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IV.3 Sélection d’un ordre de modélisation approprié reposant sur l’erreur d’estimation

IV.4.4 Sélection de l’ordre du modèle pour un signal de musique

Cette section illustre l’application de la méthode ESTER à un signal de musique. L’étude porte sur une note de piano, le do de la 5`eme octave, échantillonné à 11025 Hz, à partir duquel un segment de

255 échantillons (23 ms) a été extrait. Les signaux audio nécessitent souvent un pré-traitement avant de pouvoir appliquer l’algorithme ESPRIT. Par exemple, les signaux contenant un nombre élevé de sinusoïdes (typiquement les sons graves) peuvent être d’abord décomposés en plusieurs sous-bandes (par filtrage et décimation, comme cela est proposé dans [Laroche, 1993]). Dans cet exemple, ce pré- traitement n’est pas utilisé, puisque la note de piano choisie a peu de composantes sinusoïdales. Par ailleurs, la puissance des signaux audio décroît lorsque la fréquence augmente. Nous avons ainsi utilisé un filtre de pré-accentuation obtenu par prédiction linéaire à l’ordre 7 pour compenser cette décrois- sance.

Le périodogramme du signal de piano filtré est affiché dans la figure IV.4-a. Dans cette figure, seize pics spectraux émergent clairement du niveau de bruit environnant. Les pmax= 40 plus grandes valeurs

64 CHAPITRE IV. ESTIMATION DE L’ORDRE DE MODÉLISATION 0 2000 4000 6000 8000 10000 −120 −100 −80 −60 −40 −20 0 Fréquence (Hz) Puissance (dB)

(a) Périodogramme du signal de piano

0 5 10 15 20 25 30 35 40 −60 −50 −40 −30 −20 −10

Ordre des valeurs singulières

Valeurs singulières (dB)

(b) Valeurs singulières

Fig. IV.4 – Périodogramme et valeurs singulières du signal de piano

(a) Périodogramme du signal de piano en dB

(b) Valeurs singulières du signal de piano triées par ordre décroissant

singulières de la matrice de données7 sont représentées dans la figure IV.4-b. Ces valeurs singulières

s’effondrent de façon significative au delà de p = 16, ce qui suggère un ordre de modélisation égal à 16. La figure IV.5-a représente les critères AIC (ligne continue), MDL (tirets) et EDC (ligne poin- tillée). Seul EDC atteint un minimum en p = 16. Cependant ce minimum n’est pas beaucoup plus petit que les valeurs voisines. La figure IV.5-b représente le critère de stabilité proposé dans [Liavas et al., 1999]. Contrairement aux ITC mentionnés ci-dessus, ce critère sélectionne ici la bonne valeur p = 16. La figure IV.5-c représente les critères ITC proposés dans [Zhang et Wong, 1993], avec les mêmes paramètres que dans la section IV.4.2. Aucun d’entre eux n’atteint de minimum en p = 16. La figure IV.5-d représente la fonction d’erreur inverse J pour tout p ∈ {1, . . . , pmax}. Le maximum

global est atteint en p = 16. De plus, les bornes d’erreur obtenues pour des valeurs inférieures de p sont pertinentes. En effet, des valeurs élevées sont atteintes en p = 4, 6, 12, ce qui correspond en fait à des petits sauts dans la décroissance des valeurs singulières (représentées dans la figure IV.4-b). Par conséquent, la méthode ESTER donne l’ordre de modélisation attendu, et de plus les bornes d’erreur peuvent être utilisées pour quantifier l’adéquation d’un éventuel ordre de modélisation inférieur. En particulier, les ordres impairs ne sont pas adaptés au signal. En effet, puisque ce signal est à valeurs réelles et centré, son spectre est à symétrie hermitienne sans composante constante, ce qui sous-tend un ordre de modélisation pair.

IV.5

Conclusion

Dans ce chapitre, nous avons décrit la perturbation de l’estimation du modèle PACE induite par un ordre de modélisation erroné, en l’absence de bruit. Si l’ordre du modèle est sur-estimé, les pôles originaux se trouvent parmi les pôles estimés. Inversement, si l’ordre est sous-estimé, les pôles estimés peuvent être vus comme des approximations de certains des pôles originaux. Dans ce dernier cas, nous avons déterminé une borne d’erreur a posteriori, qui peut être calculée sans connaître l’ordre exact du modèle. A partir de cette observation, nous avons introduit la méthode ESTER, qui sélectionne un

7

Les valeurs singulières ont été obtenues en calculant la SVD d’une matrice de Hankel contenant n = 128 lignes et l = 128 colonnes, comme dans la section IV.4.2.

