• Aucun résultat trouvé

1.1 : Le rôle de l’imageur portal dans l’assurance qualité des traitements

Partie I.1 : Contexte

I. 1.1 : Le rôle de l’imageur portal dans l’assurance qualité des traitements

Pour la sécurité des patients, il est important de s'assurer que l'exposition des tissus normaux pendant la radiothérapie est maintenue aussi basse que possible. Or, dans un contexte où la moindre erreur peut avoir des conséquences dévastatrices, un maximum de précautions doit être mis en place. L'importance de l'assurance qualité (AQ) en radiothérapie est reconnue depuis longtemps et des directives ont été recommandées par plusieurs organismes internationaux, tels que l'ESTRO et l'AAPM [38], [127]. L'expérience en radiothérapie au cours des années a établi que la mise en œuvre d'un programme complet d'AQ permet de détecter et de corriger des erreurs et d’améliorer la qualité du traitement administré aux patients. L’assurance qualité désigne l’ensemble des actions nécessaires pour garantir qu’un système fonctionnera de manière satisfaisante conformément aux normes convenues, soit le développement des règles et des tolérances. Le contrôle de qualité est une partie de l’assurance qualité qui concerne la mise en œuvre destinée à maintenir ou à améliorer la qualité du système, soit l’application des règles. Par exemple, l'évaluation et le maintien aux niveaux requis des différents paramètres qui peuvent être définis, mesurés et contrôlés.

En radiothérapie externe, l’AQ concerne toutes les procédures qui assurent la cohérence entre la prescription médicale et l’administration quotidienne du traitement. L’AQ est un domaine très large, allant de la vérification de l’appareil de traitement et des logiciels utilisés, à celle du plan de traitement des patients. Son but est, évidemment, de réduire les incertitudes et les erreurs, que cela soit à l’étape de la planification du traitement ou lors de l’administration du traitement. Trois catégories d’utilisation de l’EPID dans le contrôle qualité se distinguent par la suite (Figure I.1). Premièrement, l’EPID est actuellement utilisé pour différents contrôles de qualité accélérateurs, comme la vérification de l’homogénéité et de la symétrie des lames du MLC ainsi que des mâchoires. Les deux autres types d’utilisation concerne la vérification de l’administration du faisceau chez le patient : en prétraitement (sans patient, dans l’air ou en utilisant un fantôme) et en « in vivo » soit pendant le traitement.

50

Figure I.1: Visualisation des différents modes utilisés avec l’imageur portal

Comme l’objectif de cette thèse se concentre sur l’utilisation de l’imageur portale dans le dessein d’améliorer les traitements des patients, la vérification in vivo et le contrôle de qualité patient est expliqué plus en détail.

La vérification in vivo :

La dosimétrie in vivo ou DIV désigne la réalisation de mesure de doses pendant le traitement par radiothérapie externe pour vérifier l’adéquation entre la dose administrée et la dose prescrite. Elle permet l'identification des erreurs potentielles dans le calcul de la dose, le transfert de données, l’administration de la dose et l'installation du patient. Son utilisation, lors de la première fraction, peut permettre de constater et de corriger les erreurs détectées au plus tôt, réduisant ainsi le risque de propager l’erreur sur toute la durée du traitement [61]. D’un autre côté, utiliser cette technique tout au long du traitement peut s’avérer coûteuse en temps et en équipement. Cette technique peut également être utilisée comme outil d’évaluation dans le cas d’une irradiation corporelle totale. Le rôle de la DIV, dans ce cas, est l’indication de l’atteinte d’une dose limite à un organe à risque pour prendre des mesures de protection envers cet organe. La dosimétrie in vivo est réalisable avec différents types de détecteurs tels que les diodes, les MOSFET, les thermoluminescents (TLD) et les fibres scintillantes [72].

Depuis l’avènement de l’imagerie embarquée (2DkV et CBCT) sur les accélérateurs linéaires, le rôle de l’EPID a été étendu au-delà du positionnement du patient, pour devenir un outil utile pour la dosimétrie en radiothérapie et pour le contrôle périodique des performances de l'accélérateur linéaire. Aujourd’hui, tous les accélérateurs linéaires actuellement installés sont équipés d’un imageur portal. Pour cette raison, l’intérêt de l'utilisation de l'EPID pour la vérification in vivo ou d'autres applications cliniques potentielles telles que la radiothérapie adaptative ou la vérification des faisceaux IMRT a

51

augmenté. Au début des années 2000, les imageurs EPID ont fait l’objet de nombreuses études caractérisant leur réponse en fonction de différents paramètres de traitements. Il a été prouvé que cet outil présente des caractéristiques très intéressantes accordant leurs utilisations à des fins dosimétriques [46], [86], [87], [88].

