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Quel est le rôle précis de l’otoferline dans la transmission synaptique des cellules ciliées sensorielles ?

microphonique en impulsions nerveuses 7.1 Mécanisme général

Question 4: Quel est le rôle précis de l’otoferline dans la transmission synaptique des cellules ciliées sensorielles ?

Figure 24: L’otoferline dans l'exocytose synaptique des CCIs

On peut distinguer quatre grandes étapes dans le processus d’exocytose des CCIs. Le recrutement, l’ancrage, l’amorçage et la fusion des vésicules. Ainsi différents pools vésiculaires ont été identifiés: 1) les vésicules amorcées et prêtent à fusionner constituant le RRP (Readily Releasable Pool, vésicules bleues); 2) les vésicules recrutées formant le SRP (Slowly Relesable Pool, vésicules vertes) et 3) les vésicules constituant le pool de réserve lointain (vésicules orange).

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11. Les canaux calciques voltage-dépendants

Le Ca2+ est un second messager universel permettant de contrôler un ensemble de processus tels que l’expression des gènes, la contraction musculaire par le mécanisme du « Ca2+ Induced Ca2+ Release » (CICR), le contrôle de la phosphorylation de certaines protéines, l’initiation de l’apoptose et le relargage de neurotransmetteurs tel que le glutamate dans le cas des cellules ciliées sensorielles auditives et visuelles. L’ouverture des canaux calciques voltage-dépendants peut être déclenchée 1) par un potentiel d’action au niveau des neurones, 2) par le potentiel récepteur (microphonique) des cellules ciliées auditives et vestibulaires, 3) par l’inactivation du courant d’obscurité des photorécepteurs, lié à la fermeture des canaux sodiques dépendants du GMPc. La dépolarisation de la membrane cellulaire et l’entrée de Ca2+

dans la cellule permet, via les senseurs calciques, de déclencher l’exocytose.

11.1 La famille des canaux calciques voltage-dépendant

Il existe dix isoformes de canaux calciques nommées en fonction de leur sous-unité α1 et codées par des gènes différents. Les canaux calciques sont classés en fonction de leurs propriétés biophysiques: seuil et vitesse d’activation/inactivation, conductance ionique et sensibilité à certaines molécules pharmacologiques. Ces différentes propriétés proviennent en grande partie du type de sous-unité α1 formant le pore du canal calcique. On distingue ainsi cinq grandes sous-familles de canaux calciques, les familles L, P, Q, N, R et T (Budde et al., 2002; Catterall, 2011; Striessnig et al., 2014). Alors que les familles P, Q, N et R sont majoritairement retrouvées dans les membranes neuronales, les familles L et T ont une distribution plus ubiquitaire. Les canaux T sont exprimés aussi bien dans les neurones (Cain and Snutch, 2010) que dans les cellules pacemaker cardiaques (Burgess et al., 2002) mais aussi dans les cellules ciliées auditives du poulet (Levic et al., 2007; Nie et al., 2008). Les canaux calciques de type L ont une distribution très large, en plus de leur expression dans les neurones, on les retrouve dans l’ensemble du tissu cardiaque (Platzer et al., 2000), à la fois dans les tissus conducteurs et musculaires où ils sont impliqués dans la genèse du potentiel d’action au niveau du nœud sinusal, mais aussi dans la contraction musculaire des cellules atriales et ventriculaires. Ils sont aussi présents dans la membrane des tubules T des muscles squelettiques permettant d’initier la contraction musculaire suite au relargage de Ca2+

à partir du réticulum sarcoplasmique via le mécanisme du CICR. Ces canaux sont aussi très exprimés dans les cellules ciliées auditives (Platzer et al., 2000; Brand et al., 2003) et vestibulaires (Dou et al., 2004) et dans les photorécepteurs (Koschak et al., 2003; Griessmeier et al., 2009; Shaltiel et al., 2012). Les canaux calciques sont aussi classés en deux grands groupes en fonction de leur seuil d’activation. Ainsi les canaux calciques de type T s’activant à des potentiels très négatifs entre -100 et -90 mV (Cain and Snutch, 2010) sont considérés comme des canaux s’activant à bas voltage (« low voltage activated channel ou LVA »). Les quatre autres familles de canaux calciques ont un seuil d’activation plus positif situés autour de -50 mV et sont considérés comme des canaux s’activant à haut voltage (« high voltage activated channels ou HVA »).

