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2 Contexte et objectifs

3.1 Les sécrétions

3.1.1 Le mucilage racinaire

Le mucilage racinaire est composé de polysaccharides associés à une fraction protéique qui peut atteindre 6% de la masse totale (Rougier, 1982; Bacic et al., 1987). Les sucres majeurs identifiés sont l'arabinose, le galactose, le fucose, le glucose et le xylose (Bacic et al., 1987;

Osborn et al., 1999; Knee et al., 2001). Chez le maïs, le mucilage a un poids moléculaire de 106

à 108 Da, une densité de 1,63 g cm-3, (Paull et al., 1975; Sealey et al., 1995), une teneur en

carbone aux environs de 39% et un rapport C/N voisin de 65 (Mary et al., 1993; Nguyen et al., 2007). Le mucilage racinaire est sécrété par les cellules de la coiffe des racines par exocytose des vésicules de Golgi (Morre et al., 1967; Rougier, 1982). Il s'agit donc d'un transport actif. Le mucilage migre ensuite passivement à travers la paroi si son degré d'hydratation et la pression de turgescence de la cellule sont suffisants. Sinon, il s'accumule entre la paroi et la membrane plasmique (Morre et al., 1967). En présence d'eau libre, le mucilage s'hydrate jusqu'à avoir une teneur en eau de 100 000% de sa masse à sec (McCully et Boyer, 1997). Il forme alors une gouttelette gélatineuse bien visible au niveau des apex racinaires (Photographie 1).

Photographie 1: Mucilage hydraté à l'extrémité des racines nodales d'un pied de maïs prélevé au champ

Le mucilage présente des propriétés viscoélastiques et surfactantes qui sont supposées jouer plusieurs rôles importants (Read et Gregory, 1997):

• un rôle d'adhésion des cellules de la coiffe avec les particules de sol, ce qui

facilite leur desquamation, protégeant ainsi le méristème racinaire des blessures liées à la progression de la racine à travers les particules de sol (Rougier, 1982).

• Un rôle d'adhésion des particules de sol à la racine permettant d'assurer la

continuité du flux d'absorption d'eau et d'éléments minéraux (Czarnes et al., 2000). Cete continuité est facilitée par les phospholipides aux propriétés surfactantes contenus dans le mucilage (Read et al., 2003).

En outre, le mucilage possède de nombreux groupements carboxyliques sur lesquels peuvent se lier les cations. Si ces cations sont également adsorbés sur les particules minérales, le mucilage augmente la stabilité structurale (Guckert et al., 1975; Morel et al., 1991; Czarnes et

al., 2000; Traore et al., 2000). Si ces cations sont toxiques (Pb2+, Cd2+ par exemple), le mucilage

pourrait contribuer en les fixant à limiter les effets délétères de ces éléments sur le méristème apical (Morel et al., 1986; Mench et al., 1987; Miyasaka et Hawes, 2001). Dans le sol, le mucilage est rapidement consommé par la microflore (Mary et al., 1992; Mary et al., 1993; Knee et al., 2001). Certains microorganismes rhizosphériques sont attirés par chimiotactisme vers le mucilage (Mandimba et al., 1986), ce qui pourrait participer à la sélection de la microflore qui colonise les racines.

La production de mucilage par les racines a été peu étudiée. Quelques travaux portant

sur des jeunes plantules cultivées in vitro indiquent une sécrétion de 11-47 µg MS5 mg-1 MS de

croissance racinaire pour du maïs et du blé (Vancura et al., 1977). Plus récemment, une méthode a été proposée pour évaluer la production de mucilage dans du sol en mesurant la surface de contact du mucilage avec une vitre le long de laquelle pousse la racine (Iijima et al., 2003). La production de mucilage semble corrélée à la vitesse de croissance de la racine. Par exemple,

une racine poussant à raison de 2 mm h-1 produisait 262 mg de MF6 de mucilage. Ces

observations permettent de relier la synthèse du mucilage avec la croissance des racines et elles sont donc une première étape vers la modélisation de la production de ce rhizodépôt par un système racinaire. Cette modélisation requiert de poursuivre les recherches afin d'identifier les

5 MS: Matière sèche 6 MF: Matière fraîche

autres déterminants de la libération de mucilage. Par exemple, le diamètre apical de la racine pourrait être une variable importante car il détermine la taille de la coiffe et donc la production potentielle de mucilage. Ce diamètre est augmenté par la contrainte mécanique subie par la racine (Groleau-Renaud et al., 1998a) ce qui pourrait expliquer l'augmentation de production de mucilage chez les plantes dont les racines sont exposées à une forte contrainte mécanique (Groleau-Renaud et al., 1998b).

3.1.2 Les autres sécrétions

En dehors du mucilage, de très nombreuses molécules sont sécrétées activement dans le sol par les racines en réponse aux caractéristiques de l'environnement. Ces molécules sont généralement des métabolites secondaires, des enzymes, des polypeptides et des protéines. Elles interviennent dans plusieurs processus:

• l'acquisition d'éléments minéraux: ces molécules permettent de rendre certains

éléments minéraux disponibles pour leur absorption par les racines.

- les phosphatases (phosphatases acides, phytases): ces enzymes

peuvent être libérées de manière plus importante pour permettre à la plante d'acquérir du phosphore à partir des formes organiques de P (Tarafdar et Claassen, 1988).

- les phytosidérophores: les graminées sécrètent dans la rhizosphère des

acides aminés particuliers non impliqués dans la synthèse des protéines et qui chélatent le fer ainsi que d'autres microéléments comme le cuivre, le zinc, le cobalt, le manganèse. Les complexes sont ensuite réabsorbés par les racines (Neumann et Römheld, 2000).

• les relations entre les plantes (phytoallélopathie): certains composés sécrétés

par les racines présentent des propriétés phytotoxiques qui inhibent le développement d'autres espèces végétales. C'est par exemple le cas des catéchines sécrétées par les racines de la centaurée (Walker et al., 2003; Bais et al., 2004).

• les relations entre les plantes et les microorganismes du sol; il peut s'agir de

composés favorisant les relations bénéfiques (symbioses, microorganismes 'PGPR'7), l'exemple

le plus connu étant celui des flavonoïdes qui participent à l'établissement de la symbiose avec les bactéries Rhizobiacées. D'autres molécules comme les naphtoquinones possèdent des propriétés antimicrobiennes qui limitent l'activité des microorganismes délétères (Bais et al., 2004).

Les mécanismes par lesquels ces composés sont libérés dans le sol sont encore peu connus. Ils font vraisemblablement intervenir l'exocytose de vésicules de Golgi notamment pour

les protéines (Neumann et Römheld, 2000) et probablement pour les métabolites secondaires phytotoxiques, ce qui permettrait à la plante de se protéger (Verpoorte et al., 2000). Il n'est pas exclu que des canaux ioniques participent également à la libération de certains composés comme les phytosidérophores dont le mode de libération fait débat (Neumann et Römheld, 2000).