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Inversibilité dans le cas général

On considère à présent le cas général où tous les noeuds sont libres de bouger dans le plan. On suppose comme auparavant que cinq des six noeuds sont connus et nous recherchons les positions pour le sixième noeud nous permettant d’avoir une transformation inversible. Nous nous basons sur les idées développées dans [BW82], mais les résultats de cette section ne semblent pas avoir été explicité auparavant dans la littérature. Plus précisément, on recherche

Figure 2.11: Triangle avec un seul côté droit et jacobien parabolique

les équations décrivant les cas où la courbe J = 0 est tangente à un côté ou passe par un des trois sommets du triangle de référence.

Premièrement, écrivons l’équation du jacobien comme

J (u,v) := A + Bu + Cv + Du2+ Euv + F v2 = 0.

On a alors le lemme suivant. Lemme 2.4.1. Si on a

A > 0, A + C + F > 0 et A + B + D > 0, alors la courbe J = 0 ne passe par aucun sommet de Tref.

Démonstration. Un calcul direct donne

J (0,0) = A,

J (0,1) = A + C + F, J (1,0) = A + B + D.

Il est donc clair que si ces quantités sont strictement positives, alors la courbe J = 0 ne passe par aucun sommet.

Puisqu’on considère toujours un seul noeud comme étant variable et les autres comme étant connus, les trois équations du lemme précédent correspondent simplement à des demi-plans. Ainsi, on obtient nos trois premières inégalités décrivant le domaine admissible. Les prochaines conditions sont associées aux cas de tangence avec les différents côtés.

Lemme 2.4.2. La courbe J = 0 est

• tangente à la droite u = 0 si et seulement si C2− 4AF = 0 ;

• tangente à la droite v = 0 si et seulement si B2− 4AD = 0 ; et

• tangente à la droite 1 − u − v = 0 si et seulement si

(C + B + 2A + E)2− 4(A + C + F )(A + B + D) = 0.

Démonstration. • Tangence avec la droite u = 0.

En remplaçant u = 0 dans J = 0, on trouve une nouvelle équation plus simple A + Cv + F v2 = 0.

Il s’agit d’une équation quadratique classique. Ainsi, le jacobien est tangent à la droite u = 0 si et seulement si le discriminant de cette équation quadratique est nul :

C2− 4AF = 0. (2.15)

• Tangence avec la droite v = 0.

On peut effectuer le même genre de raisonnement avec la droite v = 0. En remplaçant v = 0 dans J = 0, on trouve

A + Bu + Du2 = 0.

Ainsi, le jacobien est tangent à la droite v = 0 si et seulement si le discriminant de cette équation quadratique est nul :

B2− 4AD = 0. (2.16)

• Tangence avec la droite u + v = 1.

En remplaçant u = 1 − v dans l’équation J = 0, on trouve A + B(1 − v) + Cv + D(1 − v)2+ E(1 − v)v + F v2

=(D + F − E)v2+ (C − B − 2D + E)v + (A + B + D) = 0. Ainsi, le jacobien est tangent à la droite 1 − u − v = 0 si et seulement si le discriminant de cette équation quadratique est nul :

(C − B − 2D + E)2− 4(D + F − E)(A + B + D) = 0.

Pour cette dernière équation, nous allons la transformer pour conserver la forme donnée dans l’article [BW82]. Un calcul direct permet de réécrire l’équation précédente comme (C + B + 2A + E)2− 4(A + C + F )(A + B + D) = 0. (2.17)

Il s’agit justement de l’équation recherchée.

Comme nous considérons que tous les noeuds sauf un sont connus, les équations ci-dessus ne dépendent que du noeud libre et décrivent ainsi des coniques dans le plan xOy.

Jusqu’ici, nous avons des conditions de tangence en n’importe quel point des droites soutenant les côtés du triangle de référence. Toutefois, nous ne nous intéressons qu’aux points de tangence situés directement sur les côtés de Tref. Il nous faut donc trouver comment respecter cet intervalle assez restreint. Pour ce faire, nous allons prouver le lemme ci-dessous.

