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UNE SÉGMENTATION DU DROIT APPLICABLE AUX TRAVAILLEURS MIGRANTS : SOURCE DE DISPARITÉS DE TRAITEMENT ET

DE CONCURRENCE ENTRE LES TRAVAILLEURS

Le territoire de l’union constitue « un espace de mobilité des salariés »238.

Le droit qui leur est applicable n’est cependant pas uniforme et dépend en grande partie du droit des États membres. Comme le souligne Philippe Icard « certes, une volonté d’harmonisation persiste, mais dans le respect de la diversité des droits des États membres »239. Des systèmes juridiques différents coexistent ainsi conduisant à des « niveaux et à des modes de protection variable »240. Cette situation « engendre inévitablement des disparités, des ambiguïtés et des insuffisances »241 aboutissant à une sorte de « concurrence normative »242 entre les États membres en matière de travail, peu favorable à un haut niveau de protection des salariés. Ces constats sont encore plus vrais quand il s’agit des travailleurs ressortissants des États tiers.

A chaque catégorie de travailleurs migrants correspond un statut, c’est-à-dire un ensemble spécifique de droits et obligations. Les citoyens de l’Union européenne sont régis par le droit de la libre circulation constitué des normes adoptées sur le fondement du titre IV du TFUE243 (La libre circulation des personnes, des services et des capitaux), du droit dérivé adopté sur ce fondement, des dispositions concernant la citoyenneté de l’Union, et de la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union européenne. Les ressortissants des États tiers sont régis, quant à eux, par « le droit communautaire des migrations »244 c’est à dire un ensemble de normes

238 Philippe Icard « les droits sociaux des tiers à la communauté : un impressionnisme juridique », l’Immigration

dans l’Union européenne : aspects actuels de droit interne et de droit européen, sous la direction de Christine Bertrand ; l’Harmattan, 2008 pp 125-182, p. 126

239 Philippe Icard « les droits sociaux des tiers à la communauté : un impressionnisme juridique », l’Immigration

dans l’Union européenne : aspects actuels de droit interne et de droit européen, sous la direction de Christine Bertrand ; l’Harmattan, 2008 pp 125-182

240 Jean-Sylvestre Bergé, « la double internationalité interne et externe du droit communautaire et le droit

international privé », conférence au comité français du droit international privé, paris, 28 janvier 2005, in les travaux du Comité français de droit international privé, 2007

241 Philippe Icard, « les droits sociaux des tiers à la communauté : un impressionnisme juridique », l’Immigration

dans l’Union européenne : aspects actuels de droit interne et de droit européen, sous la direction de Christine Bertrand ; l’Harmattan, 2008 pp 125-182, P 126

242 Sophie Robin-Olivier, »La mobilité internationale du salarié », Droit social, 5 mai 2005, p.495

243 Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne

244 Ségolène Barbou des Places, « quel régime juridique pour la mobilité des personnes en Europe ? » in

Ségolène Barbou des Places et Ismael Omarjee, « droit de la libre circulation et droit des migrations : quelle articulation ? », CEJEC-wp, 2010/4 ? », Chronique de droit européen et comparé n°XXVIII, p.3 ; version

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stratifié relevant du titre V du TFUE245 plus ou moins proches des normes régissant les citoyens européens selon leur statut dans l’Union ou les rapports entre leur État d’origine et l’UE.

Il y a « une cesure problématique »246 entre le droit de la libre circulation et le droit des migrations. Cette césure est instituée par les traités247 qui attribuent au droit de libre circulation l’objectif de faciliter la mobilité des citoyens de l’Union européenne grâce notamment au principe de non discrimination. Quant au droit des migrations l’objectif est plutôt de contrôler la mobilité des ressortissants des États tiers, comme le souligne Ségolène Barbou des Places « la mission assignée ici n’est pas de faciliter la mobilité, mais de construire un régime d’encadrement des déplacements »248.

