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Restriction à une seule face courbe

Comme mentionné dans les remarques de la section 3.1, le jacobien subit quelques simplifica- tions lorsqu’on a une seule face courbe. Notons qu’il n’est pas totalement inutile d’étudier en profondeur ce type de tétraèdre quadratique. En effet, on a vu que les triangles avec un seul côté parabolique sont souvent privilégiés pour approximer les frontières des domaines tout en conservant l’avantage de la simplicité d’un maillage linéaire à l’intérieur du même domaine. Le principe est semblable en trois dimensions. On obtient une face courbe en projetant les trois noeuds secondaires d’une même face sur la frontière. Les autres noeuds restent à leur emplacement naturel : exactement au point milieu entre les deux sommets. On peut voir un exemple de ce type de tétraèdre dans la figure 3.4.

3.4.1 Une approche géométrique

Nous allons tout d’abord tenter de trouver des conditions d’inversibilité en abordant le pro- blème de façon géométrique. Rappelons que dans le cas où la seule face courbe est formée par les sommets 2, 3 et 4, on a seulement un terme cubique en uvw. On a donc

K = L = M = N = P = Q = R = S = T = 0,

dans l’expression générale du jacobien. On a alors un énorme avantage. En effet, les inter- sections de J = 0 avec les six arêtes de Tref deviennent des polynômes quadratiques à une

Figure 3.4: Exemple d’un tétraèdre quadratique avec une seule face courbe

variable. Cela nous permet d’obtenir des conditions semblables aux critères 4 à 6 obtenus dans le théorème2.4.4 du chapitre 2.

Remarque. Lorsqu’une autre face que celle formée par les sommets 2, 3 et 4 est courbe, ces annulations n’ont pas lieu. Pour simplifier au maximum le problème, il suffit de numéroter les noeuds de façon à ce que la face courbe soit toujours associée à ces sommets particuliers. Sans perdre de généralité, nous allons donc seulement étudier ce cas pour le reste de ce chapitre.

Voici un exemple du genre de critères que l’on peut obtenir pour éviter que la surface J = 0 ne croise une des arêtes de Tref.

Proposition 3.4.1. Supposons que J > 0 en chaque sommet de Tref. Alors,

2A + D < 0 et D2− 4GA < 0 =⇒ {(0,0,w) ∈ Tref : J (0,0,w) = 0} = ∅.

Démonstration. Considérons l’intersection de J = 0 avec l’arête u = v = 0. On obtient l’équation quadratique

Gw2+ Dw + A = 0. (3.1)

On sait qu’il n’y a aucune solution réelle à cette équation lorsque D2− 4GA < 0. On souhaite qu’il n’y ait aucune solution pour w ∈ [0,1]. Puisque J > 0 en chaque sommet, on peut exclure les bornes de cet intervalle. De plus, notons qu’on a J (0,0,0) = A > 0.

Supposons que la courbe (3.1) soit tangente en (0,0,w0) à la droite u = v = 0. Alors, le

discriminant D2− 4GA est nul et on a

w0 = −D 2G = −2A D . 66

On cherche une condition pour que ce point se situe dans l’intervalle (0,1). Ainsi, en exploitant le fait que A > 0,

w0 =

−2A

D ∈ (0,1) ⇐⇒ D < 0 et | − 2A| − |D| < 0. En utilisant les informations sur le signe de A et D, on obtient

w0 ∈ (0,1) ⇐⇒ D < 0 et 2A + D < 0.

Or, comme dans le chapitre 2, on remarque que la condition D < 0 est superflue, car 2A + D < 0 ⇐⇒ D < −2A < 0.

Ainsi, le critère à vérifier pour que la surface J = 0 ne croise pas l’arête u = v = 0 de Tref est le suivant : si 2A + D < 0, alors il faut vérifier que D2− 4GA < 0.

On obtient le même genre de critères pour les 5 autres arêtes. Ceux-ci nous assurent que la surface J = 0 ne croise aucune arête, mais il est encore tout à fait possible que celle-ci croise une face sans toucher aux arêtes.

Pour approfondir cette question, concentrons-nous sur la face d’équation 1 − u − v − w = 0 et écrivons l’équation de l’intersection entre J = 0 et cette face :

J (u,v,1 − u − v) = − γuv2− γu2v + (F + G − λ)v2+ (E + G − I)u2 + (H + 2G − λ − I + γ)uv + (λ + C − 2G − D)v + (−2G − D + I + B)u + A + G + D.

