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La robotisation de la chirurgie a commencé dans les années 1980 en orthopédie et en neurochirurgie. Elle a depuis été adoptée par de nombreux autres domaines, notamment pour la chirurgie de la tête et du cou (maxillo-faciale, odontologie, ophtalmologie et ORL), la chirurgie du thorax et de l’abdomen (cardiaque, urologique) et la chirurgie mini-invasive. Historiquement, les premières interventions chirurgicales robotisées ont été effectuées avec des robots industriels, comme le robot PUMA de Unimation puis Stäubli (Pfäffikon, Suisse) pour les interventions sous stéréotaxie [Young, 1987], [Kwoh et al., 1988].

Depuis, de nombreux robots porte-instruments ont été développés spécifiquement pour la réalisation d’interventions chirurgicales comme les célèbres Robodoc (Curexo, Freemont, USA) pour la chirurgie orthopédique, Mars (Mazor Robotics, Cesarea, Israel) pour la chirurgie de la colonne vertébrale, Neuromate (Renishaw, Gloucestershire, Royaume-Uni) et Rosa de Medtech (Castelnau Le Lez, France) pour la neurochirurgie, le Zeus et le DaVinci de Intuitive Surgical (Sunnyvale, USA) pour la chirurgie mini-invasive. Ce dernier est actuellement, le robot chirurgical le plus utilisé (Fig. 1.10).

Les robots chirurgicaux sont développés afin d’augmenter la qualité et la sécurité des interventions chirurgicales tout en augmentant le confort pour l’équipe chirurgicale. Bien qu’il soit

1.5. LA ROBOTIQUE APPLIQUÉE À LA CHIRURGIE 31

Fig. 1.10 – Robot DaVinci développé par Intuitive Surgical Inc. (Sunnyvale, USA).

long et compliqué de prouver les réels bénéfices pour les patients apportés par ces systèmes, les avantages espérés reposent essentiellement sur une forte amélioration de la dextérité, de la précision et de l’endurance de la gestuelle chirurgicale. Il est également possible de limiter la vitesse de déplacement, les forces exercées ou encore l’accès à certaines zones, notamment avec des systèmes co-manipulés [Kumar et al., 1999], [Zemiti et al., 2007]. Les systèmes télé-opérés permettent de déporter le chirurgien afin d’augmenter l’ergonomie du poste opératoire ou encore de réaliser des opérations à distance. Cette possibilité a été testée en 2001 lors de l’opération Lindbergh. Depuis New-York (USA), le professeur Marescaux a opéré une patiente localisée à Strasbourg (France) en utilisant le robot Zeus [Marescaux et al., 2001]. Il est également possible de filtrer et de démultiplier les mouvements du chirurgien ou des forces perçues [Emeagwali et al., 2004]. Là encore le confort du praticien est augmenté en lui offrant la possibilité de réaliser des gestes amples ou de maîtriser les forces exercées sur les structures anatomiques. Ces différentes améliorations permettent de diminuer la taille des cicatrices en favorisant des accès mini-invasifs par les voies naturelles notamment, de réduire les douleurs pour le patient et le temps d’intervention ou d’hospitalisation [Finkelstein et al., 2010]. Aujourd’hui, certaines équipes développent des outils pouvant travailler directement dans le corps du patient ou sur des systèmes autonomes. C’est le cas du robot pneumatique développé par le laboratoire de recherche en micro-ingénierie (CRIM, Pise, Italie) permettant d’évoluer dans l’intestin afin de réaliser une coloscopie [Dario et al., 2004]. La microchirurgie est un domaine de prédilection pouvant bénéficier de nombreux avantages de la robotique, comme pour la chirurgie de l’implantation cochléaire [Zhang et al., 2006], [Leinung et al., 2007]. Pour rappel, la microchirurgie est réalisée sous un microscope opératoire offrant un fort grossissement pouvant aller jusqu’à 40. De plus, elle implique de manipuler des structures fines, demandant une gestuelle délicate et une maîtrise des forces appliquées. Ainsi de nombreux robots ont été conçus spécifiquement pour des opérations de microchirurgie comme le RAMS [Schenker et al., 1995] ou encore le Steady-Hand [Taylor et al., 1999].

En otologie les deux voies d’accès privilégiées sont par le fraisage de la mastoïde ou par la voie naturelle au travers du conduit auditif externe. De nombreux travaux ont prouvé que le fraisage de la mastoïde avec des systèmes de guidage pouvait être amélioré par l’usage d’un robot

[Leinung et al., 2007], [Majdani et al., 2009] (Fig. 1.11(a)). Ainsi de nombreux travaux sur l’accès mini-invasif de la cochlée avec un couplage à des systèmes de navigation ont été effectués avec des robots industriels [Stolka and Henrich, 2006], [Leinung et al., 2007], [Klenzner et al., 2009] et [Danilchenko et al., 2011]. Ces robots industriels sont difficilement adaptables aux normes des dispositifs médicaux et sont donc réservés à des études de faisabilité. Des systèmes dédiés ont fait leur apparition [Joskowicz et al., 2006], [Bell et al., 2012]. Ce dernier est équipé d’un système de navigation optique et permet de fraiser un tunnel au travers de la mastoïde pour accéder à la cochlée avec une précision de 0.15 mm (Fig. 1.11(b)) [Bell et al., 2013].

(a) [Leinung et al., 2007] (b) [Bell et al., 2012]

Fig. 1.11 – Exemple de robots d’assistance pour l’accès mini-invasif à la cochlée.

La chirurgie des osselets est également un bon contexte pour l’élaboration de systèmes robotisés. Brett et al. ont développé un outil robotisé permettant de réaliser une platinotomie en toute sécurité [Brett et al., 1995]. Les auteurs se basent sur la mesure des forces et du couple du moteur afin de stopper la fraise juste avant que celle-ci ne pénètre dans le vestibule. Ils ont également adapté ce principe à la cochléostomie pour détecter le passage d’un tissu dur à mou [Brett et al., 2007]. La chirurgie de l’oreille moyenne est, en plus de l’ophtalmologie, une des applications du système co-manipulé Steady Hand [Taylor et al., 1999]. Ce dernier a permis de diminuer significativement les forces exercées lors d’une platinotomie et de la fixation d’une prothèse ossiculaire [Berkelman et al., 2001]. Plusieurs autres projets se sont intéressés à la robotisation de la chirurgie de l’oreille moyenne comme le micromanipulateur Micron qui permet de réduire le tremblement de la main de 50% [Montes Grande et al., 2012], le micromanipulateur télé-opéré MMS-II [Maier et al., 2010]. Le MMS-II permet en outre de mesurer des distances dans la caisse du tympan, comme la longueur entre la platine de l’étrier et l’enclume [Maier et al., 2011]. Disposant d’un espace de travail limité à 20 mm, le système a été couplé à un macromanipulateur Jaco (Innova, Québec, Canada) pour former un prototype complet nommé MMTS (Fig. 1.12(a)) [Entsfellner et al., 2012]. Enfin le robot télé-opéré, RobOtol, a également été développé pour assister le chirurgien lors d’une intervention sur l’oreille moyenne [Miroir et al., 2012]. Celui-ci est le seul système dont la préservation du champ de vision du chirurgien et la possibilité d’utiliser simultanément plusieurs instruments ont été pris en compte lors de la conception