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Reconstitution de la mosaïque paysagère de la Sella Limba : des facettes aux zones agro-

CHAPITRE 1 : LA MOSAÏQUE PAYSAGÈRE SELLA LIMBA

2 Reconstitution de la mosaïque paysagère de la Sella Limba : des facettes aux zones agro-

écologiques

« [Le] paysage est l’expression visuelle, ce qui se voit à une échelle d’observation donnée, d’un mode d’exploitation du milieu, lui-même partie prenante d’un système agraire » (Cochet, 2011 : 94). Mais, nous prévient Sautter (1985 : 293), « [les] paysages ne sont jamais la pure expression d’un ensemble de forces en action. Il s’y mêle toujours une part d’héritage, à la fois physique et humain. C’est d’ailleurs ce qui rend possible, à partir des traces ou éléments qui survivent, de reconstituer les paysages du passé ». C’est précisément cette double caracté- ristique qui fait de l’analyse du paysage un point de départ pertinent pour l’étude de l'agricul- ture de la région étudiée.

2.1

L’analyse de paysage : méthode et concept

Si le paysage s’offre à nous, du sommet d’une colline par exemple, les « modes d’exploita- tion du milieu » et « la part d’héritage, à la fois physique et humain » qu’il recèle ne sautent pas aux yeux immédiatement. Lors de notre première visite en Sella Limba, qui était égale- ment notre première visite en Afrique de l’Ouest, il nous était bien difficile d’observer autre chose qu’un océan où le vert se déclinait dans toutes ses gammes. Les terres en « friche » et les champs semblaient se mêler. La végétation luxuriante semblait hors contrôle. Pour dépas- ser cette vue impressionniste et se dégager de nos pré-supposés, l’analyse de paysage nécessite une méthode.

2.1.1 Facettes agro-écologiques

Nous nous inspirons ici notamment des travaux de Chantal Blanc-Pamard et de Gilles Sautter : la méthode consiste à identifier des unités spatiales qui combinent des données carac- térisant le milieu et son exploitation par les paysans : les facettes (écologiques, paysagères, éco-paysagères ou encore segments, combinaisons) (Blanc-Pamard, 1990).

« Objets hybrides » (Leciak, 2008) entre nature et société, l’identification et la délimitation de ces facettes est le produit d’aller-retours entre les catégories scientifiques qui caractérisent le milieu (topographie, pédologie, botanique, …) et les catégories paysannes de l’espace culti- vé. Les deux ne se recoupent pas nécessairement en tous points et c’est justement au niveau des discordances que l’approche est fructueuse18

. Pour qu’une discontinuité du milieu naturel définisse une facette il faut donc qu’elle soit reconnue, donc nommée, et qu’elle fasse l’objet d’un ensemble de pratiques paysannes spécifiques. L’objectif étant d’introduire l’analyse du système agraire par la présentation des grands modes d’exploitation du milieu, in fine, c’est l’utilisation par les paysans qui fournit le critère pertinent de l’identification des facettes.

Le découpage du paysage auquel elles correspondent aujourd’hui n’est pas donné une fois pour toute. Les facettes et la mosaïque paysagère qu’elles forment ensemble sont susceptibles d’évoluer avec le milieu lui-même, mais également avec les pratiques paysannes et les rap- ports sociaux. Ainsi la mosaïque paysagère reconstituée ici correspond à une photographie prise au début des années 2010. C’est en nous appuyant sur ce cliché que l’on amorcera l’ana- lyse diachronique de la trajectoire historique du système agraire.

L’observation des facettes se fait depuis les chemins, en bordure des parcelles. Ce point de vue privilégie la description fine de la végétation spontanée, des types de sol, des associations de cultures pratiquées et des façons culturales à différent moments de l’année. Unité élémen- taire du paysage, qui correspond à l’échelle de la parcelle ou du groupe de parcelles, les fa- cettes agro-écologiques ne seraient pas « cartographiables » à l’échelle de la Sella Limba mais à l’échelle éventuellement des territoires de chaque village.

