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4.2 Pilotage des effets mémoire

4.2.3 Rôle des conditions de photogélification

Par conditions de gélification, est entendu temps et puissance d’exposition UV.

Influence du temps d’exposition UV. Ce sous-paragraphe va présenter l’influence du temps d’exposition sur le cas à 12,5% en monomère, pour une puissance d’exposition UV de 0,1mW.cm−2.

Ainsi que cela est présenté en figure 4.13, trois comportements différents sont obtenus :

– Après 2 à 4 heures d’exposition UV, le comportement en température du mélange correspond à celui décrit au paragraphe 4.2.1 : la fixation des molécules non réactives est totale, c’est-à- dire que le pic de réflexion ne se déplace pas en température et qu’il n’y a pas de pertes d’intensité transmise par diffusion.

– Après 1 heure, 30 ou 15 minutes d’exposition UV, la fixation des molécules non réactives n’est plus totale car il y a apparition de perte d’intensité transmise par diffusion après le pas- sage de Tc. Certaines molécules sont ainsi moins influencées par le réseau et se désorientent

au cours du balayage en température effectué. La position de la bande de réflexion reste tou- tefois constante. Ce comportement est comparable à celui présenté au paragraphe 4.2.1 pour les cas d’étude à 7,8 et à 9,4% en réseau après 4 heures d’exposition.

– Finalement, après 5 minutes d’exposition, le comportement en température permet d’obser- ver une variation de λBraggen température. Ce cas est pourtant différent du cas habituel à

6,25% en réseau : en effet, la variation de λBraggvers les grandes longueurs d’onde est princi-

palement réalisée aux températures inférieures à 85°C et aucune diminution de cette valeur n’est ensuite observée.

En dessous de 5 minutes d’exposition UV, les résultats ne sont pas exploitables car le réseau est insuffisamment formé pour que l’on puisse le considérer.

FIG. 4.13:Influence du temps d’exposition UV sur la variation (a) de la position de la bande de réflexion, (b) de sa profondeur et (c) des pertes par diffusion en fonction de la température. Concentration en monomère : 12,5%, épaisseur des cellules : 25µm. La ligne bleue indique la température Tc.

Nous observons donc ici qu’il est possible de changer le comportement spectral en tempéra- ture du système étudié en faisant varier le temps d’exposition UV : lorsque la gélification n’est pas complète des défauts sont créés, ce qui se répercute par des comportements distincts en tempéra- ture.

L’étude de l’influence du temps d’irradiation sur les caractéristiques électro-optiques d’un gel de CLC et sur sa morphologie a été réalisée par l’équipe de I. Dierking, sur un mélange chiral auquel est ajouté 6% en diacrylate achiral. La gélification est réalisée avec une puissance UV de 0,5mW.cm−2, pour des cellules de 15µm d’épaisseur [121]. Les analyses électro-optiques réalisées montrent qu’il existe un temps d’exposition critique de 30 minutes. En effet, les réponses aux sti- muli électriques diffèrent suivant la durée d’exposition par rapport à cette valeur : en dessous de 30 minutes, les temps de réponse du système varient de façon abrupte avec le temps d’exposition tandis qu’ils sont constants dès que le temps d’exposition dépasse les 30 minutes. Sur le même sys- tème d’étude, il est par ailleurs rapporté que le procédé de photopolymérisation est effectivement achevé après une irradiation entre 30 et 60 minutes [36].

Les comportements observés permettent de formuler des hypothèses : l’augmentation du temps de réponse après mise sous tension τrise pour des temps d’exposition entre 4 et 30 minutes résul-

terait de la formation d’oligomères et de courtes chaînes polymères, qui accroîtrait la viscosité du CL. La seconde hypothèse permettant d’expliquer l’accroissement de τriseserait la plus faible

énergie d’ancrage des molécules CL au réseau polymère lorsque le temps d’irradiation est infé- rieur à 30 minutes par rapport à lorsque le réseau est complètement formé (temps d’irradiation supérieur à 1 heure). Lorsque le temps d’exposition augmente, leurs études concernant la mor- phologie du réseau polymère permettent effectivement d’observer l’existence d’une plus grande surface interfaciale entre le réseau et les molécules CL, liée à l’augmentation de la densité en réseau ainsi qu’au développement de sa nature tridimensionnelle. Les morphologies observées varient en effet suivant la durée d’exposition : pour 4 et 5 minutes d’exposition UV, la densité en réseau est faible, celui-ci étant constitué de structures fibrillaires mais également de perles plus ou moins agglomérées entre elles. Pour 10 à 30 minutes d’exposition, le réseau devient plus dense, avec de plus petits pores, et il n’est plus constitué que de fibres. Cela est sans doute dû à l’incorporation d’un plus grand nombre de monomères dans le réseau, une plus large réticulation ainsi qu’une plus forte expulsion des molécules CL hors des structures polymères.

Par analogie, nous pouvons discuter ici de l’influence du temps d’exposition sur les comporte- ments en température observés :

– De 2 à 4 heures d’exposition, le réseau est complètement formé.

