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Chapitre 5 Etude de la migration du deutérium sous gaz caloporteur et en présence de

5.2 Comportement du deutérium en présence de vapeur d’eau

5.2.1 Effets de la température et de la gazéification du graphite

5.2.1.1 Recuits en présence de vapeur d’eau

Les traitements thermiques en présence de vapeur d’eau, ainsi que le suivi en ligne des varia-tions de masse des échantillons, ont été réalisés sur une thermobalance Setaram Setsys Evolution CS Evo couplée à un générateur de gaz humide Wetsys. Ce dispositif, présenté en Figure5.7, a été spécialement mis en place pour l’étude d’un procédé de décontamination du graphite sous atmo-sphère humide (extraction du14C simulé par implantation ionique de13C), dans le cadre de la thèse de G. SILBERMANN(EDF CIDEN) [Silbermann 2013].

L’échantillon est placé dans une nacelle grillagée6en platine iridié suspendue à la microbalance à fléau, dont l’asservissement électronique permet d’obtenir un signal thermogravimétrique faible-ment bruité. L’ensemble de la thermobalance a de surcroît été installé sur une table anti-vibration, et équipé d’un tube anti-convection en alumine, placé au dessus de la nacelle afin d’éviter que les turbulences de l’atmosphère de recuit ne remontent vers le module de pesée. Le chauffage de l’échantillon jusqu’à 1750 °C est assuré par une résistance en graphite isolée de l’enceinte de recuit par un écran tubulaire en alumine. Les rampes de montée et de descente ainsi que la température et la durée du palier sont auto-régulées par une consigne et programmées avant le recuit via le logiciel d’acquisition connecté à la thermobalance. Par ailleurs, un bain thermostaté maintient les parois du four au-dessus du point de rosée de la vapeur d’eau afin d’éviter sa condensation.

Fig. 5.7 –Présentation du dispositif de recuit et d’analyse thermogravimétrique Setaram comprenant la thermobalance Setsys Evolution CS Evo équipée d’un générateur de gaz humide Wetsys.

Les lignes de circulation raccordent les bouteilles de gaz aux débitmètres massiques d’entrée de la thermobalance et du générateur de gaz humide. Ce dernier permet de charger à un taux d’hu-midité relative compris entre 10 et 90 % un gaz vecteur circulant simultanément dans une voie sèche et dans une voie humide couplée un réservoir d’eau chauffée à 35 °C. Une ligne thermosta-tée au-dessus du point de rosée de la vapeur d’eau transfert le gaz humide ainsi généré jusqu’au four tubulaire de la thermobalance avec un débit de 10 à 50 mL min−1. Les consignes de tempé-rature, ainsi que les débitmètres massiques et les électrovannes du générateur de vapeur d’eau et de la ligne de transfert sont pilotés manuellement. Par ailleurs, le module de pesée est protégé des remontées de gaz humide via un balayage d’azote sec régulé à 10 mL min−1. Enfin, un système de couplage entre une pompe primaire et une pompe turbomoléculaire permet d’atteindre un vide de l’ordre de 10−2mbar dans l’appareil lors des cycles de pompage-remplissage à l’azote sec, destinés à purger le dispositif avant les recuits.

Le Tableau 5.5 présente les conditions dans lesquelles ont été réalisés les traitements ther-miques sous différents taux d’humidité relative.

Tab. 5.5 – Conditions expérimentales associées aux recuits en présence de vapeur d’eau.

ATMOSPHÈRE GAZ HUMIDE(N2+ H2O)

Four Setaram

Débit 0,05 L min−1 HR à 35 °C 10 & 50 % 70 % Températures 200-1000 °C 200 °C

Rampe 10-30 °C min−1 10 °C min−1

Paliers ≥ 1 h ≥ 1 h

Le choix du gaz vecteur (humide) a été porté sur l’azote, plus léger que l’argon et pénétrant donc davantage dans la porosité du graphite. De plus, ce gaz est le plus adapté à l’étude des phé-nomènes susceptibles de se produire dans l’air de conditionnement ou de démantèlement des

ré-acteurs UNGG. La limite inférieure de la gamme de températures sélectionnée est également liée à cette problématique ainsi qu’à l’impossibilité de stabiliser la régulation du four en-dessous de 200 °C. Les températures supérieures sont destinées à s’approcher des conditions thermiques pré-sentes en réacteurs ou lors d’un éventuel traitement de décontamination des graphites irradiés. Enfin, les temps de recuit ont été définis selon la température afin de limiter la perte de masse des échantillons. Les tests préliminaires de faisabilité, ainsi que les recuits leur succédant, ont été mis en œuvre avec l’aide de N. GALYet J. ARTIGASSANCHO, respectivement doctorant (EDF CIDEN) et stagiaire en Master 2 de Physique (SYVIC7, UCBL) au sein du groupe ACE de l’IPNL.

5.2.1.2 |Mesure des taux de relâchement thermique du deutérium

Les taux de relâchement du deutérium ont été mesurés à partir de l’aire des profils obtenus par NRA suite aux traitements thermiques en présence de vapeur d’eau. La Figure5.8 présente l’évolution de ces taux (symboles) en fonction de la température, comparée aux ajustements des données obtenues sous atmosphère inerte (lignes tiretées, cf. Chap.4- section4.1.3.1).