11.2 Structure moléculaire des canaux calciques a. La sous-unité α1

Les canaux calciques sont des protéines hétéro-pentarimériques, c’est-à-dire composés de cinq sous-unités différentes (Curtis and Catterall, 1984). La plus grande de ces sous-unités est la sous-unité α1 dont le poids moléculaire est d’environ 190 kDa (soit environ 1900 acides aminés). Cette sous-unité a une taille très proche de celle de l’otoferline (200 kDa).

48 Il existe dix isoformes pour la sous-unité α1, chacune confère des propriétés électrophysiologiques et pharmacologiques spécifiques au canal calcique. La sous-unité α1 constitue le pore du canal et participe à la sélectivité ionique de celui-ci. Sa structure moléculaire est très proche de celle des canaux sodiques (Tanabe et al. 1987). Elle est composée de 4 domaines (I, II, III, IV) de six segments transmembranaires (S1 à S6) (Fig. 22A et 22B). Comme pour les canaux sodiques, les segments S5 et S6 des quatre domaines se mettent face à face formant la paroi du pore du canal et les segments S4 forment ce que l’on appelle les « voltage sensors » en raison de la présence de nombreuses acides aminés chargés positivement, sensibles aux variations de voltage. Il a été montré que l’expression seule de cette sous-unité dans la membrane des fibres musculaires squelettiques est suffisante pour générer un courant calcique (Perez-Reyes et al. 1989). Néanmoins, le niveau d’expression du canal est très diminué et leurs propriétés électrophysiologiques (activation et inactivation en particulier) sont ralenties. La co-expression des sous-unités auxiliaires avec la sous-unité α1 est donc importante pour réguler l’activité du canal calcique.

b. Les sous-unités auxiliaires du canal calcique

Les quatre autres sous-unités participant à la formation du complexe canalaire sont des sous-unités auxiliaires régulatrices. Ce sont des sous-unités de faible poids moléculaires. On distingue la sous-unité β, elle fait environ 55 kDa et quatre isoformes de cette sous-unité ont été identifiées (β1 à β4). Contrairement à la sous-unité α1 qui est strictement membranaire, celle-ci se trouve dans le milieu cytosolique et est reliée à la sous-unité α1 via la boucle cytosolique entre les domaines I et II de cette dernière (Striessnig et al., 2014). De nombreuses études sur le rôle de la sous-unité β ont révélé que cette dernière est importante dans la régulation du niveau d’expression du canal à la membrane, dans le contrôle des cinétiques d’activation et d’inactivation du canal ainsi que la dépendance au voltage du canal (Lacerda et al.,1991; Singer et al. 1991). La troisième sous-unité est la sous-unité gamma (γ), c’est la plus petite des cinq sous-unités, c’est une glycoprotéine de 4 segments transmembranaires d’environ 30 kDa (Takahashi et al. 1987). Le rôle de cette sous-unité n’est pas clairement défini puisque la co-expression de celle-ci avec la sous-unité α1 n’a que très peu d’effet sur les propriétés biophysiques du canal. Les deux dernières sous-unités régulatrices sont les sous-unités alpha 2 (α2) et delta (δ). Il a été montré que la sous-unité δ est codée par la partie 3’ de la séquence codant pour la sous-unité α2. Elles sont toutes les deux traduites ensemble et subissent un clivage protéolytique, et ensuite, par le biais de différentes maturations post-traductionnelles, ces deux sous-unités sont reliées par un pont disulfure. La sous-unité α2δ, d’un poids moléculaire d’environ 170 kDa est localisée dans le compartiment extracellulaire Son ancrage dans la membrane a fait l’objet de plusieurs études. Des études récentes postulent que l’ancrage de la sous-unité α2δ ne passerait pas par un domaine

transmembranaire comme le montre la figure 25A, mais par une liaison

glycophosphatidylinositol (Davies et al., 2010, voir revue: Dolphin, 2013). La co-expression de cette sous-unité avec la sous-unité α1 a montré que son rôle est très proche de la sous-unité β. En effet, elle participerait à la régulation de l’expression de la sous-unité α1 à la membrane et aussi la régulation des paramètres biophysiques du canal calcique mais avec un rôle moins significatif que celui de la sous-unité β (Arikkath and Campbell, 2003; Davies et al., 2007).

