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L’INFARCTUS DU MYOCARDE ET L’INSUFFISANCE CARDIAQUE

V. Sélénium, sélénoprotéines et pathologies cardiovasculaires

Le sélénium est également considéré comme une molécule antioxydante. En effet, appartenant à la famille des chalcogène, il a une forte tendance à former deux liaisons covalentes pour acquérir une couche saturée afin de respecter la règle de l’octet. Comme développé dans le premier chapitre de cette introduction, le sélénium intervient notamment dans la composition des sélénoprotéines, dont la plupart ont été définies comme enzymes antioxydantes. Cet effet antioxydant est donc capital à la fonction des protéines à sélénium. Certaines études ont suggéré que le sélénium, en soi, pouvait avoir des effets protecteurs contre les maladies cardiovasculaires. Sur le plan théorique, ces hypothèses peuvent être soutenues par la capacité des GPx à lutter contre l’oxydation des lipides et l’agrégation plaquettaire323. La Gpx4 est capable de réduire les phospholipides hydroperoxydés ainsi que les esters de cholestérol associés aux lipoprotéines324 et

76 pourrait ainsi contribuer à limiter l’accumulation de lipoprotéines de faible densité (LDL) dans les parois artérielles. Les résultats de plusieurs études épidémiologiques sont pourtant contradictoires; certains auteurs ont observé une augmentation du taux d’apparition de maladies cardiovasculaires lors de déficit en sélénium, alors que d’autres n’ont pas observé de corrélation significative325,326. Une explication moléculaire pourrait être que la GPx4, la seule enzyme capable de réduire les lipides hydroperoxydés, n’est pas présente dans les espaces extracellulaires où sont localisés les LDL. En outre, la GPx4 est peu affectée par les carences en sélénium. De ce fait, son activité ne devrait jamais être limitante dans les pays développés où les carences en sélénium sont faibles et où pourtant les problèmes cardiovasculaires sont le plus souvent observés. La GPx3, bien qu’en contact direct avec les LDL par sa localisation, n’a pas la spécificité de substrat lui permettant de réduire les lipides hydroperoxydés. Le cas de la GPx1 est surprenant. En effet, il a été montré que sa surexpression était associée à des cas d’obésité et de résistance à l’insuline327,328. Les mécanismes sous-jacents à ces observations commencent à être connus: les radicaux libres oxygénés sont nécessaires au bon fonctionnement de l’insuline et par conséquent leur élimination par la GPx1 interfère avec l’activité de l’hormone. Les effets bénéfiques du sélénium en prévention de maladies cardiovasculaires sont donc controversés et nécessitent des investigations supplémentaires. L’oligo-élément pourrait être l’un des composants impliqués dans l’émergence de ces maladies multifactorielles. Plus récemment, il a été suggéré que trois autres sélénoprotéines pouvaient avoir un rôle dans la prévention de maladies cardiovasculaires: il s’agit de la sélénoprotéine P dont une forte proportion est liée aux protéoglycanes à la surface des cellules épithéliales, notamment dans le système vasculaire, ce qui pourrait permettre la protection de l’endothélium contre les agressions oxydantes locales329,330. La deuxième protéine candidate est la sélénoprotéine S, dont la dérégulation a été identifiée dans certains cas de diabète ou d’intolérance au glucose331,332. Enfin, il a été observé que les acides biliaires, dont la fonction hormonale est connue depuis peu, préviennent l’obésité et la résistance à l’insuline, en stimulant la synthèse de la DIO2333. Ce résultat converge avec l’observation antérieure d’un polymorphisme dans le gène de la DIO2 chez certains patients atteints de diabète334, et confirme l’implication de l’enzyme dans ces processus.

Dans le cadre des pathologies cardiovasculaires ischémiques, peu de données ont été rapportées concernant l’implication du sélénium. Néanmoins, quelques études réalisées durant les années 1990’, ont montré que l’ischémie ou l’I/R entraînait une altération du statut corporel en sélénium.

77 Il a été rapporté que l’ischémie ou l’ischémie/reperfusion entraîne une altération du statut corporel en sélénium. Il a notamment été mis en évidence une baisse du sélénium plasmatique - utilisé usuellement pour définir le statut en cet élément pendant la phase aigue du post-infarctus avec ou sans traitement par angioplastie coronaire des patients ayant eu un IDM335. Des résultats semblables ont été également obtenus par Lafont et coll. qui ont montré que le taux de sélénium sanguin diminue significativement après angioplastie coronaire336. La déplétion en sélénium entraîne une baisse à la fois de la teneur en GSH-Px et de son activité337. Encore récemment, les études de la bioactivité du sélénium se sont focalisées sur l’activité de cette enzyme.

Il a par la suite été montré que l’activité enzymatique du GSH-Px du myocarde diminuait progressivement dans le post-infarctus338. L’explication avancée est que l’ischémie ou l’ischémie/reperfusion, en engendrant un stress oxydant mobilise les défenses antioxydantes et entraîne un effondrement du pool tissulaire en sélénium. D’un côté, un apport insuffisant en sélénium a été associé à l’augmentation de la vulnérabilité à l’ischémie ou à une séquence d’ischémie/reperfusion du tissu cardiaque dans différents modèles animaux339–341. De l’autre, la supplémentation en cet élément dans les limites des doses recommandées réduit significativement les manifestations du syndrome de reperfusion341–343. Eu égard à l’ensemble des observations, le statut en sélénium apparaît donc comme un facteur déterminant dans l’apparition et le pronostic de diverses maladies cardiovasculaires. Cependant, il est difficile de préciser si les maladies cardiovasculaires, en l’occurrence l’IDM, sont à l’origine de la carence en sélénium ou inversement. Considérant la dualité de la question et compte tenu du fait que les sélénoprotéines sont les principales sources de sélénium dans le corps, il nous incombe de s’intéresser à chacune des voies : la supplémentation en sélénoprotéine et l’évolution du taux plasmatique en sélénoprotéines dans le post-infarctus chez le rat.

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LA THERAPIE GENIQUE

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