• Aucun résultat trouvé

d Un anneau avec deux portes de sortie

D. Les rôles des cohésines a La cohésion

La cohésine tire son nom de son rôle décrit à l’origine dans la cohésion des chromatides sœurs. Cette dernière est établie en phase S, maintenue jusqu’en anaphase, essentielle pour la bi- orientation des kinétochores et par conséquent pour la ségrégation fidèle des chromosomes et la stabilité du génome (Dewar et al., 2004; Guacci et al., 1997; Michaelis et al., 1997). Alors que la cohésion n’est établie que quelques heures lors de la division mitotique, elle doit être maintenue plusieurs mois voire plusieurs années lors de la méiose, dans les ovocytes (Burkhardt et al., 2016). L’établissement et le maintien de la cohésion sont donc essentiels pour la survie cellulaire et doivent être hautement régulés. Les principales étapes menant à l’établissement et au maintien de la cohésion chez la levure S. cerevisiae ainsi que chez les mammifères sont abordées dans la section suivante.

i. Chez la levure S. cerevisiae

Les principales étapes de l’établissement et de l’abolition de la cohésion sont résumées en Figure 20.

Les cohésines sont absentes des chromosomes en G1. Cela est provoqué d’une part par la faible expression de Scc1 et d’autre part par le clivage des protéines résiduelles par la séparase active à cette étape du cycle (Guacci et al., 1997; Michaelis et al., 1997).

Le passage du point Start voit la stimulation de l’expression de Scc1 et la séquestration de la séparase par son inhibiteur, la sécurine (Guacci et al., 1997; Michaelis et al., 1997). L’anneau de cohésine est alors assemblé et recruté sur l’ADN par Scc2/Scc4 (Ciosk et al., 2000; Lengronne et al., 2004; Uhlmann and Nasmyth, 1998). Cependant, cette association n’est que transitoire car les cohésines sont également dissociées de l’ADN par Wpl1/Pds5 (Gerlich et al., 2006a; Rowland et

La cohésion est établie lors de la phase S, par piégeage du brin d’ADN répliqué dans l’anneau de cohésine (Ivanov and Nasmyth, 2005; Uhlmann and Nasmyth, 1998). Afin de prévenir le relargage de l’ADN, l’acétyl-transférase Eco1 acétyle les lysines K112 et K113 de Smc3 (Ivanov et al., 2002; Rolef Ben-Shahar et al., 2008; Skibbens et al., 1999; Tóth et al., 1999; Unal et al., 2008). Cette acétylation inhibe l’action de Wpl1/Pds5, stabilise des cohésines sur l’ADN et maintient la cohésion entre les chromatides sœurs (Beckouët et al., 2016; Elbatsh et al., 2016; Rowland et al., 2009; Sutani et al., 2009). L’établissement de la cohésion ne semble pas nécessiter un chargement de novo de cohésines à l’ADN, mais serait initié par des cohésines préalablement chargées sur l’ADN (Lengronne et al., 2006; Rhodes et al., 2017; Srinivasan et al., 2019). La machinerie de réplication semble également jouer un rôle primordial dans ce processus. En effet, Eco1 interagit directement avec PCNA, un facteur présent à la fourche de réplication (Moldovan et al., 2006). De plus, l’invalidation de plusieurs facteurs de réplication provoque des défauts de cohésion (Hanna et al., 2001; Skibbens, 2004; Skibbens et al., 1999).

Par ailleurs, Eco1 peut établir la cohésion après induction de cassures doubles brins en G2/M, soit après la réplication (Heidinger-Pauli et al., 2009; Unal et al., 2007). Cette observation suggère un rôle additionnel d’Eco1 dans l’établissement de la cohésion, indépendant de la machinerie de réplication. Deux modèles peuvent être avancés pour l’établissement de la cohésion : 1) un modèle passif où la fourche de réplication passe directement à travers l’anneau et 2) un modèle actif selon lequel l’anneau de cohésine s’ouvre transitoirement pour faciliter le passage de la fourche puis se referme après capture du second brin d’ADN. Le mécanisme précis d’établissement de la cohésion reste mal compris et constitue un vaste domaine d’études qui promet des découvertes majeures dans les prochaines années.