Lemme 2.4.3. Supposons que A > 0, A + C + F > 0 et A + B + D > 0. La courbe J = 0 est 1. tangente au côté de Tref soutenu par u = 0 ⇐⇒ C2− 4AF = 0 et C + 2A < 0,

2. tangente au côté de Tref soutenu par v = 0 ⇐⇒ B2− 4AD = 0 et B + 2A < 0,

3. tangente au côté de Tref soutenu par 1 − u − v = 0 si et seulement si

(C + B + 2A + E)2− 4(A + C + F )(A + B + D) = 0 et C + B + 2A + E < 0.

Démonstration. Nous présentons la preuve pour la tangence au côté soutenu par v = 0, mais les deux autres preuves se font exactement de la même manière.

Soit (u0,v0) le point de tangence sur le côté de Tref. Par le lemme précédent, la courbe est

tangente au côté v = 0 en (u0,v0) si et seulement si

B2− 4AD = 0, v0= 0 et u0 ∈ (0,1).

Notons qu’il est impossible que u0 = 0 et u0 = 1, car les conditions

A > 0, A + C + F > 0 et A + B + D > 0

nous assurent que J = 0 ne passe pas par un sommet. On peut remplacer v0 = 0 dans le

jacobien. On a alors

J = A + Bu0+ Du20= 0.

Notons aussi que les cas B = 0 et D = 0 sont impossibles. En effet, si B = 0, on aurait B2− 4AD = 0 et A + Bu0+ Du20= 0 =⇒ A = 0.

De plus, D = 0 impliquerait

B2− 4AD = B2= 0 =⇒ B = 0 =⇒ A = 0.

Or, cela est impossible par hypothèse. En résolvant l’équation quadratique on trouve u0= −B ±√B2− 4AD 2D = −B 2D = −2A B . 44

Remarquons que la dernière égalité est respectée, car B2− 4AD = 0. Ainsi, en se servant de l’hypothèse A > 0, on obtient u0 ∈ (0,1) ⇐⇒ −2A B ∈ (0,1) ⇐⇒ B < 0 et | − 2A| − |B| < 0 ⇐⇒ B < 0 et 2A + B < 0 ⇐⇒ 2A + B < 0.

La dernière équivalence vient du fait que B < −2A < 0 par hypothèse. La condition B < 0 est donc déjà contenue dans l’autre inégalité.

À partir des trois derniers lemmes, nous pouvons énoncer le théorème capital ci-dessous. Théorème 2.4.4. Soit Tref le triangle de référence et J le jacobien de la transformation quadratique ψ. Si les conditions suivantes sont respectées alors la courbe J = 0 ne croise pas la frontière de Tref.

1. A > 0,

2. A + C + F > 0, 3. A + B + D > 0,

4. Si B + 2A < 0, alors on doit vérifier que B2− 4AD < 0, 5. Si C + 2A < 0, alors on doit vérifier que C2− 4AF < 0, 6. Si C + B + 2A + E < 0, alors on doit vérifier que

(C + B + 2A + E)2− 4(A + C + F )(A + B + D) < 0.

Démonstration. Par le lemme2.4.1, les trois premières conditions nous assurent que la courbe J = 0 ne croise pas un sommet. Les trois conditions suivantes découlent des lemmes 2.4.2

et2.4.3.

Il nous faut déterminer de quel côté des coniques2.15,2.16et2.17le triangle de référence doit se trouver pour éviter que la courbe J = 0 ne croise ses côtés. En revenant à la manière avec laquelle nous avons trouvé ces coniques, il est possible de résoudre facilement cette question. En effet, il s’agissait de poser un discriminant égal à zéro. Ce discriminant était celui d’une équation quadratique nous donnant l’intersection de J = 0 avec une des trois droite soute- nant les côtés de Tref. Ainsi, pour éviter les solutions réelles, il faut nécessairement que ce discriminant soit négatif.

