• Aucun résultat trouvé

Robustesse, sensibilité et domaines de validité des modèles dans l’espace 63

1.2 La représentation des hétérogénéités des cultures : des causes aux méthodes de

1.2.2 La représentativité spatiale des mesures et des modèles

1.2.2.2 Robustesse, sensibilité et domaines de validité des modèles dans l’espace 63

Dans le cadre de l’utilisation de modèles, il est nécessaire d’avoir une représentation spatiale des données d’entrée en adéquation avec le formalisme et une cohérence de représentativité entre les données d’entrée et celles voulues en sortie. Cependant l’adéquation entre représentativité des données du modèle et la représentativité des processus et sorties simulés ne sont jamais exactement équivalents (Figure 28). Dans les modèles, cette limitation méthodologique est compensée par la robustesse du formalisme et du paramétrage qui ne vise pas à reproduire exactement la réalité et qui assume donc, comme la mesure, une part d’erreur.

Quelle que soit la complexité du modèle, la possibilité de faire varier les systèmes d’équation suivant les situations est une possibilité permettant d’élargir son domaine de validité et sa robustesse. Cela peut se manifester par l’activation de modules prenant en compte des particularismes locaux (gonflement des argiles), des phénomènes particuliers (capillarité, bilan d’énergie empirique/résistif, etc.) ou en permettant l’utilisation d’un formalisme alternatif modifiant

64

la représentation conceptuelle du système représenté. Dans les modèles décrivant des relations empiriques, il est possible de dépasser la restriction du domaine de validité liée à une échelle spécifique, notamment par des méthodes de standardisation du paramétrage pour qu’il soit insensible à l’échelle (Gelman, 2008) ou par la modalisation de l’effet du changement d’échelle (Li et al., 2006; Martin et al., 2013).

Figure 28 : Schéma approximatif de l’étendue spatiale et temporelle pouvant être représenté par les mesures (gauche) et les processus hydrologiques avec leur représentation spatiale et temporelle (droite). Tiré de (Gentine et al., 2012).

La robustesse des modèles est en partie déterminée par le calage. Il est nécessaire d’avoir une base de données de calibration et de validation qui ait une représentativité spatiale et temporelle équivalente et représentative de la zone que l’on souhaite étudier (Grayson and Blöschl, 2001). Dans le cas des fonctions de pédotransfert, cela a un impact direct sur leur domaine de validité : les fonctions établies à l’échelle territoriale ne sont valides qu’à cette échelle et perdent en pertinence dès lors qu’elles sont appliquées à des échelles différentes (Pachepsky et al., 2006;

Vereecken et al., 2010). Le calage de données avec une base de données de taille suffisamment représentative va limiter le poids des particularités locales (outsiders) et limiter le surajustement auquel sont soumises les petites bases de données au profit d’une restitution des tendances générales (Parzen, 1979).

Dans le cas des modèles relativement riches en formalismes comme STICS, Aquacrop, HYDRUS ou encore SAFYE (Coucheney et al., 2015; Duchemin et al., 2015; Skaggs et al., 2012; Steduto et al., 2009), le formalisme a une certaine robustesse qui permet de s’affranchir d’une part des erreurs de paramétrage et de calage liées aux mesures. La robustesse est en général permise par la simplicité (principe de parcimonie) des formalismes qui les composent (Parzen, 1979). Ceux-ci sont en général basés sur des descriptions empiriques qui permettent de limiter l’impact de la paramétrisation (Carlson and Doyle, 2002). Une autre part de cette robustesse est liée à plusieurs

65

facteurs liés à l’organisation du modèle. L’organisation des modèles est souvent modulaire et hiérarchisée avec des réactions de cause à effet. Cette organisation modulaire et hiérarchisée va limiter les interactions au sein d’un même modèle et va permettre des interactions parcimonieuses entre niveaux d’organisation et entre les valeurs d’entrées du modèle et les sorties. Enfin, la méthode de paramétrisation et de calage sont également essentiels à la robustesse du modèle. En effet, un calage sur plusieurs variables va permettre d’ajuster les interactions entre formalismes (Guillaume et al., 2011). Une autre approche pour apporter de la robustesse a un modèle peut être la résolution d’équations différentielles telle que proposée par certains modèles comme HYDRUS (Šimůnek et al., 2013). La résolution d’équation différentielles et la convergence de différentes équations sur un résultat peuvent être une solution afin de limiter la dérive des variables simulées lors d’un changement d’échelle. Enfin dans certains modèles, la possibilité est laissée d’imposer un pas de temps et de simuler suivant différentes discrétisation de l’espace (Šimůnek et al., 2013, 2012).

Cela implique un formalisme adaptable à ce changement d’échelle (Farmer, 2002) ce qui laisse la liberté de mettre en adéquation la mesure et la représentation spatiale du modèle.

Un autre déterminant de la robustesse est la compensation d’erreur entre mesure et interprétation par le modèle. Par exemple, l’estimation de la réserve utile déterminée par la mesure de la capacité au champ et du point de flétrissement, est souvent faite par des mesures effectuées en laboratoire qui donnent des valeurs intégrées sur un échantillon entier. Or les valeurs de capacité au champ et de point de flétrissement peuvent varier de manière importante sur le profil ce qui peut avoir un impact direct sur les simulations et la distribution des racines (Figure 29). Toutefois, sur plusieurs horizons l’erreur se compense. Ainsi, il est possible que sur les variables de sortie cette incertitude n’impacte que très peu certaines des variables simulées.

66

Figure 29 : la compensation d’erreur (error 1 et 2) sur l’estimation du profil d’extraction d’eau par les racines dans un sol discrétisé entre deux couches. La ligne correspond au profil réel d’extraction de l’eau. Tiré de Smit et al. 2013

Les modèles nécessitent parfois un grand nombre d’entrées ce qui peut rendre la tache de spatialisation plus compliquée, chacune des variables ayant une répartition spatiale différente susceptible d’évoluer au cours du temps. Une manière de simplifier la démarche de spatialisation des modèles est d’établir une stratégie basée sur la sensibilité du modèle et la spatialisation des entrées du modèle qui permettent la représentation des processus majeurs que l’on souhaite observer (Grayson and Blöschl, 2001). La robustesse des modèles ne compensant qu’en partie l’erreur, il est donc nécessaire après spatialisation de déterminer l’efficacité de la méthode sur les variables d’intérêt et d’établir un nouveau domaine de validité sur la base de ses performances de simulation.

1.2.3 De l’échantillonnage dans l’espace à la spatialisation des mesures

La distribution des processus et des variables dans l’espace est une des principales sources d’incertitude pour l’interprétation des différents phénomènes et leur interprétation à différentes échelles spatiales et temporelles (Gentine et al., 2012). De nombreuses méthodes d’échantillonnage et de spatialisation existent et permettent d’avoir une représentation des modèles et les mesures. Le choix de la méthode va avant tout dépendre des objectifs et de la nature des données acquises.

Pour permettre une représentation d’une aire ou d’un volume pour une variable deux types d’acquisitions sont possibles : soit des mesures avec une représentativité locale in situ qui nécessite une stratégie d’échantillonnage de l’espace, soit des mesures exhaustives de l’espace (ex imagerie satellite). Par ailleurs, il existe deux méthodes distinctes pour accéder à des variables dans l’espace, soit de manière statistique (méthodes SCORPAN et dérivées) soit par la technique d’inversion de modèle.

Dans cette partie est donc abordé les principales stratégies d’acquisitions pour obtenir une représentation des variables dans l’espace.

1.2.3.1 Les méthodes d’acquisition et interprétation des mesures localisées dans l’espace