Avant de pouvoir utiliser l’EPID pour des utilisations qui vont au-delà du positionnement quotidien, il faut procéder à l’étalonnage de l’imageur. Pour les Clinac iX (Varian), c’est le mode d’acquisition intégrée qui est aujourd’hui utilisé pour la dosimétrie avec l’EPID. Dans ce mode, l’image s’affiche lorsque le faisceau de rayonnement est désactivé. Cette image unique est l'intégration de toutes les données reçues par l’EPID lors de l'irradiation d’un arc ou d’un faisceau.

La mise en œuvre de l’étalonnage commence par l'obtention d'une image à champ sombre (DF pour Dark Field) et d’une image à champ clair (FF pour Flood Field) (Figure I.2). Ce sont ces images qui vont permettre l'élimination du bruit de fond et apporter une réponse uniforme à l’imageur. Leurs conditions d’acquisition sont les suivantes :

o L’image de champ sombre est l’image moyenne de 30 images obtenues en l'absence de rayonnement. Cette image représente le bruit de fond représentant le courant de fuite des photodiodes pour différentes corrections d’électromètre.

o L'image du champ clair est l’image moyenne de 30 images obtenues lorsque la totalité de la matrice de détection est exposée à une dose uniforme (il faut donc irradier le détecteur avec un champ supérieur à 40x30 cm2). L’image FF permet de corriger la différence de sensibilité

de chaque pixel de la matrice de détection et d’identifier les pixels défectueux.

Figure I.2: Image DF à gauche, la série de bandes verticales étroites résultent du courant de fuite de la photodiode. Image FF à droite, présente un pixel mort et des lignes de pixels morts (d’après la documentation Varian I4).

52

L’image brute acquise par la suite se verra soustraire l’image DF, puis cette image corrigée sera divisée par l’image FF, également corrigée du bruit de fond. Les pixels défectueux sont corrigés par attribution d’une valeur correspondant à la moyenne des valeurs voisines. L’imageur nécessite également une calibration en fonction de l’énergie de faisceau et du débit de dose utilisé dans les conditions cliniques. Lors de cette étape, l’imageur portal sera étalonné de sorte à ce que les signaux engendrés par le faisceau soient en relation avec la dose. Une fois l’étalonnage exécuté, les doses portales acquises peuvent s’afficher sous forme d’unités d’étalonnage (CU pour Calibration Unit, unité arbitraire du logiciel) ou en pourcentage du maximum (d’après la documentation Varian I4). Pour cela, des images sont réalisées pour les conditions cliniques voulues, sans milieu interférant entre la source et le détecteur et dans les conditions de calibration ci-dessous :

o Taille du champ 10x10 cm2

o DSD = 100 cm (distance source-détecteur) o 100 UM

Puis, une valeur de dose est indiquée dans le logiciel de calibration (en fonction des rapports énergie/débit) afin d’obtenir le coefficient de calibration signal/CU. Dans les conditions de référence, le facteur donne 100 CU = 100 cGy au niveau du pixel central de l’image.

Dans le cadre de la vérification in vivo, l’utilisation de l’imageur portal présente donc des avantages comme la possibilité de réaliser un contrôle de la dose avec une bonne résolution spatiale, une bonne linéarité dose/détecteur et une bonne reproductibilité. Son évolution est telle qu’un nom lui a été attribué : la dosimétrie in vivo dite « de transit ». Elle consiste à convertir le signal recueilli par l'EPID en sortie du patient en dose, pour par la suite pouvoir comparer la dose mesurée à la dose calculée [12], [22], [39]. Ces calculs, effectués par rétroprojection, peuvent être réalisés en 1D (calcul en un point), en 2D (contrôle faisceau par faisceau) ou en 3D (reconstruction de la dose pour l’ensemble des faisceaux). Avec le développement des techniques modernes de radiothérapie comme l’IMRT, les vérifications dosimétriques des plans de traitement ont pris de l’importance. Bien que l'IMRT soit un pas en avant par rapport à la radiothérapie conformationnelle, son contrôle de qualité demeure plus complexe et laborieux, exigeant une vérification dosimétrique bidimensionnelle détaillée. Il faut pour cela utiliser des outils permettant de mesurer la dose en 2D.

53

Control qualité des plans de traitement IMRT :

L’IMRT est une technique complexe qui a besoin de la réalisation de contrôle de qualité adapté. Le contrôle qualité patient (CQP) est un contrôle interne mis en œuvre pour s’assurer de la qualité du traitement apporté par l’accélérateur linéaire pour les traitements en IMRT [94]. Il est réalisé avant chaque nouveau traitement et après changement sur une dosimétrie d’un patient déjà en cours. Il consiste en la vérification de la balistique d’un patient par une mesure de dose qui peut être réalisée avec un film et une chambre d’ionisation ou une matrice de détecteur par exemple. La réalisation d’un CQP est indépendante du matériel utilisé. Il s’agit toujours de recalculer la distribution de dose prévue pour le patient et d’évaluer la correspondance entre la prévision du logiciel et la mesure d’un plan donné.

