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Ceux-ci peuvent expliquer la dépendance temporelle non-linéaire des mécanismes de redistribution des contraintes précédent les séismes classiques et donc faire office de signaux précurseurs. Les séismes lents sont similaires aux séismes classiques excepté le fait que leurs vitesses de rupture et de glissement sont bien plus faibles, l’énergie libérée étant ainsi quasi-négligeable dans la bande de fréquence sis-mique habituelle. Du fait de leur contenu fréquentiel, de tels événements peuvent être observés grâce aux réseaux sismologiques globaux, aux réseaux GPS et aux extensomètres et inclinomètres en champ proche. Un schéma comparatif entre des séismes classique et lent sur un extensomètre de type Sacks-Evertson est présenté sur la figure 1.26. Bien que ces deux événements semblent être relatifs à des processus physiques différents, leurs formes d’ondes respectives diffèrent uniquement d’un point de vue temporel, typiquement d’un facteur 10 à 100 [Sacks et al., 1982]. Tout comme les secousses clas-siques, les séismes lents peuvent également être accompagnés d’une séquence précurseur-réplique.

Ce type de signal a été observé dans de nombreuses zones sismogènes à travers le globe. En Italie centrale, par exemple, quelques signaux relatifs à des séismes lents ont été enregistrés sur un extenso-mètre laser du tunnel de Gran Sasso [Crescentini et al., 1997], notamment durant l’année 1997 (figure

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FIGURE1.23 – Données de déformation du 13/08 au 30/11/91. De haut en bas : composantes NS et EO de l’inclinaison, composantes de la déformation (ST2, ST3 et ST4), niveau d’eau à Venzone et taux de précipitations à Vedronza. Le séisme de Villanova (Mw=3.9) a eu lieu le 05/10/91. Les zones grisées (b, c, d, e et f) illustrent des déformations typiquement induites par les chutes de pluie. Le repère a indique le début de la déformation extensive. D’après Dal Moro et Zadro [2000].

FIGURE1.24 – 5 jours de données issues du dilatomètre GJM peu de temps précédent le séisme de la mer du Japon (26/05/1983,Mw=7.7). Les large variations d’amplitude sont induites par l’atmosphère, les marées ont été corrigées sur les signaux. Les variations épisodiques de déformation sont indiquées par les flèches. D’après Linde et al. [1988].

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FIGURE1.25 – (Haut) Localisation du séisme de Kettleman Hills (04/08/1985,Mw=6.1) et des stations de mesure du niveau d’eau et de la déformation. Les flèches donnent la direction des glissements cosis-mique et présiscosis-mique . (Bas) Signaux de niveau d’eau, extensométrique et de pression atmosphérique en août 1985. Les données grisâtres sont les signaux bruts et les courbes colorées sont les signaux après correction des effets des marées terrestres et de pression atmosphérique. D’après Roeloffs [2006].

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FIGURE 1.26 – Comparaison entre un séisme classique et un séisme dit lent. (a) Séisme classique (Mw = 4, 19/09/73) enregistré sur un extensomètre de type Sacks-Evertson à 15 km de l’hypocentre. (b) Même signal filtré à l’aide d’un filtre passe-bas à 1s. (c) Séisme lent enregistré le 25/08/76. On peut noter les similitudes entre (b) et (c). D’après Sacks et al. [1978 ; 1982].

FIGURE1.27 – Exemple d’un séisme lent enregistré sur l’extensomètre laser de Gran Sasso. D’après Scarpa et al. [2008].

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FIGURE 1.28 – (Gauche) 8 mois de signaux de déformation issus d’un dilatomètre de forage Sacks-Evertson (SRL) et les 3 composantes d’un extensomètre de type Gladwin (SJT). Le signe de SJT1 a été inversé, les signaux sont corrigés des dérives. Le séisme lent de début décembre domine les en-registrements. La partie inférieure de la figure présente les séismes locaux dont les magnitudes sont supérieures à 2.5 ; ceux ayant lieu durant l’intervalle de temps de la figure de droite sont représentés par des cercles noirs. (Droite) Zoom sur 10 jours de signaux en décembre. Durant cette période les 2 instruments exhibent une corrélation remarquable. Le séisme lent dure environ 6 mois mais la corréla-tion est plus délicate. De haut en bas : déformacorréla-tion extensive sur SRL, cisaillement N45˚O (parallèle à la faille de San Andreas)γ1, cisaillement normal à la failleγ2, déformation aréolaire de SJT, données de creep (XNY et XSJ) et relevé des précipitations. Les temps d’occurence et les magnitudes des séismes durant cette période sont indiqués (cercles noirs, figure de gauche), la numérotation indique le temps d’origine de chaque événement ; 2 séismes de magnitudeml=3.7 ont lieu le 12 décembre. Les lettres A-E indiquent les différents séismes lents de la séquence. Les courbes en pointillés sont les modélisations. D’après Linde et al. [1996].

1.27). Ces événements pourraient être liés à l’activité d’un réseau superficiel de failles localisé à proxi-mité de l’instrument.

En décembre 1992, deux extensomètres de forage de type Sacks-Evertson proches de la faille de San Andreas ont enregistré un événement lent de déformation durant environ une semaine. Cette variation de la déformation a été initiée par un séisme lent de magnitude équivalente d’environ 4.8 [Linde et al., 1996] (figure 1.28).

