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Rapprochement avec les résultats en opération

3 Poids des modalités

4.3 Rapprochement avec les résultats en opération

L’étude sur les performances en opération menée au chapitre 3 a démontré une augmentation du temps d’exécution, une plus grande imprécision et une moins bonne stabilité en configuration délocalisée qu’en configuration co-localisée. Toutes ces différences pourraient être expliquées par une modulation de la vision ou de l’haptique, néanmoins la problématique de stabilité est fortement liée à une baisse du poids de l’haptique en configuration délocalisée. Les résultats de l’étude de perception sont donc cohérents avec ceux en opération.

4 Discussions 115 La problématique de délocalisation au cours de la tâche de manipulation a cependant été sta-tistiquement prouvée sur la quasi-totalité des participants. Or dans l’expérience de perception, seule la moitié des candidats semble affectée.

Les conditions expérimentales différentes dans les deux études en sont peut être la cause. Ou alors la variance du poids des modalités n’est pas le seule phénomène qui affecte le processus. Même si les signaux sont intégrés correctement ils pourraient poser des difficultés au moment de leurs combinaisons. Un conflit sur la localisation de l’objet pourrait par exemple émarger du fait qu’il existe trois repères de référence possibles : la main, les yeux ou le corps de l’utilisateur. Des données récentes suggèrent que la vision et l’haptique ne sont pas nécessairement liés au même repère [Avillac et al., 2005],une compétition pourrait donc être induite au cours de leurs combinaisons.

4.4 Points critiques et perspectives

L’étude possède certaines faiblesses qui pourrait remettre en cause les résultats. En premier lieu, elle est basée sur une forte présomption sur le type de modèle. Il est notamment sous-entendu que l’intégration en configuration co-localisée se fait de manière optimale selon une fusion faible des données. En toute rigueur cette hypothèse devrait être mise à l’épreuve. L’ex-périence consisterait en une tâche de discrimination entre stimuli visuel et haptique congruents dans laquelle l’affichage serait de plus en plus bruité. Si l’intégration suit le modèle, le poids de l’haptique devrait augmenter au fur et à mesure.

Un autre point critique de l’étude concerne le paradigme 2-AFC employé. Il oblige le partici-pant à faire un choix entre deux présentations alternatives des stimuli et n’est pas basé sur un phénomène perceptible direct, mais sur une mémoire de la simulation précédente [Helbig and Ernst, 2007b]. Or il existerait une variance due à l’estimation personnelle gardée en mémoire et les deux processus ne mèneraient donc pas à la même perception [Kerst and Howard, 1978, Moyer et al., 1978].

Pour pallier à cette problématique, un seul stimulus avec retour visuel et haptique biaisés de-vrait être présenté aux participants qui choisiraient le plus courbé. Néanmoins la procédure implique de consciemment séparer les deux modalités et pourrait donc affecter leurs processus d’intégration. Aucune méthode n’est donc parfaitement adaptée.

Une troisième faiblesse est le peu de participants testés. Afin de pérenniser les conclusions, les expérimentations devraient être réalisées sur une plus grande population. A cet effet, d’autres points pourraient également être perfectionnés. La précision de la mesure pourrait par exemple être améliorée. Dans l’expérience menée, un rayon de comparaison RC est présenté seulement 8 fois, une erreur du participant sur sa réponse mène donc à une erreur sur la probabilité as-sez conséquente de 0.125. Un spectre plus large de rayon RC devrait aussi être testé ainsi que d’autres valeurs de biais.

Néanmoins si de telles modifications sont apportées au protocole, le nombre d’essais par parti-cipant devient très grand. De nombreuses sessions devront alors être réalisées. Une procédure adaptative telle que la méthode en escalier (staircase procedure) qui adapte l’amplitude des fu-turs stimuli en fonction des réponses des participants quant aux discriminations précédentes pourrait être employé. A l’inverse de la méthode à stimuli constants, le nombre d’essais n’est pas fixe et peut donc potentiellement converger rapidement [Leek, 2001].

Le système employé doit également être changé. Tout d’abord le dispositif tactile n’est pas adapté à des expérimentations sur grande population car il est fabriqué en impression 3D et n’est donc pas résistant. En outre, il serait intéressant que le dispositif haptique possède un plus grand espace de travail. En effet la longueur de la fenêtre noire est gardée fixe au cours de l’expérience à cause des contraintes imposées par le dispositif Oméga 3, les longueurs d’exploration des stimuli sont donc fonction de la taille de sphère présentée. Cependant il a été démontré que la difficulté de discrimination était variable avec la longueur d’exploration visuelle [Watt and Andrews, 1982] et haptique [Pont et al., 1999]. Il serait donc plus judicieux de réfléchir en termes d’intégrale de courbure qu’en termes de courbure et un dispositif avec un espace de travail large serait plus adapté.