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A

B

C

Figure 25: Représentation schématique du canal calcique (A) Ensemble des sous-unités formant le complexe canalaire (Gurkoff et al., 2013). Il est à noter que l’ancrage de la sous-unité α2δ reste encore à déterminer (B) La sous-unité α1 est composée de 4 domaines (I à IV) formés par 6 segments transmembranaires (S1 à S6). Les segments S5 et S6 (en bleus) forment la paroi du canal calcique. Les segments S4 (orange) sont les senseurs du voltage. (C) La partie C-terminale de la sous-unité α1 a été agrandie pour mettre en évidence les principaux domaines contrôlant la cinétique de l’inactivation dépendante du Ca2+ (IDC). Lorsque le domaine CTM est formé (encadré rouge) il rentre en compétition avec la liaison de la Ca2+-calmoduline sur les domaines pré-IQ et IQ, induisant le ralentissement de la cinétique d’inactivation.

50 11.3 L’inactivation des canaux calciques

a. L’inactivation dépendante du voltage

Les canaux calciques comme l’ensemble des canaux dépendants du voltage ont la propriété de s’inactiver en fonction du voltage (IDV). Ce processus est une propriété intrinsèque au canal et est médié par certains segments transmembranaires, certaines boucles cytosoliques composant la sous-unité α1 mais aussi par la sous-unité β régulatrice. L’utilisation de canaux calciques chimériques, c'est-à-dire le remplacement de quelques acides aminés par d’autres provenant de différentes familles de canaux a permis de démontrer le rôle important des quatre segments S6 et de la boucle intra-cytosolique reliant les domaines I et II dans la régulation et le contrôle de la cinétique d’inactivation. (An and Zamponi, 2000).

b. L’inactivation dépendante du calcium

A côté de l’IDV, les canaux calciques possèdent la particularité de s’inactiver en fonction de la concentration intracellulaire calcique (IDC). Ce processus d’inactivation spécifique aux canaux calciques lui offre la possibilité de contrôler efficacement la quantité de Ca2+ entrant dans la cellule durant chaque stimulation. Le mécanisme de l’IDC est relativement commun à l’ensemble des cinq grandes familles de canaux calciques. C’est la partie C-terminale de la sous-unité α1 qui est à l’origine de ce processus d’inactivation. En effet quand celle-ci est absente l’amplitude et la cinétique de l’IDC sont très largement augmentées (Fig. 23B).

La partie C-terminale des canaux calciques possède plusieurs domaines de régulation impliqués dans le contrôle de l’IDC (Fig. 22B). C’est la fixation du Ca2+

