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VI. PATHOGENIE DE LA ROSACEE INFANTILE

3. Rosacée et photo-dermatose

La physiopathologie de la rosacée n’est pas aujourd’hui totalement élucidée, même si certains la considèrent comme une maladie primitivement vasculaire. Cependant, les dégâts solaires retrouvés au niveau du derme et des vaisseaux dermiques, principalement dus aux UVA, sont incontestablement impliqués dans la pathogénie de la rosacée [41].

La rosacée peut être déclenchée par des expositions aiguës aux ultraviolets ou des coups de soleil, ou au cours de séances de puvathérapie [42].

On sait que la rosacée survient chez les sujets à peau claire, aux yeux clairs et aux cheveux clairs, raison pour laquelle on la qualifie parfois de « malédiction des Celtes ». Ces personnes de phototype clair sont plus exposées aux effets des radiations UV que les autres. Pour beaucoup d’auteurs, l’inflammation et les dégâts vasculaires sont induits par les UV. Il est toutefois difficile de comprendre alors pourquoi la rosacée ne touche qu’une minorité des sujets à phototype clair dans les mêmes conditions d’environnement, sans lien apparent avec la durée ou la fréquence de l’exposition solaire. Il n’a en effet pas été possible de démontrer une exposition plus importante aux UV chez les sujets atteints de rosacée que chez les témoins ayant un phototype équivalent.

En revanche, on voit que l’exposition au soleil aggrave la majorité des patients, lesquels évitent naturellement de s’exposer, car le soleil augmente l’inconfort facial. Dans un petit sous groupe toutefois, l’aspect inflammatoire de la rosacée peut être amélioré par l’exposition solaire, sans doute de la même façon que dans l’acné.

Les biopsies de rosacée montrent souvent une élastose actinique, témoin des dégâts induits par les UV, mais ceci n’est pas spécifique et peut être observé à partir d’un certain âge sur toutes les biopsies réalisées au visage.

L’amélioration ou l’aggravation de la rosacée après exposition solaire varie d’un sujet à un autre. La composante vasculaire et les télangiectasies s’aggravent au soleil alors que les papules et les pustules s’améliorent. La cause doit associer l’irradiation UV, les dégâts photoinduits et les effets de la chaleur. Certains patients pourraient éviter le soleil en raison d’une intolérance à la chaleur. Il n’y a pas d’argument assez important pour penser que les altérations histologiques de la rosacée soient directement induites par le soleil. La rosacée pourrait cependant être associée à l’héliodermie, ce qui témoignerait d’une prédisposition individuelle [8, 15, 36].

3.1 Proposition de mécanismes physiopathologiques

L’exposition à la fois aux UVA et aux UVB conduit à des modificationsde la matrice extracellulaire du derme. L’atteinte du derme suggère que les UVA jouent un rôle majeur. La perte de collagène dermique apparaît avec l’âge et tout particulièrement en rapport avec l’héliodermie.

La synthèse des procollagènes I et III et du collagène detype I est réduite. L’augmentation de la dégradation du collagène survient aussi car les fibroblastes produisent des métalloprotéinases intervenant dans la dégradation du collagène. Deux autres régulateurs importants intervenant dans la régulation de la synthèse du collagène sont le TGFβ et l’activiting protein 1 (AP1) dont la production est

L’irradiation UV est également responsable d’une réaction inflammatoire avec prédominance de polynucléaires neutrophiles. Ceux-ci peuvent permettre le relargage d’espèces réactives de l’oxygène. Des radicaux libres sont produits aucours des 20 minutes qui suivent une exposition solaire et jouent un rôle majeur dans l’héliodermie. Ils sont générés à la fois par les UVA et les UVB.

3.2 Quel est le rôle du stress oxydant dans le déclenchement de la rosacée ?

On sait que la formation de radicaux libres et d’oxygène activé sont des conséquences directes du rayonnement solaire sur la peau. On a ainsi étudié le comportement du tégument des patients porteurs de rosacée vis-à-vis du stress oxydant. Deux paramètres ont surtout été évalués : le taux de super-oxyde-dismutase (SOD), enzyme majeure intracellulaire capable de protéger les cellules d’un taux excessif de radicaux libres et d’ions super-oxygène ; le taux de malon dialdéhyde (MDA), substrat résultant de la photo-oxydation des lipides, d’autre part [8,15, 36].

Au cours des deux premiers stades de la dermatose, ces deux paramètres sont normaux et comparables à ceux retrouvés chez des témoins sains. En revanche, au stade inflammatoire, on note à la fois une baisse significative du taux de SOD et une élévation de celui du MDA. Ceci semble montrer que le tégument est capable de résister un temps au stress oxydant déclenché par l’exposition solaire, mais qu’à un certain stade, il se trouve débordé [8, 15, 36].

Oztas et al. suggèrent qu’un défaut du système anti-oxydant touchant le superoxyde dismutase (SOD) est possible au niveau cutané chez les patients atteints de rosacée. Dans cette étude, les patients porteurs de rosacée sévère ont des taux augmentés de malondialdehyde (principal produit de peroxydation lipidique des acides gras des cellules cutanées) et une activité diminuée de SOD [44].

Les espèces réactives de l’oxygène peuvent intervenir dans l’étiopathogénie de la rosacée de différentes façons :

1. la présence de polynucléaires neutrophiles retrouvés chez les patients atteints de rosacée papulo-pustuleuse au niveau du follicule pileux suggère que les espèces réactives de l’oxygène peuvent directement entraîner des dégâts au niveau des follicules pileux faciaux ;

2. les UV inducteurs d’espèces réactives de l’oxygène peuvent activer les métalloprotéinases qui vont entraîner des cassures du collagène dermique. Plusieurs facteurs intervenant dans l’héliodermie peuvent également être en cause dans les symptômes de la rosacée [45].

Les irradiations ultraviolettes à travers le processus d’élastose solaire induit par les espèces réactives de l’oxygène peuvent produire des altérations des vaisseaux et du collagène périvasculaire. Ces dommages permettent l’extravasation de protéines plasmatiques et de médiateurs de l’inflammation comme le complément et certaines cytokines [46]

3.3 Radiations ultraviolets et immunosuppression

Paradoxalement, au moins un tiers des patients atteints de rosacée de phase III voient leurs symptômes s’améliorer au soleil.Ceci est dû au fait que les UVA et les UVB peuvent entraîner une immunosuppression comme le démontre les études in vivo et in vitro. Ceci étant, 60 p. 100 de cette populationa un défaut de cette immunosuppression lorsqu’ils sont exposés au soleil et pour certains auteurs, à la suite d’observations personnelles, il est noté que certains patients s’améliorent s’ils continuent à s’exposer aux UV [41].

De bonnes études épidémiologiques sont nécessaires pour démontrer si la prévalence de la rosacée est moins importante dans les pays ensoleillés. La rosacée semble plus fréquente dans les pays nordiques, c’est-à-dire où les périodes ensoleillées sont intermittentes.

Le rôle du soleil dans l’étiopathogénie est encore très discuté. Il est possible que l’exacerbation des symptômes observés chez certains patients après exposition solaire soit complexe mêlant les dommages photo-induits, l’irradiation UV et les effets de la chaleur. Une prédisposition génétique individuelle possible semble plaider pour une association significative entre rosacée et héliodermie [47].

Des études futures sont donc indispensables notamment pour préciser les interférences entre la dégénérescence matricielle et l’homéostasie vasculaire dont les relations doivent être clairement identifiées.

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