Le but serait de ramener cette cubique sous la forme

v2= u3+ bu2+ c (3.2)

via un changement de variable bien choisi. En effet, cette cubique a un graphe très facile à visualiser. Premièrement, elle est symétrique par rapport à l’axe des u. Deuxièmement, selon les valeurs de b et de c, on distingue deux possibilités pour ses composantes connexes :

1. Une seule composante connexe non bornée (voir figure 3.5).

2. Deux types de composantes connexes : bornée et non bornée (voir figure 3.2).

Ainsi, pour être fixé sur l’existence d’une composante bornée, il suffit de rechercher les zéros du polynôme u3+ bu2+ c. Trois zéros réels signifient que la cubique a une composante bornée tandis qu’un seul signifie qu’il n’y en a pas. Dans le premier cas, on peut alors trouver un point sur la composante bornée en choisissant le plus petit zéro.

En pratique, passer d’une équation cubique générale vers une équation normalisée de la forme (3.2) n’est pas aussi simple. Avant de commenter davantage, on donne la définition ci-dessous.

Figure 3.5: Courbe cubique normalisée avec une seule composante non bornée

Définition 3.4.2. Une transformation birationnelle de R2 dans R2 est une fonction ra- tionnelle admettant un inverse rationnel.

On a alors le théorème suivant que nous ne démontrerons pas.

Théorème 3.4.3 (Newton). Il est toujours possible d’effectuer un changement de variable birationnel pour ramener l’équation générale d’une cubique sous la forme v2 = u3 + bu2+ c

où b,c ∈ R. 

Plusieurs sources expliquent comment trouver ce changement de variables (voir entre autres [ST92]). Malheureusement, la technique suppose la connaissance d’un point rationnel sur la cubique générale ce que nous n’avons pas nécessairement. Il est alors naturel de se demander s’il est facile de trouver un point rationnel sur une cubique. La réponse est tristement négative. En fait, il existe des algorithmes en C++ (par Cremona voir [Cre97]) et en Sage qui font ce travail. Or, il ne faut pas oublier que nous recherchons des critères simples pour les appliquer à la méthode des éléments finis. Il est clair que l’utilisation d’un algorithme pour chaque face de chaque tétraèdre serait loin d’être efficace.

L’approche géométrique ne donnant pas des résultats probants, on va plutôt tenter de passer par l’optimisation pour trouver des critères suffisants d’inversibilité pour ψ.

3.4.2 Une approche via l’optimisation

En théorie, le minimum et le maximum du jacobien existent sur les compacts formés par les faces ou même par le tétraèdre lui-même. On pourrait donc calculer ce minimum et ce maximum et déduire de leur signe (contraire ou non) si la fonction ψ est inversible. En pratique,

ces problèmes sont assez complexes et nous verrons que nous n’obtenons pas aisément des solutions avec Maple.

Premièrement, on a vu, dans la section 3.4.1, des critères pour que la courbe J = 0 ne croise ni les sommets, ni les arêtes. L’optimisation nous donne le même genre de résultats et nous n’allons pas étudier de nouveau la question. Par contre, il est possible que l’optimisation puisse écarter la possibilité d’une intersection entre J = 0 et une face complète du tétraèdre. Comme on souhaite que le jacobien soit positif partout sur ce tétraèdre, nous tenterons de trouver des conditions pour que le minimum soit positif.

Proposition 3.4.4. Supposons que

1. 4AEF − AH2− B2F + BCH − C2E > 0 ;

2. 4AEG − AI2− B2G + BDI − D2E > 0 ;

3. 4AF G − Aλ2− C2G + CDλ − D2F > 0.

Si les minimums de J sur les faces u = 0, v = 0 et w = 0 de Tref sont atteints à l’intérieur de leur face respective, alors ils sont positifs.

Démonstration. Nous donnons la preuve seulement pour le plan w = 0. Les deux autres se font de la même manière.

On pose directement w = 0 dans l’expression de J et on calcule les points critiques de la fonction résultante. On obtient alors un unique point :

(u0, v0) := (CH−2BF4EF −H2,BH−2CE4EF −H2).

De même, le hessien nous laisse avec la matrice 2E H

H 2F !

.

Si le déterminant du hessien est nul, alors les dénominateurs de (u0,v0) sont nuls et il n’y a

aucun point critique. Le minimum sera alors situé sur les arêtes.

On peut supposer que le déterminant du hessien est strictement positif et que E > 0 puisque c’est dans ce cas que (u0,v0) est un minimum. Cela est équivalent à dire que la matrice

hessienne est définie positive. On remplace alors (u0,v0) dans J et on trouve

J (u0,v0,0) =

4AEF − AH2− B2F + BCH − C2E

4EF − H2 .