Il en résulte des situations juridiques différentes. Ainsi, si les travailleurs ressortissants des États membres de l’Union européenne et assimilés ont un statut privilégié grâce aux dispositions relatives à la libre circulation (I) pour les travailleurs ressortissants des États tiers c’est une réglementation au cas par cas selon la catégorie de migrants concernés (II). Toutefois, nous verrons que les deux régimes vont se rapprocher progressivement sous l’influence notamment de la jusrisprudence de la CJUE.

définitive : « Quel régime juridique pour la mobilité des perso nnes en Europe ? », Petites Affiches,

Chronique de droit européen et comparé n° XXVIII, 2 9 septembre 2010, pp. 4-11

245 L’espace de liberté, de sécurité et de justice

246 Ségolène Barbou des Places, « quel régime juridique pour la mobilité des personnes en Europe ? » in

Ségolène Barbou des Places et Ismael Omarjee, « droit de la libre circulation et droit des migrations : quelle articulation ? », CEJEC-wp, 2010/4 ? », Chronique de droit européen et comparé n°XXVIII, p.1

247 « Le droit de la libre circulation des personnes a pour objet d’« assurer » la libre circulation des travailleurs

(art 45 TFUE), de « favoriser » les échanges de jeunes travailleurs (art 47), de « faciliter » l’accès aux activités non salariées. Il a donc pour objet de faciliter la mobilité des personnes dans l’UE. Le contraste est saisissant avec les dispositions du titre V dont le but est de « développer une politique » visant à assurer le contrôle des personnes (art 77), de « fixer les conditions » dans lesquelles les personnes peuvent circuler (art 77), de créer un système commun de l’asile (art 79). », Ségolène Barbou des Places, « quel régime juridique pour la mobilité des personnes en Europe ? » in Ségolène Barbou des Places et Ismael Omarjee, « droit de la libre circulation et droit des migrations : quelle articulation ? », CEJEC-wp, 2010/4 ? », Chronique de droit européen et comparé n°XXVIII, p.2

248 Ségolène Barbou des Places, « quel régime juridique pour la mobilité des personnes en Europe ? » in

Ségolène Barbou des Places et Ismael Omarjee, « droit de la libre circulation et droit des migrations : quelle articulation ? », CEJEC-wp, 2010/4 ? », Chronique de droit européen et comparé n°XXVIII, p.2

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Titre I : La libre circulation des travailleurs ressortissants des États membres de l’Union européenne et assimilés

L’article 21 TFUE (ex article 18 TCE249) pose le principe de libre circulation des citoyens européens « tout citoyen de l’Union a le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, sous réserve des limitations et conditions prévues par les traités et par les dispositions prises pour leur application ». Mais ce sont les articles 45 et 49 TFUE ex article 39 et 43 TCE qui consacrent la liberté de circulation des travailleurs. L’article 45§1 TFUE dispose que « la libre circulation des travailleurs est assurée à l’intérieur de l’Union ». La CJUE a affirmé que les dispositions relatives à la libre circulation des travailleurs peuvent être invoquées « par les travailleurs eux-mêmes, mais également par leur employeur ».250 « Le droit de la libre circulation consacre un véritable droit à la liberté de circulation et ouvre l’accès à un statut très privilégié, organisé sur la base du principe de non-discrimination selon la nationalité »251. Avec le principe de libre circulation, les ressortissants des États membres de l’Union européenne ont le droit de sortie, d’entrée et de séjour sur tout le territoire de l’union. La CJUE, a affirmé plusieurs fois que les ressortissants des États membres tirent du traité le droit « de quitter leur pays d’origine pour se rendre sur le territoire d’un autre État membre et d’y séjourner afin d’y exercer une activité économique »252.

Ils ont le droit de sortir du territoire d’un État membre et d’entrer sur le territoire d’un autre État membre sur simple présentation d’une pièce d’identité valide. Aucun visa de sortie ou d’entrée ne peut être imposé aux citoyens de l’Union253. Comme le souligne Daniel Lenoir « la liberté de circulation est d’abord le droit de se déplacer librement sur le territoire des États membres pour répondre à des emplois effectivement offerts, d’occuper dans les États membres un emploi conformément aux dispositions régissant l’emploi des travailleurs

249 Traité instituant la Communauté Européenne

250 CJUE, 16 avril 2013, Las, aff. C-202/11, pt 18

251Ségolène Barbou des Places et I. Omarjee, droit de la libre circulation et droit des migrations : quelle

articulation ?, CEJE C-wp, 2010/4

252; CJCE, 5 février 1991, Roux, aff. C-363/89, Rec. I-p.273 ; CJCE, 7 juillet 1992, Singh, aff. C-370/90, Rec. I.

p.4265 ; CJCE, 15 décembre 1995, Bosman, aff. C-415/93, Rec. I-p.4921 ; CJCE, 11 janvier 2007, Innovative Technology Center (ITC), aff. C-208/05

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nationaux, mais aussi de demeurer sur le territoire d’un État membre après y avoir occupé un emploi »254.