Lors de la phase G2/M, l’activité du complexe Scc2/Scc4 provoque le chargement ininterrompu des cohésines sur l’ADN (Uhlmann and Nasmyth, 1998). Cependant cette fraction de cohésines non acétylées est sensible à l’action de Wpl1/Pds5 (Rowland et al., 2009; Sutani et al.,

L’entrée en mitose s’accompagne notamment de l’activation de la kinase Cdc5 et du complexe APC (Irniger et al., 1995; King et al., 1995; Sudakin et al., 1995). Alors que la première provoque la phosphorylation de Scc1, le second induit la dégradation de la sécurine (Alexandru et al., 2001; Cohen-Fix et al., 1996; Funabiki et al., 1996). La séparase, alors libérée de son inhibiteur, clive la forme phosphorylée de Scc1 (Ciosk et al., 1998; Uhlmann et al., 1999, 2000). Après clivage, l’anneau est dissocié de l’ADN. Smc3 est dé-acétylé par la protéine Hos1, afin de permettre le recyclage de la protéine (Beckouët et al., 2010; Borges et al., 2010; Xiong et al., 2010). En effet l’acétylation persistante de Smc3 ou l’expression de versions constitutivement acétylées de la protéine ne sont pas recrutées sur l’ADN et ne peuvent pas établir la cohésion (Borges et al., 2010; Guacci and Koshland, 2012; Rolef Ben-Shahar et al., 2008; Unal et al., 2008). Le fragment C- terminal de Scc1 est dégradé par le « N-end rule » (voie de dégradation ciblant des protéines en fonction de leur séquence N-terminale, pour revue (Varshavsky, 2011)) afin qu’il ne puisse pas entrer en compétition avec la forme pleine longueur de la protéine dans le cycle suivant (Rao et al., 2001). Le fragment N-terminal est lui dissocié de Smc3 par Wpl1 (Beckouët et al., 2016). Le complexe APC reste actif durant la phase G1, expliquant l’activité persistante de la séparase à cette phase du cycle (Michaelis et al., 1997).

ii. Chez les mammifères

Le cycle des cohésines dans les organismes multicellulaires fait intervenir des acteurs et des régulations supplémentaires à ceux de levure détaillés plus haut. Nous allons décrire les principales différences entre ces deux cycles (Figure 21).

Tout d’abord, les protéines de levure Pds5, Eco1 ou Scc3 sont présentes en deux exemplaires chez l’homme, à savoir PDS5A et PDS5B, ESCO1 et ESCO2 et SA1 et SA2 (Table II). Bien qu’il existe des différences fonctionnelles entre ces paralogues, leurs rôles spécifiques (ou non) sur la régulation de l’anneau de cohésines ne sont pas encore clairement établis (pour ESCO1 et ESCO2 voir plus bas).

compétition avec Wpl1 pour sa liaison à Scc1 (Nishiyama et al., 2010). Une fois Sororin recrutée aux cohésines, Wpl1 ne peut donc plus se lier à Scc1, ce qui stabilise les cohésines sur l’ADN.

Lors de la prophase, la phosphorylation de Sororin provoque sa dissociation de l’anneau (Nishiyama et al., 2010). Wapl est alors de nouveau recruté aux cohésines et les dissocie de l’ADN. Ce phénomène est responsable de la dissociation de la grande majorité des cohésines des bras des chromosomes en prophase et nécessite également la phosphorylation de Scc3 (Hauf et al., 2005; Losada et al., 1998; Tedeschi et al., 2013). La phosphorylation de Sororin est inhibée spécifiquement aux centromères, par l’action de la protéine Shugoshin, elle-même recrutée par les kinétochores (McGuinness et al., 2005). Les cohésines présentes à proximité des séquences centromériques sont donc protégées de l’action de Wpl1 en prophase et seront clivées par la Séparase à la transition métaphase-anaphase (Waizenegger et al., 2000).