0 200 400 600 800 1000 1200 0 20 40 60 80 100 Température (C) R elâchement (%) 1 h 4 h 12 h

Fig. 5.8 –Taux de relâchement du deutérium en fonction de la température dans le graphite de SLA2 im-planté à 750 nm, puis recuit en présence de vapeur d’eau à 10 % HR (symboles vides) et 50 % HR (symboles pleins), comparés aux ajustements des données obtenues sous atmosphère inerte (lignes tiretées).

Jusqu’à 500 °C, il n’a pas été observé de relâchement significatif du deutérium pour des temps de recuit inférieurs à 12 h, quel que soit le taux d’humidité relative (aucun relâchement n’ayant été mis en évidence après un recuit supplémentaire de 4 h à 200 °C et 70 % HR). A 50 % HR (carrés pleins), on peut néanmoins discerner un début de relâchement (de l’ordre de 5 %) après 12 h de recuit à 200 et 500 °C. A 800 °C, on remarque que le relâchement du deutérium après 1 h de recuit en présence de vapeur d’eau, quel que soit le taux d’humidité relative du gaz (cercle gris), est environ deux fois plus faible que sous atmosphère inerte. Après 4 h de recuit à 800 °C, le relâchement à 10 % HR (rond vide) reste inférieur à celui observé sous atmosphère inerte, alors qu’à 50 % HR (rond plein), il s’en rapproche fortement. La Figure5.9présente les profils de deutérium obtenus après 1 et 4 h de recuit à 800 °C en présence de vapeur d’eau à 10 et 50 % HR.

Fig. 5.9 – Profils de deutérium ob-tenus sur des échantillons de graphite nucléaire de SLA2 implantés à 750 nm, puis recuits à 800 °C pendant 1 et 4 h en présence de vapeur à 10 et 50 % HR. 0 20 40 60 80 100 In tensité nor malisée (u. a.) TQI 1 h - 10 % HR 1 h - 50 % HR 4 h - 10 % HR 4 h - 50 % HR 1340 1360 1380 1400 1420 1440 Surface Canal

Le déplacement apparent des profils en direction de la surface traduit en réalité la consomma-tion (gazéificaconsomma-tion) de cette dernière par la vapeur d’eau, logiquement plus importante à 50 % HR qu’à 10 % HR quel que soit le temps de recuit. Cet effet est clairement mis en évidence après 4 h de recuit par l’asymétrie visible à gauche des spectres, suggérant que la consommation de la sur-face a atteint les profils d’implantation en deutérium8. D’après une estimation de la profondeur proposée dans le Chapitre3(section3.3.2.5), la gazéification de la zone implantée pourrait avoir consommé une épaisseur d’au moins 400 nm après 4 h de recuit à 800 °C. Il convient toutefois de rester prudent vis-à-vis de cette valeur dans la mesure où la gazéification du carbone n’est pas homogène du fait de la forte porosité ouverte du graphite nucléaire, dans laquelle diffuse le gaz humide.

La Figure5.10présente les spectres Raman issus de l’analyse de l’échantillon recuit 4 h à 800 °C et 50 %, comparé au spectre obtenu après 4 h de recuit à 800 °C sous atmosphère inerte.

Fig. 5.10 – Spectres Raman obtenus sur les échantillons de graphite nucléaire de SLA2 implantés en deutérium à 750 nm, puis recuits 4 h à 800 °C en présence de va-peur d’eau (50 % HR) et sous atmosphère inerte. 1000 1200 1400 1600 1800 20 40 60 80 100 D1 D2 G Déplacement Raman (cm−1) In tensité nor malisée (u. a.)

Vierge poli et dégazé TQI

50 % HR Inerte

On observe que la structure analysée au sein de l’échantillon recuit en présence de vapeur d’eau semble nettement plus ordonnée que celle du graphite recuit sous atmosphère inerte. La consom-mation de la surface ayant atteint le profil d’implantation lors des recuits sous gaz humide, la zone initialement déstructurée par l’implantation (maximum du profil de défauts au Rd théorique de

8. Le fait que la présence de la surface corresponde à une chute relativement progressive de l’intensité des spectres pourrait résulter de la résolution de l’analyse profilométrique du deutérium par NRA.

725 nm) a donc quasi totalement été gazéifiée. L’épaisseur d’une centaine de nm analysée par la sonde Raman correspond donc ici essentiellement à une zone qui, bien qu’oxydée en surface, n’a à priori pas été endommagée par l’implantation ionique, de sorte que le spectre correspondant à l’échantillon recuit sous atmosphère humide s’approche fortement de celui du graphite vierge poli et dégazé. Cette observation est donc cohérente avec la consommation de la surface mise en évi-dence sur les spectres NRA présentés en Figure5.9.

Du fait de la gazéification de la zone implantée, ainsi que de la diminution de la section ef-ficace de réaction nucléaire D(3He,p)4He au niveau des profils de deutérium consommés (due à leur déplacement apparent en direction de la surface), les taux de relâchement déduits de l’aire de ces profils sont donc fortement majorés. Ainsi, bien que le relâchement observé à 900 et 1000 °C en présence de vapeur d’eau soit globalement plus élevé que sous atmosphère inerte, quels que soient le temps de recuit et le taux d’humidité relative (cf. Figure5.8), il n’est pas possible d’en évaluer la pertinence du fait de la forte consommation de la surface.