C’est la directive 2004/38255 qui pose les règles relatives aux droits des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et séjourner dans l’Union. Elle modifie le règlement 1612/68 portant sur la libre circulation des travailleurs (aujourd’hui abrogé) et abroge les directives portant sur le déplacement et le séjour des travailleurs salariés ou non salariés et leur famille256, sur les personnes inactives257 (retraités, étudiants), et sur les mesures d’ordre public258. Seul le citoyen ressortissant d’un État membre qui se déplace dans un autre État membre pour accéder à un emploi bénéficie des droits attachés à la libre circulation des travailleurs. Toutefois, « le respect du principe d’égalité de traitement et de son corollaire le principe de non discrimination [est] délicat et pose encore […] des difficultés au sein de l’Union européenne »259.

Les dispositions du traité concernant la libre circulation des travailleurs visent des mesures qui ont pour but de supprimer les obstacles à l’exercice de cette liberté grâce au principe de non discrimination en raison de la nationalité (Chapitre I). Cependant, des discriminations et entraves à la libre circulation des travailleurs persistent (Chapitre II).

254 Daniel Lenoir, l’Europe sociale, Ed. La Découverte, 1994, p. 51

255 Directive 2004/38 CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de

l'Union et des membres de leurs famillesde circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) n° 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE

256 Directive 73/148 du 21 mai 1973

257 Directive 90/364/CEE du Conseil du 28 juin 1990 relative au droit de séjour ; directive 90/365/CEE du

Conseil du 28 juin 1990 relative au droit de séjour des travailleurs salariés et non salariés ayant cessé leur activité professionnelle et directive 93/96/CEE du 29 octobre 1993 relative au droit de séjour des étudiants

258 Directive 64/221 du 25 février 1964.

259 Michel Bruno, « Identité nationale et citoyenneté européenne », in « Crises d’identité et droits fondamentaux

de la personne humaine : Réflexions sur le questionnement identitaire contemporain » sous la direction de Gilles Lebreton, Journée d’études de la Faculté des Affaires Internationales du 19 mai 2011, l’harmattan 2014, p.91

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Chapitre I : Le principe de non discrimination en raison de la nationalité : instrument de la libre circulation des travailleurs ressortissants des États membres et travailleurs assimilés

Dans l’exercice de son droit à la libre circulation, le travailleur ressortissant de l’Union européenne doit bénéficier du même traitement que celui réservé aux travailleurs de l’État membre d’accueil. Toutefois, « depuis le début de la construction européenne, les États membres en mettant en œuvre la libre circulation des personnes et des services ont été confrontés aux questions de discrimination entre nationaux et ressortissants d’autres États membres »260.

Selon l’article 45 TFUE « elle implique l'abolition de toute discrimination, fondée sur la nationalité, entre les travailleurs des États membres, en ce qui concerne l'emploi, la rémunération et les autres conditions de travail ». Anastasia Iliopoulou a souligné dans sa thèse que les deux aspects « libre circulation et non discrimination » constituaient les « éléments du statut de citoyen de l’Union européenne » sans que celui-ci soit nécessairement conditionné par celui là261.

La non discrimination sur le fondement de la nationalité est un principe absolu qui ne souffre pas d’exceptions autres que celles prévues expressément par le traité à savoir les emplois dans l’administration publique262, l’exercice de l’autorité publique263, l’ordre public, la sécurité publique et la santé publique264. La Cour de justice a rappelé dans l’affaire Martinez Sala que « l’article 8-2 attache au statut de citoyen de l’Union les devoirs et les droits prévus par le traité, dont celui, prévu à l’article 6 du traité de ne pas subir de discrimination en raison de la nationalité dans le champ d’application ratione materiae du traité »265. Le droit à la non discrimination est ainsi un droit du citoyen de l’Union266.

