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3.2. La prise en charge écologique proposée autour de l'aide externe

3.2.2. Séances d'accompagnement à l'appropriation de l'aide externe

travaux de Sohlberg et Mateer (1989) cité par Coyette et Deroux (2003) et de Donaghy et Williams (1998) relatifs à la mise en place d'un carnet de mémoire, ainsi que sur les travaux plus récents de Svoboda et al. (2012) portant sur des outils électroniques (PDA et smartphone). Il comprend 3 étapes :

l'apprentissage de l'utilisation de l'outil FilHarmonie®,

l’application de cet apprentissage dans le cadre de situations structurées,le transfert à la vie quotidienne.

Ce programme d’accompagnement a été construit autour d’objectifs mais n’a pas été défini selon un calendrier précis. En effet, nous n’avons pas déterminé un nombre précis de séances à réaliser, l’objectif étant de s’adapter aux besoins du patient et à son évolution, comme le proposaient Svoboda et al. (2012).

3.2.2.1. Étape 1 : Apprentissage de l'utilisation de l'outil FilHarmonie®

Cette première étape a pour objectif l'acquisition de compétences techniques relatives à l'utilisation de l'outil FilHarmonie®. Elle peut être mise en parallèle avec la

première phase du programme développé par Sohlberg et Mateer (1989) dans l'apprentissage du carnet de mémoire : la phase d'acquisition.

Dans la continuité du travail mené par Crochon (2012), nous avons opté pour une approche basée sur l'apprentissage sans erreur. Ce type d'apprentissage s'applique en effet tout particulièrement aux patients présentant des troubles mnésiques sévères et/ou associés à des troubles dysexécutifs, mais peut également être profitable pour les patients présentant des troubles plus légers ou des troubles mnésiques isolés. Ainsi, chaque étape de l'apprentissage est abordée selon une progression structurée et avec estompage progressif des aides afin d’éviter la production d’erreurs. Le passage à l'étape suivante est conditionné par l'acquisition de l'étape en cours.

Pour la mise en œuvre de cette première étape, nous nous sommes appuyées sur la progression proposée par Crochon (2012) segmentant les différentes manipulations à apprendre sous forme de séquences courtes, regroupées au sein de quatre domaines : utilisation du téléphone, utilisation de l’application FilHarmonie®,

utilisation du site internet, utilisation des fonctions annexes de FilHarmonie®.

Afin de prévenir les erreurs de manipulation, nous avons décomposé l’apprentissage de ces séquences selon les étapes suivantes :

1. manipulation et verbalisation par le thérapeute

2. verbalisation par le thérapeute et manipulation par le patient

3. verbalisation et manipulation par le patient, avec supervision par le thérapeute afin de prévenir toute erreur (le thérapeute valide chaque étape avant réalisation)

4. manipulation par le patient en toute autonomie

Le document intitulé « Étape 1 : Apprentissage » détaillant cette phase du programme de réhabilitation est disponible en annexe (Annexe 9, page A24).

3.2.2.2. Étape 2 : Application dans le cadre de situations structurées Une prise en charge centrée sur une aide externe ne se limite pas à un simple apprentissage de l’utilisation de l’outil. Il est indispensable d’accompagner le patient dans la mise en application des compétences acquises. Le programme que nous avons développé propose donc, à l’image de la phase d’application du programme développé par Sohlberg et Mateer (1989), un ensemble d’exercices et de situations fictives mettant en jeu des tâches prospectives.

L'accompagnement fourni par le thérapeute, dans le cadre de cette deuxième étape, cible la mise en application, en situation, des compétences nouvellement acquises sur l'outil FilHarmonie®, mais également la mise en œuvre de

compétences autour de l'outil. Ces dernières s’articulent autour de deux axes principaux : la qualité du traitement de l’information verbale et les aspects exécutifs de la gestion d’une tâche prospective.