intracellulaire sur la calmoduline qui est l’origine de ce processus. La calmoduline est une protéine possédant quatre domaines chacun capable de fixer un ion Ca2+. C’est suite à la fixation du complexe Ca2+- calmoduline sur les domaines pré IQ et IQ de la partie C-terminale que la cinétique de l’IDC est régulée (Peterson et al., 1999; Qin et al., 1999; Catterall, 2011; Erickson et al., 2003; Liu et al., 2010; Striessnig et al., 2014). Il existe deux autres domaines importants localisés dans la partie C-terminale des canaux calciques. Il s’agit des domaines de régulation proximale (Proximal Carboxy terminal Regulatory Domain ou PCRD) et distale (Distal Carboxy terminal Regulartory Domain ou DCRD). Ces deux domaines de régulation en hélice alpha ont la particularité, en se liant l’un à l’autre, de former un complexe de modulation C-terminal (Carboxy Terminal Modulatorydomain ou CTM) dont la structure tridimensionnelle (3D) est proche de la calmoduline le rendant capable de rentrer en compétition avec la fixation du complexe Ca2+- calmoduline sur les domaines pré IQ et IQ (Singh et al., 2008; Liu et al., 2010, Striessnig et al., 2014). En plus de ces différents domaines de régulation capables de diminuer la cinétique de l’IDC, les cellules expriment certaines protéines dont la structure 3D est aussi proche de celle de la calmoduline, ce sont les CaBPs (Calmodulinlike Binding Protein). Il existe cinq isoformes de CaBPs possédant quatre sites potentiels de fixation pour le Ca2+ (Striessnig et al., 2014). Ces protéines peuvent entrer en compétition avec la fixation de la calmoduline sur le domaine IQ (Ben Johny et al., 2013). Leur rôle, en plus d’agir comme un tampon Ca2+, est d’accélérer la cinétique de l’IDC ou bien la diminuer en fonction des isoformes considérées et de la partie N ou C terminale de la CaPB se fixant sur le domaine IQ de la sous-unité α1. Il a été montré que les CaBPs sont exprimées dans les CCIs du poulet et de la souris (Lee et al., 2007; Cui et al, 2007; Uthaiah and Hudspeth, 2010) et aussi dans les photorécepteurs (Haeseleer et al., 2004) suggérant une régulation possible des canaux calciques par les CaBPs dans les cellules sensorielles auditives et visuelles.

51 c. L’inactivation dépendante des protons

Les deux mécanismes d’inactivation cités ci-dessus, sont des mécanismes de régulation intrinsèque (IDV) et intracellulaire (IDC) du canal calcique. Le chargement des vésicules en glutamate nécessite une entrée massive de protons (H+) dans ces mêmes vésicules induisant une chute de pH intra-vésiculaire à environ 5,1 comparé au milieu extracellulaire compris généralement entre 7,3 et 7,4 (voir chapitre 6.1: Mécanisme de chargement vésiculaire en glutamate). Les protons libérés conjointement avec le glutamate lors de l’exocytose sont capables de se fixer sur le canal calcique entraînant un blocage transitoire du courant Ca2+ (ICaTB). Deux mécanismes ont été proposés pour expliquer ce phénomène. Premièrement, les protons, en se fixant à la bouche du canal calcique (Zhou and Jones, 1996) entrainent une diminution de la conductance du canal (60-80%). Deuxièmement, la fixation des protons sur la membrane plasmique est capable de perturber sa polarisation à l’origine d’un décalage de seuil d’activation vers des potentiels moins négatifs (DeVries, 2001). Grâce à un tel mécanisme, le système est capable de réguler précisément l’entrée de Ca2+

dans la cellule en contrôlant l’état d’activation/inactivation du canal à la fois depuis l’intérieur (IDV/IDC) et l’extérieur de la cellule (H+). L’ICaTB provoqué par les H+ a été mis en évidence au niveau des synapses à ruban des photorécepteurs, des cellules bipolaires et des cellules ciliées auditives des amphibiens (DeVries 2001; Palmer et al. 2003; Cho and von Gersdorff, 2014). Le rôle d’une telle régulation n’est pas clairement défini. Cependant il pourrait permettre d’exercer un rétrocontrôle négatif sur la libération de glutamate par les cellules pré- synaptiques, participant à limiter le phénomène d’excitotoxicité des fibres nerveuses synaptiques. L’excitotoxicité est liée à une activation excessive des récepteurs AMPA post-synaptiques entraînant un déséquilibre osmotique dans les fibres nerveuses par une entrée massive d’ions et d’eau conduisant à leur mort prématurée. L’excitotoxicité participerait aussi dans le processus de neurodégénérescences observées dans les maladies de Parkinson, Huntington et alzheimer (voir revue: Dong et al., 2009). De même, l’excitotoxicité des fibres afférentes a été mise en cause dans les surdités liées à une exposition à des bruits d’une trop forte intensité et liées à l’âge (voir revue: Moser et al., 2013).

Question 5: Existe-t-il un tel mécanisme de régulation dans les cellules ciliées