Ainsi une perspective à court terme est d’implémenter un dispositif tactile dans l’interface à câbles développée au chapitre 2. L’espace de travail de cette dernière est plus large que celui de l’Oméga 3 et laisse plus de liberté dans la mise en place de l’expérience. Le changement aurait d’autres avantages :

• L’inertie de la structure à câble est plus faible que celle de l’Oméga 3, les opérations seraient donc moins fatigantes pour les utilisateurs.

• Un dispositif tactile à double orientations pourrait être développé de manière à explorer des courbures dans un espace 3D. La situation serait plus proche de conditions en Réalité Virtuelle.

• L’interface serait améliorée. Le retour tactile aide grandement à la détection de courbure et serait bénéfique dans des tâches d’exploration.

Un prototype de mécanisme portatif à double orientations à été développé9 (Fig. 4.15(a)). Il vient remplacer la poignée du dispositif à câbles (Fig.4.15 (b)) et s’oriente indépendamment autour des axes ~yc et ~zc.

Il a été couplé à un environnement virtuel et opéré par un utilisateur en configuration co-localisée afin de fournir une preuve de concept (Fig. 4.15 (c)). L’utilisateur explore le côté droit d’une sphère 3D et ressent à la fois un retour d’effort par le dispositif à câbles et un retour tactile. La plaque s’oriente selon la pente au contact.

Le dispositif n’est pour l’instant qu’à l’état de prototype et n’est pas assez robuste pour des expérimentations. En effet, certaines pièces de soutien ont été fabriqué en impression 3D (po-lymère) et des problèmes d’alignement en résulte avec pour effet un léger couplage des deux orientations. De plus, le dispositif est trop fragile pour menée des expériences sur une grande population. Ainsi, une nouvelle version est actuellement usinée.

A plus long terme, de nombreuses autres perspectives sont envisageables pour l’étude de per-ception. Les conditions expérimentales pourraient par exemple être changées, des stimulations dans lesquelles un temps serait imposé aux participants ou avec des stimuli tactiles enrichis par des efforts tangentiels pourraient par exemple être comparées aux simulations présentées. La problématique des facteurs individuels pourraient également être développés.

5 Conclusion 117

Preuve de concept du dispositif tactile dans linterface à cables

t = 1 s t = 3 s

xc

zc

yc

t = 5 s t = 7 s Implémentation dans l interface à câbles

~ 7 cm

(a) (b)

Prototype à double orientation

(c)

zc

y zc

y

Figure 4.15. Un mécanisme tactile à double orientations à été développé (a) afin de fournir un retour tactile dans l’interface à câbles (b). Il a été testé dans l’interface à câbles lors de l’exploration d’une sphère de diamètre 8 cm (bleue) par un avatar(blanc) de diamètre 1 cm. L’utilisateur tient le dispositif entre son index droit sur la plaque mobile et son pouce (c).

5 Conclusion

Ce chapitre à étudié l’influence de la délocalisation sur la perception des stimuli visuels, proprioceptifs et tactiles. Une plateforme expérimentale pour la reconnaissance de courbure en 2D a été mise en place. Deux expériences utilisateurs ont par la suite été menées afin de mesurer les poids des modalités en configuration co-localisée et délocalisée.

La modalité visuelle a tout d’abord été confrontée au retour proprioceptif. Les résultats obtenus démontrent une augmentation du poids de la vision en configuration délocalisée par rapport à la configuration co-localisée pour la moitié des participants. Pour l’autre moitié, les pondérations sont identiques dans les deux configurations. Ainsi, la perception de certains participants est altérée par la délocalisation et dépend d’un facteur indéterminé.

La modalité visuelle a ensuite été confrontée au retour proprioceptif augmenté d’un retour tactile. Dans ces conditions, les poids de la modalité visuelle ou de la modalité haptique augmentent en configuration délocalisé comparé à une configuration co-localisée. Le type et l’intensité du décalage dépend de la modalité privilégiée en configuration co-localisée. La délocalisation affecte

la perception des participants quand un retour tactile est présent.

En outre, ces résultats révèlent que la problématique d’intégration est différente selon les signaux en entrée et que le schéma est donc plus complexe qu’une simple augmentation du poids de la vision en configuration délocalisée.