Concernant le traitement de l'information verbale, cinq compétences sont ciblées : sélection des informations pertinentes au sein du message verbal reçu, recherche d'éventuelles informations manquantes, accès à des informations implicites, synthèse et catégorisation adéquate des informations à programmer et bonne récupération des informations saisies. Afin d’offrir un support au traitement de l’information verbale, généralement orale, nous avons mis en œuvre la technique de l’ « implementation intention » associée à une grille d’organisation de l’information, reprenant les informations principales d’un message (quand ? quoi ? où ?). Ainsi, le patient complète la grille d’organisation de l’information puis formule à voix haute son intention. Cela présente deux avantages : permettre des allers-retours entre les informations reportées sur la grille et la formulation de l’intention et proposer un support intermédiaire organisé pour consigner les informations lorsqu’il n’est pas possible d’accéder à un ordinateur (contrainte principale de l’outil FilHarmonie®).

En ce qui concerne les aspects exécutifs de la gestion des tâches prospectives, les compétences suivantes sont ciblées : initiation de conduites adaptées lors de la récupération d'informations via l'outil FilHarmonie®,

développement de stratégies d'auto-contrôle et de vérification des tâches programmées, flexibilité face à des modifications apportées aux informations initiales par différents canaux (transmission orale directe, par message vocal, par SMS, par mail), capacités de planification de tâches et gestion de l'emploi du temps.

D'autre part, dans un souci permanent de rendre le patient acteur de sa prise en charge, le programme répond à deux principes-clés: l’auto-évaluation et l’adaptation au profil du patient. En effet, le patient est incité à se fixer lui-même régulièrement des objectifs de réussite. Cette technique, inspirée de Sohlberg et Mateer (1989) et reprise par Donaghy et Williams (1998), permet au patient d'avoir un feedback sur ses performances et de mesurer ainsi ses propres progrès. Les patients cérébrolésés tendent en effet à surévaluer initialement leurs capacités en

mémoire prospective, mais sont capables d’ajuster la prédiction de leurs performances en fonction de la tâche à accomplir et des résultats qu’ils obtiennent (Schmitter-Edgecombe et Woo, 2004). D’autre part, le second principe-clé est la personnalisation de la prise en charge : des exercices et situations fictives sont proposés selon une progression structurée mais il est important de sélectionner les items pertinents pour le patient et d’intégrer, autant que possible, des situations proches de sa vie quotidienne. Pour cela, on peut s’inspirer des objectifs fixés par le patient dans le cadre du projet personnalisé, et créer des jeux de rôle reprenant les situations du quotidien.

Cette deuxième phase du programme de réhabilitation est détaillée dans le document intitulé « Étape 2 : Application » (Annexe 10, page A31).

3.2.2.3. Étape 3 : Transfert à la vie quotidienne

Cette dernière étape vise la généralisation des acquis depuis des tâches de mémoire prospective fictives réalisées avec le concours du thérapeute vers des situations réelles de la vie quotidienne. Cette étape s’apparente à la phase d'adaptation du programme développé par Sohlberg et Mateer (1989).

Deux objectifs principaux sont poursuivis : intégrer l’utilisation de l’aide externe FilHarmonie® à la vie quotidienne du patient et transférer les stratégies apprises en

séance à la réalité du quotidien. Pour cela, le thérapeute s’appuie essentiellement sur les objectifs formulés par le patient dans le cadre de son projet personnalisé, qui peuvent être renouvelés au fil de la prise en charge. Le transfert aura pu être initié par les jeux de rôle personnalisés proposés dans l’étape 2. Le thérapeute peut, si nécessaire, suggérer diverses activités associatives ou de loisir auxquelles le patient pourrait participer.

Cette étape de transfert est la clé de la réussite du programme et, très souvent, le point le plus sensible du programme de réhabilitation. La qualité de la prise en charge, dans sa globalité, sera déterminante pour qu'à ce moment charnière, le patient décide de faire sien l'outil et toutes les techniques et stratégies développées au cours du programme.

Le document intitulé « Étape 3 : Transfert » détaille cette dernière étape (Annexe 11, page A42).

Nous présenterons les résultats de notre expérimentation sous forme de cas cliniques, puis proposerons une analyse transversale des données.

1. Étude des 5 cas cliniques

1.1. Monsieur G

M. G, pompier professionnel âgé de 30 ans, a été victime d'une anoxie cérébrale suite à un arrêt cardio-respiratoire.