Le déterminant du hessien étant positif, le dénominateur de la quantité ci-dessus l’est égale- ment. De plus, le numérateur est strictement positif par hypothèse. Ainsi, dans le cas d’une matrice hessienne définie positive, le jacobien est positif à l’intérieur de la face w = 0.

En combinant cette dernière proposition avec les critères évitant que J = 0 n’intersecte les arêtes, on obtient des conditions pour éviter le croisement entre la surface J = 0 et les trois faces planes. Toutefois, la situation se complique avec la face courbe. En effet, puisque l’intersection entre J et la face courbe n’élimine plus tous les termes de degré trois, les calculs deviennent moins accessibles. Pour la suite, posons le polynôme de degré 4 suivant :

p(x) :=3γ3x4

+ (8Eγ2− 4F γ2− 4Gγ2− 4Hγ2− 4Iγ2+ 8λγ2− 4γ3)x3

+ (4Bγ2− 2Cγ2− 2Dγ2− 16EF γ − 16EGγ + 16Eλγ − 4F Gγ + 6F Hγ + 10F Iγ − 6F λγ + 6F γ2+ 10GHγ + 6GIγ − 6Gλγ + 6Gγ2+ H2γ − 2HIγ − 8Hλγ + 2Hγ2+ I2γ − 8Iλγ + 2Iγ2+ 7λ2γ − 10λγ2+ γ3)x2

+ (−8BF γ − 8BGγ + 8Bλγ + 4CF γ + 4CGγ − 4Cλγ + 4DF γ + 4DGγ − 4Dλγ + 8EF2+ 16EF G − 16EF λ + 8EG2− 16EGλ + 8Eλ2+ 8F2G − 8F2I + 8F G2− 8F GH − 8F GI − 8F Gλ − 2F H2+ 4F HI + 4F Hλ − 4F Hγ

− 2F I2+ 12F Iλ − 4F Iγ − 2F λ2+ 8F λγ − 2F γ2− 8G2H

− 2GH2+ 4GHI + 12GHλ − 4GHγ − 2GI2+ 4GIλ − 4GIγ − 2Gλ2 + 8Gλγ − 2Gγ2+ 2H2λ − 4HIλ − 4Hλ2+ 4Hλγ + 2I2λ − 4Iλ2+ 4Iλγ + 2λ3− 8λ2γ + 2λγ2)x − C2γ − D2γ + λ2γ + 2CDγ − 2CF γ + 2CGγ + 2DF γ − 2DGγ + 4F Gγ − 2F λγ − 2Gλγ − 2λ3− 4CG2− 2Cλ2− 2Dλ2− 8F G2+ 2F λ2+ 4G2H + 2Gλ2+ 2Hλ2+ 2Iλ2+ 4BF2+ 4BG2+ 4Bλ2− 4DF2− 8F2G + 4F2I − 4CF G − 2CF H + 2CF I + 2CF λ − 2CGH + 2CGI + 6CGλ + 2CHλ − 2CIλ − 4DF G + 2DF H − 2DF I + 6DF λ + 2DGH − 2DGI + 2DGλ − 2DHλ + 2DIλ + 4F GH + 4F GI + 8F Gλ − 2F Hλ − 6F Iλ − 6GHλ − 2GIλ + 8BF G − 8BF λ − 8BGλ.

Posons également l’ensemble

Racines := {r ∈ R : r est un racine du polynôme p(x)}.

Alors, avec l’aide de Maple, on trouve que les points critiques de J dans le plan 1−u−v−w = 0 dépendent de l’ensemble Racines. En effet, si (u0,v0,w0) est un point critique, on a

         u0 := r v0:= r 2γ−2Gr−Hr+Ir+J r−rγ−C+D+2G−J −2rγ+2F +2G−2J w0:= 1 − u0− v0, 70

où r ∈ Racines. Cela amène plusieurs inconvénients. 1. On a aucune idée de la forme des racines de p(x). 2. Il faut seulement retenir les racines réelles de p(x).

3. Il faut s’assurer que le dénominateur qui apparaît dans v0 est non nul.

4. Il faut s’assurer que les éventuels points critiques se situent dans la face de Tref. Pour simplifier la résolution et espérer ne pas avoir à résoudre un polynôme de degré 4, on peut tenter un changement de variables qui exploite la symétrie du gradient. Malheureusement, tous nos efforts en ce sens ont été vains. En conclusion, on peut dire que, jusqu’ici, les critères ne sont vraiment pas satisfaisants. La résolution d’immenses polynômes de degré 4 est, entre autres, un obstacle majeur.

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