Quelquefois, des signaux lents de déformation peuvent être accompagnés de trémors sismiques, notamment dans les zones de subduction. Dans la zone de subduction des Cascades par exemple, Dra-gert et al. ont observé des déformations lentes sur, des signaux GPS, associées à des pulses de trémors sismiques non-volcaniques (figure 1.29).

Les trémors sismiques d’origine non-volcanique, qui ont été observés pour la première fois en 2002 dans la partie sud-ouest de la subduction du Japon [Obara, 2002 ; Obara and Hirose, 2006], sont des signaux basse fréquence similaires à ceux observés régulièrement dans les zones volcaniques. Ce sont des signaux d’amplitude et de signature fréquentielle bien inférieure (1-10 Hz) à celle d’un séisme classique de même taille (10-20 Hz). Leur durée est également supérieure aux événements classiques, ceux-ci peuvent durer de plusieurs minutes à plusieurs jours voire quelques mois. Par analogie avec

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FIGURE 1.29 – Comparaison entre le glissement et l’activité des trémors sismiques observés dans la zone du subduction des Cascades (nord-ouest des Etats-Unis). Les cercles bleus représentent la variation journalière du déplacement sur la composante est du GPS du site ALBH (Victoria) par rapport au GPS du site proche de Penticton, supposé fixe par rapport à la plaque Nord-Américaine. La droite verte continue indique le déplacement vers l’est à long-terme du site (intersismique). Les droites rouges indiquent l’élévation moyenne dans la direction est entre 2 événements de glissement lent, ceux-ci étant marqués par une inversion du glissement tous les 13 à 16 mois. La partie inférieure de la figure représente les périodes d’activité des trémors sismiques observés au sud de l’île de Vancouver. Ceux-ci, d’une dizaine de jours de période, correspondent avec les durées des glissements lents. D’après Rogers et Dragert [2003].

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FIGURE1.30 – Comparaison entre des ondes de surface issues de téléséismes et des trémors sismiques non-volcaniques. (a) Signaux à Vancouver. (b) Signaux à Central Range (Taiwan). (c) Signaux au ni-veau de la faille de San Andreas. (d) Signaux de la zone de subduction au sud-ouest du Japon. Le domaine fréquentiel du filtre appliqué est marqué à gauche de chaque figure. D’après Peng et Gomberg [2010].

les zones volcaniques, ils pourraient, en zone sismique, traduire le comportement des fluides et donc de variation de pression de pore lors des mécanismes de transfert des contraintes dans les roches. Quelques exemples de trémors sont présentés sur la figure 1.30.

Il a été suggéré [Linde and Sacks, 2002] que des événements lents pourraient éventuellement dé-clencher des séismes classiques mais cela demeure encore flou. Ces événements lents peuvent être liés aux propriétés de friction des failles mais pourraient également être liés à des glissements de terrain par exemple. Un aspect plus surprenant est le fait que ces événements peuvent être déclenchés par le passage de typhons comme l’ont montré Liu et al. [2009] à partir d’observations sur des dilatomètres de forage installés sur la côte est de Taiwan (figure 1.16). La figure 1.31 illustre ces signaux dont la déformation lente est associée à un glissement lent répété sur une faille inverse de pendage ouest placée juste sous l’île.

L’expansion de réseaux d’observation (sismologiques, mesure de la déformation, ...) et l’augmenta-tion de leur étendue fréquentielle a permis l’observal’augmenta-tion de signaux inhabituels. En plus des événements lents de glissement et des trémors quelquefois associés, d’autres événements basse-fréquence ont été détectés. Parmi ceux-ci on peut remarquer des séismes basse-fréquence voire très basse-fréquence ou encore des séismes dits silencieux. Ces différents événements trouvent leur origine dans le même type de processus conduisant à un séisme classique (cisaillement) mais sont remarquables de par leur durée bien supérieure à ces derniers ainsi que de par les bandes fréquentielles plus basses dans lesquelles est

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FIGURE1.31 – (Gauche) 7 jours de signaux de déformation relatifs au plus large événement lent en-registré, le signal noir représente les variations de pression atmosphérique lors du passage du typhon (dépression). La cohérence des déformations relatives aux marées entre les 3 signaux de déformation (stations HGS(B), CHM(B) et ZAN(B), figure 1.16) est bien visible. Les stations ZAN et HGS, installées dans des roches de modules élastiques plus faible que CHM, exhibent une plus forte sensibilité aux variations de pression. Les 3 signaux exhibent un comportement compressif (signe négatif) aux fluctua-tions de pression atmosphérique, cela contraste avec le comportement attendu (insert de gauche) pour lequel une dépression atmosphérique donne lieu à un comportement extensif du signal de déformation. (Droite) Données précédentes après correction des marées et de la pression atmosphérique. L’événe-ment lent est divisé en 3 parties (barres A, B et C) dont les glisseL’événe-ments associés sont présentés dans la partie gauche de la figure. D’après Liu et al. [2009].

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radiée l’énergie. Ide et al. [2007] proposent le fait que le moment sismique relatif à un séisme silencieux est proportionnel à sa durée alors que celui relatif à un séisme classique est proportionnel au cube de sa durée. La comparaison entre le moment sismique associé à un séisme lent et sa durée peut être interpré-tée comme sur la figure 1.32. A titre d’exemple un événement de glissement lent (SSE) se produisant sur 2-3 semaines pourrait permettre de relâcher la même quantité d’énergie qu’un séisme de magnitude 6 (M o=1018Nm).

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