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Chapitre 1. La polyarthrite rhumatoïde

2. Physiopathologie de la polyarthrite rhumatoïde

2.2. Immunité innée

2.2.1. Rôle des macrophages

Les macrophages sont des acteurs majeurs de la physiopathologie de la PR. Ce sont les sources principales des cytokines pro-inflammatoires TNF, IL-6 et IL-1 qui ont un rôle central dans le maintien de l inflammation (1). Le TNF en est d une importance particulière puisque son inhibition thérapeutique induit une rémission dans 60% des patients atteints de PR (53).

Les macrophages sont différenciés à partir de monocytes circulants qui infiltrent le site inflammatoire sous l influence des chimiokines MCP-1 (Monocyte chemoattractant protein-1), CX3CL1 et IL-8 (54,55). Ils sont ensuite activés par différents mécanismes : un engagement des TLR2, TLR4, TLR3 et TLR6, une activation par les facteurs de croissance M-CSF ou GM-CSF, une activation Fc- R-dépendante des auto-anticorps impliqués dans la PR ou une activation des Protease-Activated Receptor 2 (PAR2) par les sérines protéases présentes dans la membrane synoviale (4) (Figure 6).

Leur activation induit donc des fonctions cruciales pour l élimination des pathogènes, mais qui jouent aussi un rôle dans la perpétuation de l inflammation. Un rôle essentiel est leur capacité de présentation d antigène qui active les cellules de l immunité adaptative. La fonction la plus importante attribuée au macrophages reste cependant leur sécrétion de cytokines pro- inflammatoires accompagnée d une capacité de phagocytose, de production de ROS, de facteurs angiogéniques tels que le VEGF (vascular endothelial growth factor) et FGF (fibroblast growth factor), de métalloprotéases matricielles (MMP-3, MMP-9 et MMP-12) mais aussi de chimiokines responsables de l infiltration de monocytes et PNN tels que le MCP-1 et l IL-8 (1,56 59).

Figure 6. Les mécanismes impliqués dans l activation des macrophages dans la PR. L engagement des TLRs, des Fc- R, de PAR2 ou des récepteurs de GM-CSF induit l activation des macrophages (4).

Dans le cas de la PR, une corrélation a été établie entre le nombre de macrophages synoviaux infiltrant l articulation et l activité ainsi que la sévérité de la PR (60). Parallèlement, le rôle crucial des macrophages dans le développement de l arthrite murine a été démontré chez des souris BALB/c déplétés de macrophages qui étaient complètement résistantes au développement d arthrite après transfert de sérum K/BxN (61). Dans ce même modèle, une infiltration de

monocytes non-classiques Ly6c-dans l articulation a été montré comme un contributeur principal

à l arthrite inflammatoire. Ces monocytes se différencient dans l articulation en macrophages pro-inflammatoires et dans un deuxième temps subissent une reprogrammation vers un phénotype anti-inflammatoire qui participe à la résolution de l inflammation (62) (Figure 7).

Cependant, une étude plus récente par Brunet et al. a mis en évidence que les souris NR4A1-/-

(Nuclear Receptor Subfamily 4 Group A Member 1) déficientes en monocytes Ly6clow

développent une arthrite plus aggravée que les souris WT (wild type). Cela suggère que ce sont les monocytes classiques Ly6chigh, et non pas Ly6clow, qui contribuent à l initiation et la

progression de l arthrite dans le modèle K/BxN. De plus, ces mêmes travaux ont montré que les

Figure 7. La contribution des monocytes non-classiques Ly6c- dans le modèle K/BxN-STA. Les monocytes non-classiques Ly6c-sont recrutées à l articulation et transitionnent au cours de l arthrite d un phénotype

pro-inflammatoire à un phénotype M2 pro-résolutif (62).

Ainsi, la synovite rhumatoïde est riche en macrophages pro-inflammatoires, schématiquement désignés dans la littérature comme des macrophages « classiques » de type M1 en référence à la dichotomie de la polarisation macrophagique M1/M2. Les macrophages de type M2 sont qualifiés à leur tour de macrophages « alternatifs » et ont, eux, des propriétés plutôt résolutives contribuant à l homéostasie synoviale (64).

Les macrophages M1 pro-inflammatoires, comme mentionné précédemment, sont majoritairement issus de la différenciation des monocytes infiltrants et se localisent au niveau de la jonction articulaire et de la couche sub-intima (65). Ils expriment à leur surface les molécules MHC-II (Major Histocompatibility Complex II) et les molécules de co-stimulation CD40, CD80 et CD86 qui sont responsables de la présentation d antigène et la co-stimulation des lymphocytes T respectivement (64,66,67). Outre leur capacité d initier la réponse adaptative, les macrophages sont capables d induire l expansion et la différenciation des lymphocytes Th17 en produisant l IL- 23 (64). L IL-1 et le TNF secrétés par les macrophages M1 activent de même les fibroblastes synoviaux qui vont à leur tour sécréter du M-CSF et RANKL (Receptor activation of nuclear factor

-B ligand) responsables de la génération des ostéoclastes et donc, de la destruction osseuse (68) (Figure 8).

Figure 8. Rôle des macrophages dans la physiopathologie de la PR. Les macrophages secrètent des cytokines impliquées dans le recrutement de monocytes/PNN, la polarisation des lymphocytes T, l activation des fibroblastes synoviaux et la génération d ostéoclastes. Les cytokines inflammatoires et les complexes immuns produits par les lymphocytes B activent à leur tour les macrophages (64).

Par contraste aux macrophages infiltrants pro-inflammatoires qui ont un rôle central dans la PR, il existe dans la membrane synoviale des macrophages résidents dont le rôle n a toujours pas été clairement défini. Ces macrophages sont associés à un phénotype plutôt immunorégulateur du fait de leur sécrétion des cytokines anti-inflammatoires IL-10 et IL-RA (IL-1 Receptor Antagonist) (69,70). Ils expriment à leur surface différents récepteurs tels que le récepteur au mannose CD206, le récepteur au fragment Fc des immunoglobulines CD16, le récepteur « scavenger » de l hémoglobine CD163 et le Mer tyrosine kinase (MerTK) entre autres (71,72) (Figure 9). De plus, il a été récemment démontré qu une sous-population de macrophages synoviaux résidents

CX3CR1+ (chemokine (C-X3-C motif) receptor 1) forme une barrière immunologique anti-

Figure 9. Phénotype et fonction des différents sous-types de macrophages. Sous l influence de stimulus différents, les macrophages peuvent se polariser en différents phénotypes (M1 ou M2) chacun caractérisé par des fonctions et marqueurs extracellulaires précis (74).

Il est cependant important de souligner que les deux phénotypes M1/M2 ont été surtout

caractérisées in vitro sous l influence de stimulus précis tels que l IFN- et LPS

(lipopolysaccharide) pour les macrophages M1 et l IL-4/IL-13, les complexes immuns/dérivés bactériens ou IL-10 pour les différents sous-types de macrophages M2 (M2a, M2b et M2c). La réalité dans l articulation est différente avec la présence de plusieurs phénotypes intermédiaires co-exprimant les marqueurs M1 et M2 avec une évolution vers l un ou l autre phénotype en fonction du microenvironnement (74,75).

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