Dans ce travail, la définition des facettes agro-écologiques repose sur trois éléments inter- dépendants :

• la position dans la topographie, inondée une partie de l’année ou exondée (pluviale) ;

18 Blanc-Pamard (1979) en définissant, par exemple, la « bodga » (la lisière du contact forêt-savane) identifiée

et exploitée comme telle par les paysans du « V baoulé » en Côte d’Ivoire, échappe à la bipolarisation sacrali- sée du milieu forêt OU savane.

• la nature de la végétation spontanée qui précède la culture de première année dans les

rotations ;

• le mode de préparation du sol (Sautter, 1993) ;

Terres inondées ou terres exondées ?

Les paysans sella limba distinguent en premier lieu les terres inondées une partie de l’année (kubo, bas fonds), des terres toujours exondées (katite, terres pluviales). Les cuvettes inon- dables (lubu) de la zone des bolilands constituent une catégorie à part de terres inondée une partie de l’année.

L’inondation saisonnière des zones basses du paysage, nous l’avons déjà remarqué, induit la formation de sols particuliers, hydromorphes. La végétation spontanée qui s’y développe est évidemment adaptée à ces conditions. La montée d’une lame d’eau dans le bas-fond est pro- voquée par le ruissellement des eaux de pluies depuis les versants, immédiatement à proximi- té, par l’écoulement de l’eau depuis l’amont du réseau et, surtout, par la remontée des nappes phréatiques de surface pendant la saison des pluies.

Les cuvettes inondables (lubu) ne sont pas des bas-fonds, puisque leur inondation est pro- voquée essentiellement par le débordement de la rivière principale via ses affluents.

Cuvettes ou bas fonds, le riz est la seule plante qui pourra être cultivée en saison des pluies sur les terres inondée. Cette catégorisation première du milieu exploité entre terres kubo, ka- tite et lubu semble donc a priori bien naturelle. Mais, s’il y a toujours eu des terres inondées et des terres exondées, nous verrons que cette catégorisation paysanne est le produit d’une his- toire relativement récente, indissociable de l’évolution des pratiques et des rapports sociaux.

Se contenter de différencier les terres exondées des terres inondées, alors même que les paysans ont des qualificatifs plus précis pour décrire les différentes variétés de sols le long de la chaîne topographique sur les versants, peut sembler un peu grossier. Mais à ce stade de la présentation des grands modes d’exploitation actuels, il est inutile de rentrer plus avant dans le détail.

En fonction des sols, éventuellement au sein même des parcelles, les paysans vont ajuster leurs pratiques (calendrier, variétés, associations, voir rotations culturales) ce que nous décri- rons notamment au chapitre 4.

Nature de la végétation spontanée

Ce qui détermine en premier lieu, et de manière incontournable, le mode d’exploitation c’est bien la nature de la végétation spontanée dont doivent se débarrasser les paysans pour procéder à la mise en culture en première année. Les paysans désignent d’ailleurs les diffé-

rentes terres exondées d’abord par la nature de cette végétation spontanée. Une classification binaire s’impose dès les premiers entretiens : il y a les recrûs arborés (hukay, qui est plus sou- vent employé au pluriel, thakay) et les couverts herbeux (kuboli). Si les thakay correspondent à un type de couvert végétal bien identifié (infra), le terme kuboli est réellement l’équivalent de notre terme « savane ». Il peut en effet désigner en Sella Limba un grand nombre de types de couverts herbeux qui ne partagent qu’une caractéristique : le passage du feu en saison sèche. On verra que les modes d’exploitation de ces différentes « savanes » sont fondamenta- lement différents : il faudra donc définir et caractériser plusieurs facettes.

Pourquoi néanmoins un tel flou dans les termes vernaculaires ? Pour faire face à des évolu- tions parfois rapides, les paysans peuvent être amenés à adopter des termes qui se rappor- taient, en d’autres lieux ou en d’autres temps, à des réalités différentes19

. Relever les termes vernaculaires est utile : ce sont des précieux indices sur la piste des classifications paysannes du milieu. Il faut cependant, selon moi, rester prudent, car aucune langue n’est exempte d’am- biguïté, d’autant plus que, ne maîtrisant pas le limba, je reste incapable de saisir finement le contexte dans lequel les différents termes sont utilisés.

