• Aucun résultat trouvé

La renaissance des FFAG à focalisation invariante : 1999 à nos jours

Introduction aux accélérateurs FFAG

2.1.2. La renaissance des FFAG à focalisation invariante : 1999 à nos jours

Nous pouvons distinguer deux familles d’accélérateurs FFAG, la première regroupe les FFAG à focalisation invariante, comme les machines de MURA que nous avons vues précédemment, dont les nombres d’onde transverses restent constants pendant l’accélération (voir section 3.1.4). La deuxième concerne les FFAG à focalisation non-invariante, dont les nombres d’onde transverses varient avec l’énergie. Nous allons dans cette thèse privilégier l’étude des FFAG à focalisation invariante. Les FFAG à focalisation non-invariante seront abordés rapidement en section 2.2 puisqu’ils constituent une part importante de la R&D en cours dans le domaine des FFAG en Europe, aux Etats-Unis (essentiellement à Fermilab et à BNL) et au Canada (TRIUMF) mais leur étude ne sera pas développée ici. La recherche concernant les FFAG à focalisation invariante a repris dans les années 90 au Japon au laboratoire KEK [68].

Les accélérateurs FFAG se distinguent par rapport aux autres grandes classes d’accélérateurs circulaires que sont les cyclotrons [69] et les synchrotrons [70] et ils

possèdent certaines propriétés intéressantes. Une propriété fondamentale des FFAG est que le champ magnétique dans les aimants est fixe pendant le processus d’accélération, contrairement aux synchrotrons pulsés dans lesquels le champ magnétique augmente en synchronisme avec l’accélération des particules. Dans les cas où l’accélération doit se faire extrêmement rapidement, par exemple pour accélérer des particules dont la durée de vie est courte comme les muons [71], la technologie des synchrotrons n’est pas adaptée du fait des limitations dans le changement d’intensité de champ magnétique avec le temps. Le champ magnétique fixe pendant l’accélération permet également de concevoir des accélérateurs à fort taux de répétition (quelques centaines de Hz) intéressant les domaines des faisceaux de forte intensité en protons [72] ou électrons.

Un FFAG à focalisation invariante accélérant des protons de 50 keV à 500 keV a été développé comme preuve de principe dans le laboratoire japonais KEK en 1999 [73]. Cette machine POP (« Proof Of Principle » en anglais) est basée sur une optique radiale dont la cellule est composée d’un triplet d’aimants défocalisant / focalisant / défocalisant (DFD), (voir Figure 2.4).

Figure 2.4 : Accélérateur FFAG POP à secteur radial de 500 keV, KEK, Japon. [74]

Elle a permis de prouver la faisabilité de l’injection, de la capture, de l’accélération, à l’aide d’une cavité à large bande de fréquence, et de l’extraction [75] dans un FFAG à protons. Par ailleurs, ce projet a nécessité le développement de modèles magnétiques utilisant des logiciels de simulations numériques par éléments finis comme TOSCA [76]. La comparaison de ces modélisations avec les mesures magnétiques sur les aimants a démontré le très bon accord entre les modèles et les mesures [73]. De plus, des outils de simulation des trajectoires des particules par intégration numérique pas à pas ont été développés pour ces études.

Par ailleurs un grand travail de R&D concernant l’accélération radiofréquence (RF) a été réalisé permettant d’obtenir un cycle d’accélération d’environ 1 ms donnant un taux de répétition de l’ordre de 1 kHz. Une cavité accélératrice à large bande de fréquence et à fort gradient a été développée à partir d’une technologie d’alliages magnétiques. L’accélérateur POP a ainsi participé à la renaissance des machines FFAG à focalisation invariante dans le monde des accélérateurs et de l’intérêt grandissant des physiciens des accélérateurs pour ces machines [77].

Consécutivement au succès de POP, le laboratoire KEK a construit un accélérateur FFAG à « optique radiale » accélérant des protons de 12 à 150 MeV (voir Figure 2.5) dont la cellule est composée d’un triplet DFD [78]. Un injecteur cyclotron délivre des ions H- à 12 MeV extraits par « stripping » pour obtenir un faisceau de protons pour injection dans le FFAG. Le but de cette machine est de démontrer la possibilité d’utiliser les FFAG pour différentes applications parmi lesquelles la protonthérapie ou les réacteurs pilotés par des accélérateurs (voir ci-après) [79]. Un nouveau type d’aimant n’ayant pas de culasse de retour a été mis au point afin d’insérer plus facilement les systèmes d’injection et d’extraction [80]. Cet accélérateur FFAG a atteint un taux de répétition de 120 Hz.

Figure 2.5 : Accélérateur FFAG 150 MeV à secteur radial, KEK, Japon.

Gauche : vue de l’injecteur cyclotron 12 MeV et de l’anneau 150MeV. [81]

Droite : vue d’un triplet d’aimants sans culasse de retour du FFAG 150MeV. [80]

Une troisième installation de FFAG en protons est en construction au Japon, à l’Institut KURRI (de l’anglais « Kyoto University Research Reactor Institute ») [82]. Il s’agit d’une cascade d’accélérateurs à focalisation invariante (voir Figure 2.6) alimentée par une source d’ions H+ de 0.1 MeV, comportant un injecteur FFAG à « optique spirale » de 2.5 MeV, un booster FFAG à « optique radiale » de 20 MeV et enfin un anneau principal FFAG à « optique radiale » de 150 MeV, ce dernier étant la copie du FFAG 150 MeV de KEK présenté précédemment [83]. Cette installation doit permettre d’étudier la physique de réacteurs nucléaires pilotés par une source de neutrons de spallation: ADSR (pour « Accelerator Driven System Reactor » en anglais) [84].

Figure 2.6 : Accélérateur FFAG 150 MeV à secteur radial pour ADSR, KURRI, Japon. [83]

Gauche : Vue de la cascade d’accélérateurs FFAG.

Droite : Schéma d’installation avec source d’ions, accélérateurs et ligne de transfert.

La renaissance des machines FFAG à focalisation invariante a donc eu lieu au Japon grâce au travail du laboratoire KEK sur les machines POP et FFAG 150 MeV puis à l’Institut KURRI dans le cadre de recherches sur les réacteurs nucléaires. Les activités de R&D concernant les FFAG à focalisation non-invariante ont, elles, débuté à la fin des années 1990 aux Etats-Unis et au Canada dans le cadre des études sur l’usine à neutrinos [85] [86]. Les activités de R&D sur les FFAG à focalisation invariante et non-invariante ont ouvert de nouvelles voies dans l’utilisation de ces machines à champ fixe, tout d’abord dans le domaine de la physique des hautes énergies, notamment dans le cadre de projets d’usines à neutrino [71]. Par ailleurs, les accélérateurs FFAG ouvrent de nouvelles perspectives pour l’hadronthérapie, comme l’accélération d’ions légers [87] (protons, hélium, carbone, etc.) et dans le domaine de la BNCT [51].

2.2. Les projets FFAG actuels