definition 5.3.5. (Monotonie dans les composantes) Étant donné un préordre (D;≤), une fonction f : D ! D est monotone (ou croissante) dans toutes ses composantes si :

∀u; v∈D: ∀x; y∈D: x≤y ) f(u:x:v)≤f(u:y:v)

˜ Une fonction f :D ! D est monotone dans toutes les composantes, si pour tout couple de suites u; v ∈ D identiques à l’exception d’une composante : w = u:x:v et w0 =u:y:v, oùx≤y, nous avonsf(w)≤f(w0). Le nom que nous avons utilisé pour cette propriété a une signification précise : il s’agit bien de la propriété de monotonie habituelle (homomorphisme) des fonctions entre préordres, où la rela-tion en quesrela-tion est l’extension produit de≤aux suites deD(cf. section 1.1.8), que nous noterons ≤. Donc, une fonction est monotone dans toutes ses composantes s’il s’agit d’un homomorphisme de type :

f: (D;≤)7−H!(D;≤)

Cette forme de monotonie est la première et principale propriété que nous attendons des fonctions généralisant le max et le min. Il est cependant inutile, pour un jeu donné, de demander une telle propriété sur toutes les valeurs possibles du domaine d’évaluation. Une version plus faible de la monotonie dans les composantes fait référence aux seules valeurs du jeu.

Definition 5.3.6. (Structure d’évaluation monotone pour un jeu) Étant donné :

– une arène de jeu S= (P; –;!;PI),

– une structure d’inteprétation élémentaire (D; ; ),

– une fonction de payoff p:PT !D et une heuristique h:PNT!D,

une structure d’évaluation (monotone) pour le jeuS, est une algèbreD, contentant la structure élémentaire, de signature :

(D; domaine d’évaluation

D : 1D×D ; relation sur les valeurs : D!D ; fonction du joueur

: D!D ; fonction de l’opposant )

et telle que :

(1) pour toute position ı∈P du jeu(Dı;≤)est un préordre

(2) et sont monotones dans toutes leurs composantes par rapport au va-leurs du jeu, i.e. pour toute position non terminaleı∈PNT, où Succ(ı) = ı1::ın, les fonctions vérifient la propriété :

∀u∈Dı1::Dık-1; v∈Dık+1::Dın:

x≤Dık y) 8<

:

(u:x:v)≤ (u:y:v)

(u:x:v)≤ (u:y:v)

(3) l’heuristique est correcte, c’est-à-dire, pour toute position ı ∈ PNT, telle queSucc(ı) =ı1::ın (n≥1), la fonction vérifie les conditions suivantes :

–(ı) =Player ) h(ı) ≤

i=1::np⊕h(ıi)

–(ı) =Opponent ) h(ı) ≤

i=1::np⊕h(ıi)

La famille des algèbres d’évaluation monotones sur un jeuS, une structure élémen-taire(D; ; ), un payoffpet une heuristiquesh, sera notéEstruct(S; D; ; ; p; h).

Dans le cas particulier où la relation ≤D est un préordre, un ordre partiel ou un dcpo, nous dirons que D est, respectivement, un préordre d’évaluation, un ordre d’évaluation ou un dcpo d’évaluation. Si (D;≤D) est un treillis et les opérations et coïncident respectivement avec la borne supérieure et la borne inférieure du treillis, alors la structure d’évaluation est appelée treillis d’évaluation. ˜ Pour qu’une algèbre soit une structure d’évaluation, il faudra, en particulier,

Dans le cas particulier où la relation ≤D est un préordre, un ordre partiel ou un dcpo, nous dirons que D est, respectivement, un préordre d’évaluation, un ordre d’évaluation ou un dcpo d’évaluation. Si (D;≤D) est un treillis et les opérations et coïncident respectivement avec la borne supérieure et la borne inférieure du treillis, alors la structure d’évaluation est appelée treillis d’évaluation. ˜ Pour qu’une algèbre soit une structure d’évaluation, il faudra, en particulier,

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