Le critère déterminant pour la définition des facettes agro-écologiques est donc in fine l’ob- servation du mode de préparation du sol, troisième élément étroitement interdépendant des deux précédents.

Le mode de préparation du sol

On désigne par cette expression, inspirée de la note de Sautter (1993) sur l’agriculture des Bakamba, l’opération technique, ou la chaîne d’opérations techniques, qui permet de se débar- rasser du couvert végétal spontané avant la mise en place de la culture en tête de rotation.

La préparation de la parcelle n’est qu’une des nombreuses opérations qui, de la récolte jus- qu'à la transformation des produits agricoles, caractérisent les itinéraires techniques20. Elle

n’est pas toujours la plus lourde ni la plus contraignante. Elle n’est pas non plus spécifique à une culture particulière. Nous rentrerons dans le détail des itinéraires techniques pour caracté- riser les pratiques paysannes (chapitre 4).

On s’intéresse ici particulièrement aux modes de préparation du sol car ils dépendent étroi- tement de la nature du couvert : on ne se débarrasse pas de la même manière d’un couvert ar- boré ou d’un couvert herbeux. Mais, en retour, on verra que ce mode de préparation influence

19 On observe souvent les mêmes décalages dans le domaine de la parenté, ce qui complique les entretiens histo-

riques concernant les rapports sociaux au sein des « familles ».

20 « […] combinaison logique et ordonnée de techniques qui permettent de contrôler le milieu et d’en tirer une

grandement la nature de la végétation qui reprend le dessus dans la parcelle immédiatement après la récolte des plantes cultivées. La plupart des couverts végétaux en Sella Limba sont ainsi « sub-spontanés »21. Il existe une relation dynamique entre l’évolution des modes de pré-

paration de la parcelle d'un côté, l’anthropisation et la différenciation des paysages sella limba de l'autre.

Étroitement dépendants de la nature du couvert végétal spontané, elle-même traduisant un mode de reproduction de la fertilité spécifique, les modes de préparation des parcelles consti- tuent véritablement le maillon central entre le paysage tel que l’on peut l’observer et le sys- tème agraire de la région tel que l’on peut le reconstituer. Pour les caractériser on pourra s’ap- puyer non seulement sur les couverts végétaux mais également sur les outils employés par les paysans. L’agriculture sella limba est strictement manuelle. La seule source d’énergie em- ployée est l’énergie humaine et l’outillage est – sauf pour quelques matériels de transforma- tion récents – toujours individuel. La « faiblesse des forces productives » n’empêche pas le dé- veloppement d’une grande variété de houes, de machettes ou de haches. La fabrication de tous les outils par les forgerons locaux et l’absence presque totale d’outils importés en Sella Limba est une spécificité de la région qui a probablement facilité les innovations dans le domaine de l’outillage.Que ce soit pour décrire les paysages, ou pour écrire l’histoire des pratiques pay- sannes, l’ancrage dans l’outillage comme réalité concrète est une méthode efficace pour les enquêtes avec les paysans.

2.1.2 Analyse de paysages : méthodes d’enquête

La simple observation des paysages a constitué, au cours du travail de terrain, une étape préalable à l’étude des dynamiques historiques ou des pratiques actuelles. Après une présenta- tion publique de nos objectifs auprès des notables de la région (Paramount Chiefs, Section chiefs, Town chiefs, …) nous consacrions plusieurs journées à parcourir le territoire du village ou à effectuer des transects à pied à travers la Sella Limba. Durant ces périodes d’observation nous notions, notamment à l’aide de premiers croquis, tous les indices relatifs aux modes d’exploitation du milieu et à l’histoire de ces paysages. Durant cette période d’observation préliminaire, nous nous gardions d’interroger les paysans et les paysannes rencontrés, nous

21 Terme que l’on réservera néanmoins pour les espèces végétales exploitées directement et qui de ce fait font

contentant de présenter à chaque fois nos objectifs et de prendre rendez-vous pour une ren- contre prochaine. Cette observation / analyse « muette » de paysage permettait de faire des premières hypothèses et de soulever des interrogations qui viendraient alimenter les entretiens avec les paysans. D’un point de vue conceptuel, l’objet « facette agro-écologique » suppose, par définition, des aller-retour entre observation de paysage « muette », observation directe des pratiques et entretiens in situ avec les paysans au sujet de ces pratiques.