IV.5. CONCLUSION 65 5 10 15 20 25 30 35 40 2000 4000 6000 8000 Ordre de Modélisation (d) Critère ESTER 5 10 15 20 25 30 35 40 0 5 10 15x 10

4 (a) Critères de théorie de l’information pour du bruit blanc

5 10 15 20 25 30 35 40 0 0.5 1 (b) Critère de stabilité 5 10 15 20 25 30 35 40 0 2 4x 10

4 (c) Critères de théorie de l’information pour du bruit coloré

Fig.IV.5 – Sélection de l’ordre du modèle pour le signal de piano

(a) Critères AIC, MDL et EDC (b) Critère de stabilité

(c) Critères C1, C2, Cm1 et Cm2

(d) Critère ESTER

ordre de modélisation approprié. La détermination de l’ordre de modélisation est une étape essentielle du processus d’estimation, car elle conditionne toute la suite de l’analyse à haute résolution du signal. Puisque la méthode initiale était assez coûteuse, nous avons proposé un algorithme rapide pour calculer récursivement les bornes d’erreur a posteriori. Ensuite, nous avons montré la pertinence de critère en tant que borne d’erreur, et les performances de la méthode ESTER ont été illustrées sur un signal synthétique et sur un signal de piano. Nous avons ainsi observé que cette méthode est plus robuste que les Critères de Théorie de l’Information (ITC). De plus, les bornes d’erreur peuvent être utilisées pour quantifier l’adéquation d’un éventuel ordre de modélisation inférieur, ce qui offre des perspectives intéressantes en terme de codage.

67

Chapitre V

Optimisation de l’algorithme d’estimation

Résumé

L’inconvénient principal de la méthode d’estimation basée sur l’algorithme ESPRIT généralisé (présentée dans le chapitre II) est sa lenteur. Le présent chapitre vise à optimiser les calculs afin de réduire sa complexité. Toutes les étapes sont ainsi optimisées, à commencer par l’estimation de l’espace signal, qui constitue l’étape la plus coûteuse, grâce à l’algorithme d’itération orthogonale (optimisé à l’aide de produits de convolution rapides). Nous proposons également des méthodes originales de calcul de la matrice spectrale et d’estimation des amplitudes. Ce chapitre constitue aussi une introduction aux algorithmes rapides de poursuite des paramètres présentés dans la deuxième partie.

68 CHAPITRE V. OPTIMISATION DE L’ALGORITHME D’ESTIMATION

V.1

Introduction

Une optimisation des calculs intervenant dans l’algorithme d’estimation introduit dans les sec- tions II.5 et II.6 est développée dans ce chapitre. Pour cela, il convient dans un premier temps d’analyser en détail le coût de cette méthode d’estimation. Rappelons qu’elle comprend quatre étapes :

– estimation d’une base de l’espace signal W (t), – calcul de la matrice spectrale Φ(t),

– calcul des valeurs propres de Φ(t),

– estimation des amplitudes complexes α(t) par la méthode des moindres carrés ordinaires (dans tout ce chapitre, le bruit additif est supposé blanc ; nous ne nous intéresserons plus à l’estimation de sa variance).

Remarque. Comme nous l’avons mentionné dans la section IV.3, dans ce document toutes les com- plexités sont exprimées en MACs (une multiplication plus une accumulation), et sont des fonctions des paramètres n, l et r. Dans la pratique, les dimensions de la matrice de données sont choisies de façon à ce que r << min(n, l).

Tout d’abord, l’estimation de l’espace signal peut être faite de deux manières différentes : via la SVD de la matrice de données X(t), ou via l’EVD de la matrice de covariance empirique Cxx(t) 1.

Cette dernière solution comprend deux étapes :

– le calcul de Cxx(t) = X(t) X(t)H requiert ln2 MACs ;

– ensuite, la diagonalisation de Cxx(t), via l’algorithme QR symétrique [Golub et Van Loan, 1996,

pp. 421], est de complexité O(n3).

Si seul W (t) est requis (i.e. l’espace singulier gauche), le coût de la SVD de X(t) est du même ordre de grandeur, via l’algorithme Golub-Reinsch [Golub et Van Loan, 1996, pp. 253–254]. Dans la suite ne sera retenue que la méthode reposant sur l’EVD de Cxx(t) qui, comme nous le verrons, offre des possibilités

de simplification intéressantes. L’étape suivante est le calcul de la matrice spectrale Φ(t) par la méthode des moindres carrés ou des moindres carrés totaux (cf. section II.5.3), dont la complexité est O(nr2).

Ensuite, le calcul des valeurs propres de Φ(t) requiert O(r3) MACs, via l’algorithme QR [Golub et

Van Loan, 1996, pp. 359]. Enfin, le calcul des amplitudes complexes bα(t) = VN †x(t) est de complexité O(N r2).

Il apparaît donc que l’étape limitante est l’estimation de l’espace signal, sur laquelle l’effort d’opti- misation doit porter prioritairement (section V.2). Les deux idées exploitées dans cette section ont été originalement proposées par R. Boyer [Boyer et al., 2002]. L’optimisation des autres étapes sera ensuite abordée dans la section V.3. Enfin, un bilan des diverses optimisations apportées à l’algorithme sera dressé dans la section V.4.