– De 15 minutes à 1 heure, le réseau est déjà bien formé mais sa densité est plus faible, l’énergie d’ancrage des molécules CL également. Ces résultats se rapprochent de ceux obtenus pour une épaisseur de cellule de 50µm : comme il y a moins de molécules CL qui sont liées au ré- seau, il apparaît plus de diffusion, mais le comportement ne change pas de catégorie, i.e. les variations de λBragget de ∆I sont comparables à celle observées lorsque l’énergie d’ancrage

des molécules est maximisée (plus faible épaisseur de cellule ou plus long temps d’exposi- tion).

– Enfin, les résultats obtenus après 5 minutes d’exposition sont très différents des précédents car le réseau formé est moins dense et de morphologie sans doute distincte. Il serait égale- ment probable qu’il y ait présence d’oligomères dans le mélange après exposition, qui gêne- raient une possible réorganisation des molécules CL après le passage de Tc.

De surcroît, l’étude du système à 12,5% en réseau après une exposition de 5 minutes indique que l’influence du réseau dans le cas à 6,25% en monomère est très subtile : l’obtention de la forme de cloche pour les variations de λBragg en température, caractéristique intéressante de ce

gel car impliquant la présence des deux hélicités à T−, n’est pas obtenue pour n’importe quelle fixation intermédiaire du réseau. Elle doit résulter d’une balance fragile entre une énergie d’an- crage suffisante des molécules CL, une densité relativement importante en réseau mais également l’absence d’oligomères qui gêneraient les déplacements en température de la position de la bande de réflexion observés.

Des études en lumière polarisée n’ont pas été réalisées pour le gel après 5 minutes d’exposition et ne peuvent pas l’être à cause de la très faible profondeur de la bande de réflexion à T−(proche de 20%). Toutefois, l’absence de la forme de cloche et, surtout, du déplacement vers les grandes

longueurs d’onde aux températures supérieures à T+ainsi que les analyses proposées ci-dessus

nous fait dire que la seule dégradation d’un réseau mal formé, comme cela est a priori le cas ici, n’est pas compatible avec la présence des deux sens d’hélicité à T−. On s’attend plutôt à être en présence d’un réseau polymère qui garde tant bien que mal la structure cholestérique réflectrice de T+en mémoire et où existe également des structures non réflectrices telles que les oligomères et des défauts d’alignement. L’application d’un champ devrait à peine rendre le système plus réflecteur à cause de la gêne occasionnée par la présence des oligomères et morceaux de réseau non adressables. La manipulation mériterait néanmoins d’être réalisée afin de pouvoir infirmer ou non les conclusions tirées ici.

Influence de la puissance d’exposition UV. Des expériences sur l’influence de la puissance d’ex- position UV ont également été réalisées, sur le cas à 6,25% en réseau. Une irradiation à une puis- sance de 0,1 ou de 0,5mW.cm−2pendant 4 heures donne des résultats comparables pour toutes les caractéristiques de la bande de réflexion sauf la profondeur, qui est moins importante à T−= 75°C dans le second cas, comme cela est exposé en figure 4.14.

FIG. 4.14: Influence de la puissance d’exposition UV sur la variation (a) de la position de la bande de réflexion, (b) de sa profondeur et (c) des pertes par diffusion en fonction de la température. Concentration en monomère : 6,25%, épaisseur des cellules : 25µm. La ligne bleue indique la température Tc.

Les résultats reportés dans la littérature concernant l’influence de la puissance UV sont dis- semblables : pour R.Q. Ma, qui a étudié son influence sur la morphologie d’un gel nématique, les structures polymère sont de plus grande taille lorsque la puissance UV est plus faible, avec des diamètres moyens de pores plus importants et moins de molécules CL piégées dans les fibrilles car moins de photoinitiateurs sont activés [46]. Les expériences de I. Dierking, réalisées sur des gels de cholestériques, l’ont par contre invité à conclure qu’une puissance UV plus faible implique une taille moyenne de pores moins importante [121].

Il est donc difficile de tirer une conclusion précise sur notre système étant donné que nous ne connaissons pas l’influence de la puissance UV sur sa morphologie. Au vu de l’influence des autres paramètres sur les comportements en température du gel à 6,25% en réseau, il serait tentant de dire qu’une puissance UV plus élevée impliquerait des tailles de pores plus importantes ainsi que rapporté par I. Dierking. En effet, les résultats obtenus jusqu’à présent indiquent que lorsque il existe plus de molécules CL peu liées au réseau, des pertes par diffusion et une diminution de la profondeur de la bande de réflexion apparaissent après le passage de Tc, que ce soit par

l’intermédiaire d’une plus grande épaisseur de cellule ou d’un plus faible temps d’exposition UV. Le graphique 4.14 (c) montre qu’il n’apparaît pas différences concernant les pertes par diffusion mais aucune conclusion précise n’est possible car l’étude porte seulement sur deux puissances d’exposition différentes. L’étude mériterait donc d’être poursuivie afin d’y voir plus clair.

Nous pouvons néanmoins remarquer que les deux puissances UV impliquent une forme en cloche de la variation en température de la position de la bande de réflexion malgré les faibles quantités de lumière réfléchie à T− dans le cas à 0,5mW.cm−2 en puissance UV. Nous pouvons donc avancer que les deux cas d’étude permettent la présence des deux sens de polarisation à la température T−.