La méthode dite de l’indice γ, aussi appelée « γ-index », a été développée pour répondre à la problématique concernant la vérification de la dose dans des régions à fort gradient de dose en imposant une tolérance en dose et en distance [79]. Cette technique est un outil permettant de comparer deux distributions de dose 2D (ou 3D). Dans les contrôles de qualité des centres de radiothérapie, elle est utilisée pour comparer les distributions de doses mesurées en sortie de l’accélérateur avec celles qui sont calculées par le TPS, en soustrayant les répartitions de doses afin d’obtenir des cartographies de différences de doses. Le critère de référence est défini par la différence de doses en pourcentage (ΔDmax), dans les régions à faible gradient de doses et par la DTA (Distance To Agreement) pour l’écart de distance dans les régions de haut gradient de doses. En effet, dans le deuxième cas, l’utilisation du ΔDmax s’avérait difficile, car pour une petite variation de distance, la différence de dose aurait été très importante et le critère d’acceptabilité aurait été difficilement respecté. En utilisant la distance pour laquelle la dose mesurée est égale à celle calculée, l’estimation devient significative. La définition de l’indice γ est définie par l’équation suivante :

𝜸 = 𝒎𝒊𝒏√ ∆𝑫 𝟐 ∆𝑫𝒎𝒂𝒙𝟐+ ∆𝒓𝟐 𝑫𝑻𝑨𝟐 Avec :

o DTA, la tolérance en distance fixée par l’utilisateur (DTA = 3mm d’après le GORTEC (Groupe d'Oncologie radiothérapie Tête Et Cou)).

o ΔDmax, la tolérance en dose fixée par l’utilisateur (%).

54

o ΔD, la différence de dose entre le point de référence (O) et le point mesuré (P) (%).

Figure I.3: Schéma de la définition de l'indice γ.

L’indice γ affecte un degré de correspondance en dose et distance entre deux pixels, pour chaque pixel de l’espace. Un pixel est dans les tolérances imposées si Δr ≤ DTA et si ΔD ≤ ΔDmax, ce qui correspond à γ ≤ 1. Au final, la surface qui représente le critère de tolérance est un ellipsoïde (Figure I.3) définie par 𝛾 = 1. Les valeurs des critères de tolérance ainsi que le seuil minimum de doses à partir duquel les pixels sont pris en compte dans l’analyse étant fixée par l’utilisateur, ils peuvent être adaptés en fonction du type d’étude menée [80], [110].

La mise en œuvre de la vérification d’un plan IMRT avec l’imageur portal au CHU de Québec se fait comme suit : une fois la dosimétrie du patient validé, un plan de vérification par dosimétrie portale est créé sur le TPS Eclipse (Varian Medical Systems, Palo Alto, CA) qui comprend une modélisation de l’imageur. C’est-à-dire que pour chaque patient, le plan de traitement va être simulé sur le TPS avec une « réplique » de l’imageur simulé à la place de ses images CT. La fluence est ensuite mesurée par l’imageur portal situé à l’isocentre sous l’accélérateur, en l’absence de tout milieu diffusant. L’image réalisée est comparée à l’image prédite par le logiciel Eclipse à l’aide du logiciel Portal Dosimetry (Varian Medical Systems, Palo Alto, CA) (Figure I.4). L’analyse par l’indice γ est utilisée avec des critères d’acceptance suivant les recommandations existantes. Récemment, dans son rapport TG 218, l’AAPM émet des recommandations visant à améliorer le processus d'assurance de la qualité de l'IMRT et à établir des critères d'assurance qualité uniformes et comparables entre les institutions [94]. Ces critères peuvent être fixés dans le logiciel Portal Dosimetry pour rendre les contrôles de qualité automatisés.

55

Figure I.4: Analyse de l’indice γ pour la vérification d'un plan IMRT fait avec l'EPID. À gauche l’image mesurée, à droite l’image prédite et au centre la carte de comparaison réalisée avec l’analyse gamma.

Il est important de noter que ces vérifications spécifiques au plan de traitement du patient sont faites pour vérifier l’écart entre le système de calcul la distribution de dose réelle. Ces dernières garantissent uniquement que le traitement prescrit est précis, conforme aux tolérances d'erreur planifiées et cliniquement acceptables. La précision de la dose spécifique que va recevoir le patient dépend d’autres facteurs comme la précision du positionnement, le mouvement interne des organes et de la conformité de l’anatomie avec la planification du traitement.