Il s’agit finalement de remarquer qu’on a seulement besoin de vérifier les conditions sur ces coniques si le point d’intersection risque d’être dans le bon intervalle (c’est-à-dire sur le côté de Tref). On a justement vu dans le lemme 2.4.3 que les critères pour se situer dans cet intervalle sont donnés par les trois inégalités B +2A < 0, C +2A < 0 et C +B +2A+E < 0.

Sachant que la courbe J = 0 est une conique quelconque et qu’elle ne croise pas la frontière du triangle de référence, il ne reste qu’une seule possibilité pouvant causer problème. Si nous sommes en présence d’une ellipse (possiblement dégénérée) et que celle-ci est entièrement comprise à l’intérieur du triangle de référence, alors il est possible que les inégalités ci-dessus soient toutes respectées, mais que la transformation ne soit pas inversible. Un exemple de cette situation est illustré dans la figure2.12.

Figure 2.12: Configuration donnant un jacobien elliptique entièrement à l’intérieur de Tref

En supposant que les six conditions du théorème2.4.4 soient respectées, le théorème qui suit permet de régler ce dernier détail. De plus, il s’agit d’un nouveau résultat qui est absent de la littérature.

Théorème 2.4.5. Soit une transformation isoparamétrique ψ(u,v) := (x(u,v), y(u,v)) quel- conque. Soit (u1, v1) la solution de ∂x∂v = ∂y∂v = 0. Supposons que cinq des six noeuds sont

connus. Alors le domaine admissible pour le sixième noeud est décrit par les conditions sui- vantes :

1. A > 0,

2. A + C + F > 0, 3. A + B + D > 0,

4. Si B + 2A < 0, alors on doit vérifier que B2− 4AD < 0, 5. Si C + 2A < 0, alors on doit vérifier que C2− 4AF < 0, 6. Si C + B + 2A + E < 0, alors on doit vérifier que

(C + B + 2A + E)2− 4(A + C + F )(A + B + D) < 0, 7. (u1,v1) /∈ Tref.

Démonstration. Tout d’abord, remarquons que les six premiers critères nous assurent que J = 0 ne croise pas la frontière de Tref comme mentionné dans le théorème2.4.4.

Ensuite, remarquons qu’il est facile de trouver un point quelconque sur la conique J = 0. En effet, on peut exploiter le fait qu’on la calcule avec un déterminant :

J = Det ∂x ∂u ∂x ∂v ∂y ∂u ∂y ∂v ! = 0.

Les entrées de cette matrice sont linéaires puisque x(u,v) et y(u,v) sont des fonctions quadra- tiques. L’intersection des deux droites ∂x∂v = ∂y∂v = 0 nous donne le point recherché. Si celles-ci sont parallèles, c’est que la conique admet un point à l’infini. Il est donc impossible qu’elle soit entièrement comprise à l’intérieur de Tref. Si le point d’intersection existe, on souhaite qu’il se trouve à l’extérieur du triangle de référence. En effet, si le point est à l’extérieur, alors on est assuré de ne pas être dans la situation où J = 0 est entièrement comprise dans le triangle de référence. On exige donc que

(u1,v1) /∈ Tref.

Ainsi, en ajoutant cette condition aux inégalités du théorème 2.4.4 on obtient exactement le domaine admissible pour le noeud libre.

Remarque. Avec Maple, on obtient facilement les expressions pour le point (u1,v1). Pour

chaque composante, il s’agit d’une fonction rationnelle avec un numérateur et un dénominateur de degré deux. Nous ne les affichons pas ici par manque d’espace.

Sauf en ce qui concerne la septième condition, il s’agit à chaque fois d’inégalités sur des droites ou des coniques. Dans la figure 2.13, on a représenté le domaine admissible pour une configuration quelconque où le noeud libre est (x13, y13) à l’aide de Geogebra. Le jacobien J

est strictement positif sur Tref si et seulement si celui-ci se trouve dans le domaine ombragé.

Figure 2.13: Domaine admissible pour le noeud (x13, y13) en fonction d’une configuration

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