260 Michel Bruno, « Identité nationale et citoyenneté européenne », in « Crises d’identité et droits fondamentaux

de la personne humaine : Réflexions sur le questionnement identitaire contemporain » sous la direction de Gilles Lebreton, Journée d’études de la Faculté des Affaires Internationales du 19 mai 2011, l’harmattan 2014, p.91

261 Anastasia Iliopoulou, Libre circulation et non discrimination, éléments du statut de citoyen de l’Union

européenne, Bruxelles, Bruylant, 2008, citée par Jean Yves Carlier, « Non discrimination et étrangers » in Collection Droits Européens : La non discrimination entre les européens, sous la direction de Francette Fines, Catherine Gauthier, Marie Gautier, 2012, p.168

262 Article 45§4 TFUE, ex article 39 TCE

263Article 51 TFUE, ex article 45 TCE

264 Articles 45§3 et 52 TFUE, ex articles 39 et 46 TCE

265 CJCE, 12 mai 1998, Matinez Sala, aff. C-85/96, Rec., p.2691, pt. 62

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Dans le cadre de l’interdiction des discriminations, il ne faut pas que des situations comparables soient traitées de manière différente et que des situations différentes soient traitées de manière identique, « à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié »267. L’exigence de non-discrimination concerne l’accès à l’emploi, son exercice ainsi que la rupture du contrat de travail. Les travailleurs ressortissants des Etats membres sont les bénéficiaires privilégiés de la libre circulation (Section I). D’autres travailleurs, bien que ressortissants d’Etats tiers, sont assimilés aux citoyens de l’Union et bénéficient des droits résultant de la libre circulation (Section II).

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Section I : Les travailleurs citoyens européens : bénéficiaires privilégiés de la libre circulation

La directive 2004/38 considère le droit de circuler et de séjourner dans l’Union comme un « droit fondamental et individuel de chaque citoyen ». Ainsi, avec une pièce d’identité valide, un ressortissant d’un État membre peut séjourner sur le territoire d’un autre État membre pendant trois mois. La Commission et le Parlement voulaient étendre de trois à six mois la période du droit de séjour inconditionnel. Mais le Conseil n’a pas accepté cette extension, les États ont manifesté les craintes relatives au "tourisme aux prestations sociales". Les États ont également inséré deux limitations au séjour inconditionnel. L’article 14§1 dispose que les citoyens bénéficient de ce droit de séjour « tant qu’ils ne deviennent pas une charge déraisonnable pour le système d’assistance sociale de l’État d’accueil » et l’article 24§2 stipule que « l’État membre d’accueil n’est pas obligé d’accorder le droit à une prestation d’assistance sociale pendant les trois premiers mois de séjour ». La Belgique a ainsi modifié sa législation afin de refuser l’octroi du revenu d’intégration sociale aux citoyens européens pendant les trois premiers mois de séjour268.

Au-delà des trois mois, l’État d’accueil peut lui imposer le respect d’une procédure d’enregistrement. Il appartient à chaque État membre de fixer le délai de mise en œuvre de cet enregistrement qui ne peut être inférieur à trois mois à compter de la date d’arrivée du citoyen sur son territoire. L’État d’accueil peut exiger la présentation d’une pièce d’identité valide, d’une assurance maladie complète et la preuve que le citoyen dispose pour lui et sa famille, le cas échéant, de ressources suffisantes afin de ne pas constituer une charge pour son système d’assistance sociale.269 Si tous les documents sont fournis, l’attestation d’enregistrement doit être délivrée immédiatement. L’État d’accueil peut mettre en place des sanctions en cas de non respect de l’obligation d’enregistrement. Celles-ci ne doivent pas être discriminatoires. En ce sens, elles doivent être comparables aux sanctions susceptibles de frapper ses propres ressortissants en cas de manquement à des obligations similaires.

268 Loi du 28 juin 2013 modifiant l’article 3 de la loi du 26 mai 2002 relative au droit à l’intégration sociale

269 Article 8 de la directive 2004/38 CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au droit

des citoyens de l'Union et des membres de leurs famillesde circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) n° 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE.