Mais l’analyse de paysage n’est pas seulement une étape préliminaire de notre recherche destinée à devenir le premier chapitre d’un manuscrit. Tout le temps qu’a duré le travail sur le terrain nous avons utilisé l’observation et l’analyse des paysages pour accompagner et prolon- ger les entretiens réalisés avec les paysans rencontrés. Les entretiens avec les vieux paysans et les vieilles paysannes démarraient généralement dans le village. Les discours sont alors tou- jours quelque peu stéréotypés et il peut être difficile d’évoquer des éléments précis de la vie quotidienne dans ce cadre. Après 1 ou 2 heures de discussion, nous proposions à notre interlo- cuteur de « nous montrer » ce dont il / elle nous avait parlé. Nous nous rendions alors sur le sommet d’une colline voisine. Mais, si les capacités physiques de notre interlocuteur ne nous permettaient pas de trop longues marches, une simple « promenade » dans les parcelles proches étaient déjà enrichissante. Pour les entretiens historiques, ces visites, accompagnées d’un informateur mis en confiance par une discussion préliminaire, avaient deux vertus :

• Elles permettaient de localiser dans l’espace les informations que nous avions tenté de

localiser dans le temps lors de la première partie de l’entretien. Le paysage était alors l’objet de nos discussions : en retirant ou en ajoutant un élément qui s’offrait à notre vision, il était possible de recomposer les paysages des époques antérieures et avec eux les systèmes agraires historiques.

• Par ailleurs, nous avons observé que hors du village et avec le paysage comme sup-

port, les langues se déliaient souvent.

• Il est connu que le cadre d’un entretien ethnographique influence la qualité et la quan-

tité d’informations collectés (Beaud et Weber, 1997). Sous la « véranda »22 de leur mai-

son, espace public par excellence, il est de bon ton de décliner la norme sociale (et technique) que l’on croit devoir servir à l’enquêteur de passage. Dans les parcelles, hors du village, il devient plus facile de discuter de choses plus quotidiennes : pra- tiques culturales bien sûr, mais aussi tensions domestiques, problèmes économiques, … Bref les discussions s’enrichissaient, du point de vue de nos objectifs.

22 En Sierra Leone, une terrasse couverte, appelée « véranda », est présente devant toutes les maisons d’une cer-

Au fur et à mesure des entretiens, suivis chaque fois que c’était possible d’une visite dans les parcelles, nous améliorions notre connaissance de l’espace exploité permettant en retour à nos informateurs d’aller plus dans les détails de leurs explications. Une bonne connaissance, à travers le paysage de l’espace exploité par les paysans interrogés est, par exemple, centrale dans les cas d’étude de groupes domestiques (cas d’étude qui fournissent la matière du cha- pitre 4 et 5).

2.2

Les facettes agro-écologiques en Sella Limba : unités

élémentaires de la mosaïque paysagère

Sur la base de la définition donnée page 38, nous proposons de décomposer le paysage de la région étudiée en 6 facettes : 4 pour les terres pluviales et 2 pour les terres inondées.

2.2.1 Le bosquet villageois (gbokoη)

Le paysage en Sella Limba est ponctué de bosquets arborés puissants, sorte « îlots fores- tiers » dominants les couverts végétaux plus bas des alentours. La présence de ces bosquets dans le paysage n’est pas propre à la Sella Limba, ni même au nord de la Sierra Leone : on les retrouve dans toute la zone dite de « mosaïque forêts-savane ». Du point de vue physiono- mique il s’agit d’une « forêt dense » : « Peuplement continu d’arbres atteignant au moins 10 m de hauteur à cimes s’interpénétrant » (White, 1983b : 50). En raisonnant par déduction, de nombreux observateurs ont fait de ces « îlots de forêt » les reliques de la végétation clima- cique de la région. Par exemple, dans ce qui constitue le manuel de botanique de référence en Sierra Leone, on lit :