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Après cinq ans de résidence régulière et continue, le citoyen acquiert la qualité de résident permanent dans l’État d’accueil. Il ne sera soumis à aucune condition.270Avec le séjour permanent, disparaît également la condition des ressources suffisantes pour rester dans l’État d’accueil. La Commission avait même proposé l’interdiction absolue d’éloignement des résidents permanents mais elle n’a pas été suivie par le Conseil. Toutefois, la CJUE a jugé que seules des raisons impérieuses de sécurité publique peuvent remettre en cause ce statut. Le degré d’intégration du citoyen dans l’État d’accueil, la solidité de ses liens familiaux, sociaux et culturels justifient un niveau élevé de protection qui ne laisse aux États membres que peu de marge de manœuvre. Ces raisons impérieuses sont déterminées après un examen individuel « il y a lieu d'effectuer une appréciation globale de la situation de l'intéressé chaque fois au moment précis où se pose la question de l'éloignement »271 et non sur la seule considération sécuritaire et général de lutte contre le trafic de drogue.272 Pour les citoyens bénéficiant de la protection renforcée273 (dix années de résidence), l’atteinte de sécurité publique doit présenter « un degré de gravité particulièrement élevé »274 et la menace d’une « exceptionnelle gravité »275.

Selon la Commission, « après une période suffisamment longue de résidence, on peut supposer que le citoyen a développé des liens étroits avec l’État membre d’accueil et qu’il soit devenu partie intégrante de sa société, ce qui justifie l’octroi d’un droit de séjour qu’on pourrait qualifier de renforcé. D’ailleurs, l’intégration des citoyens de l’Union qui sont installés durablement dans un État membre est un élément clef pour promouvoir la cohésion sociale, objectif fondamental de l’Union ».276

La liberté de circulation implique, pour le travailleur citoyen de l’Union, le droit de quitter son pays d'origine et d'accéder au territoire d'un autre État membre et celui de séjourner dans cet État membre afin d’y exercer un emploi et d’y demeurer au terme de sa carrière. Un ensemble de règles relatives à l’accès au marché du travail, l’égalité de traitement dans les conditions de travail, la coordination des systèmes de sécurité sociale, la reconnaissance des qualifications professionnelles, entre autres, ont été adoptées pour faciliter cette libre circulation.

270 Article 16 de la directive 2004/38 du 29 avril 2004,

271 CJCE, 23 novembre 2010, Land Baden-Württemberg c/ Panagiotis Tsakouridi, aff. C-145/09, pt. 32

272 CJCE, 23 novembre 2010, Tsakouridi, aff. C- 145/09

273 Article 28 §3, de la directive 2004/38

274 CJCE, 23 novembre 2010, Tsakouridi, aff. C-145/09, Pt. 41

275 Idem, Pt. 49

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Paragraphe 1 : Le libre accès à l’emploi pour les salariés et la liberté d’établissement ou de prestation de service pour les non salariés

Le citoyen de l’Union peut s’installer dans un autre État membre pour y exercer un emploi à titre indépendant ou salarié. Grâce au principe de non discrimination, plusieurs réglementations ont été adoptées pour faciliter l’accès à l’emploi des travailleurs salariés et l’exercice des activités indépendantes à travers le droit d’établissement et la libre prestation de service. La Cour de justice veille au respect de ces règles en sanctionnant les restrictions à la libre circulation des travailleurs qu’elles soient discriminatoires ou indistinctement applicables.

A. Le libre accès à l’emploi pour les salariés

Selon l’article premier du règlement 492/2011 du 5 avril 2011 relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de l’Union ayant abrogé le règlement 1612/68/CEE « tout ressortissant d’un État membre, quel que soit le lieu de sa résidence, a le droit d’accéder à une activité salariée et de l’exercer sur le territoire d’un autre État membre ». Il doit bénéficier du même accompagnement et des mêmes aides qu'un ressortissant de l'État membre d'accueil. Aussi, « des dispositions qui empêchent ou dissuadent un ressortissant d'un État membre de quitter son pays d'origine pour exercer son droit à la libre circulation constituent des entraves à cette liberté, même si elles s'appliquent indépendamment de la nationalité des travailleurs

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