Forest outliers in savanna regions probably originated as remnant forests regenerating itself over the years, when villagers cleared the original closed forest around their village for farming. Overintensive cultivation and other biotic influences like fire, soil erosion has prevented the regeneration of the original closed forest, thus leaving the forest community in the village as an island on a sea of grass or derived savanna. (Cole, 1968 : 81)

Pour Fairhead et Leach (1998b, 148-9), en Guinée Forestière ces îlots forestiers sont, au contraire, le résultat d’une exploitation répétée, ancienne ou récente, des savanes par les pay- sans. D’après les témoignages qu’ils ont collectés en Guinée Forestière, ces forêts sont d’an- ciennes fortifications datant de la fin du XIXe siècle. Ils concluent que paradoxalement : « […] the vegetation forms which forests ecologists select as indicative of least disturbance may be in reality be the most disturbed ».

En Sella Limba, si nous n’avons pas pu retracer les conditions historiques de la formation de ces bosquets, leur composition botanique rend peu crédible l’hypothèse d’une formation « relique », témoignage d’une végétation « originelle ». La strate supérieure de ces bosquets est composée d’arbres de très grande taille (plus de 20 m), notamment l’emblématique « Co- ton tree » (kutεnε, Ceiba pentendra). Cette essence pionnière à croissance rapide marque dans toute la Sierra Leone, et jusque dans la capitale, la présence d’un emplacement humain. On trouve également dans cette strate Chlorophora regia, kubεrεfut (Artocarpus altilis) ou de grands kusasi (Parinari excelsa), moins symboliques mais non moins utiles que ce soit pour le bois d’œuvre ou l’alimentation. À l’ombre de ces arbres prospère une végétation luxuriante d’arbres plus petits, souvent utiles comme des kolatiers (Cola acuminata), et de plantes culti- vées :des bananiers (Musa spp.) des taros (Colocasia esculenta) des ignames (Discora spp.), etc (figure 3).

Fig. 2: Bosquets villageois

Photo 1 :On observe, derrière une jeune palmeraie plantée au premier plan, la couronne des « Coton

tree » qui domine le couvert. Photo 2 : Un homme nous montre les fondations de la maison de son père à l’ancien emplacement d’un village. Photo 3 : A l’ombre d’un « coton tree » des bananiers dans

le bosquet villageois.

Par ailleurs, les Sella-Limba nous apprennent que ces « îlots forestiers » marquent tous l’emplacement historique d’un village. On y trouve les fondations des anciennes maisons et les tombes de leurs ancêtres. Aujourd’hui, l’emplacement de la grande majorité des villages a été modifié, et les maisons se sont alignées sur la piste carrossable. Mais les paysans se rendent régulièrement encore dans les bosquets. Ils y collectent une grande quantité de pro- duits utiles, alimentaires ou non. C’est également le lieux des « sacrifices » (saraka) qui per- mettent d’entretenir le lien entre les membres vivants et décédés du lignage et qui sont néces-

saires à la bonne conduite des activités productives sur le sol des ancêtres du lignage. C’est ce qui motive la désignation, courante dans la littérature, de ces bosquets comme des « bois sa- crés » (Juhé-Beaulaton et Roussel, 1998 ; Lebbie et Freudenberger, 1996). Quand ils décrivent le paysage, les Sella Limba désignent eux ces bosquets (gbonkoη) par le nom du village (mε- ti) auxquels ils sont associés justifiant le terme que nous emploierons dans ce travail : « bos- quets villageois ».

Cette facette du paysage ne rentre pas dans des rotations puisque les bosquets villageois ne sont jamais mises en culture.

2.2.2 Les recrûs arborés denses (thakay)

Dans certaines zones de la Sella Limba , les bosquets villageois dominent une végétation arborée dense plus basse. Les paysans parlent pour désigner ces couverts de hukay, et em- ploient le plus souvent ce terme au pluriel (thakay). Ils sont composés de deux strates : une strate supérieure d’arbres qui ne dépassent jamais 10 m et une strate inférieure d’arbustes et de

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